Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

CHANTS REVOLUTIONNAIRES

Archives

29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 15:42

 

                                                                      cerveau animé

 

 

 

 

 

Des Français et de la langue française
Mardi 27 janvier 2015
http://www.gaucherepublicaine.org/

Rythmés et modelés par la succession des lois sur la formation professionnelle et sur le séjour en France des migrants, les débats sur le droit à la langue soulèvent des questions de philosophie et de mesures politiques. D’un point de vue républicain, l’apprentissage et la maîtrise de la langue française, son appropriation, font partie des droits mais aussi des devoirs des habitants de France. Si l’on admet le principe « tous ceux qui vivent en France ont des droits et devoirs de citoyens », ces derniers ont le devoir de se confronter aux énoncés et au système de la langue-culture en communiquant pour se mêler aux autres habitants – leurs semblables civiques – et ils ont le droit-pouvoir de se mêler en langue française des affaires de la cité.

Quelle importance et quelles caractéristiques donner aujourd’hui au « français langue nationale » (FLN), dans une Europe capitaliste où la mise en avant des diversités culturelles va de pair avec un renouvellement modernisé de la polarisation sociale? Les réflexions qui suivent avancent des définitions, des interrogations et des propositions qui cherchent à prendre en compte les nouvelles réalités françaises.

Français : langue-système et langue de discours

Comme les autres idiomes, le français est une langue-culture historique. C’est non seulement un « système », selon la conception réductrice de la grammaire scolaire et de la linguistique traditionnelle, mais c’est d’abord une langue trésor1, composée de quantités de « discours en français » aux normes ou pas, légués par les siècles ou créés d’aujourd’hui, et que l’on réénonce et l’on incorpore plus ou moins partiellement et fidèlement.

Chaque citoyen parlant apprend et pratique le français au milieu d’un ensemble de formes verbales en circulation. Il en tire et mémorise une anthologie de discours et de formules (proverbes, expressions et phrases toutes faites). En même temps, il en extrait et associe des lexies (mots simples, expressions et autres formules), tandis qu’il en abstrait le système de distinctions et de combinaisons : il le construit et le met en schèmes.

Ce que j’appelle « le français » réfère à un ensemble hétérogène d’énoncés oraux et écrits circulants, des discours qui sont certes surveillés et contrôlés par les autorités et les agents des institutions chargés de les surnormaliser, mais qui sont aussi diversement régulés au fil des échanges formels ou informels entre les parleurs. Ainsi, la masse composite et changeante des paroles et des écrits en français déborde les régularités retravaillées de l’écrit standardisé: ce « français » que l’on apprend à oraliser par l’école et par les médias, avec ses énoncés modèles réglés, revus-relus, et corrigés.

A partir du français vivant instable et changeant, contre et au-dessus de son désordre plus ou moins organisé, les Etats de France ont institué et réinstitué une langue officielle, ou légitime: le français de la Nation, un idiome stabilisé et unifié par les conditionnements administratifs, juridiques, scolaires, littéraires, et médiatiques. Imposée à tous comme « le français », cette langue agit comme un modèle et fait pression sur les variations linguistiques orales et d’abord écrites. Le français surnormé exclut de son système et de son trésor bien des constructions et des mots propres aux pratiques langagières des classes populaires et moyennes inférieures des villes et des campagnes. Parmi les formes courantes du français ordinaire qui se disent et se reprennent, mais n’entrent pas dans le corpus restreint des écrits et des paroles du bon usage, académiquement et administrativement homologué, on remarquera beaucoup d’expressions et de constructions françaises créées accidentellement ou volontairement par des migrants, des ex-migrants, leurs enfants… et leurs petits-enfants.

Le français de la République, ses normes et ses contraintes

Si c’est une langue internationale, et européenne, et s’il est proche de la langue des autres nations francophones, le français trésor-et-système qui s’apprend et se parle en France est avant tout la langue des habitants de cette République sociale et laïque (suivant la constitution), la langue des «  citoyens  » qui y vivent et qui doivent pouvoir se l’approprier, quels que soient leur origine et leur milieu socioculturels, leur classe sociale ou leur communauté. C’est que les habitants ont intérêt à l’apprendre, pour  « se défendre dans la vie » individuellement et collectivement.

Certes, une telle vision correspond plus à un principe et à un idéal qu’à une réalité effective, mais c’est que la République sociale laïque est un processus créatif, conflictuel, et à l’avenir incertain. De ce point de vue, la Révolution française, sociale et culturelle, ne serait pas terminée.

Langue de la communication publique, des rencontres et du mélange entre des habitants en accord ou en désaccord, le français doit l’emporter en France sur les autres langues du pays : les langues de la famille et les langues des médias, les langues régionales ou nationales. Pour autant, les citoyens doivent aussi pouvoir les apprendre, les pratiquer et les diffuser.

C’est parier ici que la réalisation effective du droit à la langue nationale accroisse la capabilité des habitants jeunes ou vieux : i.e. qu’elle renforce leurs capacités affectivo-cognitives, conjuguées aux possibilités et aux libertés effectives d’exercer leurs capacités. Tout cela participe de ce processus de socialisation à la française, qui oblige les habitants à en accepter les normes et les principes pour exercer leurs pouvoirs politiques. Soulignons que, philosophiquement, les «  valeurs  républicaines » (les buts de vie déclarés bons pour tous) ne sont pas présentées comme surnaturelles mais sociohistoriques et politico-juridiques: elles dépendent d’une définition de l’intérêt général démocratiquement discutable.

Puisque les lois de la démocratie française l’emportent sur les lois des dieux et des déesses, sur celles des communautés (ou plutôt de leurs dirigeants), et sur celles des familles ou des ancêtres, la langue de la République – langue de Molière, Voltaire, Prévert, Césaire, et Cavanna – est aussi un espace linguistique où circulent des discours et des textes irrespectueux des croyances et des convictions des concitoyens (même républicaines), ce qui mécontentera ou choquera toujours quelqu’un.

Cependant, si la diversité conflictuelle des discours doit être reflétée par l’enseignement public et commun du français national, elle n’échappe pas à certaines prescriptions et proscriptions démocratiques. L’apprentissage du français comme langue des citoyens de France entre en contradiction avec des manières de faire, de parler et de penser ethnicistes, sexistes ou classistes présentes dans la société et incompatibles avec les principes, les idéaux et les pratiques universalistes de la République – une République dont les réalisations démocratiques sont précaires et insuffisantes.

Cette socialisation linguistique des habitants promeut également une culture de l’instruction et de l’esprit critique obligatoires qui revêt une dimension paradoxale de « contrainte émancipatrice ». Des lois, des mesures et des appareils d’Etat imposent officiellement que, comme tout le monde, les non Français soient exposés aux discours de l’éducation et de la formation nationales. Que ces personnes, ou ceux qui parlent en leur nom (chefs de famille, patrons, directeurs de conscience, vedettes des médias, experts) le veuillent ou non. De Condorcet à aujourd’hui, la citoyenneté active dépend toujours de la diffusion d’une culture générale pour tous.

Dans ce cadre philosophique et politique que penser de l’institution d’un français langue de l’intégration (FLI)2 ? Le FLI aura sans doute des effets dissuasifs, et plusieurs bénéficiaires n’auront pas recours à ce « droit à la formation linguistique » s’il se traduit par des contraintes et des corvées administratives pour les migrants, avec des menaces et des sanctions pour les récalcitrants ou les méfiants3. En tout cas, si l’on admet qu’une certaine connaissance et compétence de même qu’une pratique régulière du français sont indispensables pour obtenir la nationalité française, mais aussi pour être capable d’exercer des droits de citoyen avec ou sans la nationalité, une maîtrise insuffisante du français standardisé, ou même le refus de l’apprendre ne doivent entraîner ni expulsion du territoire, ni exclusion, ni suppression de droits et de libertés.

Si elles sont démocratiquement élaborées et débattues, les formations et les certifications linguistiques devraient servir les intérêts de ces nouveaux citoyens, s’ils acquièrent la culture générale, civique et professionnelle nécessaire, et des pouvoirs politiques.

Cette acculturation en français impose également des obligations non négociables. Les citoyens doivent suivre les lois et certaines règles de vie créées au cours de luttes historiques, un ensemble de normes peu à peu construit contre des normes étatiques, religieuses, familiales et même entrepreneuriales. Aujourd’hui encore, les habitants doivent se battre pour défendre, consolider et enrichir les conquêtes sociales du passé français: droits à la santé, droits des salariés, droits des femmes, droits à l’instruction publique et à la culture générale, droits à la liberté de conscience et à l’expression publique de ses opinions – y compris critiques et satiriques.

Cette problématisation politique de la communication langagière demande d’admettre que toute vie en société comporte une dimension conflictuelle, et qu’il s’agit de la démocratiser. Une telle conception s’oppose à l’idéologie multiculturaliste, moraliste et crypto-religieuse véhiculée par tant de travaux éducatifs et linguistiques du Conseil de l’Europe, qui vantent la cohésion sociale en minorant ou en escamotant les rapports de forces, de domination et d’exploitation, de soumission et de lutte.

Droit à la langue française et droit aux autres langues de France

L’apprentissage du français, dit-on, doit tenir compte des langues premières des parleurs et les intégrer dans les cours de FL « M » et de FLS. Comment y parvenir si l’on en examine froidement les conditions de possibilité et de contrainte d’une France qui n’émerge pas en bon état de la crise mondiale? Comment financer ces formations, les organiser et les concrétiser?

En nous limitant aux principes, on conviendra cependant que le français, ses apprentissages, ses usages et son système-trésor doivent se renouveler pour s’adapter aux changements historiques d’une nation socio-économiquement et culturellement mondialisée. Mieux encore, s’il se veut républicain et social, l’enseignement actualisé du français associera les langues des migrants au FL «  M  », au FLS et au FLI. Conjuguant ses capacités-pouvoirs de communication et d’expression à son «  pouvoir de traduction  » (Balibar, 1985), l’étudiant-stagiaire apprendra et pratiquera le français en s’accoutumant à faire des allers et retours entre sa/ses langue/s première/s et la langue légitime – articulée au français familier et populaire. En France, la langue nationale servirait à la traduction et à la reformulation des discours de ses citoyens. Le français légitime se montrerait enfin ouvert aux autres idiomes du pays. A condition que la République crée les emplois de formateurs–interprètes de français dont la population, la nation, a besoin.

Du droit à la parole au droit sur la langue

Les institutions d’instruction et de culture ont à faire du français national une langue véritablement commune, rendue disponible et intelligible pour tous: une langue communale – comme on parle de terrains communaux. Il s’agit donc à la fois de faire advenir et d’accroître les pouvoirs d’expression, de communication et de traduction en français de tous, mais également de créer des règles et des institutions démocratiques pour que chacun ait réellement la possibilité de se mêler aux autres habitants en langue française. Y compris en employant des formulations et des tournures influencées par d’autres langues et par d’autres variétés de français. Elles renouvelleront et elles enrichiront la langue de tous.

Pour devenir réellement démocratique, le français normalisé sera remis sur le métier, et l’on s’inspirera de la souplesse et de la créativité du français populaire, comme de celles de l’anglo-américain, officiel ou courant. En comparaison avec l’anglais national-international, la langue française « correcte » apparaît actuellement comme une langue tout à la fois appauvrie et corsetée. Un idiome dont les nouveautés verbales sont des calques de l’anglais médiatique et managérial de la mondialisation. Et si l’on remettait le bonnet rouge au dictionnaire (Victor Hugo), en enrichissant le français des mots et des expressions des langues régionales, et des créations des parleurs des classes populaires et moyennes de toutes origines ?

La lutte sociale et politique qui promeut le droit à la langue pour tous, pour tous les habitants (Viviane Forester), pour tous les icitiens (Jamel Debbouze), qu’ils soient migrants, ex-migrants ou non migrants, pourrait jouer un rôle de révélateur, et lever du même coup le voile sur la dépossession de la langue nationale que vivent la majorité des citoyens de France – pourtant scolarisés et médiatisés. Le droit et le devoir de s’approprier le français standardisé écrit-oralisé va de pair avec un droit sur la langue qui doit échapper au monopole des dirigeants et des experts économiques, étatiques, et académiques.

Capabilité et conditions de possibilité

Si le droit à et sur la langue française et si le devoir de connaître et de pratiquer cette langue sont indissociables, comment passer de ces principes à des réalités tangibles ?

Comment en réunir «  les moyens  » en personnels, en locaux, en temps, en ressources et en techniques didactiques, et les mettre en interaction avec les capacités d’enseignement des professeurs de français, et avec les capacités d’acquisition des apprenants?

On voit bien que l’apprentissage et la pratique du français excèdent les possibilités et même les missions des institutions éducatives et des organismes de formation. L’appropriation et les usages de cette langue c’est aussi une question de politique économique et de citoyenneté: chacun doit être en mesure d’exercer et d’enrichir son français sur son lieu de travail, dans des associations culturelles et les médiathèques, dans des organisations syndicales et politiques, dans des cafés et des salles des fêtes, mais aussi individuellement, grâce aux livres, à la presse et aux œuvres audiovisuelles. De beaux rêves, ou plutôt un programme de luttes sociales ?

Note
Une première version de cet article est parue sous le titre « De la langue française et de ses habitants associés. Remarques et propositions sur les droits, devoirs et pouvoirs linguistiques des citoyens parlants », Savoirs et Formation, Revue de l’AEFTI n° 82, décembre 2011.

Références
BALIBAR R. 1985. L’institution du français, PUF.
GODEL R. 1957. Les sources manuscrites du cours de linguistique générale de F. de Saussure, Droz.
MESCHONNIC H. 1997. De la langue française, Hachette.
VICHER A. (coord.). 2011. Référentiel FLI, DAIC/Ecrimed.

  1. J’interprète ici librement le terme de Saussure (Godel, 1957) que je redéfinis comme une configuration langagière où les formes verbales mémorisées par les sujets (leurs « trésors » au sens de Saussure) interagissent avec les discours circulants: avec le « trésor » des formes discursives produites par les locuteurs en communication sociale. Cette vision de la langue comme langue-de-discours ou discours-de-la-langue s’inspire de Meschonnic (1997). []
  2. Depuis 2011, les étrangers non européens candidats à la nationalité française doivent prouver qu’ils ont un niveau de compétence orale du français qui équivaut au niveau B1 du CECR européen. Le FLI se distingue cependant du FLE par son contenu et ses finalités civiques et politiques. []
  3. Sur le phénomène du non-recours aux droits et aux services sociaux, voir http://www.inegalites.fr/spip.php?article1495 []
Partager cet article
Repost0
29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 15:18

 

 

 

 

 

D2BAT-LAURENT.jpg

Partager cet article
Repost0
29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 15:15

 

 

 

De bien sombres perspectives financières pour la ville de Bastia
Publié le 28/01/2015, 09h05

(Julien Pernici - Alta Frequenza) - Après un conseil municipal raccourci pour l’occasion, les élus de la ville de Bastia ont débattu publiquement des perspectives financières de la ville avec un audit de soixante-dix pages présenté en préambule. Et les conclusions de cet audit sont claires : en grande partie à cause des coupes financières de l’Etat, l’équilibre financier de la ville va devenir extrêmement précaire. En effet, de 2014 à 2019, ce sont 13,2 millions d’euros de pertes de dotation de l’Etat qui vont se cumuler, le tout avec de nouvelles dépenses incompressibles à gérer comme les rythmes scolaires. Autrement dit, continuer avec le modèle actuel serait mener la ville de Bastia vers la cessation de paiements. Et pour éviter cette extrémité, l’audit privilégie plusieurs pistes, comme augmenter la pression fiscale ou réduire les investissements, mais ces deux pistes, pour le moins radicales, sont déjà écartées par l’actuelle municipalité qui ne veut pas pénaliser une ville déjà considérée comme pauvre. Reste qu’il faudra trouver un ou des moyens pour dégager 3,6 millions d’euros par an afin de garder la ville à flot. Nous reviendrons plus largement sur ce sujet dans nos prochaines éditions.

> L'articulu in lingua corsa

Partager cet article
Repost0
29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 15:04

                                                                  HUMA.fr

 

 

 

« Ils feraient mieux d’aller traquer les vrais terroristes ! »
Marie Barbier
Mercredi, 28 Janvier, 2015
L'Humanité
Photo : Édouard Coulot/La Provence/PQR
Avril 2010. Manifestation en soutien au peuple Kurde sur le Prado à Marseille.
Photo : Édouard Coulot/La Provence/PQR
Alors que le PKK aide à la libération de Kobané, en Syrie, les membres supposés de cette organisation sont poursuivis en France pour terrorisme et risquent jusqu’à dix ans de prison... Fin novembre, dix Kurdes comparaissaient devant la cour d’appel de Paris. Le jugement est tombé, ils ont été condamnés à des peines de douze mois à quatre ans de prison avec sursis.

Affreux terroriste ou simple maçon ? Fin novembre, dix Kurdes comparaissaient à Paris pour extorsion avec violence, association de malfaiteurs en vue de commettre un acte terroriste et financement d’entreprise terroriste. Pour l’accusation, ces hommes sont des « gros bras » du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), qui « frappent les mauvais payeurs dans les caves » et « recrutent des jeunes pour alimenter les bataillons de la guérilla ». Pour la défense, au contraire, ces maçons, carreleurs, peintres en bâtiment sont de simples réfugiés politiques kurdes, la plupart mariés avec des enfants, « fatigués » par huit longues années d’injustes poursuites judiciaires.

Fin 2008, une plainte est déposée pour extorsion de fonds

La cour d’appel de Paris devra trancher aujourd’hui entre ces deux versions. Avec des faits qui remontent à dix ans et une instruction fondée essentiellement sur des témoignages anonymes. Fin 2008, deux hommes portent plainte pour extorsion de fonds. Des Kurdes, d’après eux, affiliés au PKK, les auraient menacés de représailles s’ils ne donnaient pas 5 000 euros pour l’un et 7 000 euros pour l’autre. L’un affirme avoir reçu un coup au visage, qui se solde par un seul jour d’incapacité totale de travail. Mais après leurs plaintes, les deux hommes disparaissent dans la nature. « Les deux plaignants ne se sont pas constitués partie civile et n’ont répondu à aucune convocation », regrette Suzanne Bouyssou, avocate de l’un des prévenus.

Pour la défense, ce procès est à remettre dans le contexte des années Sarkozy, où les « descentes » contre les Kurdes étaient légion. « À partir de 2007, on a assisté à une multiplication des opérations avec des procédures souvent très longues, explique Me Sylvie Boitel, avocate de trois des prévenus. Ici, on est sur une affaire de 2009 déjà jugée, mais le parquet avait fait appel car les peines étaient trop faibles selon lui. » Mehmet Ulker, ancien président de la Fédération des associations kurdes en France venu assister au procès, a comptabilisé 285 arrestations entre 2007 et 2011. Ces poursuites reposent principalement sur l’inscription du PKK sur la liste des organisations terroristes de l’Union européenne. Une décision qui date de 2004 et qui suscite toujours de vives critiques. De nombreux élus (PCF, NPA, EELV et PS) s’y opposent. « Le retrait du PKK de cette liste est un impératif, insiste Sylvie Jan, présidente de l’association France Kurdistan et membre du PCF. À cause de cette liste, des militants se retrouvent traînés en justice, c’est scandaleux. »

Il y a pire. Pour l’avocate Sylvie Boitel, les magistrats – qui savent bien que les procédures ne peuvent tenir uniquement sur l’inscription du PKK sur les listes terroristes – poursuivent désormais systématiquement pour un délit de droit commun. Extorsion de fonds dans la plupart des cas. Ici, outre ce délit, on reproche aux prévenus d’avoir participé à la « kampanya », système de collecte en faveur du PKK. « Ils n’ont pas d’autres chats à fouetter ? s’agace Fidan Unlubayir, présidente de l’association kurde Azadi. Ils feraient mieux de poursuivre les vrais terroristes ! Le PKK est la seule force qui fasse reculer les fascistes de l’“État islamique” en Syrie. »

C’est l’une des nombreuses contradictions de ce procès. Alors que la France et les États-Unis livrent aujourd’hui des armes pour aider le PKK à combattre en Syrie les forces de 
l’« État islamique », les membres supposés de cette organisation sont poursuivis en France où ils risquent une lourde peine de prison. « Nous ne sommes pas chargés d’étudier la géopolitique, tente l’avocat général lors de son réquisitoire. Oui ou non, ces personnes ont-elles commis les infractions qui leur sont reprochées ? La situation d’aujourd’hui ne doit pas avoir d’incidence. »

Les prévenus nient toute implication dans le PKK

Le ministère public tient dur comme fer à ce dossier qui permet, selon lui, « d’objectiver la façon dont le PKK agit à travers les différentes structures qu’il a mises en place en France, ici sa vitrine légale à Marseille : la maison du peuple kurde ». Sauf que l’appartenance même des prévenus au PKK est loin d’être prouvée. Lors des perquisitions, ont été retrouvés chez eux des « banderoles favorables au PKK », des drapeaux d’Öcalan, son leader, et des « livres de propagande ». Mais, pour Me Boitel, « pour un Kurde, avoir un drapeau d’Öcalan chez soi ne veut rien dire ! On veut leur faire un beau costume de militants du PKK, mais ils flottent dans ce costume trop grand pour eux ». À la barre, les prévenus nient toute implication dans le parti. Tout en affichant leur soutien au PKK : « La relation entre un Kurde et le PKK, c’est comme entre la chair et l’ongle, c’est indissociable », explique l’un d’eux, qui a fait onze mois de détention provisoire dans cette affaire. « Nous avons du respect pour Öcalan, mais nous ne sommes pas des terroristes du PKK », poursuit un autre. « Des militants du PKK ne se défendraient pas comme ça, assure Mehmet Ulker. Ce sont des pauvres gens, qui n’ont pas l’habitude de la justice. Des travailleurs du bâtiment qui bossent onze heures par jour pour gagner leur vie. » La plupart ont obtenu le statut de réfugiés après leur arrivée clandestine en France, au début des années 2000. Ils fuyaient les persécutions du gouvernement turc. Au procès, ils s’expriment dans un brouhaha permanent, entourés de trois interprètes. En turc…

« Nous nous sommes enfuis de Turquie pour venir ici, où nous sommes obligés de nous exprimer dans une langue que nous avons apprise sous la contrainte, regrette l’un d’eux à la fin du procès. – Pourquoi ne pas l’avoir dit plus tôt ?, interroge la présidente. – L’audience aurait été renvoyée, ça nous coûte de l’argent de faire le voyage. » L’avocat général a requis des peines extrêmement lourdes – jusqu’à quatre ans de prison ferme. Les avocats de la défense ont, eux, plaidé la relaxe, dénonçant les « approximations » et les « incohérences » de l’instruction.

Les dix Kurdes ont été condamnés en appel, ce mercredi, à des peines de douze mois à quatre ans de prison avec sursis pour avoir participé au financement du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), considéré comme une organisation terroriste par l’Union européenne.

Partager cet article
Repost0
29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 14:19

                                                                  MARE NOSTRUM-copie-1

 

 

 

 

brahmi-belaidTollé en Tunisie : le gouvernement 'laic' nomme un ami des islamistes, ex-collabo de Ben Ali, Ministre de l'Intérieur !

 

Article AC pour http://www.solidarite-internationale-pcf.fr/

 

La période de grâce n'aura pas duré longtemps pour le nouveau gouvernement tunisien « laïc ». A forte coloration technocratique, libérale, il abrite à un poste clé un symbole de ses compromissions : à la fois réputé proche des islamistes et ancien de la dictature de Ben Ali.

 

Les élections tunisiennes ont été présentées dans les médias occidentaux comme un test réussi pour la démocratie. Elles ont pourtant reposé sur des enjeux déplacés : autour d'un clivage entre bloc laïc et islamiste, masquant bien le consensus socio-économique entre les deux forces.

 

La réalité d'un danger islamiste réactionnaire présent dans les quartiers, dans les campagnes a poussé des millions de Tunisiens à voter, sans illusions, pour Nidaa Tounes et BCE (Beji Caid Essebsi). Aujourd’hui, la pilule est amère.

 

Un gouvernement libéral, sans les islamistes ?

 

Le nouveau gouvernement, qui devra faire passer l'orage austéritaire du BCE, a une forte teinte libérale, à deux têtes, entre Nidaa Tounes – soutenue par une bonne partie du patronat dont la famille Elloumi – et l'UPL (Union patriotique libre) de l'affairiste Slim Riahi.

 

L'UPL, combinant néo-libéralisme et populisme, obtient deux postes non-négligeables : la jeunesse et les sports (Slim Riahi est propriétaire d'un grand club tunisien, le Club Africain) et surtout la Coopération et les investissements extérieurs, ministère clé pour l'attribution des gros contrats.

 

Concernant Ennahdha, le parti islamiste a envoyé tous les signaux pour participer au gouvernement, se disant prêts à livrer une liste de noms de personnalités non-membres mais adoubées par les islamistes. La réponse était longue pour Nidaa Tounes, elle est officiellement négative. En contrepartie, Ennahdha n'a pas accordé la confiance au gouvernement, déjà en crise.

 

En effet, le scénario est périlleux, entre un électorat qui n'accepterait pas l'entrée des islamistes au gouvernement après avoir fait de leur rejet leur principale motivation électorale, et les pouvoirs économiques, inquiets d'une Union nationale intégrale laissant la rue échapper à tout contrôle.

 

Gharsalli à l'intérieur … pour étouffer les assassinats politiques ?

 

Mais un poste semble avoir été laissé aux restes de « compromis historique ». Et pas n'importe lequel. Le ministère de l'Intérieur dévolu à Najem Gharsalli.

 

La nomination a suscité un tollé. Le député du Front populaire (gauche marxiste), Monji Rahoui a dénoncé ce qui résulte d'un « accord entre Ennahdha et Nidaa Tounes », ce qui est « le point noir du gouvernement ».

 

Pour lui, il s'agit tout simplement d'étouffer les affaires des assassinats des figures de la gauche révolutionnaire Chokri Belaid et Mohammed Brahmi.

 

Un pro-islamiste à un poste clé

 

Gharsalli, « compagnon de route » des islamistes ? L'intéressé a démenti tout lien avec des formations politiques, même s'il a rappelé qu'en tant que gouverneur de Mahdia, il a coopéré avec toutes les forces politiques et de la société civile. Sans préférences.

 

Or, une vidéo publiée par le parti Ennahdha le montre lors d'un meeting du parti Ennahdha aux côtés du « Conseiller du Prince », Lofti Zitoun, le plus proche collaborateur du leader Rachid Ghannouchi. Gharsalli écoute religieusement Zitoun, appréciant visiblement sa diatribe à la tribune.

 

Un relais de la dictature pour infiltrer les juges démocratiques

 

Un autre point souligné par ses détracteurs, ses relations avec l'ancienne dictature de Ben Ali, son inscription dans les réseaux de l'Ancien Régime. L'ancien juge et président du tribunal de Kasserine a laissé un souvenir exécrable chez certains de ses anciens collègues.

 

Le secrétaire général du parti Courant démocratique (social-démocrate), Mohamed Abbou, rappelle que Gharsalli devrait plutôt « passer devant la justice, que passer à l'Intérieur ». Selon lui, sa nomination « est une insulte à la Révolution et aux magistrats, cet homme était le bourreau des juges sous la dictature ».

 

La magistrate Kalthoum Kannou a eu des mots plus que durs insistant sur « le rôle qu'il a joué sous la dictature dans le harcèlement des juges honnêtes ». Elle ajoute que « c'est un des plus grands arrivistes à la solde de la dictature ».

 

L'Association des magistrats tunisiens (AMT) a refusé fermement cette décision d'installer Gharsalli à l'Intérieur. Elle en garde le souvenir d'un magistrat qui participait aux réunions de l'AMT pour l'infiltrer, récolter des informations sur ses plans, ses membres pour les harceler.

 

Pour l'AMT, « la nomination de collaborateurs de la dictature qui ont harcelé les magistrats honnêtes est contraire à la volonté de réformer la magistrature et de concrétiser les objectifs de la Révolution ».

'

L'Observatoire de l'indépendance de la magistrature (OTIM) a qualifié ces preuves d « irréfutables », celles sur les « rapports discriminants et injustes » écrits contre certains magistrats, sa contribution à la tentative de dissolution de l'AMT en 2004.

 

Aux toutes dernières nouvelles, le Premier ministre tunisien, Habib Essid envisagerait de changer la composition de son gouvernement et d'écarter l’embarrassant M.Gharsalli. Mais les manœuvres du nouveau gouvernement restent pour une « Union nationale », avec les anciens de la dictature, avec les politiciens islamistes. Contre la volonté du peuple tunisien.

Partager cet article
Repost0
29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 14:07

                                                                             MARE NOSTRUM-copie-1

 

 

Éducation : réintégration des enseignants et personnels

Par OKEANEWS
  • OkeaBird

28 janvier 2015 - 

"Non au licenciement, Non à la dissolution du personnel de l'Education" - Athènes, université, le 9 octobre 2013 (photo Olivier Drot / Okeanews)

"Non au licenciement, Non à la dissolution du personnel de l'Education" - Athènes, université, le 9 octobre 2013 (photo Olivier Drot / Okeanews)

 

M. Kourakis, Ministre chargé de l'éducation, a annoncé que les Lycées Professionnels retrouveraient les postes d'enseignants supprimés.

Il a annoncé le retour des gardiens scolaires, ainsi que la réintégration des personnels administratifs des universités, qui avaient été mis en disponibilité, ce qui avait provoqué une grève de plusieurs mois dans les universités.

Il a conclu en promettant l'annonce d'un programme complet pour l'éducation dans les prochains jours.

Partager cet article
Repost0
29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 13:27

 

                                                                 cerveau animé

 

 

 

 

      Qui manipule l’organisation de l’État islamique ?

Le jeu trouble des pays du Golfe et de la Turquie

   > 29 janvier 2015

L’Organisation de l’État islamique (OEI) n’est pas le produit d’une génération spontanée. Dans son arbre généalogique on trouve Al-Qaida en Irak et, un peu plus haut, Ansar Al-Islam. Dans cette filiation, on décèle l’ADN du royaume saoudien dont l’obsession est de contrecarrer l’influence iranienne, notamment en Irak. La Turquie a également participé à l’émergence de l’OEI, une mouvance qui risque de se retourner contre ses inspirateurs.

 

Dans une vidéo posthume, Amedy Coulibaly1 donne les raisons pour lesquelles il s’est engagé dans deux opérations terroristes, l’une en assassinant une policière municipale à Montrouge, l’autre contre un commerce cacher de la porte de Vincennes : «  Vous attaquez le califat, vous attaquez l’État islamique, on vous attaque. Vous ne pouvez pas attaquer et ne rien avoir en retour.  » Dans cette logique, il annonçait avoir fait allégeance au «  calife des musulmans Abou Bakr Al-Baghdadi, calife Ibrahim  » dès l’annonce de la création du «  califat  ». Quant à sa compagne, elle serait désormais en Syrie, pays sur une partie duquel l’Organisation de l’État islamique (OEI) a établi son emprise.

Il est peu vraisemblable que l’auteur du double attentat de la porte de Vincennes et de Montrouge2 — comme ceux qui l’ont aidé dans son entreprise meurtrière — ait perçu combien l’OEI est un instrument aux mains d’États arabes et occidentaux. L’aurait-il su qu’il aurait peut-être admis que les manœuvres diplomatiques internationales sont sans commune mesure avec la vision qu’il avait de son rôle dans le djihadisme anti-occidental.

Manipulation saoudienne des passions collectives

Lorsque la Syrie connaît ses premiers soulèvements en 2011, les Qataris d’abord, suivis quelques mois plus tard par les Saoudiens, montent, chacun de leur côté, des initiatives pour accélérer la chute du régime de Bachar Al-Assad.

À l’été 2013, alors que la Syrie s’enfonce dans la guerre civile, le prince Bandar ben Sultan, chef des services saoudiens, rencontre le président Vladimir Poutine3. Il met une offre sur la table qui peut se résumer ainsi : collaborons à la chute d’Assad. En échange, le royaume saoudien vous offre une entente sur le prix du pétrole et l’assurance que les groupes djihadistes tchétchènes ne s’en prendront pas aux jeux de Sotchi. Au-delà d’un projet d’entente cynique mais somme toute classique dans les relations entre États, c’est la reconnaissance par le royaume saoudien de sa manipulation des djihadistes tchétchènes qu’il faut retenir. Bien avant les attentats du 11-Septembre, le même prince Bandar, alors ambassadeur à Washington, annonçait que le moment n’était pas si loin où les chiites n’auraient plus qu’à prier pour espérer survivre.

Le royaume est coutumier de ces manœuvres. Dès le XVIIIe siècle, Mohammed ibn Saoud percevait combien il était utile d’enflammer les passions collectives pour asseoir son pouvoir. Pour y parvenir il s’était appuyé sur une doctrine religieuse et un pacte d’alliance passé alors avec un théologien, Mohammed Ibn Abdel Wahhab. Parce qu’il avait su mettre en avant, avec succès, les notions de djihad et d’apostasie, il avait conquis l’Arabie en éliminant l’islam syncrétique que Constantinople avait laissé prospérer sur les vastes provinces arabes de son empire.

Les recettes d’aujourd’hui sont les mêmes que celles d’hier. Ceux qui, comme l’Arabie saoudite (mais on pourrait en dire autant des États-Unis et de ceux qui ont lié leur diplomatie à celle de Washington) ont manipulé l’islamisme radical et favorisé l’émergence d’Al-Qaida4 puis de l’OEI en Irak et en Syrie, savent qu’ils touchent une corde sensible au sein de la communauté sunnite5. Leur objectif est de capitaliser sur l’animosité ressentie par cette communauté qui s’estime marginalisée, mal traitée et qui considère que le pouvoir alaouite, en place à Damas6 et chiite à Bagdad7 ont usurpé un droit à gouverner. Ce que recherchent les concepteurs de cette politique destructrice c’est à instituer aux frontières iraniennes et du chiisme un contrefort de ressentiment sunnite. Et c’est en toute connaissance de cause que Riyad combine l’aide au djihadisme extérieur qui s’est donné pour objectif de faire pression sur les chiites, et la lutte contre le djihadisme intérieur qui menace la maison des Saoud. C’est d’ailleurs une position schizophrène lorsqu’on considère que l’espace doctrinal qui va du wahhabisme officiel saoudien au salafisme revendiqué par le djihadisme se réduit à presque rien. Presque sans surprise, on constate que le royaume saoudien et l’OEI ont la même conception des fautes commises par les membres de leur communauté et le même arsenal répressif (mort par lapidation en cas d’adultère, amputation en cas de vol…)8.

L’OEI n’est pas le produit d’une génération spontanée. Dans son arbre généalogique on trouve Al-Qaida en Irak et, un peu plus haut, Ansar al-Islam. Dans cette filiation, on décèle sans difficulté l’ADN du royaume saoudien dont l’obsession est de contrecarrer l’influence des chiites sur le pouvoir irakien, de restreindre les relations entre Bagdad et Téhéran et d’éteindre les velléités démocratiques qui s’expriment — toutes évolutions que le royaume estime dangereuses pour la survie et la pérennité de sa dynastie. En revanche, il finance ceux des djihadistes qui développent leurs activités à l’extérieur du royaume. Sauf que ce djihadisme «  extérieur  » constitue désormais une menace contre le régime des Saoud.

Les ambitions régionales d’Erdogan

Depuis la nomination de Recep Tayyip Erdogan comme premier ministre en 2003 (puis comme président en 2014) le pouvoir turc est entré dans une phase «  d’ottomanisme  » aigu que chaque campagne électorale exacerbe encore plus9. Le président n’a de cesse de démontrer que la Turquie peut récupérer l’emprise sur le Proche-Orient et sur le monde musulman que l’empire ottoman a perdu à la chute du califat. Convoquer les symboles nationalistes d’un passé glorieux10, conforter l’économie de marché, faire le lit d’un islam conforme à ses vues, proches de celui des Frères musulmans et acceptable par les pays occidentaux, lui est apparu comme le moyen d’imposer le modèle turc au Proche-Orient tout en préservant ses liens avec les Américains et les Européens. Il espère du même coup supplanter l’Arabie saoudite dans sa relation privilégiée avec les pays occidentaux et servir d’inspiration, voire de modèle, à un Proche-Orient qui serait ainsi rénové. Les révoltes arabes de 2010-2011 lui ont donné un temps le sentiment qu’il pouvait réussir dans son entreprise. L’idée selon laquelle certains États seraient susceptibles de s’en remettre aux Frères musulmans n’était pas alors sans fondement. Erdogan imaginait probablement convaincre le président syrien d’accepter cette évolution. La victoire des islamistes égyptiens aux législatives de novembre 2011 (la moitié des sièges est gagnée par les seuls Frères musulmans) puis la réussite de Mohamed Morsi à l’élection présidentielle de juin 2012 ont conforté ses vues (il avait obtenu plus de la moitié des votes). Erdogan a pu envisager d’exercer son influence sur le Proche-Orient arabe et de tenir la baguette face à l’État islamique qui s’affirme.

Mais ce cercle vertueux se défait lorsqu’il devient évident qu’Assad ne quittera pas le pouvoir, quel que soit le prix à payer pour la population syrienne. Dès juin 2011, Erdogan prend fait et cause pour la rébellion syrienne. Il contribue à la formation de l’Armée syrienne libre (ASL) en mettant son territoire à sa disposition. Il parraine l’opposition politique influencée alors par les Frères musulmans. Pire pour ses ambitions, Morsi et les Frères musulmans sont chassés du pouvoir par l’armée égyptienne au terme d’un coup d’État (3 juillet 2013) largement «  approuvé  » par l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et encensé par le Koweït.

Erdogan perd la carte des Frères musulmans, désormais désignés comme terroristes par Riyad. Il doit réviser sa stratégie. À l’égard de la Syrie, il n’a désormais pas de mots assez durs pour décrire Assad et exiger son départ. Vis-à-vis de l’Arabie saoudite, il fait le choix de défier le royaume avec la même arme : l’islamisme radical. Il fait désormais partie de ceux qui croient que les djihadistes de l’OEI peuvent provoquer la chute du régime d’Assad. De là à les aider il n’y a qu’un pas qu’Ankara avait de toutes façons déjà franchi. L’étendue de la frontière turco-syrienne facilite cette assistance. Pour peu que la sécurité turque ferme les yeux, il n’est pas difficile de franchir cette frontière, d’acheter et de vendre du pétrole, de faire passer des armes, de laisser passer en Syrie les aspirants djihadistes, d’autoriser les combattants à revenir sur le territoire turc pour recruter, mettre au point leur logistique ou s’y faire soigner.

Les apprentis sorciers

Mais les passions collectives ont ceci de particulier qu’une fois libérées elles échappent au contrôle de leurs instigateurs, s’émancipent et produisent des effets qui n’étaient pas imaginables. Pire, elles finissent parfois par se retourner contre ceux qui les ont manipulées. L’exemple le plus caractéristique des dernières années aura été celui du Pakistan de Zia Al-Haq, qui avait apporté sa collaboration aux djihadistes sunnites en Afghanistan avant d’être lui-même contraint par le bon vouloir de l’islamisme radical. Aujourd’hui, ce sont la Turquie et l’Arabie saoudite qui font l’expérience de ce retour de flamme.

Ankara et Riyad, désormais à couteaux tirés, connaissent les déboires de tous ceux qui ont aidé les groupes djihadistes. Une cinquantaine de ressortissants turcs, dont des diplomates, ont été kidnappés à Mossoul le 11 juin 2014. Ankara a dû négocier leur libération d’égal à égal avec l’OEI, quasiment «  d’État à État  ». Des milliers de réfugiés kurdes quittent la Syrie pour venir se réfugier en Turquie, rendant la résolution de la question kurde encore plus problématique pour Erdogan. En octobre dernier, le gouvernement turc a violemment réprimé des manifestants qui protestaient contre le refus du président d’aider les Kurdes de Syrie à Kobané qui étaient menacés par l’OEI. Dans la première semaine de janvier 2015, deux attentats commis à Istanbul, non encore élucidés, confirment que la société turque n’est pas immunisée contre les évolutions de ses voisins proches ou plus lointains11.

Depuis au moins 1979 et la prise d’otages de la Mecque, Riyad est régulièrement atteint par la violence «  islamiste  », même si les informations précises font le plus souvent défaut sur ses commanditaires et leurs motivations. C’est dans les années 2003-2004 que plusieurs chefs se revendiquant d’Al-Qaida s’en sont pris au royaume et ont été éliminés (Youssef Al-Airi en 2003, Khaled Ali Al-Haj et Abdelaziz Al-Moqrin en 2004). Ce qui semble le plus clair, c’est que la violence politique qui touche l’Arabie saoudite depuis une quarantaine d’années puise sa source dans la contestation de la légitimité des Saoud et de leurs liens avec Washington. Riyad est donc bien placé pour percevoir le risque que l’OEI fait courir à son royaume.

L’OEI ne fait pas mystère de sa haine des liens que le royaume a développés avec les pays occidentaux. Elle y voit une trahison de l’islam. Elle n’a que mépris pour un roi qui se présente comme le «  Gardien des deux saintes mosquées  » et le défenseur de l’islam authentique, mais qui a accueilli sur son sol l’armée américaine. L’OEI constitue désormais une menace pour le régime des Saoud. Elle a donné l’assaut début janvier à un poste-frontière saoudien. Le royaume a pris des mesures sécuritaires draconiennes pour s’en protéger12 : érection d’un mur de sécurité d’un millier de kilomètres sur sa frontière nord avec l’Irak, d’une seconde barrière de sécurité sur sa frontière avec le Yémen, mise en place de dizaines de milliers de troupes au contact de la frontière irakienne. Sans oublier les lois antiterroristes adoptées en 2014 pour dissuader ses nationaux de rejoindre les rangs djihadistes (lourdes peines de prison, mesures de rétorsion à l’égard de ceux qui sympathisent avec des mouvements religieux radicaux, arrêt du financement d’une chaîne satellite basée en Égypte connue pour son caractère anti-chiite…). Riyad fait aussi partie de la «  coalition internationale antiterroriste  » mise en place par Barack Obama en septembre 2014.

Ni gagner, ni perdre

Si l’OEI est bien un rempart sunnite contre le chiisme et, accessoirement, contre le régime d’Assad, ses soutiens saoudiens et turcs ne peuvent envisager son éradication. Ils savent que l’islam sunnite aurait le plus grand mal à se relever d’une défaite militaire de l’organisation. L’Iran apparaîtrait comme le vainqueur définitif. Cette perspective n’est pas envisageable pour Riyad, Ankara, Amman, Washington ou Israël. La coalition internationale mise en place sous la houlette des Américains fait face au même dilemme. Elle doit éradiquer un djihadisme qui pratique un terrorisme aux ramifications internationales et déstabilise la région tout en ne donnant pas l’impression qu’elle porte le fer contre la communauté sunnite. La leçon irakienne de 2003 a été retenue à Washington et en Europe.

Ce délicat dosage devrait entraîner un certain nombre de conséquences. L’OEI ne l’emportera pas définitivement parce que sa nuisance mortifère sera contenue par des frappes militaires. Elle ne disparaîtra pas parce que beaucoup de sociétés arabes proche-orientales partagent ses vues religieuses13, mais ne pourra pas étendre significativement son emprise territoriale. Elle conservera cependant l’un de ses atouts : être un instrument «  diplomatique  » utile à beaucoup d’États, ceux qui la soutiennent comme ceux qui la combattent. En d’autres termes, l’OEI est là pour longtemps.

1Michel Henry, «  Amedy Coulibaly revendique son acte dans une vidéo posthume  », Libération, 11 janvier 2015.

2Amedy Coulibaly est l’auteur de deux attaques terroristes : à Montrouge le 8 janvier 2015 (une policière tuée) et Paris le jour suivant, 9 janvier 2015 (4 otages de confession juive assassinés).

3Sahar Ghoussoub, «  Russian President, Saudi Spy Chief Discussed Syria, Egyp  »t Al Monitor, 22 août 2013 : «  À titre d’exemple, je peux vous garantir que nous protégerons les Jeux olympiques d’hiver de Sotchi sur la mer Noire l’année prochaine. Les groupes tchétchènes qui menacent la sécurité des jeux sont contrôlés par nous et ils ne prendront pas la direction de la Syrie sans s’être coordonnés avec nous. Ces groupes ne nous font pas peur. Nous les utilisons face au régime syrien mais ils n’auront aucun rôle ni aucune influence sur l’avenir politique de la Syrie  » (c’est nous qui traduisons).

4Écouter les déclarations — en anglais — d’Hillary Clinton sur la responsabilité des États-Unis dans la création d’Al-Qaida.

6Le clan de la famille Assad est issu de la minorité alaouite dont la doctrine, issue du chiisme mais qui s’en est éloigné, a adopté des croyances syncrétiques, remonte au IXe siècle. Les alaouites ont longtemps été jugés hérétiques par les autres branches de l’islam. En 1936, ils sont officiellement reconnus comme musulmans. En 1973, l’imam Moussa Sadr les admet dans la communauté chiite. Le clan Assad gouverne la Syrie depuis 1971.

7Nouri Al-Maliki a été en poste de 2006 à 2014.

8Mary Atkinson et Rori Donaghy, «  Crime and punishment : Islamic State vs Saudi Arabia  », Middle East Eye, 20 janvier 2015.

9Des législatives sont prévues pour juin 2015.

10Sa récente décision de recevoir les hôtes de marque encadrés par une haie de guerriers en costume d’époque peut sembler dérisoire mais elle est significative des rêves de retour à la grandeur ottomane du président turc.

13Dans leurs réactions aux attentats de Paris, les sociétés arabes proches-orientales ont globalement témoigné d’un réel malaise, partagées entre rejet et «  compréhension  ».

Partager cet article
Repost0
29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 13:16

 

 

 

 

 

               KOBANE( KURDISTAN SYRIEN) ENFIN LIBRE......

                                                                       kobane.jpg

Partager cet article
Repost0
29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 13:07

 

 

Terre Corse

 

 

Lutte victorieuse chez les facteurs de Bastia (CGT FAPT)

 

                                fl-che-copie-1.gif                http://terrecorse.tumblr.com/

 

 

                              

Partager cet article
Repost0
28 janvier 2015 3 28 /01 /janvier /2015 11:48

 

 

 

      Michel costume          

                          « In cauda venenum »

28 Janvier 2015

L’année commence, c’est le moment des audiences solennelles de rentrée. Dans son discours le président du Tribunal de commerce dresse l’état des lieux de l’économie insulaire après avoir rappelé en préambule que les 3 200 juges consulaires de France n’avait « aucune carrière à défendre, aucun salaire ni rémunération à préserver, aucun intérêt personnel à sauvegarder ». Jean Marc Cermolacce dénonce à juste raison une réforme négative portée par le gouvernement Valls Hollande de plus en plus sensible aux sirènes du libéralisme et de la concurrence débridée.

Le point commun dans ces discours de bons libéraux c’est de vouloir résister « aux tenants de l’immobilisme ». De ce point de vue le président du Tribunal de commerce se place en porte à faux en expliquant que le gouvernement agit par pure idéologie pour démonter une institution qui « depuis 400 ans donne satisfaction ». Le gouvernement en effet se targue d’agir dans le sens des évolutions nécessaires, de la modernité économique. Les moins affectent l’intérêt général et la dépense - publique et sociale - utile les plus se lisent inversement sur le volume des transactions financières et les dividendes versés aux gros actionnaires.

Dans cette course à l'accumulation de richesses, la France du CAC 40 arrive en deuxième position derrière les Etats Unis du Dow Jones. La doxa européenne néolibérale s’impose ainsi dans notre pays dans tous les secteurs d’activités pour préserver la domination des marchés financiers et ces critères d’enrichissement de quelques uns au détriment du plus grand nombre.

Selon le rapport de l’ONG Oxfam, « la part du patrimoine mondial détenu par les 1 % les plus riches était passée de 44 % en 2009 à 48 % en 2014, et dépasserait les 50 % en 2016 ». Cela signifie que s'ils continuent à s'enrichir, ils posséderont plus que l'ensemble des autres habitants de la planète réunis. La quasi-totalité des 52 % de patrimoine restant sont aux mains des 20 % les plus riches. « Au final, 80 % de la population mondiale doit se contenter de seulement 5,5 % des richesses ».

Autant le dire Jean Marc Cermolacce ne fait aucune allusion à cette situation d’inégalité et d’injustice sociale qui s’est affirmée en Corse aussi durant les 25 années écoulées. C’est bien le résultat d’un modèle économique d’autant plus défaillant chez nous qu’il repose quasi exclusivement sur le tourisme, la rente fiscale et la commande publique. Trop sensible aux aléas conjoncturels ce modèle révèle toute sa fragilité avec la crise et son corollaire la politique d’austérité. L’aggravation du chômage de manière continue et forte depuis 2009 y compris en pleine saison touristique est tout aussi révélatrice de cette faiblesse que le nombre de procédures ouvertes au Tribunal de commerce pour cessation de paiement.

« Nous allons connaître une situation de crise comme nous n’en avons plus connue depuis 1989 ». Le spectre du grand mouvement social ressurgit dans son discours. Ainsi les victimes de cette politique seraient les principaux responsables de la situation « avec un énième conflit à la SNCM qui s’annonce en forme d’apothéose ». Le président du Tribunal de commerce redoute un « scénario à la grecque » et s’inquiète « des lourds nuages qui s’amoncellent dans le ciel de notre compagnie régionale ». La concurrence déloyale des low cost dans l'aérien et le maritime ne retient pas son attention contrairement « à l’afflux massif de main d’œuvre étrangère à bas couts » dans le BTP qui « permet d’affirmer que la bataille du chômage et perdue d’avance ».

Cette capitulation face aux 21 139 chômeurs recensés dans notre région est conforme à la réglementation, que le patronat revendique et applique parfois avec abus, selon la directive européenne, dite « services », incluant la possibilité de recourir aux « travailleurs détachés ». C’est d’ailleurs cette directive « bulldozer » qui vient aujourd’hui percuter les professions de notaires ou d’avocats dont Jean Marc Cermolacce se dit solidaire. De même, il doit savoir que les parlementaires européens de droite ont refusé que les Services d’intérêt économique général (SIEG) soient exclus du champ d’application de cette directive antisociale.

Donnant libre court à sa réflexion, on ne sait plus qui parle le dirigeant du MEDEF ou le président du Tribunal de commerce, Jean Marc Cermolacce crie cependant son amour du service public, non pour dénoncer les milliers de postes supprimés et le recul du service à la population, du fait de cette politique néolibérale désastreuse, mais pour fustiger les Chemins de fer de la Corse qui percevraient 25 millions de subvention pour seulement 5 millions de recettes. Indépendamment du chiffre inexact, on est à 22 millions de compensation financière versée au titre de la convention et du service effectué, il ne peut ignorer que cela est conforme au choix de la délégation de service public comme dans l’aérien et le maritime où toute proportion gardée le schéma est identique.

Faut-il penser dés lors, que Jean Marc Cermolacce préférerait voir les nuages qui obscurcissent le ciel de notre compagnie régionale étendre leur voile sur les Chemins de fer de la Corse ?

Alors dans un élan de générosité, il préconise la gratuité totale pour un « vrai service public » laissant entendre qu’aujourd’hui produire un million de kilomètres trains et transporter un million de passagers, parmi lesquels 1 250 étudiants gratuitement, ce ne serait pas du vrai service public. A défaut de pouvoir mettre en cause une telle évidence, le président du Tribunal de commerce défend en fait avec cynisme cette position qui n’en doutons pas fera hurler les détracteurs du service public ferroviaire en faisant croire aux usagers une chose improbable dans l’immédiat.

Comme il a pu le dire avec gourmandise dans son discours nous lui retournons l’expression latine utilisée dans la Rome antique : « In cauda venenum ».

Michel Stefani

Partager cet article
Repost0