12 avril 2010
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Bouclier fiscal:
Les dix bénéficiaires les plus riches ont reçu chacun, en moyenne, six millions d’euros - L'Humanité
1 À qui profite vraiment le bouclier fiscal ?
Les données publiques disponibles sur ses bénéficiaires confirment ce qu’on savait déjà : une infime minorité de foyers très fortunés captent la très grosse partie du magot en restitutions d’impôt, principalement d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) dont s’acquittent les ménages déclarant un patrimoine supérieur à 760 000 euros, après les divers abattements. « Un petit nombre de personnes concentre une part très importante du coût de la mesure », écrit ainsi le député Gilles Carrez (UMP) dans un rapport de juillet dernier.
Les données publiques disponibles sur ses bénéficiaires confirment ce qu’on savait déjà : une infime minorité de foyers très fortunés captent la très grosse partie du magot en restitutions d’impôt, principalement d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) dont s’acquittent les ménages déclarant un patrimoine supérieur à 760 000 euros, après les divers abattements. « Un petit nombre de personnes concentre une part très importante du coût de la mesure », écrit ainsi le député Gilles Carrez (UMP) dans un rapport de juillet dernier.
En 2008, le bouclier fiscal aurait ainsi bénéficié à 15 500 foyers fiscaux, dont 5 660 sont redevables de l’ISF, lesquels concentrent à eux seuls « 99 % du coût du dispositif », qui était de 563 millions d’euros cette année-là. Et encore, parmi eux, ce sont les imposables de tout en haut de l’échelle, ceux qui déclarent un patrimoine de plus de 15,8 millions d’euros, qui profitent de l’essentiel de la manne. En 2009, un peu moins de 1 000 ménages se sont ainsi partagés 368 millions d’euros en restitutions du Trésor public, soit près de 400 000 euros par ménage… Et en 2008, les 100 restitutions les plus importantes ont atteint près de 1,2 million d’euros par foyer, en hausse de 89 % par rapport à 2007. Pour les 10 plus grosses, le chèque rendu atteint en moyenne 6 millions d’euros par foyer, soit… + 270 % en un an. Pas de crise pour les nantis.
2 Les ménages modestes en bénéficientils ?
C’est la mystification avancée par la droite pour justifier sa mesure. Un peu plus de la moitié des bénéficiaires du bouclier fiscal (8 124 contribuables en 2008) sont effectivement des foyers à très bas revenus (moins de 3 263 euros annuels) et disposant d’un petit patrimoine. Mais les sommes redistribuées sont très faibles : seulement 535 euros par ménage en 2008. Cela ne fait que souligner l’énorme écart avec les restitutions accordées à une poignée de privilégiés. À eux tous, les plus modestes ont donc touché 4,35 millions d’euros, soit moins de 0,8 % du coût total du bouclier. Même pas l’équivalent de ce qu’ont perçu ensemble deux des dix plus gros bénéficiaires.
3 Quel est le taux d’imposition des hauts revenus ?
Avant de faire jouer le bouclier fiscal, les plus fortunés ont la possibilité de déduire de leur patrimoine imposable tout un tas de biens exonérés d’ISF et de faire jouer nombre d’abattements qui en minorent la valeur. Par exemple, les biens « professionnels » ou les oeuvres d’art ne sont pas taxables. Ensuite, l’assujetti à l’ISF peut faire valoir son droit à bénéficier du bouclier si la somme de ses impôts directs (impôt sur le revenu + impôts locaux + ISF) dépasse 50 % de son revenu de l’année précédente (60 % quand Dominique de Villepin l’a instauré en 2006). Mais ce plafond est en réalité de 39 %, déduction faite de la CSG et de la CRDS prises en compte dans les 50 %. Plus on est riche, plus cette méthode de calcul est favorable. En effet, plus l’accumulation de patrimoine taxable est énorme et creuse l’écart avec la base de calcul de l’impôt total, qui ne prend en compte que les revenus annuels (les « salaires » des riches), plus la restitution par le Trésor public est importante.
4 L’ISF est-il un impôt « confi scatoire » ?
C’est l’autre argument de la droite pour défendre le maintien du bouclier fiscal : sans lui, ses assujettis pourraient payer des impôts excédant le montant total de Un bouclier fi scal qui profi te à 99 % aux plus fortunés leur revenu annuel… Une véritable intox. Entre 1988 et 1991, les gouvernements socialistes ont plafonné cet impôt à 70 % des revenus annuels, puis à 85 % des revenus annuels. Alain Juppé a ensuite limité l’avantage procuré aux gros patrimoines en instaurant, en 1996, un « plafonnement du plafonnement » de l’ISF, c’està- dire en limitant la réduction d’impôt à une somme maximale correspondant à une fraction de l’impôt normalement dû. La droite n’a eu de cesse, ensuite, de vouloir revenir sur cette « limitation de la limitation », avant que soit instauré le bouclier fiscal qui a clos le débat sur ce point.
5 Supprimer le bouclier fi scal, oui… mais pour quoi faire ?
Nombre d’élus de droite se targuent aujourd’hui de vouloir la peau du bouclier fiscal. Mais la plupart se contentent soit de proposer sa « suspension » temporaire, soit de coupler sa suppression avec celle de l’ISF, rendant de fait le bouclier fiscal sans objet ! À gauche, d’autres idées émergent. Le PCF se prononce ainsi pour le doublement de l’ISF pour les patrimoines compris entre 760 000 et 1 200 000 euros et son triplement au-delà. Une mesure qu’il articule à une réforme fiscale globale, à base d’augmentation du nombre des tranches de l’impôt sur le revenu dans le sens d’une plus grande progressivité et de baisse de la TVA, impôt injuste par excellence, qui frappe au même taux tous les ménages.
SÉBASTIEN CRÉPEL
2 Les ménages modestes en bénéficientils ?
C’est la mystification avancée par la droite pour justifier sa mesure. Un peu plus de la moitié des bénéficiaires du bouclier fiscal (8 124 contribuables en 2008) sont effectivement des foyers à très bas revenus (moins de 3 263 euros annuels) et disposant d’un petit patrimoine. Mais les sommes redistribuées sont très faibles : seulement 535 euros par ménage en 2008. Cela ne fait que souligner l’énorme écart avec les restitutions accordées à une poignée de privilégiés. À eux tous, les plus modestes ont donc touché 4,35 millions d’euros, soit moins de 0,8 % du coût total du bouclier. Même pas l’équivalent de ce qu’ont perçu ensemble deux des dix plus gros bénéficiaires.
3 Quel est le taux d’imposition des hauts revenus ?
Avant de faire jouer le bouclier fiscal, les plus fortunés ont la possibilité de déduire de leur patrimoine imposable tout un tas de biens exonérés d’ISF et de faire jouer nombre d’abattements qui en minorent la valeur. Par exemple, les biens « professionnels » ou les oeuvres d’art ne sont pas taxables. Ensuite, l’assujetti à l’ISF peut faire valoir son droit à bénéficier du bouclier si la somme de ses impôts directs (impôt sur le revenu + impôts locaux + ISF) dépasse 50 % de son revenu de l’année précédente (60 % quand Dominique de Villepin l’a instauré en 2006). Mais ce plafond est en réalité de 39 %, déduction faite de la CSG et de la CRDS prises en compte dans les 50 %. Plus on est riche, plus cette méthode de calcul est favorable. En effet, plus l’accumulation de patrimoine taxable est énorme et creuse l’écart avec la base de calcul de l’impôt total, qui ne prend en compte que les revenus annuels (les « salaires » des riches), plus la restitution par le Trésor public est importante.
4 L’ISF est-il un impôt « confi scatoire » ?
C’est l’autre argument de la droite pour défendre le maintien du bouclier fiscal : sans lui, ses assujettis pourraient payer des impôts excédant le montant total de Un bouclier fi scal qui profi te à 99 % aux plus fortunés leur revenu annuel… Une véritable intox. Entre 1988 et 1991, les gouvernements socialistes ont plafonné cet impôt à 70 % des revenus annuels, puis à 85 % des revenus annuels. Alain Juppé a ensuite limité l’avantage procuré aux gros patrimoines en instaurant, en 1996, un « plafonnement du plafonnement » de l’ISF, c’està- dire en limitant la réduction d’impôt à une somme maximale correspondant à une fraction de l’impôt normalement dû. La droite n’a eu de cesse, ensuite, de vouloir revenir sur cette « limitation de la limitation », avant que soit instauré le bouclier fiscal qui a clos le débat sur ce point.
5 Supprimer le bouclier fi scal, oui… mais pour quoi faire ?
Nombre d’élus de droite se targuent aujourd’hui de vouloir la peau du bouclier fiscal. Mais la plupart se contentent soit de proposer sa « suspension » temporaire, soit de coupler sa suppression avec celle de l’ISF, rendant de fait le bouclier fiscal sans objet ! À gauche, d’autres idées émergent. Le PCF se prononce ainsi pour le doublement de l’ISF pour les patrimoines compris entre 760 000 et 1 200 000 euros et son triplement au-delà. Une mesure qu’il articule à une réforme fiscale globale, à base d’augmentation du nombre des tranches de l’impôt sur le revenu dans le sens d’une plus grande progressivité et de baisse de la TVA, impôt injuste par excellence, qui frappe au même taux tous les ménages.
SÉBASTIEN CRÉPEL