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CHANTS REVOLUTIONNAIRES

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2 mars 2013 6 02 /03 /mars /2013 13:13
                         Vent frais sur l’Amérique du Sud

Un article de José Fort dans "L’Huma Cactus" du 21 février

On a frisé l’apoplexie lundi dernier au département d’Etat nord-américain après la réélection de Rafael Correa à la présidence de l’Equateur. Chavez, Morales, Ortega ainsi que les chefs d’Etat du Brésil, d’Argentine, du Salvador ne suffisant pas, voici Quito qui se distingue au lendemain de l’élection événement de Cuba à la présidence de la Communauté des Etats latino-américains et Caribéens (CELAC).

La CIA avait pourtant commencé avec succès son opération « nettoyage » dans la région en soutenant des coups d’Etat institutionnels au Honduras et au Paraguay, en plaçant un « contrat » sur la tête du Bolivien Morales, en soutenant des éléments factieux de la police équatorienne, sans parler des coups tordus à répétition contre Chavez et les dirigeants cubains.

Et pourtant. Le temps où les Etats-Unis décidaient de tout en Amérique du Sud en a pris un sérieux coup au grand dam de tout ce qu’il y a de plus réac chez le grand Sam et en Europe.

Avez-vous remarqué avec quel mépris la plupart des médias français « couvrent » l’information latino-américaine ? Chavez, élu plusieurs fois avec des scores à faire pâlir de jalousie du côté des capitales européennes est traité comme un chien. Ses collègues présidentes et présidents du continent sont relégués aux oubliettes. Cuba reste toujours autant insulté en France par des formatés de l’info, alors que la Grande Ile se maintient en tête du hit parade populaire chez les latinos.

Il est grand temps que le président des Etats-Unis comprenne que l’Amérique du Sud bouge. L’organisation des Etats américains (OEA) à la botte de Washington ? Elle est devenue une coquille vide remplacée par des structures de coopération régionale indépendantes. Le blocus contre Cuba ? Une agression datant de plus de 50 ans condamnée par l’ONU. L’Amérique du Sud n’est plus l’arrière cour des Etats-Unis. Le vent de liberté, de justice sociale et de souveraineté qui balaye cette région du monde n’est pas prêt de s’arrêter.

José Fort

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2 mars 2013 6 02 /03 /mars /2013 08:48

                                                                         MARE NOSTRUM-copie-1

 

 

Palestine : Fayyad pour une mobilisation pacifique contre Israël

vendredi 1er mars 2013, par La Rédaction

Le Premier ministre palestinien Salam Fayyad a plaidé vendredi pour la poursuite de la mobilisation non violente contre l’occupation israélienne, lors de la manifestation hebdomadaire près du village de Bilin contre le "mur" israélien en Cisjordanie.
Des dirigeants palestiniens, dont M. Fayyad, ont participé à la manifestation, à l’occasion du huitième anniversaire du lancement du mouvement de protestation des villageois de Bilin, près de Ramallah, contre l’empiètement sur leurs terres de la barrière construite par Israël.
Le rassemblement s’est tenu cette année tout près des zones d’accrochages avec les soldats israéliens, qui ont tiré des gaz lacrymogènes pour éloigner les manifestants, dont M. Fayyad, qui portait une compresse médicale pour se protéger des inhalations.
"Notre peuple ne se trompera pas de chemin et sait très bien, par instinct et par expérience, ce qui lui réussit, et ce qui lui apporte le malheur, et ne s’égarera pas sur la voie vers un Etat palestinien", a-t-il assuré, dans un discours, qualifiant de "miracle" les résultats de la mobilisation à Bilin.
Il faisait allusion aux troubles ces derniers jours en Cisjordanie, où des dizaines de protestataires ont été blessés dans des heurts avec l’armée israélienne, lors de manifestations de solidarité avec des Palestiniens détenus par l’Etat Hébreu, qui ont ranimé l’hypothèse d’une "troisième Intifada".
Les villages proches de Bilin et de Nilin accueillent chaque semaine des manifestations de protestation contre la barrière de séparation, présentée par Israël comme une "clôture antiterroriste" pour empêcher les attentats et qualifiée par les Palestiniens de "mur de l’apartheid".
L’armée israélienne a modifié en juin 2011 le tracé de la barrière pour l’éloigner de Bilin et la rapprocher d’une colonie juive voisine, en application d’une décision de la Cour suprême israélienne remontant à 2007.
Dans un avis rendu en 2004, la Cour internationale de justice a jugé cette barrière illégale et exigé son démantèlement, de même que l’Assemblée générale de l’ONU.
Par ailleurs, dans le nord de la Cisjordanie, des heurts se sont produits entre manifestants palestiniens, dont certains ont été arrêtés, au barrage de Houwara près de Naplouse, à Kafr Qaddoum et près de Salfit, selon des témoins et un correspondant de l’AFP.
A Jérusalem-Est occupée et annexée par Israël, quelque 300 Palestiniens ont manifesté en bloquant la route pour protester contre un projet qui empiéterait sur le village de Beit Safafa. Huit d’entre eux ont été arrêtés pour entrave à la circulation, a indiqué une porte-parole de la police israélienne, Louba Samri.

SOURCE: as sawra

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1 mars 2013 5 01 /03 /mars /2013 15:47

                                                                     lvres en ligne 1027

 

 

 

 

                             "Israël, un État d'apartheid ?" Julien Salingue

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Le texte qui suit est l'une des contributions que j'ai rédigées pour l'ouvrage  "Israël, un État d'apartheid ? Enjeux juridiques et politiques".

  Le livre est disponible auprès de vos libraires habituels, ou il peut être commandé en ligne sur le site des éditions L'Harmattan.

 

 

 

« La justice est sujette à dispute. Le force est très reconnaissable et sans dispute. Aussi on n'a pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice et a dit qu'elle était injuste, et a dit que c'était elle qui était juste. Et ainsi, ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste » [1].

 

 

 À l’instar des autres contributions de l’ouvrage, l’objet de ce texte n’est pas d’assimiler, a priori, la politique israélienne à l’égard des Palestiniens à l’Apartheid tel qu’il était organisé en Afrique du Sud. Il s’agit plutôt d’interroger les pratiques de l’État d’Israël en les confrontant à une catégorie juridique précisément définie dans le droit international (« crime d’apartheid »), afin de les éclairer sous un jour nouveau. Je me concentrerai ici sur la situation des habitants des territoires occupés, en m’intéressant à une dimension souvent négligée de l’occupation israélienne, à savoir le régime juridique d’exception permanent imposé aux Palestiniens.

 

Si les effets de l’occupation israélienne sur la vie quotidienne des habitants de Gaza et de Cisjordanie ont été largement documentés[2], et si le système des tribunaux militaires israéliens a lui aussi été étudié[3], un aspect pourtant singulier de l’administration de la Cisjordanie et, jusqu’en 2005, de la Bande de Gaza, a été trop souvent ignoré : la colonisation des territoires palestiniens et la présence toujours plus importante de citoyens israéliens dans lesdits territoires a conduit, de facto, à la mise en place de mécanismes juridiques et judiciaires institutionnalisant un traitement différencié des auteurs de crimes et délits en fonction de leur origine nationale.  

 

C’est sur ce traitement différencié que j’entends revenir ici. Il s’agira dans un premier temps d’opérer un « retour aux sources », en étudiant les conditions et les causes de l’émergence de ce double système juridique. Dans un deuxième temps, je tenterai de décrire plus précisément ce système, en interrogeant notamment son caractère discriminatoire. Enfin, je conclurai cette contribution en questionnant la pertinence de l’approche de la situation des Palestiniens dans les territoires occupés par la mise à l’épreuve du concept d’apartheid, en expliquant pourquoi une telle approche contribue, ou non, à enrichir l’analyse.

 

I) L’occupation : de l’oppression à la discrimination

 

Au terme de la guerre de juin 1967, qui se solde par la défaite historique des armées arabes face à l’État d’Israël, ce dernier occupe le Sinaï, le Golan, Jérusalem, la Cisjordanie et la bande de Gaza. Dans ces deux dernières régions, les autorités israéliennes établissent une administration militaire, en charge de la gestion de territoires dans lesquelles ne résident à l’époque aucun citoyen israélien. Ce sont en revanche plus d’un million de Palestiniens qui demeurent dans ces zones nouvellement conquises, signe que l’exode massif de 1947-1949 ne s’est pas reproduit. En effet, alors que 800.000 Palestiniens s’étaient exilés durant cette période, soit 80% de la population arabe résidant au sein du nouvel État d’Israël, ce sont « seulement »[4] 250.000 personnes qui fuient Gaza et la Cisjordanie en 1967, soit 20% des habitants des deux zones. Ces chiffres ont leur importance puisqu’ils sont l’un des facteurs expliquant pourquoi Israël n’annexe pas formellement Gaza et la Cisjordanie : une telle annexion induirait en effet l’intégration d’un million de Palestiniens supplémentaires au sein de l’État d’Israël, ce qui reviendrait, quand bien même les habitants des territoires conquis en 1967 auraient un statut de sous-citoyens, à remettre en question le caractère juif de l’État[5].

 

Un organe spécifique est donc établi, qui se nomme aujourd’hui « Administration civile »[6] (bien qu’il soit géré par des militaires), responsable devant les institutions israéliennes[7], chargé d’administrer les territoires occupés au moyen d’ordres militaires. Depuis 1967, ce sont ainsi pas moins de 2.500 ordres militaires qui ont été émis en Cisjordanie et à Gaza. S’ils ne sont plus en vigueur à Gaza depuis le « retrait unilatéral » de l’été 2005, plusieurs centaines d’entre eux ont toujours force de loi en Cisjordanie. Les ordres militaires gouvernent l’ensemble des aspects de la vie quotidienne des Palestiniens sous occupation, et concernent les domaines les plus essentiels comme les plus inattendus. Après 1967, de l’accaparement des ressources en eau[8] aux confiscations de terres[9] en passant par la prise de contrôle des banques[10], les ordres militaires permettent ainsi aux autorités israéliennes d’asseoir leur emprise sur la Cisjordanie et Gaza. La création de toute nouvelle entreprise est alors soumise à l’approbation de la puissance occupante[11], tout comme l’enregistrement de toute nouvelle marque[12] ou la plantation d’arbres fruitiers[13]. Les ordres militaires permettent aussi de contrôler strictement la « vie politique » palestinienne, avec entre autres l’ordre 101, qui interdit tout rassemblement de plus de dix personnes[14], la mise en place d’une censure de la presse palestinienne[15] ou l’ordre 1079, qui établit une liste de plus de 1.000 textes interdits de publication dans les territoires occupés, parmi lesquels… les résolutions des Nations Unies concernant la Palestine. Certains ordres sont assez inattendus et témoignent du degré de contrôle des autorités militaires sur la vie quotidienne des Palestiniens, comme l’ordre 818, qui réglemente le type et la quantité de plantes décoratives dans les propriétés palestiniennes, ou l’ordre 96, qui interdit le transport de biens ou de marchandises à dos d’âne. Certains de ces ordres ont, depuis, été abrogés, mais ils indiquent le type de régime qui se met en place à partir de l’occupation de 1967.

 

Pour faire respecter ces réglementations, un système judiciaire est mis en place, systématisé dans l’ordre 378 (1970)[16]. Le commandement militaire peut établir des tribunaux militaires, avec des procureurs et des juges qu’il nomme lui-même, et dont le fonctionnement diffère très nettement des tribunaux civils israéliens. Ainsi, ces tribunaux peuvent se réunir à huis clos, et se réservent le droit de ne pas produire publiquement les témoignages et/ou les preuves incriminant les accusés. Les procureurs instruisant à charge, les accusés doivent, à l’inverse, apporter la preuve de leur innocence. Sans formuler aucune accusation, les tribunaux peuvent demander une détention de l’accusé, d’une durée de six mois, et renouvelable à l’infini[17]. Enfin, si le commandement militaire est en désaccord avec le verdict d’un procès, il peut demander son annulation et exiger un nouveau procès avec un autre juge. Il se réserve en outre la possibilité de prononcer lui-même, dans certaines circonstances, la sentence[18].

 

Un tel système judiciaire n’est pas une exception dans l’histoire des occupations territoriales et des dominations coloniales. De nombreux autres États ont établi des législations similaires, à l’instar de la Grande-Bretagne en Irlande du Nord : le Special Powers Act (1922) a ainsi permis au gouvernement britannique de donner aux autorités locales les pouvoirs, entre autres, de procéder à des internements sans procès, à des perquisitions sans mandat, d’interdire certains médias, de suspendre manifestations et rassemblements, de réunir des tribunaux sans jury ou de suspendre le droit des accusés à bénéficier d’un avocat. Mais le cas qui nous concerne a ceci de spécifique qu’il s’agit d’un territoire qui n’est pas administrativement intégré aux « frontières »[19] de l’État dominant, mais au sein duquel des citoyens dudit État vont progressivement venir s’installer. En effet, dès 1968, les premières colonies israéliennes sont établies en Cisjordanie, notamment dans la Vallée du Jourdain et à Hébron. Ce mouvement de colonisation connaîtra des rythmes divers, avec une première phase assez lente et une accélération notable à partir de l’élection, en 1977, du gouvernement Likoud dirigé par Menahem Begin, mais il pose, dès ses origines, une question essentielle : quel sera le régime juridique appliqué aux colons ?

 

En effet, le système que nous venons de décrire, s’il peut être considéré comme oppressif, n’est pas, à proprement parler, discriminatoire. Il s’applique en effet à l’ensemble des Palestiniens résidant en Cisjordanie et à Gaza qui, dans la mesure où ils ne bénéficient pas de la citoyenneté israélienne, ne sont pas victimes, au sens strict, d’une politique discriminatoire. C’est la colonisation qui va changer, qualitativement, la donne, en ajoutant à l’oppression la discrimination, et en systématisant cette dernière. Les colons sont en effet des citoyens israéliens qui s’installent dans des territoires qui ne sont pas considérés comme étant partie intégrante de l’État d’Israël et qui sont, en conséquence, soumis à un régime juridique et judiciaire spécifique. Si elles souhaitent que ces populations échappent au régime militaire, les autorités israéliennes doivent mettre en place une législation parallèle, qui ce concerne que les colons et qui porte donc en elle non seulement le principe de la discrimination mais, qui plus est, son institutionnalisation.

 

II) L’institutionnalisation des discriminations

 

Le développement des colonies transforme progressivement les « territoires palestiniens » en zones dans lesquelles coexistent, à défaut de cohabiter, des citoyens israéliens et des Palestiniens. Or ce sont les « zones » géographiques qui sont sous administration israélienne, d’après les textes constituant le gouvernement militaire, et non les Palestiniens qui y résident. La logique juridique voudrait donc que les colons, au fur et à mesure qu’ils viennent s’installer en Cisjordanie et à Gaza, soient eux aussi soumis aux ordres militaires et, en cas d’infraction, traduits devant les tribunaux militaires. Pour éviter une telle configuration, qui ne manquerait pas de susciter des conflits entre colons et administration, et qui découragerait les candidats à « l’implantation » dans les territoires palestiniens, les autorités israéliennes vont établir un statut d’exception pour les colons, qui va reposer sur deux principaux outils juridiques : une extension de la législation israélienne, sur une base territoriale, aux colonies juives des territoires occupés ; l’application de la loi israélienne, in personam, aux colons.

 

Le premier dispositif sur lequel se fonde la dualité du système juridique en vigueur dans les territoires occupés est en effet l’attribution d’un statut spécial, sur une base géographique, aux colonies. Ce sont notamment les ordres 783 et 892 (1979 et 1981) qui encadrent ce statut particulier, en offrant au commandement militaire la possibilité de permettre aux autorités des colonies (municipalités et conseils régionaux) d’appliquer plusieurs dizaines de lois israéliennes, et non les ordres militaires. Les lois en vigueur en Israël ne s’appliquent donc pas directement dans les colonies, mais l’administration militaire des territoires occupés joue un rôle d’interface entre législation israélienne et territoires des colonies. De plus, des tribunaux locaux, ainsi que des tribunaux rabbiniques, sont établis au sein des colonies, qui sont en charge de certains litiges opposant les colons entre eux. Si, comme le fait remarquer Amnon Rubinstein, de tels mécanismes contribuent à brouiller les « frontières » entre Israël et les territoires occupés[20], force est de constater qu’ils créent en outre des enclaves territoriales extra-légales au sein desdits territoires, qui ne sont pas sujettes aux ordres et aux tribunaux militaires. Ces enclaves bénéficient, qui plus est, d’un certain nombre de services dont les Palestiniens sont exclus, fournis notamment par les Ministères de l’Éducation, de la Santé, de l’Environnement ou de l’Agriculture.

 

Le second dispositif qui encadre la dualité juridique entre colons et Palestiniens est l’attribution d’un statut de citoyen « extra-territorial » aux résidents des colonies. La seule base territoriale ne permet pas, en effet, de contourner les ordres et les tribunaux militaires, dans la mesure où les colons pourraient se rendre coupables d’infractions à l’extérieur des colonies et des zones qui y sont annexées. C’est pourquoi de nombreuses lois votées à la Knesset mentionnent explicitement le fait qu’elles s’appliquent non seulement en Israël mais qu’elles concernent aussi les Israéliens résidant dans les territoires occupés. Dans le domaine pénal, la plus significative d’entre elles est une loi adoptée en 1977[21], « qui autorise les tribunaux pénaux israéliens à juger les Israéliens suspectés d’avoir commis des infractions pénales en Cisjordanie[22] sur le base du code pénal et des procédures pénales de l’État d’Israël »[23]. Le texte explique ainsi que « le tribunal en Israël aura l’autorité pour juger, au regard de la loi en vigueur en Israël, (…) un Israélien pour son acte ou manquement s’il se produit dans le territoire du Conseil Palestinien [l’Autorité Palestinienne]. Cette régulation ne s’applique pas à une personne qui, au moment de l’acte ou du manquement, était un résident de la région [la Cisjordanie] ou un résident des territoires du Conseil Palestinien, et qui n’est pas israélien »[24]. La législation permet non seulement aux colons israéliens d’être jugés par les tribunaux réguliers de l’État d’Israël, mais elle exclut de plus de facto les non-Israéliens, en l’occurrence les Palestiniens.  

 

Depuis les Accords d’Oslo, la juridiction territoriale des tribunaux militaires israéliens se réduit, en théorie, aux zones B et aux zones C[25], et donc aux crimes qui y sont commis et aux individus qui y résident. En effet, les zones A étant sous le contrôle de l’AP, c’est elle qui est, en théorie, chargée de juger les infractions qui y sont commises. Mais l’ordre 1651 (2009) précise des exceptions à cette limitation de la juridiction des tribunaux militaires : « Le tribunal militaire est autorisé à juger (…) une personne qui a commis un acte criminel à l’intérieur de la zone A, [si cet acte] vise ou contribue à nuire à la sécurité de la région [la Cisjordanie] »[26]. De même, un Palestinien accusé d’avoir commis, ou participé à la commission d’un crime en Israël, peut tomber sous la juridiction des tribunaux militaires : « Le tribunal militaire est autorisé à juger (…) une personne qui a commis un acte criminel hors de la région [la Cisjordanie] qui constituerait un crime s’il était commis dans la région et si l’acte vise ou contribue à nuire à la sécurité de la région ou l’ordre public »[27]. Les Accords d’Oslo et les « transferts de compétences » à l’AP n’ont donc pas bouleversé la structure qui s’est mise en place après 1967, puisque les autorités militaires israéliennes se réservent le droit d’arrêter des personnes vivant dans les zones A et de les juger même si l’acte répréhensible a été commis dans lesdites zones.

 

Il existe donc, aujourd’hui encore, un double statut pénal, à l’intérieur même de la Cisjordanie, correspondant à une séparation, sur des critères nationaux, entre deux populations résidant pourtant dans la même entité territoriale. Cette séparation se double d’inégalités de traitement, puisque comme le rappelle Amnesty International dans un rapport daté de 2006, la législation militaire est « moins protectrice » que la législation israélienne « normale »[28]. C’est ainsi qu’un Palestinien arrêté en Cisjordanie et suspecté d’homicide involontaire pourra être retenu huit jours avant d’être traduit devant un juge militaire, maintenu en détention « provisoire » pendant une durée indéfinie[29] et condamné à une peine pouvant aller jusqu’à la prison à perpétuité. Un colon suspecté du même crime sur le même territoire devra, en vertu de la loi israélienne, être traduit devant un juge (civil) au maximum 24 heures après son arrestation, et ne pourra pas être condamné à une peine excédant 20 ans de prison. Le double standard juridique est ici manifeste, qui confirme qu’à la séparation s’ajoute la discrimination. Les statistiques de l’activité des tribunaux militaires israéliens sont à cet égard éloquents : en 2010, ce sont pas moins de 9.542 Palestiniens qui ont été déférés devant la « justice militaire » israélienne, avec un taux de condamnation de 99.74%[30].

 

III) De l’intérêt du recours au paradigme de l’apartheid

 

La confrontation de la politique israélienne en Cisjordanie avec les traits fondamentaux de l’apartheid, et notamment le caractère institutionnalisé des discriminations et de l’oppression[31] permet donc d’aller au-delà de la description et de l’analyse de l’occupation comme étant intrinsèquement « violente » ou « arbitraire ». La dualité juridique à l’œuvre en Cisjordanie, qui repose sur le principe de la séparation entre résidents palestiniens et israéliens, témoigne en effet d’une institutionnalisation des discriminations dans un territoire qui demeure sous occupation israélienne. En fonction de leur origine nationale, les habitants de Cisjordanie soupçonnés d’avoir commis des infractions ne sont pas sujets aux mêmes lois et aux mêmes tribunaux[32], quand bien même ceux-ci sont sous la responsabilité du même État, à savoir Israël. La séparation ainsi opérée est un indice du caractère structurel des discriminations au sein des territoires occupés, assumées et légalisées par les autorités israéliennes.

 

En dernière analyse, cette dualité n’est que la projection juridique et judiciaire des contradictions inhérentes au sionisme politique et au projet d’établissement d’un « État des Juifs » dans une région très majoritairement peuplée de non-Juifs[33]. La logique d’inclusion territoriale et d’exclusion démographique porte en effet en elle, à partir du moment où l’ensemble des résidents indigènes n’ont pas quitté la Palestine, la constitution de catégories de citoyens de seconde classe[34] et de sujets sans citoyenneté. Il en résulte en effet une situation apparemment paradoxale : force est en effet de constater que les Palestiniens de Cisjordanie sont eux aussi, à bien des égards, des sous-citoyens de l’État d’Israël. Certains auteurs peu suspects d’antisionisme vont ainsi jusqu’à souligner que ce qui constitue, selon eux, l’une des principales différences de traitement entre les Palestiniens et les colons, est le fait que ces derniers aient le droit, en vertu de la loi électorale de 1968, de voter aux élections israéliennes : « nous devons relever l’extension, sur une base personnelle, de la loi électorale israélienne, qui affirme que les Israéliens qui résident dans les territoires placés sous la responsabilité des Forces de Défense Israéliennes (FDI) pourront voter dans leur lieu de résidence. (…) [Cette loi] permet aux colons israéliens des territoires occupés de participer au choix du gouvernement qui administre ces territoires en tant que puissance occupante, alors que les résidents palestiniens des mêmes territoires, qui sont sujets aux actions du même gouvernement, ne prennent pas part à ce choix »[35].

 

Les Palestiniens des territoires occupés demeurent en effet, à plus d’un titre, et ce malgré la fiction de « l’autonomie palestinienne », des sujets de l’État d’Israël. Il est ainsi significatif de noter que les permis de circulation à l’intérieur des territoires occupés demeurent, aux côtés des autorisations d’entrée en Israël, sous la seule responsabilité de l’administration israélienne. À la fin de l’année 2011, ce sont ainsi pas moins de 101 permis différents qui organisaient les déplacements des Palestiniens, en fonction de leur lieu de résidence, de leur âge, de leur profession, de leur sexe, de leur situation maritale, etc[36]… Un exemple qui illustre, à l’instar des tribunaux militaires, à quel point la vie quotidienne des Palestiniens demeure rythmée et organisée par des décisions israéliennes, quand bien même l’AP a hérité, depuis les Accords d’Oslo, de nombreuses « compétences »[37]. L’occupation israélienne ne se résume pas à une situation d’oppression, elle est également productrice de normes juridiques discriminatoires dans la mesure où elle s’applique différemment selon l’origine nationale des habitants des territoires occupés. L’interrogation du paradigme d’apartheid permet ainsi d’établir que l’occupation militaire et les discriminations institutionnalisées ne se confondent pas, quand bien même elles peuvent être considérées comme les deux faces d’une même politique. L’inscription dans la durée de l’occupation, doublée de la politique d’implantation de colons dans les territoires occupés, ont conduit au développement légalisé des discriminations et abouti à une situation complexe mais familière : un seul pouvoir réel, deux populations imbriquées, une unification territoriale de facto, mais une législation différenciée selon des critères nationaux, et des enclaves territoriales soumises à des régimes politiques et juridiques distincts.



[1] Pascal, Pensées (1670).

[2] Voir notamment l’excellente synthèse de Neve Gordon, Israel’s Occupation, Berkeley, University of California Press, 2008, et l’ouvrage collectif dirigé par Adi Ophir, Michal Givoni et Sari Hanafi, Power of Inclusive Exclusion : Anatomy of the Israeli Rule in the Occupied Palestinian Territories, New York, Zone Books, 2009.

[3] Voir notamment Lisa Hajjar, Courting Conflict : the Israeli Military Court System in the West Bank and Gaza, Berkeley, University of California Press, 2005. Pour une étude plus synthétique, on pourra également se reporter à Sharon Weill, « The judicial arm of the occupation : the Israeli military courts in the occupied territories », International Review of the Red Cross, vol. 89, n°866, juin 2007, p. 395-420.

[4] Il ne s’agit pas ici de relativiser la tragédie des réfugiés de 1967, mais d’établir que la proportion d’exilés est beaucoup plus faible qu’en 1947-1949.

[5] L’annexion aurait en effet amené les Palestiniens à représenter plus d’un tiers des habitants de l’État d’Israël.

[6] « Gouvernement militaire » jusqu’en 1981, « Administration civile » par la suite.

[7] L’administration militaire est rattachée à la Coordination des Activités Gouvernementales dans les Territoires Occupés (COGAT), une unité du Ministère de l’Intérieur israélien.

[8] Ordres 92, 158, 291, entre autres. Les numéros correspondent aux ordres émis pour la Cisjordanie. La plupart ont un équivalent, sous un autre numéro, à Gaza.

[9] Ordres 58, 59, 291, 321, 364, 1.091, entre autres.

[10] Ordre 45.

[11] Ordre 267, modifié par les ordres 362 et 398.

[12] Ordre 379, modifié par l’ordre 398.

[13] Ordre 1015.

[14] Sauf si les autorités militaires en sont averties à l'avance et ont les noms de l'ensemble des participants…

[15] Les autorités militaires reprennent à leur compte la législation d’urgence adoptée par les Britanniques en 1945, en l’occurrence les articles 86 à 101.

[16] La dernière mise à jour des « directives sécuritaires » date de 2009, avec l’ordre 1651 (« Order Regarding Security Directives (Judea and Samaria) »), qui reprend, complète et/ou remplace les ordres précédents, dont l’ordre 378.

[17] C’est ce que l’on appelle la « détention administrative », toujours en vigueur.

[18] Articles 44 et 50 de l'ordre 378.

[19] Rappelons ici que l’État d’Israël n’a toujours pas, à ce jour, de frontières déclarées. D’où l’utilisation des guillemets.

[20] Amnon Rubinstein, « The Changing Status of the "Territories" (West Bank and Gaza) : From Escrow to Legal Mongrel », Tel Aviv University Studies in Law, vol. 8, 1988, p. 59-80.

[21] « The Extension of Power of Emergency Regulations Law (Judea and Samaria and the Gaza Strip – Adjudication of Offences and Legal Aid) », votée en 1977 et régulièrement amendée depuis.

[22] Et, jusqu’en 2005, à Gaza. 

[23] Middle East Project of the Human Sciences Research Council of South Africa,  Occupation, Colonialism, Apartheid ? A re-assessment of Israel’s practices in the occupied Palestinian territories under international law, mai 2009, p. 107.  

[24] The Extension of Power of Emergency Regulations Law, op. cit, section 2. C’est moi qui souligne.

[25] Les Accords de Taba (« Oslo II », septembre 1995) ont divisé les territoires palestiniens en zones aux statuts divers : les zones A (18% de la Cisjordanie en 2011) sont sous la seule responsabilité de l’AP, les zones B (21%) sont le lieu d’un partage des responsabilités, et les zones C (61%) sont sous la seule responsabilité israélienne.

[26] Ordre 1659, article 10.F.

[27] Ibid, article 10.E.

[28] Amnesty International, Israël et Territoires occupés : note au Comité de l'ONU pour l'élimination de la discrimination raciale, 2006.

[29] Cf supra.  

[30] Chaïm Levinson, « Nearly 100% of all military court cases in West Bank end in conviction », Haaretz, 29 novembre 2011.

[31] Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale, Article 7, 2, h.

[32] Je n’évoque pas ici les tribunaux palestiniens, mais les tribunaux civils et militaires israéliens.

[33] Voir à ce propos la contribution de Céline Lebrun, infra.

[34] Je me permets ici de renvoyer aux autres contributions de l’ouvrage revenant sur les cas des Bédouins, des Palestiniens de Jérusalem ou des Palestiniens d’Israël. Voir, respectivement, les contributions d’Irène Steinert, de Ben Scribner et de Layla Damiri et Céline Lebrun.

[35] Orna Ben-Naftali, Aeyal Gross et Keren Michaeli, « Illegal Occupation : The Framing of the Occupied Palestinian Territory », Berkeley Journal of International Law, vol. 23, n°3, 2005, p. 551-614 (p. 584-585).

[36] Chaïm Levinson, « Israel has 101 different types of permits governing Palestinian movement », Haaretz, 26 décembre 2011. Inutile de préciser que les colons sont dispensés de ce système de « permis ».

[37] Sur les transferts de compétences, voir notamment Jean-François Legrain, « Retour sur les Accords israélo-palestiniens », Maghreb-Machrek n°170, octobre-décembre 2000, p. 96-125.

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1 mars 2013 5 01 /03 /mars /2013 15:21

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Claude Hagège: "Imposer sa langue, c'est imposer sa pensée"

Par Michel Feltin-Palas (L'Express),

Faut-il s'inquiéter de la domination de la langue anglaise? Les langues nationales vont-elles disparaître? Sans chauvinisme ni ringardise, le linguiste Claude Hagège dresse un constat lucide de la situation. Rencontre. 

 

En amoureux des langues,Claude Hagège défend la diversité et s'oppose fermemement à la domination de l'anglais.

Yann Rabarier/L'Express

Claude Hagège en 5 dates

1955 Entrée à l'Ecole normale supérieure 

1966 Première enquête linguistique de terrain, au Cameroun 

Depuis 1988 Professeur au Collège de France 

2009Dictionnaire amoureux des langues (Plon). 

2012Contre la pensée unique (Odile Jacob) 

La Semaine de la langue française, qui vient de s'achever, n'aura pas suffi à mettre du baume au coeur de Claude Hagège. Car le constat du grand linguiste est sans appel : jamais, dans l'histoire de l'humanité, une langue n'a été "comparable en extension dans le monde à ce qu'est aujourd'hui l'anglais". Oh ! il sait bien ce que l'on va dire. Que la défense du français est un combat ranci, franchouillard, passéiste. Une lubie de vieux ronchon réfractaire à la modernité. Il n'en a cure. Car, à ses yeux, cette domination constitue une menace pour le patrimoine de l'humanité. Et fait peser sur elle un risque plus grave encore : voir cette "langue unique" déboucher sur une "pensée unique" obsédée par l'argent et le consumérisme. Que l'on se rassure, cependant : si Hagège est inquiet, il n'est pas défaitiste. La preuve, avec cet entretien où chacun en prend pour son grade... 

Comment décide-t-on, comme vous, de consacrer sa vie aux langues?

Je l'ignore. Je suis né et j'ai grandi à Tunis, une ville polyglotte. Mais je ne crois pas que ce soit là une explication suffisante : mes frères, eux, n'ont pas du tout emprunté cette voie.  

Enfant, quelles langues avez-vous apprises?

A la maison, nous utilisions le français. Mais mes parents m'ont fait suivre une partie de ma scolarité en arabe - ce qui montre leur ouverture d'esprit, car l'arabe était alors considéré comme une langue de colonisés. J'ai également appris l'hébreu sous ses deux formes, biblique et israélienne. Et je connaissais l'italien, qu'employaient notamment plusieurs de mes maîtres de musique. 

Combien de langues parlez-vous?

S'il s'agit de dénombrer les idiomes dont je connais les règles, je puis en mentionner plusieurs centaines, comme la plupart de mes confrères linguistes. S'il s'agit de recenser ceux dans lesquels je sais m'exprimer aisément, la réponse sera plus proche de 10. 

Beaucoup de Français pensent que la langue française compte parmi les plus difficiles, et, pour cette raison, qu'elle serait "supérieure" aux autres. Est-ce vraiment le cas?

Pas du tout. En premier lieu, il n'existe pas de langue "supérieure". Le français ne s'est pas imposé au détriment du breton ou du gascon en raison de ses supposées qualités linguistiques, mais parce qu'il s'agissait de la langue du roi, puis de celle de la République. C'est toujours comme cela, d'ailleurs : un parler ne se développe jamais en raison de la richesse de son vocabulaire ou de la complexité de sa grammaire, mais parce que l'Etat qui l'utilise est puissant militairement - ce fut, entre autres choses, la colonisation - ou économiquement - c'est la "mondialisation". En second lieu, le français est un idiome moins difficile que le russe, l'arabe, le géorgien, le peul ou, surtout, l'anglais.  

L'anglais ? Mais tout le monde, ou presque, l'utilise!

Beaucoup parlent un anglais d'aéroport, ce qui est très différent ! Mais l'anglais des autochtones reste un idiome redoutable. Son orthographe, notamment, est terriblement ardue : songez que ce qui s'écrit "ou" se prononce, par exemple, de cinq manières différentes dans through, rough, bough, four et tour ! De plus, il s'agit d'une langue imprécise, qui rend d'autant moins acceptable sa prétention à l'universalité.  

Imprécise?

Parfaitement. Prenez la sécurité aérienne. Le 29 décembre 1972, un avion s'est écrasé en Floride. La tour de contrôle avait ordonné : "Turn left, right now", c'est-à-dire "Tournez à gauche, immédiatement !" Mais le pilote avait traduit "right now" par "à droite maintenant", ce qui a provoqué la catastrophe. Voyez la diplomatie, avec la version anglaise de la fameuse résolution 242 de l'ONU de 1967, qui recommande le "withdrawal of Israel armed forces from territories occupied in the recent conflict". Les pays arabes estiment qu'Israël doit se retirer "des" territoires occupés - sous-entendu : de tous. Tandis qu'Israël considère qu'il lui suffit de se retirer "de" territoires occupés, c'est-à-dire d'une partie d'entre eux seulement.  

Est-ce une raison pour partir si violemment en guerre contre l'anglais ?

Je ne pars pas en guerre contre l'anglais. Je pars en guerre contre ceux qui prétendent faire de l'anglais une langue universelle, car cette domination risque d'entraîner la disparition d'autres idiomes. Je combattrais avec autant d' énergie le japonais, le chinois ou encore le français s'ils avaient la même ambition. Il se trouve que c'est aujourd'hui l'anglais qui menace les autres, puisque jamais, dans l'Histoire, une langue n'a été en usage dans une telle proportion sur les cinq continents. 

En quoi est-ce gênant ? La rencontre des cultures n'est-elle pas toujours enrichissante ?

La rencontre des cultures, oui. Le problème est que la plupart des gens qui affirment "Il faut apprendre des langues étrangères" n'en apprennent qu'une : l'anglais. Ce qui fait peser une menace pour l'humanité tout entière. 

A ce point ?

Seuls les gens mal informés pensent qu'une langue sert seulement à communiquer. Une langue constitue aussi une manière de penser, une façon de voir le monde, une culture. En hindi, par exemple, on utilise le même mot pour "hier" et "demain". Cela nous étonne, mais cette population distingue entre ce qui est - aujourd'hui - et ce qui n'est pas : hier et demain, selon cette conception, appartiennent à la même catégorie. Tout idiome qui disparaît représente une perte inestimable, au même titre qu'un monument ou une oeuvre d'art. 

Avec 27 pays dans l'Union européenne, n'est-il pas bien utile d'avoir l'anglais pour converser ? Nous dépensons des fortunes en traduction!

Cette idée est stupide ! La richesse de l'Europe réside précisément dans sa diversité. Comme le dit l'écrivain Umberto Eco, "la langue de l'Europe, c'est la traduction". Car la traduction - qui coûte moins cher qu'on ne le prétend - met en relief les différences entre les cultures, les exalte, permet de comprendre la richesse de l'autre. 

Mais une langue commune est bien pratique quand on voyage. Et cela ne conduit en rien à éliminer les autres!

Détrompez-vous. Toute l'Histoire le montre : les idiomes des Etats dominants conduisent souvent à la disparition de ceux des Etats dominés. Le grec a englouti le phrygien. Le latin a tué l'ibère et le gaulois. A l'heure actuelle, 25 langues disparaissent chaque année ! Comprenez bien une chose : je ne me bats pas contre l'anglais ; je me bats pour la diversité. Un proverbe arménien résume merveilleusement ma pensée : "Autant tu connais de langues, autant de fois tu es un homme."  

Vous allez plus loin, en affirmant qu'une langue unique aboutirait à une "pensée unique"...

Ce point est fondamental. Il faut bien comprendre que la langue structure la pensée d'un individu. Certains croient qu'on peut promouvoir une pensée française en anglais : ils ont tort. Imposer sa langue, c'est aussi imposer sa manière de penser. Comme l'explique le grand mathématicien Laurent Lafforgue : ce n'est pas parce que l'école de mathématiques française est influente qu'elle peut encore publier en français ; c'est parce qu'elle publie en français qu'elle est puissante, car cela la conduit à emprunter des chemins de réflexion différents.  

Vous estimez aussi que l'anglais est porteur d'une certaine idéologie néolibérale...

Oui. Et celle-ci menace de détruire nos cultures dans la mesure où elle est axée essentiellement sur le profit.  

Je ne vous suis pas...

Prenez le débat sur l'exception culturelle. Les Américains ont voulu imposer l'idée selon laquelle un livre ou un film devaient être considérés comme n'importe quel objet commercial. Car eux ont compris qu'à côté de l'armée, de la diplomatie et du commerce il existe aussi une guerre culturelle. Un combat qu'ils entendent gagner à la fois pour des raisons nobles - les Etats-Unis ont toujours estimé que leurs valeurs sont universelles - et moins nobles : le formatage des esprits est le meilleur moyen d'écouler les produits américains. Songez que le cinéma représente leur poste d'exportation le plus important, bien avant les armes, l'aéronautique ou l'informatique ! D'où leur volonté d'imposer l'anglais comme langue mondiale. Même si l'on note depuis deux décennies un certain recul de leur influence.  

Pour quelles raisons?

D'abord, parce que les Américains ont connu une série d'échecs, en Irak et en Afghanistan, qui leur a fait prendre conscience que certaines guerres se perdaient aussi faute de compréhension des autres cultures. Ensuite, parce qu'Internet favorise la diversité : dans les dix dernières années, les langues qui ont connu la croissance la plus rapide sur la Toile sont l'arabe, le chinois, le portugais, l'espagnol et le français. Enfin, parce que les peuples se montrent attachés à leurs idiomes maternels et se révoltent peu à peu contre cette politique. 

Pas en France, à vous lire... Vous vous en prenez même de manière violente aux "élites vassalisées" qui mèneraient un travail de sape contre le français.

Je maintiens. C'est d'ailleurs un invariant de l'Histoire. Le gaulois a disparu parce que les élites gauloises se sont empressées d'envoyer leurs enfants à l'école romaine. Tout comme les élites provinciales, plus tard, ont appris à leur progéniture le français au détriment des langues régionales. Les classes dominantes sont souvent les premières à adopter le parler de l'envahisseur. Elles font de même aujourd'hui avec l'anglais.  

Comment l'expliquez-vous?

En adoptant la langue de l'ennemi, elles espèrent en tirer parti sur le plan matériel, ou s'assimiler à lui pour bénéficier symboliquement de son prestige. La situation devient grave quand certains se convainquent de l'infériorité de leur propre culture. Or nous en sommes là. Dans certains milieux sensibles à la mode - la publicité, notamment, mais aussi, pardonnez-moi de vous le dire, le journalisme - on recourt aux anglicismes sans aucune raison. Pourquoi dire "planning" au lieu d'"emploi du temps" ? "Coach" au lieu d'"entraîneur" ? "Lifestyle" au lieu de "mode de vie" ? "Challenge" au lieu de "défi" ? 

Pour se distinguer du peuple?

Sans doute. Mais ceux qui s'adonnent à ces petits jeux se donnent l'illusion d'être modernes, alors qu'ils ne sont qu'américanisés. Et l'on en arrive à ce paradoxe : ce sont souvent les immigrés qui se disent les plus fiers de la culture française ! Il est vrai qu'eux se sont battus pour l'acquérir : ils en mesurent apparemment mieux la valeur que ceux qui se sont contentés d'en hériter. 

Mais que dites-vous aux parents qui pensent bien faire en envoyant leurs enfants suivre un séjour linguistique en Angleterre ou aux Etats-Unis?

Je leur réponds : "Pourquoi pas la Russie ou l'Allemagne ? Ce sont des marchés porteurs et beaucoup moins concurrentiels, où vos enfants trouveront plus facilement de l'emploi." 

Ne craignez-vous pas d'être taxé de ringardise, voire de pétainisme?

Mais en quoi est-il ringard d'employer les mots de sa propre langue ? Et en quoi le fait de défendre la diversité devrait-il être assimilé à une idéologie fascisante ? Le français est à la base même de notre Révolution et de notre République !  

Pourquoi les Québécois défendent-ils le français avec plus d'acharnement que nous-mêmes?

Parce qu'ils sont davantage conscients de la menace : ils forment un îlot de 6 millions de francophones au milieu d'un océan de 260 millions d'anglophones ! D'où leur activité néologique extraordinaire. Ce sont eux qui, par exemple, ont inventé le terme "courriel", que j'invite les lecteurs de L'Express à adopter ! 

 

Des limites de l'anglais en entreprise

 

En 1999, le PDG de Renault, Louis Schweitzer, impose l'anglais dans les comptes rendus de réunions de direction. Une mesure sur laquelle il sera obligé de revenir, à la plus grande satisfaction de Claude Hagège. "Les entreprises qui ont adopté cette mesure ont perdu en efficacité. Pour une raison simple, que décrit très bien l'ancien patron de Sanofi-Aventis, Jean- François Dehecq : "Si nous imposons l'anglais à tous, les natifs anglophones fonctionneront à 100 % de leur potentiel, ceux qui le parlent bien en seconde langue, à 50 %, et les autres, à 10 %."" "Par ailleurs, il est faux de croire que l'anglais soit indispensable pour le commerce, reprend Hagège. C'est parfois le contraire. Quand on veut vendre un produit à un étranger, mieux vaut utiliser la langue de son client, qui n'est pas toujours l'anglais ! Une grande compagnie d'eau française est allée récemment à Brasilia. Quand ses représentants ont commencé à recourir à l'anglais, cela a rendu furieux les Brésiliens, qui possèdent, comme nous, une langue d'origine latine. Par anglomanie, nos commerciaux ont transformé un avantage culturel en handicap !" 

La victoire de l'anglais est-elle irréversible?

Pas du tout. Des mesures positives ont d'ailleurs déjà été prises : les quotas de musique française sur les radios et les télévisions, les aides au cinéma français, etc. Hélas, l'Etat ne joue pas toujours son rôle. Il complique l'accès au marché du travail des diplômés étrangers formés chez nous, il soutient insuffisamment la francophonie, il ferme des Alliances françaises... Les Chinois, eux, ont ouvert 1 100 instituts Confucius à travers le monde. Il y en a même un à Arras ! 

Si une seule mesure était à prendre, quelle serait-elle?

Tout commence à l'école primaire, où il faut enseigner non pas une, mais deux langues vivantes. Car, si on n'en propose qu'une, tout le monde se ruera sur l'anglais et nous aggraverons le problème. En offrir deux, c'est s'ouvrir à la diversité.  

Nicolas Sarkozy est coutumier des fautes de syntaxe : "On se demande c'est à quoi ça leur a servi..." ou encore "J'écoute, mais je tiens pas compte". Est-ce grave, de la part d'un chef d'Etat?

Peut-être moins qu'on ne le croit. Regardez : il a relancé les ventes de La Princesse de Clèves depuis qu'il a critiqué ce livre de Mme de La Fayette ! Mais il est certain que de Gaulle et Mitterrand étaient plus cultivés et avaient un plus grand respect pour la langue. 

Le français pourrait-il être le porte-étendard de la diversité culturelle dans le monde?

J'en suis persuadé, car il dispose de tous les atouts d'une grande langue internationale. Par sa diffusion sur les cinq continents, par le prestige de sa culture, par son statut de langue officielle à l'ONU, à la Commission européenne ou aux Jeux olympiques. Et aussi par la voix singulière de la France. Songez qu'après le discours de M. de Villepin à l'ONU, s'opposant à la guerre en Irak, on a assisté à un afflux d'inscriptions dans les Alliances françaises. 

N'est-il pas contradictoire de vouloir promouvoir le français à l'international et de laisser mourir les langues régionales?

Vous avez raison. On ne peut pas défendre la diversité dans le monde et l'uniformité en France ! Depuis peu, notre pays a commencé d'accorder aux langues régionales la reconnaissance qu'elles méritent. Mais il aura fallu attendre qu'elles soient moribondes et ne représentent plus aucun danger pour l'unité nationale. 

Il est donc bien tard...

Il est bien tard, mais il n'est pas trop tard. Il faut augmenter les moyens qui sont consacrés à ces langues, les sauver, avant que l'on ne s'aperçoive que nous avons laissé sombrer l'une des grandes richesses culturelles de la France. l 

 

[LIVRE]

Contre la pensée unique CONTRE-LA-PENSEE-UNIQUE.jpg

 

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1 mars 2013 5 01 /03 /mars /2013 14:56

 

 

 

 

 

                                                                  5mars.png

                  A BASTIA, à 11 H , DEVANT LA PREFECTURE

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1 mars 2013 5 01 /03 /mars /2013 14:52

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Battle-of-Empty-Stomachs.jpg 

Grève de la faim massivement suivie dans les prisons israéliennes

 

 

Article AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

 

 

Les 4 700 prisonniers palestiniens détenus par l'occupant israélien ont mené dimanche une action symbolique de grève de la faim contre la mort la veille, sous les coups des tortionnaires israéliens, du prisonnier politique Arafat Jaradat.

 

La colère gronde en Palestine après le décès en prison du prisonnier politique Arafat Jaradat, dernière victime ce samedi 23 février des traitements inhumains imposés quotidiennement par Israël aux prisonniers palestiniens.

 

Si les autorités israéliennes ont prétendu une crise cardiaque subite, l'autopsie menée en présence de responsables palestiniens a révélé une toute autre cause pour ce jeune homme de 30 ans, en parfaite santé par ailleurs.

 

Selon l'autopsie, révèle le ministre aux prisonniers de l'Autorité palestinienne Issa Qarage, Jaradat avait six os cassés : en particulier au niveau du dos, du nez, des bras ainsi que des jambes.

 

« Les informations reçues sont choquantes et douloureuses. Les preuves confirment nos soupçons : Jaradat est mort des suites de tortures, l'autopsie a clairement prouvé que le cœur de la victime était par ailleurs en parfait état », a déclaré Qarage en conférence de presse.

 

Ce lundi, plusieurs milliers de Palestiniens ont rendu hommage à Jaradat, dans son village natal de Sair, près d'Hébron en Cisjordanie promettant de venger celui qui est devenu un martyr de la cause palestinienne.

 

Les échauffourées se sont multipliées depuis lundi, aux jets de pierres de civils palestiniens a succédé la répression par les forces militaires israéliennes, à base de grenades lacrymogène et assourdissante.

 

Ce dimanche, l'immense majorité des 4 700 prisonniers palestiniens ont entamé une grève de la faim symbolique d'une journée pour protester contre la mort sous la torture d'Arafat Jaradat et en solidarité avec les grévistes de la faim en lutte depuis depuis l'été dernier .

 

Les prisonniers ont demandé non seulement une commission d'enquête internationale sur les conditions de détention mais aussi la libération immédiate de quatre prisonniers en grève de la faim depuis plus de 200 jours : Samir Issaoui, Ayman Sharaouneh, Tarek Kaadan et Jafar Azzedine.

 

Sept autres prisonniers palestiniens ont rejoint la grève de la faim illimitée des quatre qui meurent à petit feu dans les prisons, coupés de toute aide humanitaire internationale.

 

En marge des 4 700 prisonniers palestiniens, 200 répondent du non-statut de « détention administrative », n'ayant jamais fait l'objet d'un procès ni bénéficié des droits élémentaires à la défense.

 

Parmi eux, quinze sont membres de l'Assemblée palestinienne.

 

Les communistes israéliens solidaires avec la lutte des prisonniers palestiniens

 

Seuls contre toute une société coloniale, accompagnés de quelques rares organisations pacifistes, le Parti communiste d’Israël a mené depuis samedi des actions de solidarité avec les prisonniers politiques palestiniens.

 

Samedi après-midi, ce sont plusieurs centaines de militants arabes, de leaders locaux mais aussi de plusieurs députés arabes à la Knesset, parmi eux les principaux dirigeants du Parti communiste, qui ont participé à une manifestation de solidarité à Nazareth.

 

Invité vendredi dernier au 44 ème anniversaire du Front démocratique pour la libération de la Palestine, à Ramallah, le député communiste Mohammed Barakeh a lancé un appel à la résistance palestinienne :

 

« Dans la période, rien n'est plus important que la mobilisation de la résistance populaire palestinienne pour vaincre l'occupation ».

 

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1 mars 2013 5 01 /03 /mars /2013 14:49

                                                                 MARE NOSTRUM-copie-1

 

 

Sortez vos mouchoirs. Gardez votre calme. Contrôlez une possible montée de tension. Attendez-vous  à une nouvelle bouleversante. Stéphanie de Monaco a avoué sur France 5 :   « Nous souffrons de la même manière de la crise. » La fille cadette de Rainier a révélé que le plan d’austérité mis en place dans la principauté provoquera des baisses des dépenses publiques affectant notamment les subventions culturelles. La princesse, celle qui fit, à l’époque, les délices des Inconnus, portait sur son visage les stigmates de la douleur lorsqu’elle a prononcé ces mots qui resteront gravés à jamais dans la mémoire collective de la principauté.

Une première mondiale, sans conteste. Car si on sait tout ou presque des problèmes de cœur et de cul des Grimaldi, la discrétion absolue du clan reste la règle dès qu’on s’intéresse à leur cassette où plutôt au déluge d’argent déversé sur le Rocher. Stéphanie, fine mouche, fait pleurer dans les chaumières. Mais la règle de conduite princière demeure intacte : touche pas au grisbi… de la famille.

La fortune des Grimaldi estimée à un peu plus d’un milliard d’euros s’alimente des commissions versées par les banques bénéficiant de considérables avantages fiscaux, des sociétés anonymes, des immeubles, casinos et jusqu’aux boutiques à souvenirs pour les gogos de touristes. La liste civile – un peu plus de 100 millions d’euros  votée chaque année par le Parlement monégasque – sert  d’argent de poche au clan qui dispose en France de plusieurs propriétés. Belle et généreuse famille dont les racines, dit-on, relèvent de la rubrique des faits divers, certains allant jusqu’à fouiller dans des histoires de cabarets datant du siècle dernier.

Tranquillisez-vous. Pour la famille Grimaldi, comme pour leurs amis exilés fiscaux qui pullulent sur le Rocher ce n’est vraiment pas la crise. Mais prononcer ce mot en ce moment fait chic chez les fortunés en mal d’amour et de reconnaissance.

José Fort

L’Humanité cactus 28 février

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28 février 2013 4 28 /02 /février /2013 17:16

 

 

 

                                             

 

 

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Chômage record en Corse comme au plan national. Le résultat d’une politique d’austérité injuste et inefficace.

Mobilisation le 5 mars 2013

Les chiffres du mois de janvier 2013 montrent une nouvelle et importante progression du chômage. Ce sont plus de 5 millions de personnes dans le pays qui sont actuellement inscrit au pôle emploi dans les différentes catégories. C’est un triste record qui sera malheureusement battu dans les prochains mois si les choix politiques du gouvernement sont poursuivis.

 

En Corse, 20337 personnes sont inscrites au chômage toutes catégories confondues dont 17140 pour les 3 premières. La progression sur 1 an est de 11%. Dans notre région ce sont surtout les jeunes et les plus de 50 ans qui paient un lourd tribu à cette politique. La progression des + de 50 ans est de 19% conséquence notamment de la réforme des retraites.

Ce triste résultat devrait en toute logique conduire le Président de la République et le patronat à revoir leurs décisions.

 Les politiques d’austérité ça ne marche pas., Les choix de F Hollande de réduire à marche forcée les déficits publics, plombent la croissance et détruisent les emplois.

 

Pour la CGT il faut aussi bien en Europe qu’en France tourner le dos à ces politiques de rigueur budgétaire qui ne font qu’enfoncer les pays dans la récession et les populations dans les difficultés et la misère.

Alors que des nouvelles mesures régressives se profilent sur les retraites ou les allocations familiales il n’est pas question de se laisser faire. 

C’est la raison pour laquelle avec d’autres syndicats, nous appelons à une forte mobilisation mardi 5 mars. En effet ce jour le conseil des ministres va adopter le projet de loi sur la flexibilité voulu par le MEDEF et accepté par certains syndicats.

Ce n’est pas en baissant les salaires ni en facilitant les licenciements contenus dans cet accord que le pays créera des emplois bien au contraire.

 

La CGT appelle tous les salariés, les retraités et les chômeurs à se rassembler le 5 mars prochain devant la préfecture de Bastia à 11 H.

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27 février 2013 3 27 /02 /février /2013 16:56

                                                                Solidarité internationalisteOUTILS TOURNANTS

 

 

 

Ils ont participé au XVème congrès du parti Communiste de la Fédération de Russie 

 (source:N.Maury) 

95 délégations de partis communistes, ouvriers et de gauche, ont pris part au Congrès XVème du Parti communiste (KPRF) - Ils ont participé au XVème congrès du parti Communiste de la Fédération de Russie
Parti communiste d'Abkhazie
Parti communiste d'Azerbaïdjan
Parti communiste d'Arménie
Le Parti communiste du Bangladesh
Parti des travailleurs du Bangladesh
Tribune démocratique progressiste, Bahreïn
Parti communiste du Bélarus
Parti du Travail de Belgique
Le Parti communiste de Bulgarie
Parti des communistes bulgares
Parti communiste ouvrier de Bosnie-Herzégovine
Parti communiste du Brésil
Parti communiste de Grande-Bretagne
Nouveau Parti communiste de Grande-Bretagne
Parti communiste ouvrier hongrois
Parti communiste du Venezuela
Parti Socialiste Unifié du Venezuela
Parti communiste du Vietnam
Parti communiste allemand (DKP)
Parti de gauche, Allemagne
Parti communiste de Grèce
Parti communiste unifié de Géorgie
Parti communiste au Danemark
Parti communiste d'Israël
Parti communiste d'Inde
Parti communiste d'Inde (marxiste)
Parti communiste jordanien
Parti communiste irakien
Parti Toudeh d'Iran
Parti communiste d'Espagne
Parti communiste des peuples d'Espagne
Parti des communistes italiens
Parti de la refondation communiste italien
Parti socialiste yéménite
Parti communiste du Kazakhstan
Parti progressiste des travailleurs de Chypre (AKEL)
Parti communiste chinois
Parti des travailleurs de Corée
Parti communiste de Cuba
Parti communiste du Kurdistan
Parti des communistes de la République kirghize
Parti populaire révolutionnaire du Laos
Parti communiste de Lettonie
Le Parti socialiste de Lettonie
Parti communiste libanais
Parti communiste de Lituanie
Parti communiste de Macédoine
Parti du Progrès et du Socialisme du Maroc
Parti Communiste du Mexique
Parti du Travail du Mexique
Parti des communistes de la République de Moldavie
Parti communiste du Népal (UML)
Parti socialiste des Pays-Bas
Front Sandiniste de libération nationale du Nicaragua
Parti communiste de Norvège
Parti communiste du Pakistan
Parti communiste palestinien
Le parti du peuple palestinien
Parti populaire du Panama
Parti Communiste du Pérou
Parti communiste de la Pologne
Parti communiste du Portugal
Parti communiste de transnistrie
Parti communiste de Serbie
Nouveau Parti communiste de Yougoslavie
Parti communiste syrien
Parti communiste syrien (unifié)
Parti socialiste arabe Baas de Syrie
Parti communiste de Slovaquie
Parti communiste soudanais
Parti communiste du Tadjikistan
Mouvement Ettajdid
Parti communiste du Turkménistan
Parti communiste unifié de Turquie
Le Parti des travailleurs de Turquie (Omer)
Le Parti communiste d'Ouzbékistan
Parti communiste d'Ukraine
Parti communiste des Philippines (1930)
Le Parti communiste de Finlande
Union de la Gauche de Finlande
Parti communiste français
Socialist Workers Party de Croatie
Parti communiste de Bohême et de Moravie
Parti communiste du Chili
Parti communiste du Sri Lanka
Parti communiste d'Estonie
Parti communiste de l'Ossétie du Sud
Parti communiste d'Afrique du Sud
Parti communiste japonais
UCP-PCUS
Fédération Syndicale Mondiale
Conseil mondial de la paix
FDIF
GUE au Parlement européen et à l'APCE

 

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27 février 2013 3 27 /02 /février /2013 16:49

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elezioni-politiche-2013-x-300x290.jpg Élections en Italie : la dégénérescence de la vie politique continue, les communistes au plus bas depuis 1945

 

Article AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

 

Les résultats des élections législatives du 25 février confirment l'Italie comme un laboratoire de la dégénérescence de la vie politique traditionnelle : un centre-gauche aux ordres du capital et de l'UE, des « populismes » canalisant la colère populaire, des communistes effacés.

 

Pour se faire une idée des choix du capital, il suffit de jeter un œil à la Bourse de Milan : indifférente au score du bateleur Grillo, euphorique face au score à la Chambre basse du leader du centre-gauche Bersani puis boudeuse face au retour au Sénat du démagogue Berlusconi.

 

Le programme de la Confindustria (MEDEF italien) est clair : d'une part continuer les « réformes structurelles » et les mesures d'austérité entamées par le « dictateur » européen Monti ; d'autre part sauver l'Euro et approfondir l'intégration européenne.

 

Le choix numéro un du patronat et de l'UE était l'ancien commissaire européen Monti, allié à la démocratie chrétienne de Casini et aux ex-néo-fascistes de Fini, l'alternative gouvernement reste l'ancien ministre de Romano Prodi, Pier-Luigi Bersani.

 

Si l'hypothèse d'un gouvernement d'union Bersani-Monti est en suspens, c'est bien le candidat du capital Bersani qui sort vainqueur de justesse à la Chambre avec 29,7% des voix et 340 sièges (mais 31,6% au Sénat sans majorité), tandis que Monti ne totalise que 10,5% des voix et 46 sièges.

 

Bersani, candidat de la Confindustria (MEDEF italien)

 

Pour la Confindustria et les milieux financiers, l'ex-communiste Bersani est le candidat du « pragmatisme » et de la « rigueur », celui à même de maintenir le cap de l'intégration européenne et de l'austérité.

 

Le programme de Bersani : maintenir l'Italie dans l'euro, défendre les mesures d'austérité de Monti et aller plus loin dans les « réformes structurelles » à commencer par une réforme du travail prévoyant des allègements de cotisations pour les entreprises au nom de la compétitivité.

 

Le parcours de renégat de Bersani est un gage de sûreté pour le capital. Homme d'appareil par excellence, le jeune loup du PCI fait partie de l'aile « centriste » qui pense puis exécute froidement le processus de liquidation du Parti communiste au cours de l'année 1991.

 

Ferme sur ses positions économiques libérales et européistes, Bersani reste le ministre de la privatisation de l'électricité et du pétrole en 1999, sous le gouvernement Prodi I, appliquant à la lettre les directives européennes de libéralisation.

 

Il récidivera en 2006, dans le gouvernement Prodi II, en libéralisant certaines professions fermées (taxis, pharmacies) et ouvrant les transports urbains communaux à la concurrence privée.

 

Alibi de gauche dans son futur gouvernement : Nichi Vendola, l'ancien liquidateur de Refondation communiste, leader du mouvement gay et intégriste catholique, gouverneur des Pouilles loué par l'ex-patronne du MEDEF italien et communiste repenti.

 

Berlusconi, démagogue embarrassant et franc-tireur imprévisible pour le capital européen

 

Dans ce contexte, le retour de Silvio Berlusconi embarrasse les milieux financiers et surtout le grand capital européen, avec un score inespéré de 29% à la Chambre et de 30,6% au Sénat,

 

Franc-tireurservant tantôt les intérêts d'une fraction du capital italien tantôt mû par ses intérêts égoïstes, mais aussi porteur des aspirations contradictoires des petits entrepreneurs : les positions démagogiques du Cavaliere sont bien trop imprévisibles pour le capital et l'UE.

 

Dans son come-back, Berlusconi a alimenté la surenchère anti-européenne. Jouant sur la colère contre la monnaie européenne, Berlusconi a pesté contre l'hégémonie allemande mais s'est bien gardé de se prononcer pour la sortie de l'euro, axant ses palabres sur la ré-orientation de la BCE.

 

Multipliant les invectives contre Mario Monti, l' « Homme de Merkel », Berlusconi ne s'est pas privé de proposer de retirer sa candidature pour se ranger derrière l' « Homme d'Etat » Monti si celui-ci prenait la tête d'une coalition de centre-droit.

 

Sur le plan économique, la surenchère démagogique a battu son plein avec promesses de baisses d'impôts profitant aux entreprises et aux riches : réduction de la TVA, suppression de l'impôt sur les résidences principales (IMU), baisse de l'impôt sur le revenu, exonérations patronales.

 

Pour le capital européen, les promesses démagogiques et inconséquentes de Berlusconi sont un péril dans la période. D'une part parce qu'elles entretiennent un sentiment anti-européen. D'autre part, parce qu'elles rendent impossible l'adoption des futures réformes structurelles.

 

Cette impasse avait en 2009 conduit à la démission forcée de Berlusconi, incapable de mettre en place la réforme des retraites, sous pression de sa base populaire. Le capital européen l'avait alors remplacé par Mario Monti qui a lancé le plus grand plan de rigueur en Italie depuis 1945.

 

« Ni de droite, ni de gauche » : le populisme de Grillo et les dangers du qualunquisme

 

Mais en termes de populisme échevelé, Silvio Berlusconi a peut-être trouvé son maître. Humoriste lui aussi mais volontaire, Beppe Grillo, a su manier l'invective pour fustiger, avec une violence verbale confinant souvent à l'insulte jouissive, la « caste » politique italienne.

 

Avec 25,5% des voix et 110 sièges, il est le grand gagnant du scrutin. Grillo rassemble large, les déçus de tous les bords. Tous unis dans une même rage née de la crise économique, tous unis dans le « Qu'ils s'en aillent tous » de Grillo.

 

Le « Vaffanculo » qui avait été le mot d'ordre qui l'avait fait connaître en 2007, trouve un nouvel élan dans le « Tutti a casa » (tous à la maison) ou « Tutti fuori » (tous dehors), un « Sortez les sortants » à l'italienne.

 

Poujadiste, « qualunquiste » plutôt, ce vieux mouvement de fond de rejet de la politique italienne, axé sur le supposé ressenti de l'italien moyen, mêlant des sentiments contradictoires entre anti politique et anti classe politique, entre anti Etat et anti « gros ».

 

C'est ce qui fait l'unité du mouvement, son dénominateur commun est un rejet de la « classe politique » autour d'un programme suffisamment vague pour satisfaire les déçus de la droite comme de la gauche.

 

« Ni gauche, ni droite : contre la caste politique », le discours de Grillo est porteur en temps de crise, porteur de périls également.

 

Le « Mouvement 5 étoiles » de Grillo est né des mouvements citoyens de base pour l'eau publique notamment, classés à gauche, mais fonctionne désormais sur un rapport organique entre un « chef », tribun et sauveur, et une « masse » subjuguée par ses diatribes enflammées sur les places.

 

Grillo peste avec véhémence lors de ces meetings, crie tout haut ce que le patron du Nord-est, ex-électeur de la Lega Nord, anti-Etat et raciste, ou l'intellectuel précaire du Centre, déçu de la gauche, attaché au service public et à l'écologie, pense de moins en moins bas.

 

Mais Grillo dit tout et son contraire : diminuer les taxes sur les entreprises pour relancer la croissance mais lancer une transition écologique vers la décroissance, défendre certains services publics comme l'eau mais râler contre les syndicats et les fonctionnaires planqués.

 

Sur les questions sociétales, Grillo est le premier à défendre la « démocratie participative » mais dans un rapport quasi personnel avec le chef, il est pour lutter contre la monnaie unique européenne mais aussi contre les vagues d'immigration extra-européennes qui menacent l'Italie.

 

Les positions de Grillo sont l'illustration d'une réelle radicalisation de parties importantes de la population italienne, de classes moyennes déclassées, une population sans repères ni perspective politique cohérentes, sujette à toutes les récupérations populistes et potentiellement réactionnaires.

 

Les communistes au plus bas depuis 1945 : une alliance tactique qui ne paie pas

 

Face à ce tableau désolant d'une vie politique italienne en pleine décrépitude, la nécessité d'un Parti communiste italien fort se fait sentir plus que jamais.

 

Hélas, le choix réalisé par les deux partis communistes italiens (PdCI et Refondation communiste), celui d'un effacement tactique, parrainé stratégiquement par le Parti de la gauche européenne (PGE) ne s'est pas avéré payant électoralement.

 

Les communistes italiens avaient fait le pari, pour revenir au Parlement, de s'effacer derrière une liste unitaire, avec les Verts et le parti centriste « Italie des Valeurs » du juge Antonio di Pietro, une liste menée par le juge anti-mafia (l'Eva Joly italien), l'intègre Antonio Ingroia.

 

Après le fiasco de la tentative liquidatrice de l'équipe dirigeante Bertinotti-Vendola en 2008, avec la Gauche arc-en-ciel qui avait ramené les communistes italiens de 9 à 3% et les avaient exclu du Parlement, les communistes tombent encore plus bas.

 

Avec 2,2% à la Chambre des députés et 1,8% au Sénat pour la « Révolution civile » d'Ingroia, les communistes ne reviendront pas au Parlement. Ils entraînent avec eux le parti centriste « Italie des Valeurs » qui avait réalisé 4,5% des voix en 2008 et obtenu 29 députés.

 

Partant d'un potentiel de près de 9% en 2008, la liste de la « Révolution civile » d'Ingroia tombe à 2% sur les deux chambres, loin des prévisions des sondages plafonnant pourtant à 4-5%.

 

Ingroia et les dirigeants de Refondation communistes ont tout de suite dénoncé le blackout médiatique dont a été victime la liste et ont surtout regretté que le PD n'ait pas pris en compte les propositions d'alliance de la coalition, préférant traiter avec Monti :

 

« Bersani a préféré le choix suicidaire de l'alliance avec Monti plutôt que l'alliance avec nous : pourtant nous lui avions proposé mais il n'a jamais répondu », s'est lamenté Ingroia.

 

Paolo Ferrero, secrétaire de Refondation communiste, a ajouté : « on est resté piégé entre le vote utile de Bersani et le résultat de Grillo : nous avons proposé le dialogue au PD mais la porte est restée fermée ».

 

Nous avions en février dernier exposé nos doutes sur les choix d'alliances électorales des communistes italiens, nos camarades du PdCI avaient désiré défendre une alliance qu'ils percevaient indispensable pour sauver une représentation parlementaire.

 

Les choix tactiques hésitant de nos camarades ont suscité le débat en Italie. Après de nouveau revers électoral, ils continueront sans nul doute à faire débat de l'autre côté des Alpes. Les communistes italiens sont les seuls à juger de leurs orientations stratégiques et tactiques.

 

En tout cas, en Italie comme ailleurs, plus que jamais le peuple a besoin d'un Parti communiste à la hauteur de notre temps pour mener la lutte contre les politiques au service du capital, contre ceux qui les mettent en œuvre à « gauche » et ceux qui tentent de récupérer la colère populaire pour la conduire vers de dangereuses impasses.

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