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CHANTS REVOLUTIONNAIRES

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15 avril 2014 2 15 /04 /avril /2014 12:09

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source:collectif communiste Polex

Algérie 2014, conflits ethniques, luttes sociales et rivalités entre clans au pouvoir.

publié le : 11 Avril, 2014

La presse algérienne fait souvent état de manifestations et d’échauffourées un peu partout en Algérie. Elles sont souvent marquées par des heurts avec les forces de l’ordre, et parfois qualifiées d’émeutes. Leur origine est essentiellement sociale, liée à la question des salaires et des prix, du manque de logements…

Mais les événements qui se sont déroulés de décembre 2013 jusqu’en février 2014 dans le Mzab, en particulier à Ghardaia, mais aussi à Berriane, à Guerrera, sont différents.

Différents par le bilan beaucoup plus lourd (au moins quatre morts parmi les Mozabites, plus de quatre cents blessés, le pillage de dizaines de magasins et d’habitations de Mozabites ou d’arabophones, la profanation d’un cimetière mozabite classé au patrimoine de l’UNESCO, de très nombreuses arrestations et condamnations), mais différents surtout par le caractère intercommunautaire du conflit.

Ces émeutes, comme en 2009 et précédemment, ont opposé des habitants arabophones, de confession sunnite malékite, rite majoritaire en Algérie, à des Mozabites berbérophones, de confession ibadite.

L’ibadisme est présent à Djerba, dans quelques lieux de Libye, et surtout dans le sultanat d’Oman. Pour certains auteurs c’est une branche lointaine du chiisme ; pour d’autres, il est aussi éloigné du chiisme que du sunnisme.

Différences de langue, de religion… Certes ces éléments sont à prendre en considération. Beaucoup de berbérophones en Kabylie, dans les Aurès et ailleurs, ont rejeté la politique d’arabisation conduite au lendemain de l’indépendance, et revendiquent la reconnaissance pleine et entière de leur langue et de leur culture. La « crise berbériste » dans le PPA à la veille de l’insurrection de 1954, le « printemps Kabyle » des années 1980 sont symptomatiques de ce problème

Mais la religion n’est pas le seul caractère particulier des Mozabites.

Réputés pour leur grande rigueur religieuse et morale, leur pacifisme, leur tolérance, mais aussi leur « sens du commerce », ils ont longtemps vécu dans le cadre d’une communauté autocentrée, très structurée, solidaire, qui a su intégrer des populations d’origine subsaharienne, et qui a réussi à maintenir des réseaux d’entraide traditionnels mis en place depuis des siècles dans cette « cité-Etat », palmeraie et place commerciale, isolée dans le désert. Aujourd’hui ces réseaux continuent à fonctionner. Ils assurent une certaine protection des Mozabites qui, de ce fait, connaissent un taux de chômage moins élevé que celui des autres Algériens. Les effets des mesures de libéralisation de l’économie, entamées dans les années 80 et poursuivies depuis, y sont amoindris.

Les populations arabophones, arrivées pour beaucoup dans les années 1970 quand la mise en valeur des richesses de la région exigeait une nouvelle main d’œuvre, vivent à la périphérie des vieilles villes. Elles ne disposent pas du même système particulier d’entraide et de protection. Isolées, sans cet amortisseur social, ces populations subissent directement le choc du libéralisme économique, du désengagement de l’Etat, et sont plus durement frappées par le chômage, le manque de logements, la misère… Marginalisées, sans grande conscience politique, « plongées dans les eaux glacées du calcul égoïste », ces populations peuvent devenir des proies plus faciles pour des manipulateurs en tout genre, et on peut noter que l’élément déclencheur de ces troubles fut lié à une question d’attribution de logements.

Quel fut rôle les dirigeants et les représentants de l’Etat ?

Ont-ils seulement fait montre de leur incapacité à assurer le calme et le respect des personnes et des biens, tout occupés qu’ils sont à gérer leurs conflits de clan pour la possession du pouvoir, autour d’un président usé, et qui ne contrôle plus rien directement ?

Ou bien est-ce plus grave ? Certains cercles liés au pouvoir jouent-ils sur la misère et les différences de langues et de religion ? Utilisent-ils et même encouragent-ils des groupes intégristes, liés à AQMI, pour lesquels les Mozabites ibadites sont hérétiques ?

Au début des années 1990, les intégristes n’avaient aucun soutien au Mzab. Les résultats électoraux l’attestent : le score du FIS était quasi nul, le FFS, le RCD dominaient largement la vie politique. Il en va différemment aujourd’hui. Les salafistes, soutenus par l’Arabie saoudite et les émirats qui rêvent d’importer le conflit syrien en Algérie, sont maintenant bien présents. Symbole fort : Moktar Belmoktar, trafiquant-djihadiste organisateur de la prise d’otages sanglante de la raffinerie de Tigantourine, est originaire de Ghardaia.

Les Mozabites ont accusé les forces de police de collusion avec certains émeutiers arabophones. Par contre, ils ont estimé que la gendarmerie n’a pas fait montre de partialité. Est-ce une nouvelle illustration des conflits au sein des groupes dirigeants ? Mais lorsque le pouvoir central a envisagé de muter certains de ces policiers, cela a immédiatement entraîné une protestation et un appel à la grève générale, largement suivie, des arabophones de Guerrera.

Ces mêmes autorités laissent-elles les mains libres aux intégristes liés à AQMI pour qui les ibadites sont hérétiques ? Seraient-ils même encouragés dans cette voie ?

De plus, et parfois dans la rivalité, les impérialismes occidentaux, pas plus que les pétro-monarchies, ne restent de simples spectateurs passifs. Qu’ils agissent au travers d’ONG ou d’officines douteuses poussant à la déstabilisation, ou par des ingérences militaires directes comme dans les opérations françaises et occidentales en Libye, au Mali, considérées parfois comme des mesures d’encerclement de l’Algérie, ils sont bien présents et actifs.

Samir Amin, dans une déclaration récente à propos de l’intervention française au Mali, intervention qu’il soutenait, insistait sur les rivalités inter impérialistes. Il mettait en avant l’éventualité de la création d’un Sahélistan islamiste, sous le contrôle des monarchies du golfe, avec la bienveillance des Etats-Unis. Ce Sahélistan, d’où l’impérialisme français serait évacué, couvrirait des espaces sahariens relevant aujourd’hui de l’Algérie, de la Libye, du Mali, de la Mauritanie, du Tchad et du Niger. Territoire immense, peu peuplé, mais doté de richesses minières gigantesques.

Les événements du Mzab, s’inscrivent-ils dans cette perspective ?

La mise en ligne par internet, de scènes de destruction de lieux sacrés ibadites, similaires aux destructions de mausolées traditionnels à Tombouctou, n’a-t-elle pas pour but de provoquer une intervention militaire occidentale au nom de la « défense des droits de l’homme », dans cette zone immense, où seuls les Etats algérien et marocain ne sont pas totalement déstructurés.

Là comme ailleurs, la réponse viendra des peuples. Les catégories populaires, toutes celles et ceux qui souffrent de la politique menée par les classes dominantes, qu’ils en souffrent durement ou moins durement, n’ont rien à gagner mais tout à perdre à se diviser et se combattre au nom de religions, de langues ou de cultures. Au Mzab, en Algérie, comme en France et ailleurs dans le monde, ils ont tout intérêt à s’unir contre l’exploiteur commun qui lui, sait taire ses divergences et défendre ses intérêts essentiels.

Robert Malclès

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