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CHANTS REVOLUTIONNAIRES

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2 octobre 2012 2 02 /10 /octobre /2012 13:30

                                                                    EUROFRANKENSTEINpg.jpg

 

 

manifestation contre l'austérité dimanche 30 septembre à Paris (DR S.G. l'Humanité.fr)

 - le 2 Octobre 2012

 

120 économistes éreintent le traité budgétaire européen

 

 

"En limitant plus que jamais la capacité des pays à relancer leurs économies et en leur imposant l'équilibre des comptes publics, ce traité est porteur d'une logique récessive qui aggravera mécaniquement les déséquilibres actuels", estiment ces économistes d'un divers horizons.

Parmi les signataires, on trouve Dominique Taddéi, Frédéric Lordon, Jacques Généreux, Paul Jorion, André Orléan, Jean Gadrey, Jean-Marie Harribey, Bernard Friot, Dominique Plihon, Guillaume Etievant et Jacques Rigaudiat.

Cette tribune publiée dans le Monde offre un décryptage sans appel du nouveau traité européen dont l'Assemblée nationale se saisit ce mardi. Elle dresse un réquisitoire sévère:

  • "Contrairement à ce que prétendent les économistes libéraux, cette crise n’est pas due à la dette publique. Ainsi, l’Espagne et l’Irlande subissent aujourd’hui les attaques  des marchés financiers alors que ces pays ont toujours respecté les critères de Maastricht".
  • "La montée des déficits publics est une conséquence de la chute des recettes fiscales due en partie aux cadeaux fiscaux faits aux plus aisés, de l’aide publique apportée aux banques commerciales et du recours aux marchés financiers pour détenir cette detteàdes taux d’intérêt élevés".
  • "La crise s’explique également par l’absence totale de régulation du crédit et des flux de capitaux aux dépens de l’emploi, des services publics et des activités productives."
  • Le texte relève que cette crise est aggravée par la Banque centrale européenne, qui préfère soutenir les banques que les Etats et imposer à ces derniers l'austérité,

Elle met en cause François Hollande qui, "après s'être engagé pendant la campagne à renégocier le traité européen, n'y a en fait apporté aucun changement et choisit aujourd'hui de poursuivre la politique d'austérité entamée par ses prédécesseurs. C'est une erreur tragique". Pour ces économistes, le pacte de croissance"aux montants réels dérisoires" ne justifie pas l'acceptation de la Règle d'or

"Briser l'étau des marchés"

"Le constat est sans appel: l’austérité est à la fois injuste, inefficace et antidémocratique. Nous pouvons faire autrement. L’avenir de l’Europe mérite un débat démocratique sur les solutions de sortie de crise", note le texte qui conclut: "Il faut briser l'étau des marchés financiers et non leur donner des gages."

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2 octobre 2012 2 02 /10 /octobre /2012 12:51

                                                                                     drapeau rouge

                                                                             

Communiqué de presse de l’UCR-CGT

 

La solidarité intergénérationnelle OUI, l’impôt NON !

 

 

L’Union Confédérale des Retraités CGT est opposée au choix du Gouvernement de créer une contribution supplémentaire de 0,15% sur les revenus imposables des retraités.

Selon le Gouvernement, cette contribution servirait à financer la CSA (contribution de solidarité mise en place par le Gouvernement Raffarin après la canicule de 2003), puis, à partir de 2014, pour financer le futur projet de Loi sur la dépendance.

Ce qui revient à dire clairement que cette Loi sera financée par l’impôt et non par les cotisations sociales.

Cette Loi ne se fera donc pas dans le cadre de la Sécurité sociale, sauf à ce que dans le futur, la Sécurité sociale soit financée par l’impôt.

De plus, des milliers de retraités seront, pour la première fois, imposables en 2013, du fait du gel du barème sur l’impôt, cela après le gel voulu par le précédent Gouvernement (Fillon) pour l’année 2012.

Le pouvoir d’achat des retraités subit et subira une véritable baisse.

Si cette contribution serait demain de 0,15%, de combien sera-t-elle dans les prochaines années ? N’oublions pas que les taux d’imposition sont révisables annuellement. De plus, une contribution de 0,15% pour les retraités et de 3% pour les salariés, cela est nettement insuffisant pour financer une véritable aide à l’autonomie et faire face à cet enjeu de société.

Les retraités ont dès lors une raison supplémentaire de manifester leur mécontentement le 11 octobre prochain.

 

Montreuil, le 1er octobre 2012

 

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2 octobre 2012 2 02 /10 /octobre /2012 12:40

                                                  

                                                                                            drapeau rouge

                

Le 9 octobre agissons pour l’emploi et contre la vie chère.LA-CGTSIGLE2.jpg

 

Les syndicats européens organisent une journée de mobilisation pour la défense de l’emploi et de l’industrie. La CGT de Corse s’inscrit dans cette initiative en y ajoutant la question de la vie chère qui frappe durement une grande majorité de la population de l’île.

 

L’austérité proposée par le Traité Européen que s’apprête à voter le parlement va créer 300 000 chômeurs supplémentaires. Ratifier et appliquer ce Traité aggravera la récession économique sans réduire les déficits publics. La Grèce, l’Espagne ou le Portugal qui suivent ces recommandations connaissent une explosion de la pauvreté mais aussi de la dette.

Pour la CGT, il est temps de tourner le dos aux politiques qui ruinent les peuples et rapportent des dividendes records aux actionnaires des grandes entreprises et des profits scandaleux pour une minorité de privilégiés.

 

Ça suffit ; Ensemble exigeons :

·        La diminution par 2 des dividendes qui permettrait de consacrer 120 milliards par an pour les investissements productifs, la création d’emplois et la protection sociale.

·        Conditionner toute aide publique aux entreprises à des contreparties en matière d’emploi et de salaires.

·        Stopper les suppressions d’emplois et créer de nouveaux postes dans les services publics. Pour la Corse, rétablir les 1000 emplois supprimés depuis 2007 avec la RGPP.

·        Pénaliser les entreprises qui abusent de contrats précaires.

·        Maintenir l’emploi en cas de difficultés conjoncturelles des entreprises. Mettre fin aux licenciements abusifs comme une grande partie des 2000 ruptures conventionnelles annuelles en Corse.

·        Le blocage des prix en Corse (alimentaire et carburant) comme le gouvernement s’apprête à le faire pour l’outremer. 

 

Contrairement à ce que prétend le patronat ce n’est pas le travail qui coute cher. Un salarié sur deux gagne moins de 1500 euros net. Continuer à précariser l’emploi et bloquer les salaires enfoncera la pays dans la récession économique. Ces vieilles recettes nous conduisent dans l’impasse économique et sociale. Il faut en changer en Corse dans le pays et en Europe.

 

La CGT appelle tous les salariés, chômeurs et retraités à se mobiliser le 9 octobre et à se rassembler

à 10H30 devant la préfecture.

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30 septembre 2012 7 30 /09 /septembre /2012 18:02

 

                                                                      MARE NOSTRUM-copie-1 

 

  Tunisie : colère et indignation après le viol d’une femme par des policiers

samedi 29 septembre 2012

Indignation, colère et dégoût se lisaient sur tous les visages à Tunis lors d’un rassemblement de protestation contre le sort d’une Tunisienne violée par des policiers et menacée de poursuites par la justice.
Sous un tableau de femme nue à l’entrée d’un petit théâtre privé, militants, artistes, étudiants ou femmes au foyer se bousculaient vendredi soir pour dénoncer le viol qui a fait scandale en Tunisie.
"Choquant, révoltant, dégoûtant !", crie une femme au foyer répondant à l’appel d’un collectif d’ONG féminine et de défense des droits de l’Homme.
La jeune femme violée début septembre par deux agents de police alors qu’elle se trouvait avec son ami, a porté plainte avant de se voir convoquer par un juge pour "atteinte à la pudeur", un délit passible de six mois de prison.
Selon le ministère de l’Intérieur, le couple a été appréhendé le 3 septembre dans une "position immorale". Deux agents avaient alors violé la femme pendant qu’un troisième retenait le fiancé menotté. Les trois policiers ont été incarcérés.
"Je suis indigné par le cours que prend cette affaire et d’autant plus choqué de voir que les violeurs sont deux agents des forces de l’ordre censés protéger les citoyens. Le pire c’est que la victime se retrouve sur le banc des accusés", renchérit Jamel Bouslama, un médecin défenseur des droits de l’Homme.
Selon lui, "le gouvernement est gêné par l’immense courage de la jeune femme qui a osé porter plainte". Et de saluer "la vitalité de la société civile post-révolution qui lutte contre la violence qu’elle soit le fait de la police ou des salafistes".
"Je viens partager un sentiment de profonde indignation et dénoncer les tentatives de justifier un acte infâme", lâche Lobna Jridi, députée de gauche à l’Assemblée nationale constituante, exprimant sa "stupeur de voir comparaître une femme victime de viol et torture sous prétexte d’atteinte à la pudeur".
"Un verrou a sauté, le silence a été brisé autour de la violence faite aux femmes, mais aussi aux hommes, ajoute-t-elle, soulignant la responsabilité des élus à édicter des lois conformes à l’esprit de la révolution.
"Je suis ahurie, de quelle pudeur parle-t-on pour justifier la sauvagerie de flics malades ? Jamais plus je ne m’arrêterai à un contrôle policier", lance une une étudiante anonyme venue "saluer le courage" de la femme violée.
Emna Mnif du mouvement Kolna Tounes évoque "une logique qui se confirme de jour en jour : à chaque fois que quelqu’un ose lever la tête ou contester il se transforme en accusé !", déplore-t-elle.
"On a vraiment peur, c’est peut-être la partie visible de l’iceberg, parler de viol est difficile", lance l’actrice Martine Gafsi.
"Nous devons lutter pour les libertés individuelles parce qu’il y a une dictature islamiste qui est en train de s’instaurer", met-elle en garde, dénonçant le harcèlement des femmes pour leur tenue vestimentaire ou leur mode de vie.
Le ministère de la Justice a justifié les poursuites à l’encontre la femme violée et, au sein du gouvernement dominé par le parti islamiste Ennahda, seule la ministre de la Femme, Sihem Badi (gauche), a franchement condamné le viol.
"Être fidèle à la révolution, c’est apporter protection et assistance à la victime", a-t-elle indiqué, louant le courage de la victime pour avoir dénoncé ses agresseurs.
Pour Raja Ben Slama, universitaire féministe, "il faut séparer le juridique du moral, sinon c’est le fascisme qui s’installe".
Le 2 octobre, la jeune femme violée et son compagnon se rendront de nouveau devant le juge d’instruction, alors les ONG locales et internationales ont appelé à l’arrêt des poursuites les concernant.

(29 Septembre 2012 - Avec les agences de presse)

 "Assawra"

 

Comment disait-il , le porte parole  du parti Ennahda, Samir Dilou, le 18 mai dernier?

« Nous ne voulons pas une théocratie. Nous voulons un État démocratique qui se caractérise par l'idée de la liberté. Le peuple doit décider par lui-même comment il vit [...] Nous ne sommes pas un parti islamiste, nous sommes un parti islamique, qui obtient aussi sa direction par les principes du Coran. »

 Un Etat démocratique? Mais pour qui?

                                                         U Cursinu Rossuu-cursinu-rossu.jpg

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30 septembre 2012 7 30 /09 /septembre /2012 15:38

                                                                     MARE NOSTRUM-copie-1

 La révolution et après ?

site:Respublica

Mercredi 19 septembre 2012
Par Rabâa Ben Achour-Abdelkéfi
Rabâa Abdelkéfi est née en 1948 à La Marsa (Tunisie). Agrégée et docteur en Lettres et Civilisation françaises, elle a enseigné à l'université de Tunis. Auteur de nombreux articles sur les littératures maghrébines à l'époque coloniale, elle a publié par ailleurs un essai, Appropriation culturelle et création littéraire (Sud Éditions - Maisonneuve et Larose, 2005) et un roman, Bordj Louzir, un temps à deux voix (Sud Éditions, 2010), Prix Comar spécial du jury. Aux éditions elyzad, est parue sa nouvelle "La fille du Cadi", in Enfances tunisiennes (2010).
 
 

Qui sont ces étranges personnages qui sillonnent nos rues, arborant à dessein une inélégance recherchée et une arrogante agressivité ? Sourcil froncé, barbe hirsute, front marqué du sceau de la dévotion, sûrs d’eux-mêmes comme de la mission qu’ils se sont assignée, ils jugent, menacent, corrigent, s’il le faut, par le bâton, le couteau et l’épée, ceux qui savent encore créer, penser et aimer. 

« Ce sont des Tunisiens, nous apprend M. Rached Ghannouchi, président du parti islamiste, Ennahdha. Ils ne viennent pas d’une autre planète ! » Certes. Je me frotte les yeux et je me dis : « Mais alors, viendrais-je, moi, d’une autre planète ? Mon pays, celui de mes parents et de mes aïeux, ne serait donc pas la Tunisie ? »

Le 23 octobre 2011, en effet, la géographie de notre monde change. Ce jour-là, une étoile éclaire le ciel tunisien. Le futur chef du gouvernement, M. Hamadi Jébali, la voit. Il en décrypte aussitôt le sens et en explicite la portée : Dieu a désigné les braves, ils devront œuvrer à l’éveil et à l’unification du monde musulman, mieux encore, à l’instauration du VIe Califat rachidien. Programme ambitieux et peu réaliste. Mais, l’ordre vient de Dieu et nul ne peut le négliger.

Malgré sa fatigue et son vieil âge, la Tunisie se plie alors au commandement. Horrifiée désormais par la proximité de l’Europe, terre honnie de Dieu, dont on peut user, telle une fille de joie, et que l’on peut donc, en toute conscience, lapider, la Tunisie se détache de la vieille Afrique.

Oubliant sa révolution de la misère, ses morts, ses blessés, ses revendications sociales, son aspiration à la liberté, elle avance, cahotante, à la recherche du lieu que nulle autre culture et nulle autre civilisation n’ont souillé de leurs empreintes. L’Arabie fascine, les Émirats et le Qatar aussi. On aime leur jeunesse, leur engourdissement intellectuel, on aime leur puissance, leur richesse, leur tapageuse dévotion, leurs lois charaïques, leurs femmes encapuchonnées, la prodigalité de leurs princes et leurs voitures rutilantes, le tracé de leurs larges avenues, l’accent traînant de leurs habitants et leur « onctuosité pateline ». Eux au moins, n’ont pas été dépossédés par l’Occident de leur culture et de leur religion. Il ne leur a pas insufflé le venin du doute et du rire malfaisant. Chez eux, on ne chante pas, on ne danse pas, on ne peint pas, et, si par mégarde un mauvais génie s’amuse à les pousser à enfreindre la loi, ce n’est pas grave : ils se cachent. Le mal, comme chacun sait, est contagieux. Hommes du désert, ils attaquent sans détours. Ils dédaignent le langage allusif tissé de mots, d’images ou de dessins. Leurs principes sont clairs et tout simples. Ils s’énoncent en deux mots : al-haram et al-halal (le « licite » et l’ « illicite ») et ils ont la netteté des lames, des couteaux et des épées qui sanctionnent leur manquement.

La révolution tunisienne est confisquée, et si bien confisquée que l’enthousiasme a cédé sa place au découragement. La déception et l’amertume marquent aujourd’hui les physionomies et les conversations des Tunisiens. La peur resurgit, avec ses sœurs, l’autocensure et la délation. Bon nombre de nos concitoyens se demandent si la nouvelle Constitution verra le jour, si le pays ne court pas vers la guerre civile et s’il n’avance pas à reculons. Il y a quelques mois seulement, instruits par leur malheureuse expérience, nos amis algériens nous prédisaient un avenir similaire à leur passé, fait de violence et de haine. Nous jugions alors leurs propos absurdes et leur méconnaissance de notre pays avérée.

Aujourd’hui, nous les écoutons et nous nous disons : peut-être avaient-ils raison, car notre révolution n’appartient plus désormais à ceux qui l’ont faite, à ceux qui ont souffert de l’exclusion, de l’indigence matérielle, culturelle et morale, elle a été captée par ceux qui, se réclamant de l’islam politique, avaient été muselés, emprisonnés, torturés, sous le régime de Zine Al-Abdine Ben Ali.

Certes la répression dont ont été victimes les islamistes est sans aucun doute condamnable, et il ne viendrait à l’esprit d’aucun démocrate digne de ce nom de contester le droit de chacun à la libre expression de ses idées et de ses convictions politiques. Mais la mainmise de la Nahdha sur les institutions et les rouages de l’État – mainmise condamnée au demeurant par le président de la République lui-même –, sa volonté de détruire tout contrepouvoir, de museler tout contestataire, sa complaisance manifeste envers la terreur salafiste qu’elle couvre, voire la protection qu’elle lui accorde, ne peuvent ni se justifier ni être acceptées.

La Nahdha s’est imposée en toute légitimité. Nul ne le discute. Mais son relatif succès électoral l’autorise-t-il à laisser déferler des hordes de djihadistes qui s’appliquent à défigurer le paysage urbain, à annihiler toute différence ethnique, religieuse ou culturelle et à détruire les institutions ? Telle une secte, ces derniers formatent les esprits des enfants, distillant la haine et libérant une malsaine libido. Si un simple regard masculin sur une chevelure féminine ou un bras dénudé les indispose au point qu’il justifie l’enfermement des femmes, des jeunes filles et parfois même des petites filles derrière voiles et niqab, cela révèle une société malade.

Le gouvernement nahdhaoui de la troïka –l’a-t-on assez répété ? – est légitime. Cela est admis. Mais ce bon droit repose sur des discours fallacieux. Défenseurs d’un islam qui, selon leurs allégations, fut menacé, voire anéanti par Habib Bourguiba puis par Zine Al-Abdine Ben Ali, les nahdhaouis auraient été alors peu soutenus par une société civile qui, de par son silence, se serait rendue complice des exactions de la dictature1 .

Cette argumentation, somme toute habile puisqu’elle permet de culpabiliser une frange de la société civile – dont la résistance à la dictature n’est pourtant pas à démontrer (ATFD, AFTURD, LTDH, CNLT) – tout en sensibilisant une autre partie de la société au faux problème de la perte identitaire, nécessite aujourd’hui une mise au point.

Il semble abusif et même inexact d’affirmer une absence soutien de la société civile, comme ne cessent de le déclamer les constituant(e)s nahdhaoui(e)s, l’existence même du Collectif du 18 octobre 2005 pour les droits et les libertés et de sa plateforme est une éloquente démonstration2 . Rappelons, par ailleurs, que la répression n’était jamais relayée par les médias et que l’islam politique se réclamait alors d’aller à l’encontre des principes démocratiques. Le programme politique du Mouvement de la tendance islamique (MTI), devenu Ennahdha, en 1989, n’a pas laissé que de bons souvenirs.

En Tunisie, l’islam n’a jamais été menacé et il est déloyal de le nier. Contrairement aux déclarations de M. Rached Ghannouchi, Zine Al-Abdine Ben Ali a bien plutôt renforcé la pratique religieuse. En 1988, il réinstaure la ro’yya3 ainsi que l’appel à la prière sur les chaînes de radio et de télévision. Les cérémonies religieuses étaient célébrées en grande pompe. Toutes ces pratiques n’étaient évidemment que calculs politiques et si elles relevaient, tout comme les enseignements des « salafistes », du pur formalisme, elles n’en révèlent pas moins l’enracinement évident de l’islam en Tunisie et la nécessité pour tout politique de compter avec cette réalité.

Habib Bourguiba, qui est aujourd’hui diabolisé, n’a jamais rejeté l’islam et en a fait son cheval de bataille contre le colonialisme. Lorsqu’en 1961, il a incité les Tunisiens à ne pas observer le jeûne, il a eu recours au langage religieux. N’a-t-il défini le travail et la lutte contre le sous-développement comme une forme de « djihad » suprême ? Et malgré son incontestable autorité, sa notoriété et la légitimité que lui avait conférées la lutte nationale, il fut alors contesté.

Ni les nahdhaouis, ni les dits « salafistes » ne peuvent prétendre aujourd’hui avoir pour mission de redonner force et brio à l’islam, en Tunisie. La religion musulmane y est déjà fortement implantée et la société tunisienne se montre d’ailleurs plutôt conservatrice. Ce traditionalisme séculaire a été entretenu et consolidé par la dictature de Ben Ali qui, deux décennies durant, s’est attaché à tuer la vie culturelle, à dévaloriser l’enseignement, les examens et les diplômes. Les islamistes veulent démontrer que l’islam est menacé. Je ne le crois pas, ou je crois plutôt qu’il n’est menacé que par ces nouveaux musulmans, par leur ignorance affichée, par leur refus de réfléchir et s’instruire. Persuadés qu’ils n’ont rien à apprendre qu’ils ne savent déjà, ils s’érigent en donneurs de leçons, en prédicateurs, usant du verbe, des menaces et des armes, pour islamiser un pays déjà musulman.

Les islamistes, à vrai dire, ne tentent pas d’islamiser la société. Ils savent bien qu’elle est musulmane – parfois même jusqu’au fanatisme et à la xénophobie.

Mais ils s’appliquent à réduire les libertés, à uniformiser la société, à achever l’œuvre d’abêtissement que Ben Ali n’a pas eu le loisir d’achever.

La Tunisie fait piètre mine aujourd’hui. Le déclin de ses institutions apparaît au grand jour, avec pour signe le délabrement de ses rues, de ses édifices, de ses commerces et même l’accoutrement fantasque de ses hommes et de ses femmes.

Gravats et ordures ménagères souillent villes et villages, plages et campagnes de la Tunisie. Le pays croule sous le poids de ses déchets et étouffe dans son air vicié. Y a-t-il un petit bout de terrain nu, un rond point ou un bas-côté ? on le convertit aussitôt en décharge. Personne ne s’en offusque : on se contente de balayer devant sa porte. Là où s’amassent des monticules d’immondices, un cafetier dresse sa terrasse : la clientèle s’en accommode. On sirote son café, on fume son narguilé. La saleté, on ne la voit plus ; les odeurs nauséabondes, on ne les sent plus. Mouches et moustiques peuvent toujours tournoyer, on les chasse d’un revers de la main. Le Tunisien est conciliant et ce n’est pas une légende.

On s’habitue à tout, on s’accommode de tout mais il est peu probable que les Tunisiens plient devant la terreur et se résignent à n’être plus eux-mêmes.

Tunis le 28/08/2012

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30 septembre 2012 7 30 /09 /septembre /2012 15:26

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                                                                                    AUTORITE PALESTINE

 

La Palestine veut devenir Etat non membre de l’ONU d’ici la fin de l’année

vendredi 28 septembre 2012, par La Rédaction

Le président palestinien Mahmoud Abbas a lancé une campagne pour que la Palestine obtienne à l’ONU le statut d’Etat non membre d’ici la fin de l’année afin de "sauver les chances de paix" avec Israël, selon la dirigeante de l’OLP Hanane Achraoui.
Ce projet, dénoncé par Israël et les Etats-Unis, pour lesquels un Etat palestinien ne peut résulter que d’un accord de paix, devrait néanmoins être présenté après l’élection présidentielle américaine du 6 novembre, afin de ne pas gêner le futur occupant de la Maison Blanche, quel qu’il soit.
A la tribune des Nations unies, le président palestinien a souhaité jeudi "que l’Assemblée générale adopte une résolution considérant l’Etat de Palestine comme un Etat non membre des Nations unies pendant cette session", qui se termine en septembre 2013.
"Nous sommes confiants que la grande majorité des pays du monde soutient notre initiative, qui vise à sauver les chances d’une paix juste", a-t-il ajouté. Pour être adoptée, la résolution doit être votée par plus de la moitié des 193 Etats membres à l’Assemblée générale, où elle est assurée d’une large majorité. Cette initiative promise au succès marque un recul par rapport à la demande historique d’adhésion de la Palestine en tant qu’Etat à part entière, déposée le 23 septembre 2011 par M. Abbas, qui avait dominé la session de l’Assemblée générale il y a un an.
Les dirigeants palestiniens ont renoncé, faute de la majorité requise de neuf voix, à demander un vote au Conseil de sécurité, où les Etats-Unis avaient prévenu qu’ils utiliseraient leur droit de veto si nécessaire.
"La plupart des gens tablent sur une finalisation des consultations d’ici la fin de l’année. D’autres ont suggéré que nous visions le 29 novembre, date de la Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien", a indiqué vendredi Hanane Achraoui, membre du Comité exécutif de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP).
"Le président a dit ouvertement qu’il ne présenterait pas la résolution avant les élections américaines", a souligné la responsable de l’OLP lors d’une conférence de presse à Ramallah (Cisjordanie).
"Nous avons perdu la dynamique de l’année dernière, au Conseil de sécurité", a-t-elle reconnu.
"Nous avons atteint un stade critique. Israël a été autorisé à saper la solution à deux Etats, à tel point que ceci est un ultime effort des Palestiniens pour essayer de sauver les chances de paix et la solution à deux Etats", a averti Mme Achraoui.
Mahmoud Abbas a dénoncé la recrudescence des "attaques par des milices terroristes" de colons israéliens, "en collusion complète avec les forces d’occupation et le gouvernement israélien", accusant celui-ci de "rejeter la solution à deux Etats".
S’exprimant peu après lui, dans son discours presque exclusivement consacré à la crise nucléaire iranienne, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a fustigé "les discours diffamatoires et (...) les déclarations unilatérales d’Etat qui ne résoudront pas notre conflit".
Il a pressé M. Abbas de "négocier pour parvenir à un compromis mutuel, dans lequel un Etat palestinien démilitarisé reconnaîtrait le seul et unique Etat juif".
Les dirigeants palestiniens exigent pour reprendre les pourparlers de paix, interrompus depuis deux ans, qu’Israël cesse la colonisation des territoires occupés depuis 1967 et accepte les lignes antérieures à la guerre de juin 1967 comme base de discussions.
Le gouvernement israélien rejette ces revendications et dit vouloir des négociations "sans condition préalable", en leur fixant pour objectif la reconnaissance d’Israël comme "Etat du peuple juif" et le maintien sous son contrôle d’une partie du futur Etat palestinien, des exigences refusées par les Palestiniens.

 

                                    site: As asawra

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30 septembre 2012 7 30 /09 /septembre /2012 15:07

 

 


 

C'est un joli nom Camarade
C'est un joli nom tu sais
Qui marie cerise et grenade
Aux cent fleurs du mois de mai
Pendant des années Camarade
Pendant des années tu sais
Avec ton seul nom comme aubade
Les lèvres s'épanouissaient
Camarade Camarade

C'est un nom terrible Camarade
C'est un nom terrible à dire
Quand, le temps d'une mascarade
Il ne fait plus que frémir
Que venez-vous faire Camarade
Que venez-vous faire ici
Ce fut à cinq heures dans Prague
Que le mois d'août s'obscurcit
Camarade Camarade

C'est un joli nom Camarade
C'est un joli nom tu sais
Dans mon coeur battant la chamade
Pour qu'il revive à jamais
Se marient cerise et grenade
Aux cent fleurs du mois de mai

 

 

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30 septembre 2012 7 30 /09 /septembre /2012 14:42

                                                                           CERVEAU.gif

 

 

 
De la morale à la politique chez Rousseau
L’intervention d’Yvon Quiniou lors du colloque « Rousseau, l’art et la nature »

Mon propos a un objet très précis, que je ne peux mieux résumer qu’en citant Rousseau lui-même affirmant, dans l’Emile, que « ceux qui voudront traiter séparément la politique et la morale n’entendront rien à chacune des deux » [1]. Il y a là un problème philosophique essentiel selon moi, que l’on peut aborder en dehors de son œuvre (à partir de Kant, par exemple), mais dont il nous en a donné une formulation exemplaire et auquel il a fourni une réponse qui constitue plus qu’une référence incontournable : une vérité irrécusable. Deux textes suffiront pour ma démonstration, qu’on n’a pas toujours lus comme je le fais : le Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes et le Contrat social, qui sont rigoureusement complémentaires dans l’optique, justement, de la relation réciproque de la morale et de la politique, au sein de laquelle l’idée de « nature » joue un rôle crucial – même si je me réfèrerai aussi à son article Economie politique de l’Encyclopédie [2].

Le Discours

Le Discours fait intervenir doublement cette idée. D’une part, cherchant l’origine des inégalités sociales, il brosse à grands traits une genèse historique de celles-ci à partir de l’hypothèse d’un « état de nature » initial. J’y insiste : ce n’est là qu’une hypothèse, une fiction théorique si l’on veut, assumée comme telle par lui puisqu’il affirme d’emblée : « Commençons par écarter tous les faits » [3] – ce qui fait qu’on ne saurait lui objecter son irréalité ou lui reprocher, comme Voltaire, de vouloir y ramener l’humanité. Fiction donc, qui a une fonction intellectuelle très précise et originale. Comme il entend comprendre le statut des inégalités en se demandant si elles sont ou pas naturelles, inhérentes à l’homme, et dans quelle proportion, il a besoin de concevoir ce qu’est l’homme par nature, abstraction faite des influences que la société a exercées sur lui et qui l’ont transformé. Or ce n’est pas en enquêtant sur l’homme social, dit-il avec raison, qu’il pourra le savoir puisque celui-ci, le seul dont la réalité soit attestée, est largement construit et donc artificiel, tel « la statue de Glaucus » qui, roulée et transformée par les flots et les alluvions, ne laisse pas deviner son visage originel. Et il ne peut pas non plus recourir à des expériences que l’on pourrait faire en société pour le savoir, faute, disons, d’une psychologie ou d’une anthropologie scientifique suffisamment développée mais dont, avec une extraordinaire lucidité, il anticipe la possibilité à venir [4]. Il est donc contraint de se rabattre sur la réflexion et ses « conjectures » et, surtout, d’imaginer un homme vivant à l’état de nature, hors société, c’est-à-dire dans un état au sein duquel, précisément, l’influence de la société n’a pas encore opéré et qui peut donc nous montrer ce qu’est l’homme par nature. En d’autres termes : la référence à un état de nature hypothétique a une fonction théorique essentielle, celle de nous révéler la nature humaine puisque celle-ci nous est masquée par l’état social, et il a conscience de la difficulté de la tâche, indispensable pourtant : « Car ce n’est pas une légère entreprise de démêler ce qu’il y a d’originaire et d’artificiel dans la nature actuelle de l’homme, et de bien connaître un état qui n’existe plus, qui n’a peut-être point existé, qui probablement n’existera jamais, et dont il est pourtant nécessaire d’avoir des notion justes pour bien juger de notre état présent. » [5] Mais cette référence a une autre fonction, hétérogène à la première. Car pour Rousseau il ne s’agit pas seulement de comprendre l’origine des inégalités mais de savoir si elles sont fondées – à quoi fait clairement allusion la seconde partie du titre parlant de leurs « fondements ». Or cette question n’est plus factuelle mais normative et elle renvoie à une problématique fréquente à l’époque, celle du « droit naturel », des droits que l’homme possède par nature (tel que Dieu l’a fait, éventuellement), problématique dont Rousseau fait expressément mention dans sa préface et à laquelle il se réfèrera tout à la fin de son ouvrage [6]. Il s’agit ici de juger les inégalités sociales, de savoir si elles sont légitimes, normales, c’est-à-dire conformes au « droit naturel » – lequel est alors institué en norme morale du jugement en tant qu’il exprimerait ce qu’on appelait alors la « loi naturelle » ou la « loi de nature », qui prescrit ce que doit être le comportement humain. Rousseau assume pleinement cette problématique et s’il entend enquêter sur la nature de l’homme, c’est justement pour proposer « la véritable définition » (je le cite) de ce droit et donc éliminer les confusions qui règnent dans ce domaine faute d’une connaissance exacte de ce qu’est l’homme [7]. On voit alors le statut de l’état de nature changer et l’extraordinaire ambition de Rousseau se (re)formuler. L’état de nature cesse d’être un fait (même hypothétique) pour devenir une norme permettant d’apprécier critiquement la société ; et l’enquête de simple réflexion anthropologique anticipant un savoir éventuel à venir, s’arrache à la factualité ou à la seule dimension théorique et se fait franchement réflexion critique, morale et politique, les deux ensemble. Rousseau conclut d’ailleurs sa préface en parlant des « recherches morales et politiques auxquelles donne lieu l’importante question[qu’il ]examine » et il les inscrit dans l’horizon d’un projet d’amélioration substantielle de la société, d’où pourrait résulter le bonheur de l’homme [8].

Quel est alors cette condition de l’homme à l’état de nature, en n’oubliant pas le point suivant : ses caractéristiques doivent être pensées comme des caractères de l’homme lui-même conçu dans sa nature profonde et, plus encore, comme des données auxquelles il a droit ou pour lesquelles il est fait – un peu comme dans la Déclaration de 1789, inspirée d’ailleurs de Rousseau, où la liberté et l’égalité humaines que son premier article proclame solennellement ne sont pas des déterminations que l’on constaterait empiriquement ou qu’on penserait seulement intellectuellement, mais des qualités qui, par une alchimie théorico-pratique, sont inscrites ou, pour parler comme Ricœur, sont « ascrites » dans l’essence de l’homme [9] : ce sont des propriétés normatives et donc des droits indiquant la manière dont nous devons traiter les hommes, et cet énoncé initial doit être dit performatif et non descriptif. On peut repérer quatre caractéristiques, sachant qu’il s’agit d’un état de quasi solitude puisque, une fois les enfants procréés et élevés, l’homme retrouve son indépendance :
1 L’homme est bon ou vertueux, ou encore moral – même si l’on trouve que ce terme ne convient pas vraiment : l’alternative du mal ne se présentant pas, la notion de bien et celle de mérite moral semblent disparaître ; on peut alors, si l’on préfère, parler d’innocence pré-morale (comme on le fait pour l’enfant). En tout cas – car les analyses de Rousseau sont toujours très fines –, lorsqu’il arrive à l’homme de rencontrer un autre homme, il ne se comporte pas à son égard en méchant porté à l’agresser selon lui, il est seulement sur la défensive et, dit superbement le Discours, « farouche ». Les deux sentiments fondamentaux que Rousseau lui attribue alors sont « l’amour de soi » – sentiment parfaitement légitime, qui définit l’amour que toute créature vivante, dotée de sensibilité, se porte à elle-même et qui la porte à se conserver en vie – et la pitié, sentiment naturel et spontané face à la souffrance d’autrui et, plus largement, face à celle d’un être sensible, qui nous amène à lui venir en aide. Je précise que l’amour de soi est différencié fortement de « l’amour propre », sentiment négatif, qui n’a lieu qu’en société puisqu’il consiste, comme chez La Rochefoucauld, à se comparer aux autres et à se préférer à eux. C’est un synonyme de l’égoïsme et il se déploie aussi dans le domaine de l’imagination et grâce à elle puisqu’il fait intervenir l’image que l’on se fait de soi [10]. En tout cas, rien ici qui s’apparenterait à une méchanceté innée, à une violence native, à une propension à la domination ou à l’exploitation, ou encore à une volonté de puissance (comme chez Nietzsche) qui feraient de l’homme « un loup pour l’homme » et qui aboutissent à « naturaliser » la violence et les inégalités sociales, donc à nous les faire concevoir comme inévitables. Rousseau va attribuer tous ces défauts à la société elle-même et il polémique avec Hobbes pour avoir conféré à l’homme naturel ce qui suppose la société et en résulte.
2 L’homme est libre, non au sens où il disposerait d’un libre arbitre et d’une capacité de choisir ses actes sur la base d’une réflexion, mais au sens où il est indépendant et ne connaît pas la contrainte d’autrui : c’est l’état de quasi solitude qui lui garantit cela et c’est donc une liberté-spontanéité. Les seules contraintes qu’il connaît sont celles de la nature et de sa survie, mais elle ne nient en rien son indépendance, surtout si l’on admet que la faiblesse de ses besoins et de ses désirs ne le rend pas esclave de la nature pour les satisfaire.
3 L’homme connaît aussi l’égalité. Point important, on le devine, pour son projet politique (comme la liberté, d’ailleurs) et qu’il faut bien comprendre. Car Rousseau n’est pas un égalitariste absolu qui nierait toute inégalité naturelle entre les hommes. Bien au contraire, il distingue clairement deux types d’inégalité [11]. Il y a l’inégalité qu’il appelle « morale ou politique », qui se manifeste en inégalités de fortune, de propriété, de pouvoir, de statut symbolique, dont la source est largement due à la société et qui sont légitimées et codifiées par elle ; il y voit des « privilèges » qui n’existent qu’en portant préjudice à autrui. Mais il y aussi l’inégalité « naturelle ou physique » dont la source, par définition, ne peut être que la nature et qui se manifeste, elle, dans les différences d’âge, de santé, de force, mais aussi dans les différences des qualités intellectuelles ou morales des individus. Et sans nier dogmatiquement toute influence des inégalités naturelles sur les inégalités sociales, il refuse catégoriquement d’introduire une correspondance terme à terme ou une proportionnalité stricte entre les premières et les secondes et il critique vivement ceux qui voudraient chercher « quelque liaison essentielle entre les deux » [12]. Il maintient expressément que les inégalités sociales, au sens où on les trouve dans la société, viennent largement de cette société et il indique que, de plus, elle renforcent artificiellement les conséquences des inégalités naturelles : « Il est aisé de voir qu’entre les différences qui distinguent les hommes, plusieurs passent pour naturelles qui sont uniquement l’ouvrage de l’habitude et des divers genres de vie que les hommes adoptent dans la société » et il précise ensuite que « non seulement l’éducation met de la différence entre les esprits cultivés, et ceux qui ne le sont pas (première influence – Y. Q.), mais elle augmente celle qui se trouve entre les premiers à proportion de la culture » (deuxième influence, qui renforce les différences naturelles – Y. Q.) [13]. Il n’empêche que les inégalités naturelles existent : en quoi peut-on parler alors d’une égalité naturelle des hommes – que l’on va ensuite convertir en exigence politique ? Tout simplement parce que l’état de nature excluant la relation à autrui, il rend vain l’existence de ces inégalités en annulant leur effet, puisque cet effet étant un effet comparatif, relationnel, il suppose le lien social et l’ensemble des productions sociales. C’est ainsi que la supériorité de beauté ou d’intelligence ne peut se manifester dans un état pré-social où l’on ne peut guère se comparer ou exercer ses talents intellectuels : les inégalités y existent bien, mais elles ne peuvent pas s’y actualiser et elles n’y ont donc pas d’importance. Paradoxalement, c’est dans la société que les inégalités naturelles, qui ne viennent pas d’elle, se réalisent et ont un impact sur les hommes ! L’on peut donc dire que pour l’essentiel, hormis des détails liés aux circonstances, l’état de nature est bien un état global d’égalité.
4 Enfin, il y a, de toute évidence, le bonheur, conséquence logique de tout ce qui précède : un homme bon, libre et à l’abri des inégalités ne peut être qu’heureux puisque le malheur vient de leur contraire. Surtout si l’on ajoute que le faible développement des besoins et des désirs, non seulement le fait échapper à leur esclavage, mais le met à l’abri de la frustration que leur multiplication et leur intensification entraînent inévitablement, ce qui est aussi une définition du malheur.

Tout cela constitue, je l’ai indiqué, non seulement un état de fait que l’humanité aurait hypothétiquement connu et qu’elle n’a pas, en réalité et selon lui, vécu, mais un ensemble de traits normatifs de l’humanité véritable que la société a détruits : l’homme, tel que la nature l’a façonné, est fait pour vivre vertueusement, être libre, connaître l’égalité avec ses semblables et, ultimement, être heureux, et la société en a fait le contraire : un être corrompu, dépendant ou esclave, victime d’innombrables inégalités et, finalement, malheureux. On laissera de côté le présupposé théologique que cette vision de l’homme peut impliquer [14], pour n’entendre que son message anthropologique laïque, indissolublement moral et politique : c’est la société, dans son développement historique, qui a dégradé l’homme et l’a aliéné au sens fort [15]. Elle l’a rendu étranger à lui-même, autre, en l’occurrence pire, moins bien que ce qu’il est en profondeur et celui-ci l’ignore, prenant une production sociale pour sa nature – thèse qui fait de Rousseau, avant Marx, le premier penseur d’une aliénation anthropologique fondamentale liée à l’histoire. Et à l’origine de ce processus, qui s’apparente donc à une véritable dénaturation, il y a un événement fondateur, l’instauration de la propriété privée, qu’il critique violemment, là aussi comme Marx : « Celui qui ayant enclos un terrain, s’avisa de dire, ceci est à moi, […] fut le vrai fondateur de la société civile » et des malheurs qui ont suivi, ajoute-t-il : crimes, guerres, etc. ; c’est là la première inégalité, décisive, qui rompt l’égalité originelle [16]. Et si son instauration, avec toutes ses conséquences (production, travail, division du travail, etc.) a bien enclenché le développement multiforme de la civilisation, elle a dégradé l’homme, elle a « perdu le genre humain » [17]. C’est bien pourquoi le Discours, une fois la genèse de l’inégalité expliquée longuement, peut se terminer par sa critique radicale dans ce qu’elle a de fondamentalement social : « J’ai tâché d’exposer l’origine et le progrès de l’inégalité, l’établissement et l’abus des sociétés politiques, autant que ces choses peuvent se déduire de la nature de l’homme par les seules lumières de la raison, et indépendamment des dogmes sacrés qui donnent à l’autorité souveraine la sanction du droit divin » – et il en tire son jugement final : « Il suit de là que l’inégalité morale, autorisée par le seul droit positif, est contraire au droit naturel, toutes les fois qu’elle ne concourt pas en même proportion avec l’inégalité physique ». D’où un cri final d’indignation terrible contre les inégalités de son temps, qui est un jugement indissolublement moral et politique dont le fondement (pas l’origine) est bien la référence explicite à un état de nature érigé en norme et définissant, selon l’alchimie théorico-pratique que j’ai indiquée au départ, un droit naturel, c’est-à-dire les droits imprescriptibles de l’homme [18] ; avec cette notation ultime, témoignant d’un exceptionnel courage critique, qui le fait s’en prendre à une société où « une poignée de gens regorge de superfluités, tandis que la multitude affamée manque du nécessaire » [19].

Le Contrat social

Pourtant Rousseau n’en reste pas là, au moment négatif de la critique. Si la référence à l’état de nature est bien le fondement de celle-ci, elle est aussi le fondement de son projet de transformation sociale tel que le Contrat social va l’exposer, sans la moindre rupture donc : il ne fait qu’exprimer à l’endroit ce qui était l’envers de la critique antérieure. Qu’est-ce que ce livre, en effet, sinon le projet de restaurer au sein de la société la perfection perdue ou imaginaire de l’état de nature, et d’y instaurer les droits humains dont il nous a offert le miroir ? Le livre I suffit pour nous le faire comprendre : il s’agit, dit-il d’emblée, de trouver « une règle d’administration légitime et sûre » – l’adjectif « légitime » montrant bien qu’on est sur le plan normatif de la morale, mais, comme il qualifie une « règle d’administration », l’expression d’ensemble nous montre que cette morale s’applique au plan politique où elle est censée se réaliser. Et il précise qu’il va tâcher d’allier « ce que le droit permet et ce que l’intérêt prescrit » pour que « la justice et l’utilité ne se trouvent point divisées », ce qui confirme ma remarque précédente, puisqu’il s’agit de concevoir une organisation « juste » – c’est la morale – des « intérêts » – c’est la politique [20]. Mais la démonstration d’ensemble de ce propos nous est fournie remarquablement par l’exposé même du contrat ou du « pacte social » (ch. VI), à condition d’en bien comprendre d’abord le statut normatif, quoique sans irréalisme. Pour Rousseau, on ne peut expliquer l’existence d’une société quelconque sans la faire reposer sur une convention que ses sujets passent entre eux, donc sur un pacte collectif. Mais :
1 Ce pacte n’est pas un pacte réel ou historique, les hommes ayant toujours vécu en société – ce qui confirme le statut imaginaire de l’état de nature – et n’ayant pu, faute d’un développement intellectuel et moral suffisant, passer un pareil pacte entre eux [21].
2 Il faut donc le comprendre comme un pacte implicite ou latent – dont les clauses n’ont peut être « jamais été formellement énoncées », dit-il –, mais qui est toujours « tacitement » admis [22]. C’est donc, si l’on veut, ce que j’appellerai un pacte « transcendantal », à savoir une condition de possibilité absolument nécessaire de la société elle-même, un a priori pour celle-ci.
3 Enfin, et surtout, ce pacte, dans ses clauses précises, est rarement formulé et respecté. Rousseau se charge donc de l’énoncer dans toute sa rigueur et de le transformer en impératif politique absolu à réaliser et dans les clauses duquel on retrouve les exigences mêmes de la morale contenue dans le droit naturel. Sans trop entrer dans les détails [23], il y a l’idée que, sur la base d’une aliénation librement décidée, c’est-à-dire, ici, d’une donation totale de sa personne à la société, ce pacte est universel : tous les sujets politiques qui se constituent ainsi possèdent les mêmes droits que le pacte va définir. Les sujets alors sont absolument égaux, sans inégalité juridique d’aucune sorte. Si la loi est là pour protéger leurs biens, ce qui paraît impliquer une forme d’inégalité lorsque les biens sont inégaux, elle protège les biens de tous au même titre et ces biens ne sauraient être, apparemment tout au moins, ces biens de production dont la propriété privée clive les hommes en permettant l’exploitation de certains par d’autres dans la sphère du travail. En ce sens, la critique antérieure de la propriété privée, dans un esprit qu’on peut dire pré-marxien, demeure à mon avis pleinement et ne fait pas du tout de lui un partisan du libéralisme économique [24]. D’autant plus que c’est la loi commune qui décide quoi appartient à qui, sous quelle forme, dans quel domaine et à quel degré : Rousseau ici fait clairement confiance à une organisation collective de l’économie dans laquelle l’Etat intervient pour définir un domaine public de l’activité humaine [25]. Mais ils sont aussi libres : d’abord parce que personne n’est contraint d’entrer en société ; mais surtout parce qu’ils vont tous concourir à l’établissement des lois : il sont donc tous citoyens. Et s’ils doivent obéir à des lois en tant que sujets du corps politique et non s’abandonner à leur spontanéité individuelle, c’est à des lois qu’ils ont, directement ou indirectement, énoncées en tant que citoyens actifs, à des lois qu’ils se sont donc données à eux-mêmes. C’est le suffrage universel, exprimant la volonté générale, qui est la source des lois et le seul garant de leur justesse, c’est-à-dire de leur légitimité. Cela définit la République – la chose publique, qui appartient à tous – dans laquelle « chacun se donnant à tous ne se donne à personne ». Comme pour Kant, elle constitue clairement le seul régime moralement légitime [26] et elle réalise la liberté au sens nouveau, civil ou social, que Rousseau lui donne alors, qui n’est plus la spontanéité irréfléchie puisqu’elle intègre l’idée de loi et de soumission à celle-ci : « L’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est liberté », dit-il désormais [27], donnant ainsi à l’état civil (ou social), pour autant qu’il est réglé par le contrat, une supériorité infinie sur l’état de nature puisqu’il développe en l’homme la liberté morale absente de celui-ci et, plus largement, ses qualités spécifiques qui le distinguent de l’animal et le font accéder à son statut d’homme [28]. Enfin, c’est aussi un régime juste au sens de la justice, permettant la satisfaction de l’intérêt personnel mais dans le respect de l’intérêt des autres : la volonté générale n’est pas, indique fortement Rousseau, exactement la volonté de tous, même si ce sont eux qui l’instaurent – volonté de tous qui ne serait dans ce cas qu’une addition de volontés particulières ; elle est une synthèse de celles-ci, qui suppose que chacun renonce à ce qui, dans sa vie singulière, pourrait nuire à autrui – renoncement qui est, comme il se doit, parfaitement réciproque, exigé de tous et qui, articulé à l’Universel, pointe exactement le moment moral de l’activité de la volonté individuelle en politique : la liberté réfléchie étant désormais acquise, on peut dire que c’est la moralité individuelle elle-même qui advient et s’exerce, pour autant que, dans ses choix de vie sociaux, elle coïncide avec la volonté générale et se conforme à ses prescriptions. Comme l’affirmait déjà un passage de l’article Economie politique, d’une manière remarquable et en anticipant clairement sur le cœur moral du Contrat social, dont le vocabulaire est même déjà présent : « Tout homme est vertueux quand sa volonté particulière est conforme en tout à la volonté générale. » [29] On assiste alors à une harmonisation des intérêts, dont on peut penser que, par définition, elle assure un bonheur collectif, c’est-à-dire, nuançons le propos, un bonheur de l’homme envisagé dans sa vie collective – la vie strictement individuelle n’étant pas concernée par le Contrat [30]. L’article Economie politique l’avait déjà dit, sur la même base morale d’instauration de la justice sociale : « Il n’est pas impossible de rendre un peuple heureux. » [31]. Universalité, égalité, liberté réfléchie, bonheur : n’est-ce pas là la réalisation de la morale en politique et la définition de la politique à la lumière de la morale ?

Questionnement final

On ne saurait pourtant conclure ainsi et aussi sûrement sans évoquer brièvement les problèmes que cette perspective soulève légitimement – brièvement car il y aurait là la matière à un autre exposé. Et d’abord, il est clair qu’il s’agit bien pour Rousseau de conférer à la politique une fonction indissolublement anthropologique et morale : la société telle qu’elle a fonctionné jusqu’à présent ayant dénaturé l’homme, il s’agit pour elle, à travers le contrat social, de le renaturer, de restaurer sa bonne nature initiale ; et comme cette nature est bien une bonne nature, la tâche de sa restauration est de toute évidence une tâche morale, donc absolument impérative. Reste à savoir s’il n’y a pas là un objectif irréalisable, c’est-à-dire utopique et, à ce titre, potentiellement totalitaire puisqu’il reviendrait à imposer aux hommes ce dont on estimerait qu’ils ne sont pas, par nature, capables. Qu’il y ait là une tâche morale et que la politique ait donc pour fin une moralisation de l’homme, cela est expressément revendiqué par Rousseau – exactement comme cela le sera par Kant [32] : la politique n’est pas à soi-même sa vérité normative, elle est soumise en droit – même si en fait cela ne se passe pas ainsi – à des normes morales préalables qui n’en dépendent pas et dont, au contraire, elle dépend, c’est-à-dire doit dépendre. Soutenir que cette tâche est utopique n’a guère de sens si l’on a bien compris Rousseau : l’argument d’une nature « mauvaise » de l’homme qu’on lui objecte superficiellement oublie que, pour lui, celle-ci est largement un produit social, une nature acquise, si l’on peut dire, donc une non-nature faite par l’histoire et qu’une autre histoire, dirigée par une politique morale, peut défaire et refaire dans un sens meilleur – ce qui rejoint les enseignements d’une grande partie de l’anthropologie scientifique contemporaine inspirée de Marx affirmant que ce sont les « circonstances » qui font l’homme – suggérant ainsi que c’est en humanisant ces circonstances que l’on peut humaniser l’homme [33]. D’autant plus que le terme d’utopie pris rigoureusement ne convient pas : l’utopie est (comme chez Thomas Moore ou d’autres, après) la description concrète d’une société idéale dont le choix peut être jugé arbitraire ; alors que chez Rousseau, le Contrat social est, à l’inverse, la description abstraite, dans ses principes fondateurs, d’une société moralement exigible, ce qui n’est pas du tout la même chose. Autre élément de réponse, qui prolonge ce qui précède : Rousseau accorde un poids décisif à l’éducation conçue comme la formation progressive d’une humanité meilleure – c’est l’objet propre de l’Emile –, éducation dont l’Etat, au-delà de ses banales fonctions de gestion des intérêts humains auxquelles l’époque contemporaine tend à le réduire, a la responsabilité en tant qu’il constitue aussi, sinon d’abord, une instance morale et anthropologique. Comme le dit à nouveau l’article Economie politique : « S’il est bon de savoir employer les hommes tels qu’ils sont (par où on retrouve le réalisme de Rousseau – Y. Q.), il vaut beaucoup mieux encore les rendre tels qu’on a besoin qu’ils soient », et cela n’est pas irréalisable puisque « il est certain que les peuples sont à la longue ce que le gouvernement les fait être » [34]. Enfin, il est tout aussi clair que Rousseau, comme je l’ai à plusieurs reprises suggéré, est aussi un grand penseur réaliste. Non seulement parce que toute sa réflexion de fondation morale de la politique, que l’on peut considérer comme abstraite, se double d’une analyse concrète des problèmes posés par sa mise en œuvre, qu’il s’agisse des formes de gouvernement ou de bien d’autres points institutionnels traités dans le Contrat social, de l’économie en général dans l’article cité ou de ses textes sur la constitution de la Corse ou le gouvernement de la Pologne, dans lesquels il fait la preuve d’une étonnante information empirique comme d’un sens aigu du réel. Mais surtout, parce que sa théorie de base de la volonté générale, dans laquelle se résume l’articulation de la morale et de la politique, ne fait jamais abstraction des obstacles que sa réalisation ne peut manquer de trouver dans la volonté particulière de chaque homme, donc dans l’intérêt personnel [35]. Celui-ci peut en permanence pervertir les choix individuels en les asservissant à l’amour de soi transformé alors en égoïsme illégitime parce qu’immoral, comme il peut, surtout, pervertir les dirigeants politiques qui ne devraient pourtant n’être que les « ministres », à savoir les serviteurs, de cette volonté générale. Mais, malgré cette conscience extrêmement lucide de ce qui menace la réalisation de son projet politique, sa réponse est toute prête, parfaitement cohérente avec sa conception d’ensemble qui met la morale au poste de commandement dans le cadre d’un anthropologie pour laquelle c’est la politique qui, qu’elle soit de fait médiocre ou à venir et meilleure, de toute façon fait l’homme : « Faites régner la vertu » exhorte-t-il alors les hommes politiques [36], quitte à demander à ce que, pour y parvenir, on utilise les passions humaines, qu’on détourne l’égoïsme de son objectif initial et qu’on lui apprenne à aimer l’universel en s’aimant dans l’universel, par le pouvoir de l’éducation [37]. A nouveau, c’est la morale qui commande à la politique, se confond même avec elle et, tout en tenant compte de ce que sont les hommes de fait (sinon par nature), ne saurait renoncer à sa tâche politique sans se trahir.

Ce texte est tiré d’une conférence d’Yvon Quiniou dans le cadre du colloque Rousseau, l’art et la nature qui s’est tenu à Sacy -le Grand les 13 et 14 juin 2012, organisé par Jean-Philippe Catonné, ancien enseignant de philosophie à la Sorbonne, psychiatre et membre de l’Union rationaliste. Les actes du colloque sont à paraître fin septembre 2012. Contact : art.therapie@chi-clermont.fr

Notes :

[1] Emile ou de l’éducation, GF-Flammarion,, p. 306.

[2] Discours sur l’économie politique ( GF-Flammarion). Celui-ci présente d’une manière remarquable la matrice morale de la politique proposée ensuite par le Contrat social.

[3] Op. cité, Idées/NRF, p. 45.

[4] Cf. op. cité, p. 33. Songeons, par exemple et s’agissant de l’intelligence, à l’expérience, involontaire en quelque sorte, des jumeaux monozygotes adoptés dans des milieux culturellement inégaux et qui deviennent inégaux : elle démontre le caractère assez largement acquis, et donc non naturel, de l’intelligence.

[5] Op. cité, p. 33.

[6] Le « droit naturel » est le droit des hommes tel que la raison peut le formuler, indépendamment de toute référence à une transcendance surnaturelle que seule une foi irrationnelle pourrait offrir. R. Derathé, l’un des meilleurs spécialistes de Rousseau a bien souligné qu’il était un penseur fondamentalement rationaliste, malgré les références sous-jacentes ou explicites au Dieu chrétien dans son œuvre.

[7] Op. cité, p. 34.

[8] Op. cité, p. 38.

[9] Voir P. Ricœur, Soi-même comme un autre (Seuil). J’ai repris cette idée dans mon livre L’ambition morale de la politique. Changer l’homme ? (L’Harmattan, 2010), dont je m’aperçois rétrospectivement qu’il s’inscrit fortement dans la filiation de Rousseau, autant que dans celles de Kant et de Marx.

[10] Ce point engage à sa manière cette problématique de « l’être » et du « paraître » qui résumerait assez bien l’anthropologie de Rousseau telle que la suite de notre analyse va l’éclairer, et qui était déjà présente dans le Discours sur les sciences et les arts. J. Starobinski l’a très bien mise en lumière dans son livre Jean-Jacques Rousseau, la transparence et l’obstacle, Tel/Gallimard.

[11] Op. cité, p. 43.

[12] Op. cité, p. 44. Parlant, par exemple, de la liaison que l’on voudrait trouver entre le mérite et la puissance ou la richesse, il ironise en indiquant qu’il s’agit là d’une « question bonne peut-être à agiter entre des esclaves entendus de leurs maîtres, mais qui ne convient pas à des hommes raisonnables et libres qui cherchent la vérité » (ib.).

[13] Op. cité, p. 82.

[14] On pourrait et en on a pu, en effet, voir dans le schéma de Rousseau, une transposition profane et historique du thème chrétien de la chute hors du paradis initial résultant du pêché originel – surtout si l’on songe à la transformation que la politique va proposer, que j’analyserai ensuite, dans laquelle on verra alors l’équivalent d’une « rédemption ». Soyons clair : que cela ait pu jouer sous la forme d’une influence idéologique inconsciente dans la genèse de la pensée de Rousseau, est envisageable mais importe peu, au final. Car celle-ci doit être reçue et examinée en elle-même, dans l’ordre des raisons conscientes et explicites qui sont les siennes, au sein desquelles la thématique chrétienne en question non seulement n’intervient absolument pas, mais est remplacée par une thématique rigoureusement inverse fondée sur la seule intelligence rationnelle des choses. Je l’ai déjà indiqué : Rousseau est un penseur rationaliste. Sur cette analogie ou influence, voir la présentation par H. Guillemin du Contrat social qui exagère, d’une manière excessivement partiale, cette influence (10/18-UGE). Si Rousseau est bien théiste et donc croyant, il est hostile aux religions positives, ou instituées, et à leur dogmes, qui détournent l’homme de ses obligations politiques dans la Cité – et cette hostilité vise tout particulièrement le christianisme : voir le dernier chapitre du Contrat social, que seule la (mauvaise) foi peut faire oublier.

[15] Je dis bien le développement historique : il y a une histoire du mal pour Rousseau, qui est une histoire objective dans laquelle les circonstances jouent un rôle majeur et qui ne fait en rien intervenir l’idée (chrétienne) d’un choix libre du mal opéré par les hommes individuels, qui en seraient alors moralement responsables. On est bien plutôt du côté de la conception de l’histoire (ici du mal) comme « procès sans Sujet » qu’a défendue le philosophe marxiste L. Althusser et, plus largement, sur le terrain du « matérialisme historique » marxien.

[16] Début de la seconde partie, op. cité, p. 87.

[17] Op. cité, p. 97.

[18] On voit ici à quel point Rousseau prend ses distances avec le discours religieux et dénonce sa fonction idéologique de justification de l’ordre social avec ses inégalités et ses injustices.

[19] Op. cité, p. 127.

[20] Du contrat social, 10/18-UGE, p. 49. La présence de l’intérêt dans la politique proposée n’annule en rien sa dimension morale comme on pourrait facilement le croire, car, comme on va le voir, il s’agit de l’intérêt de tous.

[21] Sinon, on rencontrerait le cercle suivant : un pacte supposant des contractants dotés d’intelligence et de langage, comment attribuer à ceux-ci, avant le pacte et donc hors société, des qualités qui ne peuvent être que la conséquence de la société elle-même ? C’était déjà le cercle de l’origine du langage quand on prétend la trouver dans une convention, qu’exposait Platon dans le Cratyle.

[22] Op. cité, p. 61.

[23] Voir op. cité, L. I, ch. VI.

[24] Voir G. Della Volpe, Rousseau et Marx, Grasset.

[25] De nombreuses notations de l’article Economie politique vont sans conteste dans ce sens.

[26] De Kant, voir en particulier ce qu’il dit de la République dans son Projet de paix perpétuelle ou dans sa Doctrine du droit, avec une fondation morale de la légitimité de ce régime qu’on peut dire encore plus forte que celle de Rousseau, dans la mesure où il a élaboré et fondé la morale à un niveau supérieur à celui de ce dernier. Mais c’est bien celui-ci qui en a donné, par anticipation si l’on veut, la traduction politique la plus parfaite, Kant demeurant timide quand il s’agit d’énoncer les institutions et le fonctionnement de la République. Je me permets de renvoyer à nouveau à mon livre L’ambition morale de la politique. Changer l’homme ? (op. cité plus haut), dans lequel j’ai approfondi cette comparaison Kant/Rousseau s’agissant très précisément de cette relation de la morale et de la politique

[27] Op. cité, p. 66.

[28] Rousseau affirme fortement que si l’état social tel qu’il est en fait, non régi par les normes du contrat, ne dégradait moralement l’homme (ce que le Discours a montré) et ne l’abaissait au dessous de l’état de nature, celui-ci « devrait bénir sans cesse l’instant heureux qui l’en arracha pour jamais et qui, d’un animal stupide et borné, fit un être intelligent et un homme » (op. cité, p. 65). Ce point est régulièrement passé sous silence par la vulgate « anti-rousseauiste » : Rousseau est bien un penseur de la société, mais dans son articulation à la norme morale de la nature. Et dès lors que cette articulation a lieu, il en est l’apologiste, le partisan fervent.

[29] In Discours sur l’économie politique et autres textes, GF-Flammarion, p. 72.

[30] Voir op. cité, partie II, ch. IV, « Des limites du pouvoir souverain ». Je précise cette idée importante, qui interdit absolument de faire de la pensée de Rousseau une matrice du totalitarisme : la volonté générale est générale par ses sujets, ceux qui y participent et la font, mais aussi par son objet : elle ne légifère que sur ce qui engage les rapports sociaux, que sur la vie générale des hommes.

[31] Op. cité, p. 73.

[32] Voir, plus haut, mon commentaire de la note 21 et les références qu’elle comporte ; à quoi l’on ajoutera les différents textes réunis dans La philosophie de l’histoire (GF-Flammarion).

[33] Voir La Sainte Famille (avec Engels), La Pléiade, t. III, p. 571-572. L. Sève reprend justement cette inspiration théorique dans son grand ouvrage L’ homme ? (La Dispute), même si on peut en discuter le radicalisme historiciste.

[34] Discours sur l’économie politique, op. cité, p. 69. « Les vices n’appartiennent pas tant à l’homme qu’à l’homme mal gouverné » dit-il magnifiquement dans la préface de Narcisse (cité par H. Guillemin dans sa présentation du Contrat social, op. cité, p. 18).

[35] « L’intérêt personnel se trouve toujours en raison inverse du devoir » ( Discours sur l’économie politique, op. cité, p. 63).

[36] Ib., p. 70.

[37] Ib., p.78.



 

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29 septembre 2012 6 29 /09 /septembre /2012 16:01

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Tunisie : manifestation sans incident des diplômés chômeurs dans Tunis

samedi 29 septembre 2012, par La Rédaction

Des centaines de Tunisiens ont manifesté samedi à Tunis pour réclamer du travail et appelé à la chute du gouvernement dirigé par les islamistes du parti Ennahda, a constaté une journaliste de l’AFP.
A l’appel de l’Union des diplômés chômeurs (UDC), les manifestants se sont rassemblés devant le siège de la centrale syndicale (l’Union générale des travailleurs tunisiens, UGTT) avant de défiler sur l’avenue Habib Bourguiba, artère principale de la capitale hautement surveillée par la police.
La marche soigneusement encadrée par un dispositif policier comprenant des unités anti-émeutes se déroulait sans incident, les manifestants étaient tenus à distance de l’ambassade de France protégée par des barbelés et des véhicules militaires depuis la publication de caricatures de Mahomet en France.
"Travail, liberté, dignité !", "Où sont tes promesses, gouvernement menteur", "Ni peur, ni terreur, la rue appartient au peuple", "Le peuple veut la chute du gouvernement", scandaient les manifestants.
"Y en marre d’attendre des promesses sans lendemain", a déclaré à l’AFP Majid Rihaï, un diplômé de l’université, âgé de 28 ans.
D’autres jeunes enveloppés dans des drapeaux, rouge et blanc, de la Tunisie ont dénoncé la nonchalance du gouvernement. "Ce gouvernement ne prend pas nos problèmes au sérieux et ne parle du chômage que pour nous instrumentaliser", a renchéri Amira Sassi, 25 ans.
Dans un communiqué, l’UDC a réclamé la publication des listes de candidats admis dans des concours d’embauche dans la fonction publique et de confier le recrutement à une instance autonome pour "garantir la transparence et mettre fin au népotisme".
Le gouvernement a lancé un programme d’emploi pour 25.000 personnes dans la fonction publique, en plus de milliers d’autres dans le secteur privé. Le taux de chômage est tombé à 17,6% en septembre 2012 contre 18,9% durant l’année 2011 (14% en 2010), les diplômés formant le tiers de quelque 750.000 demandeurs d’emploi dans le pays.
Ce taux de chômage national cache d’importantes disparités régionales allant de 50% dans des régions déshéritées enclavées à moins de 6% sur la côte centre-est nantie.
La manifestation non autorisée par le ministère de l’Intérieur, selon les organisateurs, était la première a avoir lieu dans Tunis depuis les violences qui ont marqué les protestations contre un film islamophobe devant l’ambassade des Etats-Unis le 14 septembre.
Les autorités tunisiennes avaient été alors prises de court et les affrontements ont fait quatre morts parmi les manifestants issus pour la plupart de la mouvance salafiste.

(29 Septembre 2012 - Avec les agences de presse)

"Assawra"

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29 septembre 2012 6 29 /09 /septembre /2012 15:53

 

 

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Abbas lance une campagne pour élever le statut de la Palestine à l’ONU

Le président palestinien Mahmoud Abbas a lancé jeudi à l’ONU une campagne pour que la Palestine obtienne le statut d’État non membre des Nations unies, se disant "confiant" du soutien international à cette demande. Mahmoud Abbas a souhaité "que l’Assemblée générale adopte une résolution considérant l’État de Palestine comme un État non membre des Nations unies pendant cette session", qui se termine en septembre 2013.

"Nous sommes confiants que le grande majorité des pays du monde soutient notre initiative qui vise à sauver les chances d’une paix juste", a-t-il affirmé, ajoutant : "Nous ne cherchons pas à délégitimer un État déjà existant, c’est-à-dire Israël, mais à faire valoir les droits d’un État qui doit être réalisé, c’est-à-dire la Palestine". Le président palestinien a affirmé cependant que les Palestiniens n’avaient pas renoncé à obtenir le statut d’Etat à part entière et allaient "continuer leur efforts" en ce sens.

Il a aussi sévèrement critiqué la politique de colonisation israélienne dans les territoires palestiniens, qualifiée de "catastrophique" et "raciste". Il a enfin invité le Conseil de sécurité de l’ONU à "adopter d’urgence une résolution posant les bases d’une solution au conflit israélo-palestinien qui servirait de référence contraignante et de guide" en vue d’un accord de paix fondé sur une solution "des deux États, Israël et la Palestine".

27 Septembre 2012

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