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CHANTS REVOLUTIONNAIRES

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2 avril 2013 2 02 /04 /avril /2013 14:18

                                                                  MARE NOSTRUM-copie-1

 

Déclaration d’Alexis Tsipras (Syriza) face au hold-up de l’UE à Chypre
Alexis Tsipras

Il est totalement évident maintenant que les leaders de l’UE suivent une voie qui va ouvertement à l’encontre des peuples européens. La stratégie du gouvernement allemand, avec la bénédiction du capital financier spéculatif en Europe, est une stratégie de colonisation de tout le sud de l’Europe, en particulier de la Grèce et de Chypre.

Un instrument clé pour la mise en œuvre de cette stratégie est l’extorsion basée sur la dette, la même dette qui dévaste le sud du continent avec les politiques néolibérales d’austérité. Même si la dette n’aurait pas existé, ils l’auraient inventée dans le but de servir leurs objectifs. La décision de l’Euro Groupe de vendredi dernier met en péril la stabilité du système financier de toute la zone euro. Il s’agit d’une bombe placé dans les bases de la stabilité non seulement du système bancaire à Chypre, mais aussi dans toute l’Europe. Cette décision doit être annulée avant qu’elle ne provoque des dégâts irréversibles.

Le gouvernement grec, avec les déclarations des porte-paroles de Stournaras et Samaras, a apporté son soutien à ces décisions inacceptables. Le gouvernement grec n’a pas hésité à accepter la proposition de coupe dans les dépôts des citoyens chypriotes, créant ainsi un précédent inacceptable pour les pays en risque dans la zone euro. Avec cette décision, le gouvernement grec prend une responsabilité historique, sans même offrir la moindre information au peuple et au Parlement grec. Hier, j’ai demandé par lettre au président du Parlement une session urgente de l’assemblée nationale afin que l’on nous informe sur la position prise par le gouvernement grec vendredi dernier à la réunion de l’Euro Groupe. Malheureusement, cette demande a été refusée avec de fausses excuses.

Mais la question demeure. Le gouvernement grec n’a pas le droit de soutenir, sans l’approbation du Parlement, une décision qui dissous de facto le système financier chypriote et pose d’énormes risques au système financier grec. Je lance un appel urgent au Premier ministre pour qu’il convoque une session extraordinaire du Parlement. Il a non seulement le droit de le faire, mais c’est aussi son devoir.

Selon nos estimations, l’objectif ultime de la décision politique de l’Euro Groupe n’est pas le sauvetage de l’économie chypriote, mais bien d’imposer un régime de domination économique absolue sur Chypre, qui est une région géopolitique ayant une valeur particulière. Il semble évident que l’objectif consiste à garantir de manière anticipée l’accès aux ressources énergétiques du pays, y compris les hydrocarbures. Et le gouvernement grec a une grande responsabilité dans le fait que la décision a été acceptée dans l’Euro Groupe. Le Premier ministre grec a enchaîné le pays au char du mémorandum de madame Merkel, en ruinant tous les avantages obtenus dans les négociations qui ont suivies les élections grecques et en rompant toutes promesses faites de renégociation. Et maintenant, il accepte et se fait même le complice de la nouvelle colonisation de la république chypriote. Il ignore une fois de plus et dévalue la nécessaire politique étrangère multidimensionnelle et le rôle que doivent jouer l’intervention des organisations populaires et la population dans l’évolution de la Grèce et de Chypre.

Mais il existe des limites à la tolérance et à la patience des gens. Nous demandons au gouvernement, même si c’est de manière rétrospective, de ne pas valider la décision qui signifie la colonisation de Chypre et la dissolution de son économie. Et nous appelons à un sommet extraordinaire de l’UE afin d’indiquer clairement que la partie grecque n’accepte pas cette option.

La décision du Parlement chypriote ne détermine pas seulement l’avenir de Chypre, mais aussi, probablement, celui de la zone euro toute entière. Le NON fier adressé par le Parlement chypriote aux plans de dissolution du pays est, en même temps, le NON de tous les peuples européens adressé à la voie sans issue autodestructrice pour l’Europe. Il démontre en même temps que, même dans les moments les plus difficiles, il y a de l’espace pour la résistance et la négociation.

Ceux qui pensent que l’on peut exercer constamment un chantage et jouer avec le feu doivent maintenant considérer leurs responsabilités. Et surtout se rendre compte que, mis à part les gouvernements qu’ils contrôlent, comme le grec et les gouvernements pro-mémorandums, il y a des gens qui ne vont pas se rendre sans lutter. Les peuples d’Europe n’ont pas encore dit leur dernier mot. Les peuples grec et chypriote doivent commencer une contre-attaque totale des peuples d’Europe contre les plans destructeurs des leaders de l’UE, en ouvrant ainsi la voie à la construction d’une autre Europe, l’Europe de la solidarité, de la démocratie et de la cohésion sociale.

Alexis Tsipras

Traduction française réalisée pour Avanti4.be à partir des traductions en espagnol de Tomás Martínez pour Izquierda Anticapitalista

source : http://www.avanti4.be/actualite/article/declarations-d

 

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2 avril 2013 2 02 /04 /avril /2013 14:09

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Syrie : la guerre des mots et des images
Bahar KIMYONGUR

Vous ne le saviez sans doute pas. Et pour cause. Dans ce pays-là, il y a eu 250.000 disparitions forcées en 20 ans dont 34.467 entre 2005 et 2010. Dans une seule fosse commune située près d’une caserne militaire, pas moins de 2000 corps ont été retrouvés. Des opposants politiques ont été donnés en pâture aux caïmans, des rebelles jetés vivants dans des fours crématoires, des syndicalistes éliminés par milliers, des villages bombardés par l'aviation, des jeunes ramassés dans la rue, emmenés en forêt, exécutés puis habillés par leurs assassins en combattants pour faire croire qu’ils ont été tués lors d’accrochages militaires, des militants des droits de l’homme dénonçant la barbarie abattus en pleine rue, des bourreaux du peuple bénéficiant de l’impunité, près de 600.000 personnes déplacées entre 2010 et 2011. Nous avons là toutes les caractéristiques d’une dictature qui assassine son peuple.

Et pourtant, ce régime-là n’est jamais décrit comme tel par nos médias. Normal, c’est l’État colombien, enfant gâté de Washington, Paris et Tel Aviv. En somme, un régime ami…

Pour savoir si nos médias sont réellement libres comme ils le prétendent, rient de tel que de comparer le traitement médiatique des conflits qui déchirent la Colombie, État aligné au « monde libre » et la Syrie, vilain petit canard de l’axe du Mal.

Quand les médias occidentaux parlent de la Syrie, le mot « chabbiha » désignant les forces civiles loyalistes revient en boucle. Les chabbiha sont accusés de crimes barbares pour le compte de Damas.

Mais avez-vous seulement entendu parler des Autodéfenses unies (AUC), des « Bacrim » ou de la Force Oméga qui sévissent quotidiennement en Colombie ?

Dans les médias occidentaux, il est interdit de parler de « révolution » et d’insurrection populaire en Colombie.

En revanche, les chirurgiens esthétiques de TF1, RTL ou France 24 travaillent d’arrache-pied pour relooker les djihadistes à l’œuvre en Syrie en zapatistes fleur bleue.

En Colombie, les centaines de milliers de paysans pauvres, d’indigènes qui sont engagés à des degrés divers dans la résistance armée n’auraient rien à voir avec le peuple.

En revanche, l’insurrection anti-baassiste serait la « révolution » de « tout un peuple » et ce, malgré l’existence de millions de citoyens syriens qui expriment une hostilité farouche envers l’opposition et une loyauté sans faille envers le gouvernement.

Notre presse qualifie la révolution colombienne de « terrorisme », de « gang », de « maffia » ou encore de « narco-guérilla ». Elle est pourtant plus émancipée et moins dépravée que la prétendue « révolution syrienne », cette malheureuse courtisane enfermée dans le harem des rois du Golfe.

Marie Delcas, correspondante du quotidien Le Monde (30 mai 2012) titrait : « La menace des FARC plane toujours ».

Imaginez-vous un seul instant que l’Armée syrienne libre soit considérée comme une menace ?

Lorsque la dictature colombienne commet des crimes, elle est toujours excusée. Dans le cas du régime terroriste de Bogotá, il n’y a ni indignation, ni sanction, ni résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, ni menace d’intervention militaire, ni campagne de sensibilisation en faveur des victimes de la dictature, ni discussion sur l’armement des rebelles, ni fourniture de « matériel non létal ».

Ne vous risquez surtout pas à défendre les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), principal mouvement de résistance contre le régime de Bogotá, vous finiriez derrière les barreaux pour apologie du terrorisme et pire encore, excommuniés par l’Inquisition bobo pour blasphème idéologique voire hérésie stalinienne.

Par contre, défendre les égorgeurs, les dépeceurs, les pillards, les génocidaires d’Al Nosra ou de l’ASL qui massacrent le peuple syrien avec l’aide de la CIA, des monarchies obscurantistes du Golfe et des gouvernements européens n’ayant pas plus d’estime pour leur propre peuple que pour le peuple syrien, ça c’est humaniste.

Si vous parlez de résolution politique du conflit en Colombie, vous serez soupçonné de sympathie envers les FARC parce que « l’on ne négocie par avec des terroristes ». Et si vous parlez de résolution politique du conflit en Syrie, vous serez soupçonné de sympathie envers le président Assad parce que « l’on ne négocie pas avec des dictateurs ».

Last but not least, les victimes de la répression du régime syrien ont droit à toutes les larmes et c’est légitime. Mais jamais les victimes du régime colombien. Eux n’ont ni voix, ni rêve, ni visage.

Vous avez dit conditionnement idéologique ?

Vous avez dit indignation sélective ?

URL de cet article 19899
http://www.legrandsoir.info/syrie-la-guerre-des-mots-et-des-images.html
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2 avril 2013 2 02 /04 /avril /2013 13:56

                                                                   MARE NOSTRUM-copie-1

 

                                                                             humanite.fr

 

 

l'Humanité des débats

Habib Kazdaghli « Face aux salafistes, j’ai répondu que l’université n’était pas une mosquée »

 

Le doyen de la faculté des lettres de la Manouba, à Tunis, est en butte, depuis plus d’un an, aux pressions et aux menaces des islamistes qui veulent imposer le port du voile. Il est même traduit en justice pour avoir empêché le port du niqab en cours au sein de l’université. Mais, pour lui, la révolution doit amener de la démocratie, du progrès, et non un retour en arrière.

Depuis plus d’un an maintenant 
vous êtes la cible d’islamistes 
violents qui vous reprochent d’empêcher le port du niqab. 
Vous êtes même traduit en justice ! Quel est le fond de cette affaire ?

Habib Kazdaghli. Ce port du niqab n’existait pas en Tunisie. Mais l’un des phénomènes pervers de la liberté retrouvée est que certains ont voulu faire autrement. Ce n’est pas l’habit en lui-même qui nous pose problème – même si c’est une expression régressive. Mais nous avons toujours insisté, sur le fait de se dévoiler, que le visage soit découvert quand le prof entre. Parce que nous considérons que le visage est la partie fondamentale de la personnalité de l’être humain. C’est avec les expressions du visage que tout enseignant qui respecte son métier suit les étudiants qui sont devant lui. C’est une exigence pédagogique et de communication. L’enseignement, la transmission du savoir se fait dans un climat de confiance entre les deux parties. On nous dit qu’on ne peut pas enlever le voile parce que Dieu l’a imposé ! Alors qu’une bonne partie des Tunisiennes ne portent pas le voile. Ce serait donc des mécréantes ? Il y a une ségrégation qui va s’établir entre les gens. Si Dieu décide de tout, alors il n’y a besoin ni de doyen ni de profs. Il y a une transmission directe du savoir. Alors que, pour nous, le plus important est l’égalité face au savoir. Le professeur symbolise le savoir. Les étudiantes et les étudiants doivent être à égalité face à ce savoir. On m’a conseillé de laisser ces filles voilées dans un coin de l’amphithéâtre et de ne pas m’occuper d’elles. J’ai dit « non » ! L’éthique de l’enseignant réside dans l’idée que tout le monde va accéder à ce savoir et réussir. L’affaire a donné lieu à un débat terrible. Il y a vraiment deux perceptions différentes par rapport à l’éducation. À Sousse, il y a eu un problème au moment des inscriptions. À Kairouan, c’était à propos des contenus des programmes. À Monastir et à Gabès, ils ont voulu imposer la séparation hommes-femmes dans les restaurants universitaires…

N’est-ce pas un problème politique, une vision de société ?

Habib Kazdaghli. Il faut rappeler que, sous le pouvoir dictatorial, il y avait des postes de police à l’intérieur de l’université. Après les élections du 23 octobre, nous avons compris qu’un nouveau phénomène se développait. Certains groupes ont interprété la victoire des islamistes comme la mise en place d’un pouvoir pour des années. Or, en réalité, les gens ont voté pour une Assemblée constituante dont la mission première est d’écrire une Constitution et qui ne devait exister qu’une année.

Ces formes d’intrusion dénotent un certain état d’esprit. Comme si c’était une revanche de la part de ces groupes islamistes voulant utiliser le pouvoir indépendamment des institutions en place. La crise s’est déclenchée le 25 octobre, deux jours après les élections. Et ces groupes ont dit à une collègue que le parti qui avait gagné les élections était avec eux dans cette affaire du niqab. L’autre revendication de ces salafistes (dont beaucoup n’avaient rien à voir avec l’université) était l’ouverture d’une salle de prières et le refus de la mixité. J’ai répondu que l’université n’était pas la mosquée.

Dans le fond, dans cette affaire, c’est un projet de société qui voulait s’exprimer. Si la bataille était gagnée au niveau de l’université, elle s’imposerait à l’ensemble de la société. Même au temps de la dictature, nous avons pu gagner des batailles, c’est ce qu’on appelle les libertés académiques. Du temps de Bourguiba et même de Ben Ali, il n’y a jamais eu de censure sur les sujets de thèse. Moi-même, en 1982, j’ai fait ma thèse sur l’histoire du Parti communiste tunisien. De même, un collègue a fait sa thèse sur le mouvement islamiste. C’est un fossé qui sépare ces deux visions du monde.

Le problème se complique encore quand on sait que les différents ministères, de l’Enseignement supérieur ou de l’Intérieur, sont occupés par les islamistes, même si des miettes ont été données à d’autres partis. Leur attitude incompréhensible dénote une vision de l’école ou de la démocratie. Qu’est-ce qu’on nous demande ? On nous dit de patienter. Mais si on fait une concession sur une question aussi fondamentale, c’est fini. Il en va de même sur le rôle de l’école ou de la place de la femme à l’école. Cette ségrégation rappelle des pays qui, pour nous Tunisiens, ne sont pas des pays de référence. Ils peuvent être des références au niveau de la spiritualité, comme l’Arabie saoudite. Mais il n’y a aucune influence sur le modèle sociétal de l’école. Depuis le XIXe siècle, l’école a jeté un pont avec l’universel. La femme a accédé à l’enseignement depuis l’époque coloniale. Il y a une massification depuis l’accession à l’indépendance. La réussite de l’État moderne, c’est l’éducation et l’égalité entre hommes et femmes. On peut résumer ainsi la Tunisie des cinquante dernières années. On a l’impression qu’il y a également une vision d’éradication de ces années. Il n’y a jamais eu un doyen traîné devant les tribunaux. Le gouvernement, par son silence complice, a laissé faire.

Avez-vous été surpris de la force 
que représentent les groupes islamistes, 
qu’ils se disent modérés ou non ?

Habib Kazdaghli. Surpris, oui et non. Il faut remonter à la manière avec laquelle ce phénomène avait été appréhendé. En tant qu’intellectuels mais aussi en tant que forces politiques démocratiques, nous pensions, du temps de Ben Ali et même sous Bourguiba, qu’il fallait rester ferme, mais ne pas faire de la politique policière. Ce qui a été fait, c’est une politique de répression qui n’a pas seulement touché les salafistes ou les intégristes, mais l’ensemble de la société. Il y avait un contrôle total et le pouvoir est devenu allergique à toute voix discordante. De ce fait, pendant la période où les islamistes étaient en prison, on n’a pas laissé la société se défendre. L’État policier a voulu mener le jeu et, en même temps, derrière cette mise au pas de la société, il y a eu de la corruption. Ce contrôle policier a permis à certaines familles de s’enrichir. Elle a ouvert la voie aux prébendes. Ce qui s’est passé est bien l’échec de cette pratique. La société était un peu désarmée lorsque la liberté est revenue. Mais ces islamistes n’avaient rien à faire avec les mouvements sociaux qu’avait connus la Tunisie, tout d’abord en 2008 avec la longue résistance des mineurs du Sud, notamment à Redeyef. Le mouvement était dirigé par le mouvement syndical et la gauche. Les islamistes n’y avaient aucun rôle. Après le 17 décembre 2010, à la suite de l’immolation de Bouazizi, on n’a jamais vu un drapeau réclamant l’islam ou l’arabité. C’était un mouvement tunisien, social, avec comme slogan : « Dignité, justice sociale, emploi ». Le 14 janvier 2011, devant le ministère de l’Intérieur il n’y avait pas de demandes de plus de religiosité, mais au contraire plus de liberté, d’égalité, de justice. Le rôle joué par les femmes était magnifique. Elles n’étaient ni voilées ni en niqab. Ce sont des phénomènes pervers qui sont apparus à la suite d’une captation de la scène publique. Cela a commencé par des attaques contre la synagogue de Tunis, contre les cafés vendant de l’alcool… On a compris à ce moment-là qu’il y avait une volonté de donner une couleur identitaire à la révolution tunisienne. Mais, en elle-même, cette révolution est le rêve de ma génération. Elle est le fruit de cette Tunisie instruite. Dans toutes les sociétés il existe des formes extrémistes, radicales. Le problème est comment affronter ces situations. Ce qui m’inquiète n’est pas tant qu’il y ait des islamistes radicaux à l’université, que le manque de soutien aux autorités universitaires. Je suis élu. Ce que j’applique ne sont pas mes idées seulement, mais les décisions prises par des conseils élus. Le sens d’une révolution, c’est aussi le changement pour plus de démocratie et plus de progrès. Si c’est pour réclamer des choses d’il y a quatorze siècles, ce n’est plus une révolution, mais tout simplement un retour en arrière.

Il y a un problème politique aujourd’hui. 
Vous avez évoqué les « miettes » données 
à deux partis laïques qui siègent 
au gouvernement avec les islamistes d’Ennahdha. On peut même être déçu par l’attitude du président Marzouki. On a également l’impression que le fer de lance de la résistance est plus le syndicat UGTT que certains partis politiques. Partagez-vous cette idée ?

Habib Kazdaghli. Oui et non ! Si l’on considère les partis, on n’est plus à la situation qui a caractérisé les élections avec un grand émiettement des forces démocratiques et de gauche. Cela a été une grave erreur. Le parti Ettajdid, ancien parti communiste, devenu la Voie sociale et démocratique, a appelé les forces du centre et de gauche à ne pas penser les élections pour la constituante comme étant des élections pour le pouvoir, mais pour écrire une Constitution. Une Constitution, pour être efficace, doit être meilleure que celle de 1959, qui a permis de traverser le siècle. Tous les partis n’ont pas vu les choses de la même manière. Ainsi, Ettakatol, membre de l’Internationale socialiste, a accepté la présidence de l’Assemblée et Marzouki la présidence du pays, selon un partage voulu par Ennahdha. Il avait été promis une Constitution au bout d’un an. Un an et demi après, toujours rien. On ne connaît pas les dates des élections et le pays vit dans l’insécurité politique. Outre les attaques contre les institutions et les universités, contre les journalistes, les créateurs, le 6 février, Chokri Belaïd a été abattu. La société est divisée. Avec un pouvoir qui utilise tantôt les salafistes comme bras armé, tantôt des prétendues ligues de protection de la révolution qui ne sont rien d’autre que des ligues fascistes.

Il est vrai que l’UGTT joue un rôle important. Elle a d’ailleurs été attaquée par ces ligues fascistes. Mais ce n’est pas nouveau. Il en allait de même pendant la période coloniale. Son fondateur, Farhat Hached, a été assassiné en décembre 1952. Il y a une histoire du mouvement syndical qui est imbriqué à la lutte nationale. Il y a aussi la société civile. La preuve, les manifestations organisées pour empêcher l’introduction de la charia dans la Constitution. De même, le 13 août 2012, pour s’opposer à l’article qui voulait faire de la femme le complément de l’homme. L’opposition essaie de jouer un rôle au sein de l’Assemblée. Même si, personnellement, j’aurais aimé qu’il n’y ait pas ce partage. Il s’agit d’écrire un texte qui serve la Tunisie, et non pas une partie des Tunisiens en fonction de la majorité toute relative qui existe à l’Assemblée nationale.

L’assassinat de Chokri Belaïd pourrait-il être 
lié au rôle qu’il jouait pour l’unification 
de l’opposition démocratique et progressiste ?

Habib Kazdaghli. Lorsqu’il y a assassinat, il y a toujours responsabilité. Lorsque dans une société une partie liquide l’autre, cela signifie qu’une ligne rouge a été franchie. Il y a une responsabilité politique et morale. Chokri Belaïd était d’un parti d’extrême gauche. Il était d’ailleurs l’un de mes avocats. Il n’a pas oublié la nécessité d’une convergence nationale. Au sein du Front populaire, un groupement de plusieurs partis d’extrême gauche et de nationalistes arabes, il était celui qui disait ne pas exclure un rapprochement avec l’autre bloc, l’Union pour la Tunisie, composé de cinq partis, dont l’ancien parti communiste. Les forces démocratiques s’attendent donc à ce qu’il y ait au moins un pacte de non-agression à défaut d’entente. C’est le rôle joué par Chokri Belaïd ces derniers mois. La veille de son assassinat, il avait appelé à la tenue d’un congrès national contre la violence. Il l’a payé de sa vie. Je rapproche cet assassinat de celui de Jaurès en 1914 et celui d’Aldo Moro en 1978, des hommes capables d’être des fédérateurs. D’où l’importance de ses obsèques. Il faut que ça se traduise au niveau politique par une alliance des forces démocratiques attachées à cette Tunisie que voulaient ceux qui sont morts lors de la révolution de 2010-2011.

La résistance du doyen   Doyen de l’université de Tunis-Manouba et professeur d’histoire contemporaine, Habib Kazdaghli est devenu le symbole de la justice, des libertés et de la séparation nécessaire entre la religion et l’État. Parce qu’il s’oppose au port du niqab (le voile intégral) pendant les cours 
et les examens, il subit depuis un an et demi la vindicte physique et verbale des groupes islamistes venus occuper les locaux. Le 6 mars 2012, deux étudiantes voilées mettent à sac le bureau du doyen puis l’une d’entre elles porte plainte et l’accuse de l’avoir giflée. Habib Kazdaghli avait lui-même saisi la police. Hier, il comparaissait devant le tribunal de la Manouba. Il était accompagné de centaines de personnes venues le soutenir. Les magistrats étant en grève, le verdict a été reporté au 4 avril. 
Un procès qui est dénoncé par le corps enseignant, 
la société civile et l’opposition de gauche qui accusent le gouvernement dirigé par les islamistes d’Ennahdha de vouloir islamiser la société tunisienne. Il y a quelques jours il était à Paris, à l’invitation du Gremamo (Groupe de recherches sur le Maghreb et le Moyen-Orient) 
du laboratoire Sedet de l’université Paris-Diderot 
et sa directrice adjointe, Chantal Chanson-Jabeur.

Entretien réalisé par Pierre Barbancey

 

 

 

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2 avril 2013 2 02 /04 /avril /2013 13:22

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Aujourd'hui, nous sommes le : 2 Avril 2013

 source :la faute à Diderot.

                    

"Retour à Marx. Pour une société post-capitaliste"

 

                                            Extraits du dernier livre d’Yvon Quiniou

Introduction : le communisme au regard des transformations historiques

Il peut paraître curieux d’écrire aujourd’hui un livre qui a pour ambition déclarée de prendre position en faveur du communisme. Même si certains penseurs à la mode, comme Alain Badiou ou Slavoj Žižek, ont tenté de lui rendre toutes ses lettres de noblesse dans l’opinion publique, leur réflexion, malgré leur talent, ne se situe ni au niveau d’intelligence socio-historique, ni à celui d’intelligence économique qui était ceux de Marx, et on ne peut pas dire qu’elle emporte réellement l’adhésion, qu’elle ouvre une perspective convaincante à « l’Idée » communiste, surtout quand on voit à quel point leurs travaux (ou d’autres) sont déconnectés des luttes et des rapports de forces politiques réels. Cela peut d’ailleurs expliquer leur succès médiatique auprès de ceux qui ne jurent que par le libéralisme économique : sans impact, sans danger, donc succès garanti [1] ! Du coup, ce qui demeure, malgré un réveil incontestable de l’intelligence critique et un refus, confus mais réel, d’un capitalisme confronté à une crise mondiale qui suscite un peu partout des résistances à son encontre, c’est un scepticisme généralisé à l’égard de ce qui pourrait le remplacer. Cela est net, sinon aveuglant, non seulement dans la conscience collective ordinaire mais aussi chez les acteurs professionnels de la politique ou ses spécialistes dans les médias, y compris à gauche. Et je ne suis même pas sûr que, chez ceux qui se réclament encore explicitement du communisme – j’entends ici les divers partis d’Europe occidentale qui continuent de se référer à cette identité et dont l’influence commence heureusement à remonter –, la référence maintenue à ce concept corresponde toujours à une conviction profonde, à l’abri du doute. D’où le constat amer, sinon désespérant, que l’alternative au capitalisme que Marx a formulée et qui a pour nom « communisme », paraît massivement non crédible, sans consistance réelle : ni politique avec le règne de la démocratie complète qu’il entendait promouvoir, ni socio-économique avec la suppression des classes et celle de l’exploitation du travail qui leur est liée, ni anthropologique, avec sa visée d’un homme émancipé, mû par autre chose que la recherche concurrentielle de la richesse matérielle, ni enfin, sans consistance du point de vue de ses effets revendiqués dans l’ordre de la liberté personnelle et du bonheur, effets qu’une politique digne de ce nom devrait ambitionner d’apporter aux hommes, à tous les hommes [2].

Pourquoi ce scepticisme ? À sa racine il y a bien entendu un événement fondamental qu’il faut affronter en toute lucidité : l’échec des régimes de type soviétique que la révolution bolchevique a mis en place, directement ou indirectement, à partir de 1917. Car c’est bien au nom de cet échec, incontestable, que l’idéologie libérale dominante, particulièrement conquérante depuis la chute du mur de Berlin, et qui a infesté une large partie de la gauche dite « socialiste », déclare que l’histoire aurait définitivement invalidé sur le fond le projet communiste et que son concept serait donc désormais nul et non avenu. Il devrait être rangé au compte des utopies, généreuses peut-être dans l’idéal – les meilleurs esprits le concèdent –, mais en réalité sans possibilité d’incarnation et, surtout, du fait même de cette impossibilité, considéré comme inévitablement totalitaire et meurtrier – l’histoire l’ayant donc censément absolument démontré1. Cependant, ce diagnostic ne peut se comprendre que si l’on croit pouvoir appliquer légitimement le concept de « communisme » à ces régimes pour les définir dans leur vérité politique. Or il y a là un contresens fondamental, qui aura constitué ce que j’appelle l’imposture sémantique du xxe siècle – laquelle imposture, fort logiquement quand on en est prisonnier, bloque toute pensée d’un avenir radicalement nouveau, réellement post-capitaliste, puisqu’elle s’accompagne d’un constat de décès généralisé et apparemment irréversible concernant le communisme. C’est donc à cette imposture sémantique qu’il faut s’attaquer, sans préjuger d’ailleurs du futur historique, mais en faisant le ménage, si j’ose dire, dans les mots et les concepts afin d’avoir une intelligence exacte de ce qui s’est passé et donc de ce qui pourrait se passer dans l’histoire à venir. Qu’est-ce donc en réalité, et à l’inverse de ce que le siècle dernier nous a présenté, que le communisme ? Et surtout, pourquoi peut-on dire, sur la base d’une simple exigence de rigueur intellectuelle et, à ce niveau de la réflexion, sans aucun parti pris favorable, que le communisme n’est pas mort étant donné qu’il n’a existé nulle part ?

Le communisme suppose préalablement le capitalisme développé

Que l’histoire obéisse à une nécessité qui s’enracine dans la production économique et que la raison peut comprendre, constitue un thème central chez le Marx de la maturité. C’est bien pourquoi son œuvre théorique ressortit aux sciences et, plus précisément, aux sciences sociales, lesquelles, comme les sciences en général, ne sauraient exister sans les présupposé du déterminisme et de la légalité – obéissance à des lois objectives – des phénomènes qu’elles étudient, quelle que soit leur complexité et l’apparence de désordre ou de contingence qui peut les caractériser à première vue [3]. Cette idée est présente chez lui dès qu’il entreprend de comprendre l’histoire – et l’homme en elle – dans L’idéologie allemande, sur la base matérielle de la production des moyens d’existence. Et on la retrouve fortement revendiquée dans Le Capital, spécialement dans la préface à la première édition, quitte à ce que ce soit sous des formes ou avec des formulations qui font problème. C’est ainsi que dans cette préface – mais c’est vrai aussi de ce qu’il dit dans la postface à la seconde édition allemande – il assume pleinement la comparaison de la marche de l’histoire à celle de la nature, qui veut qu’une nécessité du même ordre (ce qui ne signifie cependant pas identique) régisse le développement de la réalité dans les deux cas, et que les lois qui déterminent les phénomènes sociaux, même si ce sont des lois tendancielles, « se manifestent et se réalisent avec une nécessité de fer » [4]. Enfin, le Manifeste communiste lui-même, bien avant Le Capital, parlant de la révolution communiste à venir sur la base des processus historiques qu’il a précédemment expliqués, annonce clairement que la chute de la bourgeoisie et la victoire du prolétariat « sont également inévitables » [5]. Certes, bien des formes d’expression de cette nécessité historique doivent être non seulement critiquées mais rejetées, précisément quand elles la font passer pour inévitable ou inéluctable, comme c’est le cas dans les deux citations précédentes : non seulement quand elles assimilent sans réserve importante le développement de l’histoire à celui de la nature mais, autre possibilité, quand elles pensent le devenir historique sous la catégorie hégélienne de la « négation de la négation » – les sociétés de classes nient le communisme primitif et le communisme du futur niera cette négation [6]– en lui attribuant, ce faisant, une nécessité absolue, de type métaphysique, qui doit tout à la spéculation et rien à la science [7]. Il n’en reste pas moins vrai que, derrière la gangue d’un vocabulaire qu’il faut rectifier pour lui restituer son sens profane véritable, c’est bien d’un authentique déterminisme historique qu’il s’agit, lequel, s’il ne définit pas toujours dans le détail ce qui doit nécessairement se produire, à savoir la révolution communiste, nous dit clairement, comme on l’a vu plus haut, à quelles conditions, elles absolument nécessaires, elle peut se produire, ce qui n’a rien à voir avec une fatalité. En effet, autant que l’expression d’une nécessité historique implacable, on peut y voir, sous cet angle déterministe, l’énoncé de conditions à la fois de possibilité et d’impossibilité, que tout déterminisme stipule. Dire quelles sont les conditions matérielles sans lesquelles cette révolution ne peut avoir lieu et réussir, ce n’est pas forcément dire qu’elle aura nécessairement lieu, mais c’est affirmer qu’avec elles, elle peut avoir lieu et que, sans elles, elle ne peut se produire et réussir. Ce n’est donc pas formuler une prophétie, sur un mode quasi religieux, qui nous garantirait un futur souhaité, comme on l’a longtemps cru sous l’égide du « marxisme-léninisme », tout en prétendant lui apporter un fondement scientifique fourni par des lois de l’histoire. Mais dire que, si l’avenir est ouvert sur une perspective de transformation radicale, c’est à certaines conditions dont l’absence voue immanquablement l’expérience révolutionnaire à l’échec. C’est donc une leçon de réalisme et de patience politiques, sans le moindre renoncement, que nous enseigne alors ce point de vue qui ressortit bien d’une science matérialiste de l’histoire. Celle-ci, quand elle est bien comprise (ce qu’elle n’a pas été) est loin d’alimenter le risque de l’utopie ou le danger de la dictature, comme le prétend Comte-Sponville, trop pressé d’en finir avec ses enthousiasmes de jeunesse [8]. Au contraire, elle sape à la base la tentation de l’utopie, elle l’interdit même, et permet d’éviter en principe la séduction du volontarisme qui mène tôt ou tard à la dictature.

Quelles sont alors, plus précisément, ces conditions et sous quelle forme la politique doit-elle s’en emparer ? C’est paradoxalement le Manifeste – paradoxalement vu son statut de simple manifeste et étant donné qu’il est antérieur aux analyses empiriques plus approfondies qui suivront – qui est le plus explicite et le plus convaincant sur celles-ci. Le tableau qu’il nous fournit, dans sa première partie, de la réalité capitaliste de son temps, est en effet, pour qui l’aborde sans préjugés, saisissant par son actualité – sous la réserve d’une remarque essentielle que je ferai par la suite et dont je demande au lecteur d’en retenir l’idée d’ores et déjà –, en raison d’un argument simple qui contredit une « idée reçue » trop largement répandue : quelles que soient les remarques empiriques de détail qu’il peut faire sur ce qui se passe dans tel ou tel pays, à cette époque précise, spécialement en Angleterre, et qui pourraient nous faire croire que, peignant une société située dans l’espace et dans le temps, le tableau qu’il nous offre du capitalisme serait complètement dépassé – on n’est plus au xixe siècle, n’est-ce pas ! –, c’est au contraire la description et l’explication (partielle, bien entendu) d’un système qu’il nous présente, le système capitaliste, qui n’était qu’embryonnaire à son époque mais dont il a su dégager les mécanismes essentiels de fonctionnement, économiques et sociaux, avec ses effets destructeurs sur la vie des hommes au travail [9]. De plus, en analysant ses lois internes d’évolution (conformément à ce que j’en ai dit plus haut), il a su anticiper le devenir mondial du capitalisme tel qu’il se déroule aujourd’hui sous nos yeux, puisque, dit-il, « le travail industriel moderne, l’asservissement moderne au capital, aussi bien en Angleterre qu’en France, en Amérique qu’en Allemagne, ont dépouillé le prolétaire de tout caractère national » [10] ; et c’est bien à « l’exploitation du marché mondial » que nous avons déjà affaire, à l’époque, exploitation grâce à laquelle « la bourgeoisie envahit le globe entier » et « donne un caractère cosmopolite à la production et à la consommation de tous les pays » [11]. Qui ne voit, sauf à être ou à se faire aveugle (par mauvaise foi), que c’est exactement ce qui passe et se déploie pleinement présentement, près de deux siècles après, à un degré encore plus renforcé et sous des formes pour une part inédites, bien évidemment, et que cela rend, il faut le dire, parfaitement ridicule le propos de Michel Foucault, affirmant dans Les mots et les choses, que « le marxisme est dans la pensée du xixe siècle comme un poisson dans l’eau […], partout ailleurs il cesse de respirer » [12]. En l’envisageant de ce double point de vue de son fonctionnement et de ses tendances évolutives, Marx nous indique alors clairement comment le capitalisme lui-même produit les conditions objectives qui vont rendre nécessaire – c’est-à-dire inévitable, selon lui, dans ce texte – le passage à une autre société, le capitalisme accumulant donc les présupposés objectifs de son propre dépassement, selon une vue profonde que L. Sève développe souvent dans ses travaux et que je partage totalement [13]. Et du même coup – ce point est en creux dans cette même thèse et c’est lui qu’il faut prioritairement retenir – il produit les conditions de possibilité (mais non la nécessité inéluctable) d’une révolution communiste sans lesquelles celle-ci ne pourrait, sinon avoir lieu en tout cas réussir. Ces conditions sont de trois sortes : économiques, sociales et politiques.

Retour à Marx. Pour une société post-capitaliste, édition Buchet-Chastel

Notes :

[1] Pour la petite histoire, je signale que Badiou – dont j’admire par ailleurs la capacité de conceptualisation et dont je suis proche parfois, on le verra ici même – se déclare partisan du non-vote et que Rancière – autre contestataire à la mode – a préconisé l’abstention aux dernières élections : drôle de manière de s’engager en faveur d’un idéal d’émancipation dont la démocratie politique ne peut être que la base !

[2] L’objectif du « bonheur de tous » est expressément assigné à l’activité politique dans la République par le préambule de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : la République est organisée de telle sorte que « les réclamations des citoyens, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous ». Cette affirmation ne fait que reprendre ici une idée essentielle formulée par Rousseau dans le Contrat social. À ce propos, je me souviens d’un magnifique dessin de Wolinski, dans L’Humanité des années 1970, à l’époque où la gauche du programme commun discutait des nationalisations, qui représentait un couple idyllique assis sous un arbre et s’interrogeant : « Il faudrait nationaliser le bonheur ! ». Le terme « pouvoir » ne figurait malheureusement pas dans l’exclamation. C’est dommage ! Car ainsi complétée et rendue plus modeste – « Il faudrait pouvoir nationaliser le bonheur » –, la formule est parfaite car elle indique la direction dans laquelle la politique doit s’orienter : créer, entre autres, les conditions, mais seulement les conditions, collectives du bonheur individuel.

[3] Ce propos engage une position épistémologique que j’assume entièrement, mais que beaucoup contestent aujourd’hui. Elle revient à dire que la catégorie de contingence ou de hasard n’est pas heuristique ou productive en sciences : comprendre scientifiquement le réel, dans quelque domaine que ce soit, ce n’est pas rechercher la part de contingence ou du hasard qu’il comporte, mais tenter de comprendre, à l’inverse, en quoi les phénomènes sont déterminés et essayer de trouver les lois du déterminisme qui les produit, donc réduire la part de contingence ou de hasard qu’ils semblent contenir. Je partage ici totalement les réticences de R. Thom à propos de la fascination pour l’aléatoire (ou le hasard) dans la philosophie contemporaine des sciences, quand il dit, par exemple, que celle-ci « témoigne d’une attitude antiscientifique par excellence » (in La querelle de déterminisme, ouvrage collectif, Pa ris, Le Débat/Gallimard, p. 62). On la retrouve dans le champ du marxisme, avec un intérêt surprenant pour « le matérialisme de la rencontre » qu’a défendu Althusser dans ses derniers écrits, position matérialiste elle-même surprenante venant d’un penseur qui a mis longtemps en avant la scientificité du marxisme.

[4] Cf. Le Capital, op. cité, respectivement p. 37 et 36. L’idée de « tendances » est bien chez Marx – donc celle de « lois tendancielles » – mais elle n’abolit pas celle de nécessité. M. Vadée, dans son beau livre Marx penseur du possible (Paris, Méridiens-Klincksieck, 1992), a insisté sur cet aspect des choses, quitte à l’exagérer en négligeant ce dernier point.

[5] Karl Marx, Manifeste du part communiste, Paris, Editions sociales, 1978, chap. I, p. 47.

[6] Ou encore, voir par exemple Le Capital (L. I, ch. XXXII, fin), quand il explique que le capitalisme a ruiné la petite propriété individuelle et que son renversement va la rétablir, en quelque sorte en niant ce qu’il a nié. « C’est la négation de la négation » dit Marx, en faisant se télescoper au surplus ce processus de type dialectique et spéculatif avec un processus naturel, puisqu’il est censé lui conférer une « fatalité comparable à « celle qui préside aux métamorphoses de la nature » (Ibid, p. 567). Certes, on peut discuter du statut de cette formulation – propos purement réflexif ou concept directement explicatif – mais elle est bien là. On n’est plus dans « la libre et scientifique recherche » dont il se réclame superbement, mais dans le prophétisme dialectique hégélien, au moins quant au langage !

[7] Ceci dit et pour être totalement honnête, on ne peut rejeter a priori l’idée que le communisme doive nécessairement se produire un jour et qu’il soit donc, de fait, inévitable. C’est ce que pensait Joseph Schumpeter, donnant raison au pronostic de Marx, tout en prétendant tout faire politiquement pour s’y opposer. Voir le début de Capitalisme, socialisme et démocratie (Paris, Payot, 1990) dans lequel il défend cette idée. C’est ainsi que dans la préface à la première édition édition de cet ouvrage où il se définit comme un « non-marxiste qui croit à l’importance unique du message de Marx », il affirme carrément « qu’un type de société socialiste émergera inévitablement de la décomposition non moins inévitable de la société capitaliste » (p. 10) ! On ne peut donc réfuter (ni prouver, d’ailleurs) cette idée par avance et donc la récuser ; on ne peut que contester son affirmation dogmatique ou les formulations de celle-ci.

[8] Voir supra. J’indique qu’après avoir écrit un livre au titre curieux, Le capitalisme est-il moral ? (Paris, Albin Michel, 2004) et pris à contre-pied par la crise généralisée de celui-ci, avec ses dérives scandaleuses, il a éprouvé le besoin de répondre, dans la postface une deuxième édition (2009) à mes objections comme à celles de Marcel Conche et de Lucien Sève, mais sans renoncer à l’idée que la référence à la science et à la nécessité historique chez Marx soit porteuse d’un danger totalitaire.

[9] Voir à nouveau ce que disait M. Godelier autrefois, parlant du Capital (mais c’est transposable en partie au Manifeste) et qui selon moi n’a pas pris une ride : « Le Capital n’est pas un livre d’histoire et [...] malgré de nombreuses allusions à l’histoire de pays européens, de l’Angleterre surtout, Marx n’a pas écrit une histoire du capitalisme anglais ou hollandais, etc. Le Capital se propose de faire la théorie de la logique invisible de fonctionnement du mode de production capitaliste. » (Rationalité et irrationalité en économie, op. cit., t. II, p. 128).

[10] Marx, Manifeste, op. cit., ch. I, p. 45.

[11] Ibid, p. 35.

[12] Michel Foucault, Les mots et les choses, Gallimard, 1996. C’est l’occasion d’indiquer que le rapport de Foucault à Marx est fortement biaisé, quoique la mode soit à le valoriser. En réalité, Foucault est philosophiquement un nietzschéen, théoriquement un anti-marxiste et politiquement un libéral. Il l’a clairement déclaré dans ses entretiens avec R.-P. Droit, Michel Foucault, entretiens, Paris, Odile Jacob, 2004

[13] Voir par exemple ce qu’il dit sur la « teneur de nécessité » qu’on trouve dans la conception marxienne de l’histoire et sur les « présupposés du communisme » que le capitalisme accumule en son sein, dans Penser avec Marx aujourd’hui. T. I. Marx et nous, p. 225-238. Dans son débat avec J. Bidet, je suis d’accord avec lui sur ce double point. Je ne le suivrai pas, en revanche, sur l’importance qu’il donne à la dialectique hégélienne pour penser cette nécessité.



 

 

 

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2 avril 2013 2 02 /04 /avril /2013 13:13

                                                                           CERVEAU.gif

 

                               La guerre que le Bien mène au Mal est interminable. Car le Mal est partout. Le Mal possède des armes chimiques, développe l’arme nucléaire, veut « rayer Israël de la carte », n’aime pas nos droits de l’homme, ni notre démocratie, ni nos philosophes à chemise blanche ; le Mal maltraite sa population, menace notre tranquillité, plombe notre croissance, et va faire ses courses en Chine ou en Russie. Le Mal ne sait pas ce qui est bon pour lui. Voilà pourquoi le Bien doit intervenir. Pour son bien. Au Mal.

 

            Le Bien a donc désintégré la Yougoslavie, rasé l’Afghanistan, ramené l’Irak à l’âge de pierre, et « démocratisé » la Libye. Pour ne parler que des guerres (justes, bien sûr) qui sont passées à la télé. Parfois, on cherche simplement à « déstabiliser » le Mal : Côte d’Ivoire, Venezuela, Honduras. Pour ne parler que des pays dont tout le monde se fout. Et puis, parfois, on suscite des guerres civiles à l’intérieur, quand on ne peut mettre les mains du Bien directement dans le cambouis du Mal : là, c’est la Syrie.

 

            Dans tous les cas, notre presse libre et démocratique nous informe sérieusement sur les enjeux géopolitiques du moment : c’est simple, à chaque fois, c’est le Mal qui a commencé, et le Bien a répliqué, mais toujours proprement, dans le respect des Conventions dont tout le monde se fout.

 

            C’est pour ça qu’on peut encore briller en société. Grâce aux schémas que nous propose la Grande Caravane Publicitaire Qui Nous Informe, on sait toujours quoi dire : Chavez est un dictateur, Kadhafi bombarde sa population, et nos soldats à nous sont toujours accueillis en libérateurs. C’est si simple la géographie, quand c’est le Bien qui s’en occupe…

   

            De Syrie – un pays voisin d’Israël, en passant -, nous parviennent des nouvelles : attentats, massacres, exécutions sommaires. Et il n’est nul besoin de chercher à comprendre, et par exemple de savoir qui sont les responsables de ces atrocités. La réponse, nous l’avons déjà, désignée par avance : le Mal. Combattu, comme de bien entendu, par le Bien.

 

            Le Bien, là-bas, soutenu comme il se doit par l’Occident bienfaiteur, sa Turquie et ses monarchies pétrolières et accessoirement wahhabites, le Bien, porte la barbe mercenaire, et prend la forme du djihad. Le djihad du Bien, celui de l’impérialisme.  

 

            Parce que nous ne croyons pas au Bien, ni au Mal, et parce que la propagande n’a sans doute jamais atteint un tel niveau, ce mercredi, nous recevrons dans nos studios, Rana, une Syrienne de Lille, qui ne reconnaît pas son pays dans nos medias, et nous entretiendrons avec Bahar Kimyongür, par téléphone, de Bruxelles. Vous pouvez le lire ici :

 

http://www.michelcollon.info/Intervention-aux-Nations-Unies-sur.html

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1 avril 2013 1 01 /04 /avril /2013 09:48
An-Iraqi-prisoner-of-war-008Dix ans après l'invasion américaine en Irak : « Une décennie de barbarie impérialiste »



Article publié dans Avante, organe du Parti communiste portugais (PCP)



Traduction MA pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

                                                                                      

Les services secrets nord-américains et britanniques savaient que l'Irak ne possédait pas d'armes de destruction massive (ADM), information fournie par deux hauts responsables du régime de Saddam Hussein – le ministre des Affaires étrangères de l'époque et le chef des services secrets irakien – mais l'ont délibérément ignoré, affirme une étude menée par la BBC. Selon l'émission, la CIA et le MI-6 ont également nié ce fait dans leurs enquêtes ultérieures.



La possession d'ADM a été le principal argument avancé par les États-Unis et la Grande-Bretagne pour déclencher la guerre contre l'Irak, dont le dixième anniversaire de son lancement vient d'être commémoré.



Au total, les victimes du conflit varient selon les critères et l'objectif des études.



L'Université de Brown et le projet Irak Body count, par exemple, estiment que les victimes civiles entre mars 2003 et décembre 2011 oscillent entre 110 et 134 000, mais les deux admettent avoir utilisé des méthodes très prudentes.



The Lancetet l'Opinion Research Business, de leur côté, chiffrent le nombre de morts entre 650 000 et 1 millions d'êtres humains. Les réfugiés avaient déjà atteint le nombre de 5 millions dans un pays de près de 26 millions d'habitants.



Un crime sans châtiment



Au sein de la population irakienne, il est difficile de trouver quelqu'un qui n'ait pas un proche, un ami ou un voisin mort pendant le conflit. Des centaines de milliers de personnes furent soit victimes de torture soit connaissent quelqu'un qui l'a été.



Les crimes commis par les occupants restent impunis. La justice est une caricature et les exécutions par pendaison ou les exécutions réalisées par des escadrons de soldats et de mercenaires sont l'image du recul civilisationnel imposé.



Abu Grahib et Fallujah sont des noms marqués du sceau de la cruauté. Dans cette dernière ville, hormis la destruction des services et infrastructures publiques les plus élémentaires (scénario hélas étendu au reste du territoire), le recours par les États-Unis aux ADM a contaminé l'environnement et provoqué des dégâts qui subsisteront pendant plusieurs générations, comme le prouvent l'augmentation exponentielle de nouveaux-nés avec des malformations congénitales ou le nombre de patients atteints de cancer.



L'Irak est aujourd'hui un des pays les plus corrompus au monde, gouffre pour ses ressources propres et les fonds dits pour la reconstruction. La corruption et le clientélisme dans les affaires est la base de la chaine de pouvoir qui permet à Nuri al-Maliki de conserver, depuis 2006, la tête d'un pouvoir réparti en factions qui défendent leurs positions par la violence, selon des motivations apparentes confessionnelles, mais, en réalité, expression de la lutte pour l'accumulation de richesses.



Ces dernières années, l'Irak, un des premiers possesseurs de réserves d'hydrocarbures au monde, a payé 30 milliards de dollars en importation d'énergie. Dans la capitale, Bagdad, le nombre moyen d'heures où on peut bénéficier de l'énergie électrique tourne autour de six heures par jour.



Un coût insupportable



Au moment le plus critique de la guerre, les envahisseurs ont transporté plus de 200 000 hommes sur le terrain, sans compter les forces de sécurité privées. Les États-Unis sont le pays qui ont participé le plus massivement, parmi les 40 nations, en envoyant des contingents pour l'occupation.



Il n'est pas surprenant que ce soit accumulé un grand nombre de victimes, estimées, officiellement, en décembre 2011, à 4 487.



S'ajoutent plus de 32 000 blessés graves et estropiés, nombre qui n'inclut pas les centaines de milliers de militaires qui ont subi des troubles psychologiques, nombre d'entre eux également invalidés, comme l'admet l'insoupçonnable site « Stars and Stripes » qui cite des données du Département des Affaires des vétérans du Pentagone.



Le coût total de la guerre pour les États-Unis est difficile à jauger, mais un chiffre tournant autour de deux billions (mille milliards) de dollars est communément admis, chiffre qui pourrait tripler dans les prochaines décennies avec le versement des pensions et traitement aux vétérans, dont les sollicitations d'aides étatiques dépassent déjà celles constatées après les guerres de Corée et du Vietnam.



A tout cela, s'ajoute le coût de l'arbitraire des autorités des États-Unis sur leur propre territoire. Ainsi, le 15 mars dernier, un tribunal fédéral a déclaré inconstitutionnelle la disposition qui permet au FBI d'obtenir des informations privées sur les personnes « suspectes de terrorisme », sans nécessité d'un mandat judiciaire, et a interdit l'émission de nouvelles « lettres de sécurité nationale », pratique renforcée par l'entrée en vigueur du « Patriot Act », défendu par l'administration Bush et prolongé par les cabinets dirigés par Barack Obama. Pour la seule année 2011, le FMI a publié plus de 16 500 « lettres de sécurité nationale ».



Ces derniers jours, à Guantanamo – la prison qu'en janvier 2009 Obama avait promis de fermer mais où continuent à croupir des dizaines d'hommes trainés ici sans aucun motif d'accusation – les prisonniers mènent une grève de la faim. Commencée le 6 février, la protestation est le recours ultime contre le non-respect des règles minimales de détention, critiquées par les Nations unies.



Jeudi, 45 avocats de la défense des prisonniers ont envoyé une lettre ouverte au nouveau secrétaire à la Défense, Chuck Hagel, appelant à une action urgente face au danger pour la vie des prisonniers, dont les allégations de torture constituent la marque de la barbarie impérialiste qui, il y a dix ans de cela, en Irak, ouvrait un nouvel épisode tragique.

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31 mars 2013 7 31 /03 /mars /2013 12:30

                

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         François Hollande totalement déconnecté des urgences sociales

                    (Pierre Laurent – PCF/FDG)

 

 

François Hollande totalement déconnecté des urgences sociales (Pierre Laurent – PCF/FDG)    Ce n'est pas le laborieux exercice de justification de ses choix politiques auquel s'est livré ce soir le Président de la République qui peut convaincre le pays. Tout le monde voit que l'austérité mène à l'échec ici comme dans toute l'Europe. Mais le Président persiste et signe. Pire, il annonce une année 2013 de hausse continue du chômage, un nouvel allongement de la durée de cotisation des retraites, et sur l'Europe il propose d'aller plus vite dans les sanctions infligées aux peuples en prenant Chypre comme exemple !

Les mots de François Hollande sont restés totalement déconnectés des urgences sociales et des solutions nouvelles nécessaires. Rien de ce que nous avons entendu n'est de nature à rassurer les Françaises et les Français qui souffrent et ont plus que jamais besoin du changement pour lequel ils ont voté.

Il a vanté l'accord sur l'emploi signé par le Medef et trois organisations syndicales minoritaires en continuant à masquer les graves reculs des droits sociaux qu'il contient. Alors que débute dans 4 jours à l'Assemblée nationale la discussion sur ce projet majeur, on attendait du Président qu'il s'explique ! Rien de cela. Résultat, on s'apprête à faciliter encore les licenciements alors que le niveau de chômage bat tous les records !

Puisque le Président de la République ne veut rien changer à sa politique, rien entendre de la colère qui monte, j'appelle, au nom du Parti Communiste Français et du Front de Gauche, les forces du changement à entrer massivement dans l'action pour exiger un changement de cap, pour dire stop aux politiques d'austérité, stop aux licenciements, stop à la casse du code du travail et des services publics.

La semaine prochaine dans tout le pays, nous irons à la rencontre des salariés pour dénoncer les dangers du projet de loi gouvernemental sur l'emploi et demander le vote de la proposition de loi que nous avons déposée pour interdire les licenciements boursiers. La journée d'action syndicale interprofessionnelle du 9 avril a tout notre soutien. Elle doit être le prochain grand rendez-vous de la mobilisation populaire.

 

 
                                        source: Site National du PCF

 

 

Marie George Buffet, députée PCF de Seine Saint Denis
Marie George Buffet : "J’attendais des réponses d’un Président de gauche, j’ai eu droit à un oral d’un énarque"
J’attendais des réponses d’un Président de gauche aux angoisses du peuple de France. J’ai eu droit à un oral d’un énarque.

Vingt minutes pour rassurer les chefs d’entreprises, pas un mot pour les salariés en lutte, mais des menaces sur notre système de protection sociale, et la poursuite de la casse des services publics. S’ajoute à ce mauvais repas la mise à l’index du Parlement qui est sommé d’avaliser l’accord du MEDEF sur la flexibilité et la libéralisation des licenciements, avec une profession de foi sur la réduction des dépenses publiques.

Pour les hommes et les femmes de gauche, une seule alternative, le Front de Gauche.
 
source:N.Maury
 
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30 mars 2013 6 30 /03 /mars /2013 14:23

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Espagne : la crise et la lutte des classes…

Crise en EspagneLa crise est une occasion, diront certains à juste titre, pour tenter de renverser les rapports de force entre les classes et inverser le processus de démobilisation des forces populaires à travers le monde. Mais la crise est aussi une opportunité pour les classes dominantes. La bourgeoisie nationale et transnationale a conquis ces dernières années de plus en plus de pouvoir en profitant de la disparition des frontières au sein d’un super État européen et de l’instauration du marché unique pour porter une attaque sans précédent sur le conditions de vie des classes populaires, allant même jusqu’à rétrograder socialement les maillons les plus faibles de leur propre classe. La majorité des Espagnols est ainsi engagée dans un processus de paupérisation – certains parlent de prolétarisation - qui semble irrémédiable. 

 

Les données publiées par l’ONG catholique espagnole Caritas parlent d’elles-mêmes. Les riches gagnent en moyenne sept fois plus que les pauvres, faisant de l’Espagne l’un des pays connaissant un des taux d’inégalité les plus élevés sur le continent européen. La fourchette entre les riches et les pauvres a d’ailleurs augmenté de 30 % ces dernières années.

 

L’organisation, qui a vu se multiplier de mois en mois le nombre de personnes en quête d’un repas chaud, de vêtements, d’un toit, de soins médicaux, etc., a comparé la situation des 20 % les plus riches à celle des 20 % les plus pauvres. Les résultats de cette étude sont publiés dans un rapport que nous nous sommes procuré. Comme on pouvait s’y attendre, « le pire effet de la crise est la forte augmentation de l’inégalité sociale, qui aboutit à un niveau de fragmentation sociale jamais atteint jusque-là ».

 

Le revenu moyen par habitant était l’an dernier de 18.500 euros en Espagne. Il n’a pratiquement pas augmenté depuis dix ans. Pis, il a diminué de 4 % depuis 2007 alors que les prix ont flambé de 10 % depuis cette même date. Si on prend en compte l’augmentation de la fiscalité, directe ou indirecte (y compris sur les franges les moins aisées de la population), c’est au final une perte sévère de pouvoir d’achat à laquelle doivent faire face les Espagnols.

 

Depuis 2006, le revenu des plus pauvres a diminué de 5 % chaque année tandis que celui des riches a augmenté… et de bien plus. La perte du pouvoir d’achat va de pair avec les coupes claires dans le budget des services sociaux ; depuis quelques années, quantité d’hôpitaux et de centres de soins, d’écoles et d’universités, ont mis la clé sous la porte, rendant infernale la vie de millions de familles.

 

Depuis cette même date, le nombre de foyers dans lesquels aucun des membres n’a travaillé est passé de 380.000 à 1.800.000. Au dernier trimestre 2012, le taux de chômage s’établissait à 26,02 % de la population active (soit presque six millions de chômeurs).   

 

Ceux qui disent que la crise est une opportunité ont raison. Mais la crise des uns n’est pas celle des autres, et force est de constater que ce sont les classes dirigeantes qui tirent jusqu’à présent les marrons du feu…

 

Capitaine Martin (source:Résistance.fr)

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30 mars 2013 6 30 /03 /mars /2013 14:19

                                                 Solidarité internationalisteOUTILS TOURNANTS

 

250px-LogoPsuc.jpgSur le processus d'unité des communistes en Catalogne

 

 

 

Communiqué commun du Parti communiste d'Espagne (PCE) et du Parti socialiste unifié de Catalogne (PSUC-viu)

 

 

Article AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

 

 

 

Ce mercredi 20 mars se sont rencontrées à Barcelone deux délégations du PCE et de PSUC-Viu, menées par leurs secrétaires généraux respectifs, José Luis Centella et Alfredo Clemente. L'objectif de la rencontre était de réfléchir ensemble sur le processus d'unité communiste en Catalogne.

 

 

Après un débat fructueux, ont été constatées des convergences importantes entre les deux partis sur l'occasion historique de dépasser la division qui a marqué le monde communiste en Catalogne ces 30 dernières années, et encore plus à un moment où une profonde crise économique, sociale et démocratique rend nécessaire une issue qui fasse que les intérêts de la classe ouvrière l'emportent sur ceux du capital, rendant encore plus nécessaire un grand parti communiste, qui lutte contre l'exploitation, contre les inégalités, et pour la démocratie réelle et le socialisme comme l'a toujours fait le PSUC.

 

 

Le PSUV-Viu et le PCE ont affirmé leur volonté d'avancer dans la mise en route du processus d'unité en Catalogne. Un processus qui, par le renforcement de l'unité d'action entre PSUC-Viu et le PCC intègre d'anciens militants du PSUC, des syndicalistes, des militants des mouvements sociaux, des intellectuels et fondamentalement des travailleurs et travailleurs qui subissent les conséquences d'une crise qu'ils n'ont pas provoqué.

 

 

Un processus qui pourrait ensuite culminer sur la reconstruction du PSUC comme un parti unifié de tous et toutes les communistes de Catalogne. Un parti qui retrouve l'élan de la fondation du PSUC en 1936 et de son parcours dans la lutte contre le franquisme et dans la transition, pour la reconquête des libertés et pour le socialisme en partant de son caractère de classe et national.

 

 

Un parti qui, à partir de la pleine actualité de l'idéal communiste, actualiste le projet de construction du socialisme pour le temps présent. Un parti qui continue à être le parti frère du PCE, comme l'a toujours été le PSUC et continue de l'être le PSUC-Viu.

 

 

Avec une pleine et entière co-responsabilité politique qui émane de la conviction d'avoir en nous les mêmes principes et la même volonté de participer à un même projet communiste fédéral et républicain, avec une même politique et un même parti-pris dans le projet stratégique, avec EuiA et IU, et les mêmes critères organisationnels.

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30 mars 2013 6 30 /03 /mars /2013 14:10

                                                                    telecerveau-copie-1.jpg                                                                        

 

 

 

Mercredi 27 mars 2013  

                              La dictature des experts

 

    Ils sont partout. Sur les plateaux de télé, dans les studios des radios, les pages des journaux et les commissions gouvernementales. Ils savent tout sur tout. Ne se trompent jamais, dispensent des conseils, fixent la ligne de conduite. Et lorsque les vents changent de sens, ils s’adaptent quitte à renier ce qu’ils déclaraient quelques semaines auparavant.

La dictature des experts a pris son envol lors de la première guerre du Golfe. Généraux en retraite et anciens des services commentaient une guerre qu’ils ne voyaient pas. Depuis, les « experts » sévissent sur tous les sujets. En matière économique et sociale, ils se taillent désormais la part du lion avec, à quelques exceptions près, un même discours anti syndical et défaitiste.

L’austérité ? Obligé d’y passer. Le déficit ? Les services publics responsables. Le chômage ? Les diktats européens ? La baisse du pouvoir d’achat ? Les inégalités sociales ? Rien d’autre à faire que subir. Voici qu’ils s’occupent désormais des retraites, une dizaine d’entre eux composant la commission « pour l’avenir des retraites » mise en place par le gouvernement.

La logique voudrait que les premiers intéressés, les représentants des salariés, soient au premier rang de la réflexion. L’efficacité supposerait de débattre sans intermédiaire avec les actuels ou futurs retraités dans un esprit responsable. Le respect exigerait que les organisations syndicales constituent l’ossature d’un groupe de travail pouvant bénéficier, bien entendu, de l’éclairage de techniciens de l’économie, de la sociologie, de la santé… L’inverse a été choisi avec une « commission » de notables d’où sont excluent les forces vives de la nation.

La manœuvre n’échappe qu’aux naïfs. Les   « experts » de la nouvelle commission disposent déjà de leur feuille de route : allongement de la durée d’activité avec départ à 67 ans en ligne de mire, désindexation des retraites complémentaires, hausse de la CSG et une première approche – discrète pour le moment – pour aller vers un bouleversement du système et la « retraite par points ».

La dictature des « experts » mérite d’être traitée comme n’importe quel abus de pouvoir. Sans pitié.

  

                                                   JOSE FORT

 

                                     Publié dans « Vie Nouvelle"

 

 

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