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Copé, le MRAP et le racisme anti-Blancs
mercredi 26 septembre 2012, par Alain Gresh
Lors de son congrès du 30 mars-1er avril, le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP), une organisation qui avait été tout au long de son histoire à l’avant-garde du combat contre les discriminations, adoptait un texte surprenant :
« Promouvoir des identités artificielles et “uniques”, qu’elles soient nationales, religieuses, ethniques ou raciales, conduit inéluctablement au racisme. Ces enfermements identitaires émanent des groupes dominants, mais se reproduisent dans les groupes dominés : le racisme anti-blanc en représente un avatar. Le MRAP le condamne à ce titre d’autant plus qu’il apporte une inacceptable et dangereuse non-réponse aux méfaits et aux séquelles de la colonisation. »
Cette référence au « racisme anti-Blancs », une première pour l’organisation, suscitait une réponse sur le site Rue 89, « “Racisme anti-blanc” : le texte du MRAP “préoccupant” ». Les signataires notaient :
« L’emploi de manière a-critique d’une telle notion, comme si elle allait de soi, soulève en effet nombre de problèmes. Sans en faire la généalogie, comment toutefois ne pas tenir compte des conditions dans lesquelles elle est apparue en France dans le lexique politique, portée par les mêmes personnalités qui n’ont eu de cesse depuis quelques années de stigmatiser l’immigration et les populations des quartiers populaires ?
Comment ne pas voir que la notion de “racisme anti-blanc” a émergé dans le débat politique français pour inverser les rapports de responsabilité : la “victime” ne serait plus l’immigré ou le descendant d’immigrés mais le Blanc, inversion que l’on peut exprimer d’une autre manière ; si l’hostilité à l’immigration progresse, c’est la faute aux immigrés, ou encore : si les immigrés vivent et travaillent dans de terribles conditions, eh bien, c’est de leur faute. »
Le MRAP répondait dans une tribune « Non à la racialisation de la société française ! » :
« Si le MRAP ne fait qu’évoquer le racisme anti-Blancs comme l’une des composantes du racisme, les signataires du texte font, par contre, de la “non-existence du racisme contre des blancs” un élément déterminant de leur pensée.
Ce qui implique, selon leur logique, que seul le blanc peut être raciste et seuls les non-blancs peuvent être victimes de racisme. C’est là une réécriture raciale du racisme et cela entre en contradiction avec les fondamentaux du MRAP qui lutte contre tous les racismes. »
Cette argumentation du MRAP est pour le moins curieuse. Qu’il existe, dans tous les groupes de la société, des préjugés à l’égard de l’Autre n’est pas nouveau ; que puissent dominer des visions essentialistes plus ou moins dangereuses, plus ou moins répandues (les juifs sont riches ; les Bretons sont têtus ; les Auvergnats sont avares ; les roms sont des voleurs, etc.) non plus. S’il faut combattre ces préjugés, on ne peut les mettre sur le même plan qu’un système organisé d’oppression d’une catégorie de la population.
Le MRAP s’est illustré au cours de l’histoire, notamment durant la lutte contre la ségrégation aux Etats-Unis. Aurait-il été imaginable, à l’époque, qu’il dénonce « le racisme anti-Blancs » chez les Noirs ? Bien sûr, il existait à l’époque des visions racistes aussi chez les Noirs.
Le MRAP s’est aussi illustré dans la lutte contre l’apartheid. Aurait-il été imaginable, à l’époque, qu’il dénonce « le racisme anti-Blancss » qui existait dans les townships ?
Il ne s’agit pas, quand on dénonce le racisme dans tel ou tel pays, d’évoquer les préjugés des uns ou des autres, mais un système de domination et d’oppression. C’est ce que le MRAP semble avoir oublié.
Ce thème du racisme anti-Blancs est celui de l’extrême droite, suivie désormais par la droite traditionnelle. L’article de Wikipedia consacré au sujet offre quelques informations intéressantes :
« En 1983, l’écrivain Pascal Bruckner avait déjà utilisé le terme de “racisme anti-Blancss” dans son livre Le Sanglot de l’homme blanc. Mais selon le Dictionnaire de l’extrême droite du psychosociologue Erwan Lecoeur, la notion de “racisme anti-Blancs” aurait été introduite à l’origine par l’association d’extrême-droite, l’AGRIF, au côté de termes comme “racisme antifrançais” et “racisme antichrétien”. D’après cet ouvrage, l’emploi de ces notions s’inscrit dans une stratégie de “retournement victimaire” contre l’antiracisme pour “sortir du piège de l’accusation récurrente de racisme” et “la retourner par tous les moyens possibles”. La notion a été largement propagée et instrumentalisée par l’extrême droite (notamment dans le sillage de la nouvelle droite), en réponse à l’émergence du thème de l’antiracisme. Jean-Marie Le Pen le leader du FN affirmait à ce propos :
“L’antiracisme, instrument politique d’aujourd’hui, comme le fut l’antifascisme avant guerre n’est pas un non-racisme. C’est un racisme inversé, un racisme antifrançais, anti-Blancs, antichrétien” »
Mais, le plus inquiétant, est que certains intellectuels aient aussi rejoint ce combat.
« Un certain nombre de personnalités de gauche comme Ghaleb Bencheikh, Alain Finkielkraut, Bernard Kouchner et Jacques Julliard ont lancé, le 25 mars 2005, un Appel contre les “ratonnades anti-Blancss”, appel soutenu et relayé par le mouvement sioniste de gauche Hachomer Hatzaïr et la radio communautaire juive Radio Shalom. L’appel formulait le problème en ces termes :
[A]ujourd’hui les manifestations lycéennes sont devenues, pour certains, le prétexte à ce que l’on peut appeler des “ratonnades anti-blancs”. Des lycéens, souvent seuls, sont jetés au sol, battus, volés et leurs agresseurs affirment, le sourire au lèvres : “parce qu’ils sont Français”. Ceci est un nouvel appel parce que nous ne voulons pas l’accepter et parce que, pour nous, David, Kader et Sébastien ont le même droit à la dignité. Écrire ce genre de textes est difficile parce que les victimes sont kidnappées par l’extrême droite. Mais ce qui va sans dire, va mieux en le disant : il ne s’agit pas, pour nous de stigmatiser une population quelle qu’elle soit. À nos yeux, il s’agit d’une question d’équité. On a parlé de David, on a parlé de Kader mais qui parle de Sébastien ? »
C’est là le plus grave. Désormais, ce concept de racisme anti-Blancs a largement dépassé les frontières de la droite et gangréné une partie de la gauche. Le texte du MRAP reflète cette dérive.
Cette vision reçoit un appui de poids avec Jean-François Copé qui décide, à son tour, de « briser un tabou » (« Copé et le “racisme anti-blanc” : Hortefeux et NKM parlent de “tensions””, lemonde.fr, 26 septembre).
« Jean-François Copé, candidat à la présidence de l’UMP, a anticipé la polémique : il dit lui-même vouloir “à dessein” “briser un tabou” en dénonçant l’existence d’un “racisme anti-blanc” dans certains quartiers difficiles, dans son livre Manifeste pour une droite décomplexée (Fayard), dont Le Figaro Magazine, à paraître vendredi, publie des extraits. »
La vie du Parti
Ce texte est important et doit être lu et discuté par les communistes. Il réaffirme la rupture avec ce qu’était le PCF en proposant une nouvelle force politique dans un contexte de crise profonde du capitalisme, donc en reprenant certains concepts (communisme, lutte de classes...) pour les intégrer dans un idéalisme dont l’expérience communiste a justement démontré l’inefficacité pour l’union du peuple dans un objectif de changement de société.
Cet idéalisme lui fait dire par exemple qu’un cycle de recul de la critique du capitalisme serait fini, et donc que s’ouvrirait un cycle progressiste des idées, ce que l’expérience concrète conduit a minima à interroger devant les succès d’une véritable contre-offensive du capitalisme autant militaire, économique, qu’idéologique...
Il ne fait évidemment aucune analyse concrète des politiques suivies par le PCF depuis des années, critiquant par exemple l’électoralisme sans rien dire des stratégies électorales suivies notamment depuis les régionales de 2004.
Mais c’est bien ce à quoi conduit l’idéalisme : le refus de se confronter collectivement à la pratique, qui suppose de partager la critique de ces pratiques et des orientations qu’elles concrétisaient, et de placer ensuite les choix stratégiques dans la validation collective de l’analyse concrète des situations concrètes...
Il est vrai que Patrice Bessac pense que les communistes, ceux qui ont fait l’histoire de ce parti dont il hérite, étaient des moutons... Je ne vois pas d’autre mot que l’insulte pour caractériser cette affirmation qui n’est pas une erreur de langage. Il avait déjà utilisé cette formule en août pour l’université du PCF (ou du Front de Gauche je ne sais plus...). Des moutons qui résistaient individuellement et collectivement à la pensée dominante, capables de dire NON au colonialisme, de se coucher devant les trains, de refuser la défaite quand tout poussait à la désespérance, de se lever pour dénoncer les injustices quand la répression patronale allait jusqu’au meurtre, quand les officines de la droite qui n’avait pas encore besoin de son extrême, faisaient le coup de poing... Et des moutons capables dans le parti de se confronter au fonds à de multiples occasions, même si la nécessité de la cohérence de l’action du parti conduisait souvent à mettre en œuvre une décision qui avait fait débat, mais cela faisait-il des militants des moutons ? Quand à imaginer que les communistes dont rêve Bessac seraient devenus des chats, on se demande s’il pense au ronronnement bien au chaud dans les salons, à l’individualisme forcené qu’on prête à ces bêtes qui ne sont pas des chiens, ou au plus malin qui joue avec les souris... J’ai envie de reprendre Ferré chantant les poètes provocateurs pour lui aboyer avec colère "nous sommes des chiens !".
pam
Rapport de Patrice Bessac (CN du 13 septembre 2012)
Publié dans "Communistes" supplément à l’Humanité du 19 septembre 2012
Chacun, chacune a conscience que la période nécessite un grand travail collectif. Les problèmes sont nombreux, la difficulté immense et le combat, d’une grande brutalité. Ce rapport veut s’essayer à ouvrir quelques réflexions pour la préparation de notre Congrès. Ainsi, il ne reflète pas une quelconque ligne prédéterminée mais plutôt une tentative personnelle, nourrie d’échanges, de soulever quelques enjeux sans préjudice de notre débat commun. Les choses sont ainsi faites qu’exprimer sa pensée propre, ce n’est pas servir un filet d’eau tiède. Donc j’y vais. C’est fini. C’est fini. Le cycle de la crise des mouvements critiques du capitalisme est fini. Vingt ans, trente ans de domination du capitalisme libéral, de convulsions pour le mouvement communiste et transformateur : tout cela est fini. Le fait majeur est la crise du capitalisme mondialisé, sa crise économique et, au-delà, la crise du modèle de civilisation issu de la contre-révolution libérale des années 1970. C’est fini. Il ne s’agit plus de tenir, il s’agit d’avancer, de conquérir, de s’arracher à la gangue, aux sédimentations de plus de trente années de recul pour prendre vingt ans d’avance. Il nous appartient de prendre vingt ans d’avance, d’avoir la même ambition que les économistes libéraux eurent dans les années 1970 : changer les bases culturelles, idéologiques, politiques du monde actuel. Si une longue et dure phase historique se referme, chacun mesure pour autant les dangers de la nouvelle période : les risques de nouvelles barbaries comme d’une avancée possible des forces révolutionnaires. Nous sommes à la fois devant des changements de longue portée et dans l’urgence.
Ainsi, nous vous proposons que le congrès d’Aubervilliers manifeste par un texte fondateur cette ambition. Il s’agit, au fond, de proposer une vision unificatrice de notre projet, de notre stratégie, de notre conception du Parti et de l’action politique. Ainsi, si chacun sait que le caractère historique d’un congrès ne procède pas du décret, c’est pourtant cela que nous devrions viser. Que nos décisions, que nos actes, que notre analyse, que notre travail unifient et fondent un regard complet sur les vingt ans qui sont devant nous. Alors que notre stratégie de rassemblement, le Front de gauche, alors que notre parti, le Parti communiste français, ont enregistré au plan des résultats électoraux et de notre effectif des avancées considérables, nous pourrions nous reposer dans la molle satisfaction de nos quelques réussites. Nous vous proposons exactement le contraire. Nous vous proposons d’accélérer, de franchir des étapes, de marquer des ruptures. Nous vous proposons donc que le Congrès soit une Révolution dans l’ordre de notre pensée et de nos pratiques pour répondre à la guerre sociale que livre le capital aux peuples et qu’il réponde à une seule question : Comment être utile au peuple, à la France, à l’Europe, à l’humanité ? Ainsi, et sans préjuger de nos décisions communes, je veux évoquer devant vous quelques idées. Je le ferai, je vous l’ai dit, sans filet, en considérant qu’il vaut mieux jeter quelques idées que ne rien dire du tout.
D’abord dans l’ordre de la culture
La réduction du champ de l’activité des partis à l’activité électorale telle que voulue par nos institutions est une réduction de la politique elle-même. Nos institutions, en asservissant progressivement les partis à leur service exclusif, ont agi comme des réducteurs de tête. Elles affaiblissent les fonctions culturelles, sociales, intellectuelles de la politique pour n’en garder que l’activité de représentation dans une démocratie devenue d’opinion. Or c’est la culture, ce sont les représentations qui forment le soubassement de la conquête du pouvoir. La question de l’hégémonie culturelle est donc le point de départ nécessaire de toute réflexion.
Déracialiser le débat français : le choix des Lumières
Le fait marquant et en accélération constante depuis les années 1980 est la racialisation du débat politique français. À droite, on ethnoculturalise la francité autour de la blancheur et de la chrétienté ; à gauche, comme dans un miroir, on procède à la même ethnoculturalisation de la société française, cette fois en positif. Ainsi, la gauche assume des catégories telles que la diversité qui pose, circonscrit et valide de fait l’existence de groupes religieux, ethniques ou raciaux qu’il s’agit de discriminer positivement. La campagne de 2012 aura constitué une nouvelle accélération en ce sens. L’universitaire Laurent Bouvet explique avec un grand esprit de synthèse le phénomène dans son ouvrage Le sens du peuple. Il montre comment l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981 et l’abandon de l’ambition d’un profond changement social provoquent le passage d’une lecture de classe de la société française et des moyens de la mobilisation politique à une lecture autour d’un bloc central fortement intégré et éduqué et d’une galaxie de groupes nouveaux parmi lesquels, pêle-mêle, les femmes, les jeunes des banlieues, les gays, les immigrés... Et dans ce mouvement apparaissent sans cesse de nouveaux groupes, je pense à la création du Conseil représentatif des associations noires (le CRAN), ou encore les “beurjois”, les renois, les blancos...
Ce mouvement est sans fin. Et il répond à un besoin profond du capitalisme dans la situation actuelle : reformuler le social pour le désintégrer, c’est la réplique interne du choc des civilisations. Les individus sont enfermés dans des politiques identitaires. Elles agissent de manière performative : à chaque fois que l’on crée des manières de classer les individus, ils y entrent ! Cette situation est potentiellement mortelle pour la société et pour le mouvement de transformation sociale. La déracialisation du débat politique français, la suppression des politiques identitaires, en bref le retour aux Lumières, c’est-à-dire à la seule reconnaissance des individus libres, souverains et égaux dans la République est un axe majeur de reconquête. Il faut jeter par-dessus bord et dans le même mouvement les politiques d’assimilation, d’intégration ou les politiques multiculturelles pour entrer dans un processus historique qui brisera le lien de la citoyenneté des sociétés modernes avec l’ethnomorphisme, c’est-à-dire l’association d’une couleur de peau, d’une culture ou d’une origine supposée à une citoyenneté - les grands blonds sont norvégiens, les gens typés viennent d’ailleurs, les musulmans sont des immigrés...
Notre vocation est d’établir l’égalité des citoyens de la République sans considération d’origine ou d’appartenance supposées. Ce qui caractérise les cultures, contrairement à ce que pensent les ethno-bobos, ce n’est pas leur permanence, c’est leur capacité de dialogue et de transmutation. Les politiques identitaires, fussent-elles de gauche et pavées de bonnes intentions, ne sont en réalité qu’un des avatars de la période coloniale, une négation organisée de l’égalité. Il s’agit donc de défendre un universalisme abouti, qui ne se confond pas avec l’universalisme impérial qu’a développé notre pays au cours de son histoire. Un universalisme abouti, c’est-à-dire ne cédant pas à l’hypocrisie qui consiste à nier et à entretenir les inégalités de genre, d’orientation sexuelle, de discriminations fondées sur les origines supposées au nom d’une égalité fantasmée. Un universalisme de combat qui, dans un contexte de régression identitaire, affirme, développe et rend effective l’unité du genre humain. À cette conception, un contre-argument vient tout de suite : le problème reste. Le problème reste de l’exclusion visible des responsabilités militantes et publiques d’une partie de la population française. J’y reviendrai tout à l’heure s’agissant du Parti mais, au fond, la question me semble être : de quoi cette exclusion est-elle le nom ? Quelques études simples sur la composition des conseils municipaux montreraient que dans les villes de gauche ou communistes de plus de 30 000 habitants, les cadres de la fonction publique sont ultra dominants. Et nous savons dans le même temps que c’est dans les couches populaires que les enfants ou les petits-enfants de l’immigration, en provenance d’Afrique notamment, sont les plus nombreux. Ainsi, la question de la diversité n’est-elle pas simplement le nom d’une rupture de grande ampleur avec les couches populaires ?
La politique de classe contre les politiques racialistes
Cette reformulation du social par la gauche puis par la droite a eu comme effet de laisser en déshérence la question sociale. Lors de sa campagne de 2007, Nicolas Sarkozy a été un ingénieur doué de la dignité des travailleurs et des travailleuses. Or, à l’issue de la période que j’ai décrite, le travail n’est plus un marqueur de gauche : c’est un marqueur de droite dans le discours politique. Je rappelle que Marine Le Pen a totalisé 29 % du vote ouvrier au premier tour de l’élection présidentielle, François Hollande 27 % (Lionel Jospin avait totalisé 13 % en 2002) et Jean-Luc Mélenchon 11 % du vote ouvrier. Et il est frappant de constater que la perte de centralité du travail dans le discours de la gauche correspond à sa propre impuissance à résoudre la question du chômage. La gauche s’est désaffiliée de sa relation aux travailleurs, a détourné son regard des questions sociales et de classe à mesure qu’elle perd l’ambition d’un réel changement économique. Les résultats électoraux de premier tour sont sans appel : la gauche est plus forte là où le peuple est le moins présent. Un certain nombre de politiques publiques ont accéléré ces phénomènes. La thématique de l’assistanat par exemple : à mesure que s’est développée la crise sociale, les politiques sociales ont développé des effets de représentation très pervers. En effet, avec les seuils d’accès à un certain nombre de prestations sociales, des fractures sont apparues dans les classes populaires.
L’« assisté » – celui qui y a droit – s’opposant au travailleur – celui qui n’y a pas droit. Sur cette base, l’alliance décrite par Terra Nova entre les classes supérieures et les plus paupérisés peut fonctionner à plein sur une série de thématiques telles que le logement social ou la santé en mettant de côté les couches populaires salariées. Les services essentiels étant dès lors réservés à la fine couche de celles et ceux qui en ont le plus besoin.
J’ai tenu à commencer par les problématiques de racialisation du débat public et les divisions au sein des salariés, car ces représentations contribuent profondément aux divisions du corps social. Et en découle pour nous la nécessité de représentations alternatives qui rassemble la classe salariée. Un certain nombre de questions en découlent. La première d’entre elles est la suivante : nous le voyons, l’idéologie, les politiques de représentation, ce que j’ai appelé la culture, ont un effet puissant sur le réel et le transforment en s’appuyant sur les contradictions de notre société. Nous avons donc besoin d’un écosystème culturel qui travaille les trois grandes questions : la nation, le peuple, la démocratie. Pour le dire avec les mots d’un autre, en l’occurrence Rémi Lefebvre, il faut « structurer des alliances autour de mots d’ordre susceptibles d’unifier des demandes sociales hétérogènes ».
Le rapport avec le Congrès est le suivant : comment nos discours s’agissant des trois grandes sphères de la société – la sphère nationale en liaison nouvelle avec l’Europe et le monde, la sphère économique et sociale et la sphère démocratique – cessent d’agir chacun de manière autonome pour résonner en écosystème, en ensemble unificateur, en opérateur de valeurs, de lutte et d’action ? Sur ce sujet, mon hypothèse est la suivante : l’entrée dans la nouvelle période historique ne concerne pas que nous. Cela affecte l’ensemble du champ mobilisable : intellectuel, syndical, populaire. Et le problème n’est pas tant de leur faire signer des appels électoraux que de créer un espace de travail réel. Ainsi, j’ai la conviction qu’il faudrait décider de créer une coopérative de travail, qui échappe aux problèmes de pouvoir immédiat et de débat politique dans le Front de gauche. Il faut un lieu de renaissance pour la pensée révolutionnaire avec l’aide des différents organismes existants mais qui dépasse le fractionnement. D’une certaine manière, l’Appel des économistes atterrés ou l’Appel des appels participent de cette recherche. Mais un saut qualitatif doit être fait. Comme à de grands moments de l’histoire du PCF, l’anticolonialisme, le Front populaire, la Résistance, nous devrions prendre rendez-vous avec l’Histoire et déclencher le mouvement nécessaire de travail pour la pensée et l’action communiste et de transformation sociale.
À présent, quelques remarques dans l’ordre de la politique et de notre stratégie de rassemblement, le Front de gauche
Comment être utiles au peuple et à la France, à l’Europe et à l’humanité ? Je traiterai la question de nos rapports avec la majorité gouvernementale puis de notre stratégie de rassemblement, le Front de gauche. La première question est : au nom de quoi, de qui parlons-nous ? En d’autres termes, au nom de la gauche ou d’une partie de la gauche ou au nom des intérêts de notre peuple et de notre pays ? Cette question n’est pas anodine, car il me semble que la posture politique, c’est-à-dire nos rapports avec la majorité gouvernementale, doivent passer au second plan par rapport à notre objectif premier, l’intérêt général. L’interview de François Hollande dimanche dernier marque l’atterrissage entre une tactique électorale, la fameuse guerre à la finance, et la réalité de sa stratégie économique, l’austérité et l’espérance d’un retour de la croissance en 2014.
L’expression du Premier ministre appelant à un « choc de compétitivité » est de ce point de vue effrayant de clarté. Je ne reviendrai pas, cela a déjà été fait dans le rapport d’actualité politique, sur les effets d’une telle politique. Je veux juste faire la remarque suivante : la situation est dangereuse, les conséquences sociales seront dures, les conséquences politiques potentiellement dramatiques. Ainsi, nous sommes face à nos responsabilités. Déclarons-nous l’affaire entendue et adoptons-nous la posture du combat désespéré et de l’attente d’un pouvoir futur ? Ou cherchons-nous à inverser la situation ? En 2005, si nous avions fait l’hypothèse d’un rapport de forces immuable, nous aurions bloqué les possibilités de mouvement de l’électorat socialiste vers le NON. Il faut donc considérer qu’un mouvement est possible parmi l’électorat socialiste, de gauche, populaire, parmi un certain nombre de dirigeants de la social-démocratie vers le refus de l’austérité et pour une autre politique. La Chine, les États-Unis d’Amérique, notre continent et leurs dirigeants sont tous face à ce problème : nous sommes à l’heure des grandes transformations, de la nécessité d’un basculement radical du système économique mondial et cette perspective provoque une reprise en main tout aussi radicale et autoritaire des forces du capital sur les principaux leviers de gestion de l’économie.
Alors comment être utiles ? C’est la seule question. Comment être utiles pour contribuer à l’accouchement d’une politique nouvelle ? Comment battre l’austérité comme seule réponse ? À cette aune, la question du rapport au gouvernement actuelle est seconde. Le problème n’est pas de faire arbitrer au peuple un match entre le Parti socialiste et le Front de gauche, mais de faire arbitrer deux choix politiques : l’austérité ou le développement. C’est dans ces conditions, me semble-t-il, que nous devons aborder à la fois nos rapports avec le gouvernement et l’avenir du Front de gauche.
L’avenir du Front de gauche : un nouveau Front populaire
J’y viens donc. Avec le Front de gauche, la séquence politique qui vient de se clore a permis une avancée spectaculaire : le retour des forces critiques du capitalisme sur la scène politique. Nous sommes de retour, nous sommes de nouveau dans le match. Mon sentiment est que le plus difficile commence. Car il ne s’agit plus d’unir des familles, des militantes et des militants dispersés par la longue histoire. Il s’agit à présent de poursuivre un déploiement qui dépasse nos frontières actuelles, de viser une hégémonie culturelle nouvelle. Et à partir de cet instant, la vitalité de notre rapport au monde salarié, aux syndicalistes, aux intellectuels, à la création, aux citoyens sur l’ensemble du territoire se pose avec cette ambition à l’esprit. Car ce n’est plus seulement un problème d’en haut, un problème électoral, un problème d’efficacité de la parole médiatique, c’est un problème d’en bas/en haut, de développer le Front de gauche en dépassant les hiérarchies institutionnelles. C’est la question d’un Front populaire de type nouveau. Souvenons-nous les différentes étapes. Souvenons-nous que c’est l’ouverture aux élections européennes avec notre secrétaire nationale d’alors, Marie-George Buffet, qui ouvre la voie au Front de gauche et permet l’engagement de Jean-Luc Mélenchon et de ses amis. Nous sommes à une étape similaire et différente. Similaire car nous savons que les forces disponibles pour s’opposer à l’austérité et pour une nouvelle politique sont bien plus nombreuses que l’état actuel du Front de gauche. Différente car ces forces par leur nature, intellectuelle, populaire, dans le monde syndical, ne nous rejoindront pas par un accord politique mais par une démarche de travail, d’action et de luttes. C’est la question d’un nouveau Front populaire. J’ai évoqué dans la partie précédente l’hypothèse d’une coopérative. Cela ne résout que la partie que j’ai appelée culturelle du problème. Reste l’organisation du travail politique et l’association à un niveau local et national de ces forces disponibles. Un équilibre imparfait a été trouvé entre le rapport des forces politiques entre elles et le Conseil national de campagne durant l’élection présidentielle. Il faut une nouvelle ouverture, un nouveau mouvement, un nouvel équilibre. Sur ce sujet, nous proposons que le Comité exécutif entame une série de rencontres afin de travailler avec nos interlocuteurs dans le monde syndical, associatif, intellectuel à la résolution de ce problème. Il s’agit de trouver les voies pour réaliser l’agrégation de nouvelles forces.
Nous avons construit un premier pilier, celui de l’unité politique. Pourquoi ne pas proposer d’ajouter deux nouveaux piliers : un pilier des luttes sociales, syndicales, populaires et un pilier, avec la coopérative, de la participation des intellectuels. Et je veux ajouter s’agissant du Front de gauche que la question du rapport en tant que tel avec les autres forces politiques est posée. Sauf à considérer une fois pour toutes que nous sommes la solution et eux le problème, la question de nos rapports, en tant que Front de gauche, conflictuels ou non, avec le reste de la gauche est posée. Allons-nous ignorer qu’une partie importante des Verts et au moins un tiers des socialistes sont opposés au traité ? Le Front de gauche doit entrer en débat avec les autres forces de gauche. Dans le même temps, nous aurons à discuter de la préparation des deux prochaines échéances, d’abord municipales au printemps 2014 puis européennes en juin. Deux échéances électorales différentes, aux enjeux différents à la fois pour le pays et pour l’avenir du Front de gauche et du Parti communiste français. Et à nouveau se posent des problèmes de conceptions. Sur les européennes par exemple, allons-nous réussir à créer avec le refus du traité un Front antiaustérité plus large que le Front de gauche actuel ? L’intervention de la direction du Parti a permis de lever certains des blocages qui existaient dans le collectif unitaire. Pouvons-nous aller plus loin ? Nous le pensons. Le Front de gauche, dans sa forme et son fonctionnement actuel, n’est pas le début et la fin de tout. Nous entendons qu’il continue d’être un mouvement qui agrège, qui rassemble les forces mobilisées contre l’austérité et pour une sortie de crise sociale et démocratique. Ainsi, il s’agira de préparer aussi les futures échéances sans esprit conservateur mais avec l’idée d’un Front de gauche en mouvement.
Enfin dans l’ordre de l’avenir du Parti communiste français
Le vingtième siècle des communistes a été déterminé pour une large part par la Révolution russe de 1917 puis surtout par l’existence pendant soixante-dix ans de l’Union soviétique. Ce modèle, longtemps adulé puis apprécié avec des critiques plus ou moins prononcées, a définitivement failli à la fin des années 1980, même si les approches caricaturales les plus véhiculées d’hier et d’aujourd’hui ne doivent pas faire l’économie d’une approche distanciée de ce qu’a représenté ce système. La matrice bolchevique qui lui était liée a longtemps représenté l’idéal révolutionnaire contre un réformisme socialdémocrate, durablement concurrencé par cette expérience, notamment en Europe occidentale et particulièrement en France. Mais il a aussi engendré des interrogations douloureuses au sein du mouvement communiste lui-même mais également avec le socialisme historique. En effet, les communistes français ont connu dans ce long processus, certes des heures de gloire, mais auss plusieurs crises majeures qui ont entraîné des prises de distances, des ruptures violentes créant des divisions durables au sein de la galaxie qui se réclamait de l’ambition communiste, des oppositionnels divers aux courants trotskystes. De 1930 aux années 1990, ces séparations apparurent la plupart du temps comme indépassables, au point d’être restées vivaces jusqu’à une période très récente. Mais en ce début de XXIe siècle, les divisions et points de rupture du « court vingtième siècle » n’ont désormais plus lieu d’être : vingt ans après la disparition de l’URSS, les raisons qui ont séparé pendant des décennies ces sensibilités ont disparu ; qui oserait stigmatiser aujourd’hui les « staliniens », « trotskystes » ou autres épithètes du même type, caractérisations issues des luttes internes au Parti bolchevik des années 1920-1930 ? Des débats continuent bien évidemment de se poser (sur la démocratie, l’État, le rôle des institutions, des réformes, etc.) mais le mouvement émancipateur que représente l’idéal communiste doit être désormais capable de réunir des courants qui, ensemble, partagent ou peuvent partager les mêmes objectifs fondamentaux. Sans faire de raccourcis rapides, souvenons-nous de quelques leçons de l’histoire : dans les années 1970, les libéraux de toutes obédiences ont su taire leurs divergences passées pour préparer la contre-révolution idéologique et économique des années 1980-1990 ; le mouvement politique que nous souhaitons construire, la force communiste dans un front plus large, doit être à la hauteur du défi qui reste d’inverser la tendance que nous lèguent ces douloureuses années, en construisant une nouvelle hégémonie qui puisse durablement changer le rapport de forces actuel.
Dans ce contexte, il ne suffit pas de dire que le Parti communiste français entend rassembler tous les communistes. Il faut le prouver et dire ce que nous entendons par là. Et en donner les signes visibles. Avant d’entrer dans le vif du sujet, je veux faire une précision par rapport à nos débats passés. Il ne s’agit pas à mon sens d’entrer en négociation politicienne avec tel ou tel groupe sur la base d’identités supposées. Il s’agit, dans l’objectif d’une culture commune, de préciser, en théorie et en pratique, les conditions par lesquelles elle se crée. De ce point de vue, je veux dire quelques mots d’une des apories de nos débats : la question de l’efficacité et de la pluralité. À la suite de la période d’ossification stalinienne, nous avons navigué entre deux eaux pour ouvrir notre débat interne : protéger la pluralité de l’expression et, dans le même temps, nous avons été confrontés au problème du respect de nos décisions majoritaires. Cette recherche s’est faite avec plus ou moins de bonheur, plus ou moins de bazar, plus ou moins de débat.
Je pense, quant à moi, que ces problèmes peuvent se résoudre simplement. Il y a deux sphères relativement autonomes dans ce débat : la sphère des plates-formes politiques (du Parti, ou du Front de gauche, ou d’autres...) et la sphère du débat d’idées. La première obéit à la loi de la majorité et aux règles classiques des processus démocratiques. Ainsi, nous adoptons à différents moments le point d’équilibre politique pour mener les combats nécessaires. Et à ces processus s’attachent éventuellement des mesures d’ordre, de discipline électorale, notamment, plus ou moins strictes selon les contextes. C’est le moment de la décision politique. Ce moment de la décision ne doit être rien d’autre qu’un moment de décision inscrit dans le temps. Le danger survient lorsque nous prétendons que la décision ponctuelle ferme le débat d’idées. Parenthèse évidente, le danger survient également lorsque nous prétendons qu’il n’est nul besoin de décider évidemment. Ainsi, la décision politique majoritaire ne peut pas, ne doit pas affecter la qualité et la liberté du débat d’idées. Agréger, coaliser un nombre supérieur de citoyens au sein de notre parti, c’est nécessairement accroître notre diversité, les savants disent entropie, philosophique, économique, politique. Et il faut l’accepter et la développer en postulant qu’en augmentant notre niveau de confrontation intellectuelle et politique, et donc d’efforts, nous forgerons une culture commune plus dense et plus efficace. La deuxième question que je veux traiter est celle des chats et des moutons que j’ai traitée à l’université d’été. Nous étions moutons, nous sommes devenus chats... À la terrasse ensoleillée d’un café montreuillois, mon partenaire de discussion philosophique estivale osa cette image... Nous étions moutons, nous sommes devenus chats... et qu’il est difficile de constituer un troupeau de chats ! C’est une image du réel que je crois très juste. Elle résume l’un des problèmes de l’avenir. Réussir à unir une foule qui n’est plus une foule, réussir à constituer en troupeau des consciences dont la forme actuelle est constituée d’une volonté farouche de souveraineté individuelle et d’autonomie personnelle. Ainsi, ce que nous appelons transformation de la politique ou des partis, ou du Parti communiste français pour ce qui nous intéresse en premier lieu, n’est pas un chantier contingent des petites vicissitudes du présent, c’est la recherche d’une culture pratique nouvelle de l’action politique qui puisse entrer en résonance puissante avec les profondes transformations culturelles de notre civilisation qui ont félinisé notre rapport personnel au monde et à l’action collective. Pour le meilleur, comme pour le pire, c’est-à-dire de la compétition libérale sans rivage. Jusque-là, l’affaire est assez simple.
Jusque-là, c’est-à-dire en mots. Cela se complique immédiatement en pratique. Car le discours d’une culture nouvelle de notre action n’est pas, malheureusement, performatif. De grandes organisations humaines, scientifiques, économiques, artistiques affrontent les mêmes difficultés. C’est le problème de toutes les grandes révolutions : les outils de la révolution précédente restent formidablement efficaces et ceux de la suivante formidablement compliqués. Et pourtant, les exemples sont désormais légion de projets humains auxquels la forme coopérative donne une efficacité décuplée. Les troupeaux de chats ont désormais la possibilité de se former et dans le troupeau chacun conserve, développe et partage ses propres compétences, ses propres appétences, son autonomie propre. Les formes du développement de l’intelligence sont en train de changer, les processus créateurs se diffusent, se distribuent, la figure du démiurge est en train de se reconstruire pour devenir un produit collectif. Ainsi, paradoxalement, les chats sont moins chats qu’il n’y paraît et la révolution actuelle reformule et intensifie la question collective...
La transformation et le rayonnement du Parti
C’est la question de la transformation du Parti qui est posée et des processus coopératifs. C’est ce que Paul Boccara appelle aussi la révolution dans le domaine anthroponomique. Je cite : « C’est l’autre face de la révolution informationnelle pour la vie humaine, la révolution du numérique et de la télécommunication des informations, avec les ordinateurs personnels, permettant un accès de chaque individu aux informations de toutes sortes, et leur circulation dans tous les sens. » Je cite à nouveau : « Pour une nouvelle civilisation, une maîtrise de tous les moments de la vie par chacun, il ne suffit pas de nouveaux pouvoirs, il faut une autre culture ».
Ce problème n’est pas simple. Et ne se résume pas au basisme du style « vive la base » ou « vive les chefs » ou « chacun fait ce qu’il veut ». Je ne pense pas que le passage du centralisme autocratique au féodalisme soit un progrès. Il s’agit de trouver les formes pratiques qui permettent un essor de l’implication de chacune et de chacun. Nous avions pris des décisions au dernier Congrès ; nous en avons mis en oeuvre quelques-unes ; le Parti s’est transformé dans l’intervalle et dans l’action mais le saut qualitatif n’a pas été fait. Il faut donc répondre à nouveau et dans l’efficacité à cette question du comment.
Je veux conclure cette dernière partie par l’évocation d’un problème que je pense central. Les dynamiques sociales spontanées favorisent les couches sociales les plus intégrées. La dénonciation uniforme des élites a au moins ceci de bon qu’elle pointe le réel : la représentation décrochée du réel, l’éradication des couches populaires des lieux de pouvoir, la quasi disparition sur une longue période des organisations politiques dans les quartiers populaires, leur disparition des instances des partis politiques, et du nôtre, moins vite, avec moins d’ampleur, peut-être, mais du nôtre tout de même. Vous savez, c’est le moment dans le Congrès où nous appelons le rapport de la Commission des mandats. Et à cette occasion, nous constatons la surreprésentation des fonctionnaires et des professions intermédiaires. Un débat plan-plan s’ensuit, il se conclut généralement en eau de boudin, parfois dans l’anathème, ouvriérisme, que sais-je d’autre, ou dans un discours velléitaire. Ou encore, nous décidons d’ateliers sur les quartiers populaires ou les entreprises parmi dix autres sujets. Les faits restent, têtus, et les dynamiques sociales spontanées favorisent toujours les mêmes couches sociales.
Nous avons donc un problème à traiter qui peut se résumer de manière abrupte de la manière suivante : comment sélectionnons-nous et formons-nous nos élites ? Élite, de l’ancien français eslit, c’est-à-dire « choisi », ancien participe passé du verbe élire. Au fond, c’est actuellement les dynamiques sociales dominantes qui choisissent celles et ceux que nous pensons choisir nous-mêmes. Et cette question est évidemment reliée à la forme de notre action politique : enfermée dans les institutions ou dans les institutions et la solidarité concrète, les luttes, la politisation et l’éducation populaire ?
Conclusion
J’ai utilisé en début de rapport l’expression texte fondateur. J’ai eu tort. J’aurais dû parler d’un texte et d’actes fondateurs. La situation historique présente nous offre une occasion : nous sommes unis par rapport aux périodes passées, ce congrès peut être un congrès d’Union et le temps historique a ouvert une fenêtre nouvelle. Un des symboles des Lumières, c’est l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert. Un des symboles de la naissance du communisme, c’est le Manifeste. C’est-à-dire des sommes de travail qui produisent des effets culturels et politiques puissants en unifiant ce qui était là en gestation. Il faut se donner les moyens pour que Lucien Sève, pour que Paul Boccara, pour que Jean-Loup Amselle, pour que Bernard Thibault et bien d’autres, pour que nos nouveaux adhérents, pour que nos anciens adhérents, pour que de nombreux syndicalistes, pour qu’une partie de la jeunesse puisse identifier un acte de renaissance de l’ambition communiste et donc d’un processus de travail ouvert et nouveau. Nous avons besoin que le congrès d’Aubervilliers soit l’un des lieux de la renaissance de l’ambition révolutionnaire, un lieu qui installe un nouveau récit pour le Parti communiste français ancré dans l’avenir.
Faut-il tenter d’écrire un manifeste pour une civilisation humaine avec toutes celles et tous ceux qui le voudront ? Faut-il se donner l’objectif d’élire lors des prochaines élections des centaines de citoyens à l’image de la France d’aujourd’hui, en ayant comme point de repère l’union des couches dites populaires et des couches dites moyennes ? Faut-il se donner comme objectif d’être la force du travail ? Faut-il proposer la création d’un Congrès mondial pour la paix et le développement ? Faut-il publier un ouvrage collectif sur l’écologie, un deuxième sur notre conception du communisme ? En d’autres termes, quelles sont les voies qui feront que le congrès d’Aubervilliers provoque une coagulation dans la société du travail en vue du dépassement du capitalisme ?
J’y vais plus directement. Quand je vois à l’université d’été des universitaires ou des journalistes ouvrir grands les yeux et découvrir la réalité, l’ouverture, la jeunesse du Parti communiste français, j’ai des envies criminelles qui montent. Pas contre eux, contre moi, contre nous. Ce n’est pas possible de continuer à se trimballer un tas de préjugés, de vieilleries sur notre compte : il faut faire éclater notre réalité nouvelle, notre mouvement, notre puissance pacifique au service de l’intérêt général. Il faut que Pierre Laurent fasse une dizaine de grands meetings consacrés au Congrès et à la situation du pays et du monde. Il faut que chaque journaliste qui écrira sur le PCF soit confronté pendant le Congrès à 400 de nos nouveaux adhérents. Il faut reprendre le drapeau de la France, des ouvriers et dans le même temps faire un grand congrès international de liaisons avec les mouvements politiques et sociaux des différents continents. Il faut faire éclater l’existence d’une organisation politique européenne, le PGE, il faut des signes, tangibles et pas bling-bling d’une nouvelle alliance avec quelques-uns des grands penseurs de ce pays. Il faut un grand congrès de la fierté communiste, des valeurs et un congrès de décisions qui balaie les petits calculs de petites boutiques et de petits pouvoirs pour créer une dynamique renouvelée au Front de gauche et au Parti communiste français. Il faut que la vie bruyante et généreuse se fraye un chemin.
Le processus formel de préparation du Congrès
J’en viens à présent aux questions formelles. Le Comité exécutif national propose que le 36e Congrès se tienne aux Docks d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), métro Front populaire. Par son vote, nous vous proposons que le Conseil national convoque le Congrès du 7 au 10 février 2013 avec trois points à l’ordre du jour : 1) La résolution politique : sortir de la crise ; gagner le changement / changer la société ; refonder l’ambition communiste ; 2) Les statuts ; 3) L’élection des directions.
Nous proposons également d’adopter l’échéancier suivant au terme des statuts :
• A partir de ce 13 septembre et jusqu’au 13 et 14 octobre : appel à contributions.
• 13-14 octobre : CN d’adoption d’une base commune et du texte de statuts.
• 17 novembre : date limite de publication des textes alternatifs à la base commune.
• Envoi des textes aux communistes
• 5 décembre : vote des communistes pour choix de base commune.
• Conférences de section et fédérales 15 décembre et janvier 2013.
S’agissant des commissions, nous vous proposons quatre commissions présidées par :
• texte : rapporteur Pierre Dharréville
• statuts : présidée par Isabelle De Almeida
• direction : présidée par Jacques Chabalier
• transparence : présidée par Fabienne Halaoui
En plus de ce dispositif, le Comité exécutif propose que j’assure la direction du Congrès, c’est-à-dire la coordination de l’effort interne et public à partir de la Fête de l’Humanité et jusqu’à la fin du Congrès. Pierre Laurent, notre secrétaire national, en dira quelques mots.
Voilà, chers camarades, les quelques idées que j’étais chargé de vous présenter. L’histoire nous joue des tours parfois... Il est temps de renverser les rôles et de jouer des tours à cette satanée histoire. Je vous remercie.
Un reportage dans les camps de réfugiés palestiniens au Liban.
Réalisation : Chris Den Hond et Mireille Court. Tournée en juillet 2012
Traduction AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/
Le Haut commissariat aux droits de l'Homme des Nations unies, Human Rights Watch(HRW) et le rapporteur de la commission d'enquête de l'ONU pour la Syrie admettent que l' « opposition syrienne » commet toutes sortes d'atrocités dans la campagne pour renverser le gouvernement de Bachar el-Assad.
S'adressant au Conseil des droits de l'Homme, Navi Pillay, qu'on ne peut guère soupçonner de sympathies pour le gouvernement syrien, a dénoncé le fait que « les groupes anti-gouvernementaux utilisent des mineurs comme soldats », un crime qui s'ajoute au « recours à des franc-tireurs qui tirent sur des civils » et les « tortures, détentions arbitraires et exécutions sommaires », des pratiques qui, insiste la responsable, sont constatées également du côté du gouvernement.
Pillay n'avait jamais admis officiellement les atrocités commises par les terroristes en Syrie. Ses déclarations – qui insistent également sur des accusations réitérées de bombardements contre les civils, supposément perpétrés par les autorités de Damas – sortent après que le rapporteur de la Commission de l'ONU pour le pays, Paulo Pinheiro, a lancé une mise en garde contre la progression exponentielle des « violations flagrantes des droits de l'Homme, en nombre, rythme et intensité ».
Dans son rapport, Pinheiro a confirmé également la présence « croissante et alarmante » de combattants islamistes étrangers parmi les miliciens et les a accusé de radicaliser le conflit.
Dans la même veine, Human Rights Watch a accusé les bandes armées de torturer et d'exécuter les prisonniers, en donnant les exemples de plus d'une dizaine de cas documentés à Idleb, Alep, Latakia.
Pinheiro et Pillay défendent l'idée que le Conseil de Sécurité adopte une position interventionniste en Syrie, dont l'objectif, disent-ils, serait de mettre un terme au conflit, une position à laquelle la Russie et la Chine ont opposé leur veto.
Moscou et Pékin exigent d'abord que les puissances impérialistes cessent de soutenir les insurgés. Le fait est que toutes les semaines des éléments se font jour attestant de ce soutien.
Ces derniers jours, l'armée du Liban a annoncé la confiscation d'une nouvelle livraison d'armes destinée aux mercenaires syriens. Par ailleurs, sont parvenus entre les mains de l' « opposition » 400 tonnes d'équipement lourd, a affirmé ce vendredi 14 septembre le quotidien britannique Times. Parmi ces armes lourdes, des missiles sol-air et des lance-roquettes provenant de Libye.
Le trafic se produit via la Turquie, où, selon un ancien responsable de la CIA, Philip Giraldi, dans un entretien à un quotidien turc, se trouveraient des agents secrets nord-américains, français, allemands, britanniques chargés de soutien les groupes armés.
Une partie de leur mission est de trier les candidats au mercenariat, des candidats qui pourraient augmenter significativement si se confirmerait l'accord secret signé récemment entre les Etats-unis, l'Arabie saoudite et un seigneur de guerre yéménite pour le transfert de milliers de djihadistespour la Syrie.
Source: Avante, organe du Parti communiste portugais
Selon le site « Secret défense », de Jean-Dominique Merchet, un exercice conjoint des forces militaires française et saoudienne aura lieu en Corse dans la première quinzaine d’octobre. Selon cette source, si l’affaire est menée en toute discrétion, la coopération avec l’Arabie Saoudite, la Jordanie, le Qatar et les Émirats est « très active ». Étonnant, non ? Rien que des « démocraties » ! Ce sont les rois et des princes arabes serviteurs de l’Empire !
Donc, « discrète, la coopération française (…) est très active » ! On peut se poser des questions sur les buts poursuivis. D’autant plus qu’une force militaire est qualifiée de « spéciale » quand elle a la compétence « spéciale » de pouvoir agir clandestinement, dans des situations de guerre non déclarée, comme ce qui s’est passé en Libye et ce qui se passe actuellement en Syrie.
Quand deux armées font des exercices en commun, le but est de vérifier si les techniques de combat, les matériels mis en œuvre, la chaîne de commandement, et toutes ces choses qui font l’efficacité militaire, sont compatibles. Alors, pourquoi l’Arabie Saoudite et pourquoi en Corse ? Pourquoi l’Arabie Saoudite s’intéresse-t-elle à une zone d’opération méditerranéenne, loin de ses bases ? Quel coup tordu mijote le gouvernement avec ce pays ? Quels objectifs communs les forces spéciales de ces deux pays peuvent-elles avoir ?
Une chose est sure, des activités militaires avec l’Arabie Saoudite et les autres pays du Conseil de Coopération du Golfe ne sentent pas bon.
DR
site:Resistance-politique.fr
Surprises, surprises… Si l’on en croit la presse allemande, le trou dans les caisses d'Athènes serait, selon la troïka, beaucoup plus important que prévu : à savoir 20 milliards d’euros au lieu des 11,5 milliards annoncés précédemment.
Cette nouvelle a été à peine ébruitée que le ministre des finances d'Athènes (lundi 24 septembre, NDLR) se fendait d’un démenti. Pourtant, les chiffres publiés résonnent dans les media grecs comme la preuve définitive - et tragique - de l'inefficacité et de l'iniquité des énormes sacrifices imposés aux jeunes, aux travailleurs et aux retraités au nom d'un assainissement des caisses de l'État.
Que ce fameux trou soit supérieur aux estimations initiales avait déjà été anticipé par l’hebdomadaire allemand Der Spiegel. Ce dernier avait en effet annoncé la semaine dernière que les autorités grecques devaient impérativement trouver 14 milliards d’euros pour répondre aux « exigences financières », soit trois milliards de plus que prévu. Mais ces chiffres déjà passablement inquiétants ont été largement dépassés par les informations diffusées ces dernières heures par les « experts » qui, après n’avoir eu de cesse d’organiser des coupes sombres dans le budget national, admettent aujourd’hui le désastre tout en n’assumant aucunement leurs responsabilités dans la situation actuelle.
Que va faire maintenant le gouvernement grec ? Continuera-t-il, comme il l’a déjà fait par le passé, à demander à la troïka quelques mois supplémentaires pour payer ses dettes… tout en sachant qu’il n’y a plus rien à tirer d’un pays désormais au bord de l’explosion sociale ? À en croire les dernières déclarations faites par les ministres grecs et leurs homologues communautaires, parmi lesquels le puissant et omniprésent Wolfgang Schäuble, on peut craindre que oui.
En attendant, les Grecs sont de plus en plus sceptiques quant à l’efficacité des plans de leur gouvernement et de la troïka, même s'ils continuent de penser qu'il est préférable que le pays reste dans la zone euro (c’est du moins ce qui ressort d'une enquête récente). Et aujourd'hui commence une énième journée, une énième semaine de grèves contre les coupes sombres imposés à Antónis Samarás par Bruxelles et de Francfort. La semaine commence avec une grève de vingt-quatre heures des journalistes alors que, sur le plan de la santé, l'Ordre des pharmaciens a décidé de ne plus distribuer de médicaments tant que l’État ne se sera pas acquitté des arriérés qu’il doit.
Quant aux syndicats, ils ont appelé à une grève générale de vingt-quatre heures qui devrait toucher tous les secteurs, public et privé. Plusieurs manifestations sont par ailleurs prévues à travers tout le pays. Le point d’orgue de la contestation sera le rassemblement qui aura lieu mercredi 26 septembre à 11 heures sur le Champ-de-Mars à Athènes. Les syndicats ont décidé, contrairement à ce qui se passe habituellement, de maintenir en activité le métro pour permettre à un maximum de manifestants d'atteindre le centre de la capitale.
Et c’est dans ce climat que reprendront lundi prochain (1er octobre, NDLR) les négociations entre le ministre des finances grec, Yannis Stournaras, et les représentants des créanciers internationaux de la Grèce, les Allemands Matthias Mors (Union européenne) et Klaus Mazuch (Banque centrale européenne) et le Danois Paul Tomsen (Fonds monétaire international), pour définir le nouveau paquet de coupes budgétaires pour l'exercice 2013 - 2014, en échange de l'octroi de la nouvelle tranche de 31,5 milliards d'euros « d’aide ».
Capitaine Martin
site: Résistance.fr
Une provocation a été montée de toute pièce par un citoyen étasunien d’extrême-droite, qui a déjà fait de la prison pour escroquerie, sous la forme d’un film d’une islamophobie grossière dont les acteurs n’étaient pas informés.
Ce film a été utilisé et traduit en arabe par une télévision intégriste égyptienne pour enflammer quelques milliers de ses partisans et les jeter dans la rue pour protester contre ce film qui circulait sur Youtube. Ensuite, la mèche allumée, les impérialistes et les intégristes pouvaient se réjouir : les médias aux ordres pouvaient illustrer la “guerre de civilisations”.
Les intégristes ne sont donc pas, contrairement à ce que certains musulmans de bonne foi peuvent croire, des ennemis de l’impérialisme américain. Ils en sont les meilleurs alliés.
Pourquoi ?
Parce que les intégristes sont réactionnaires, obscurantistes et non pas progressistes et révolutionnaires. Nous parlons non seulement des intégristes se réclamant de l’Islam au risque de défigurer cette religion, mais des intégristes « néo-conservateurs » américains – partisans du lobby des armes, maladivement homophobes, partisans des croisades militaires à outrance, adeptes du millénarisme et dont les vues néolibérales plongent des continents entiers dans la misère et l’injustice.
Parce que les intégristes amènent les peuples dans des impasses politiques, la théocratie ne pouvant offrir la moindre issue aux peuples.
Parce que les intégristes ne combattent pas le capitalisme et donc l’impérialisme, au contraire ils combattent les communistes, les progressistes, croyants ou non croyants, les partisans de l’égalité des sexes, afin de défendre les milliardaires des pays musulmans: c’est pourquoi les oligarchies d’Arabie Saoudite ou du Qatar financent et arment les intégristes.
Parce que les dictatures réactionnaires arabes ou d’autres régions du monde ont utilisé les intégristes comme troupes de choc contre les progressistes, les communistes, les démocrates arabes ou pakistanais ou indonésiens.
Parce que les États-Unis d’Amérique ont soutenu les Ben Laden et autres “combattants de la liberté” tant qu’ils égorgeaient les Afghans progressistes ou les jeunes soldats de l’Armée soviétique. Pour faire saigner les “rouges”, puis pour déstabiliser l’Algérie indépendante, intégristes et CIA marchaient la main dans la main.
Quant au 11 septembre 2001 à qui a le crime a-t-il profité ? Aux impérialistes qui ont trouvé là un prétexte pour agresser l’Irak et l’Afghanistan, plongeant ces pays dans des guerres civiles chroniques, pour le plus grand profit du grand capital US et local.
Parce que les intégristes sont encore la force de frappe des impérialistes en Syrie, une Syrie menacée du même sort que l’Irak et que la Libye. S’appuyant sur le légitime mécontentement des masses contre des régimes brutaux et corrompus, les impérialistes introduisent, via leurs alliés locaux comme l’Arabie Saoudite et le Qatar, une fausse alternative qui ne remet pas en cause leurs intérêts : les intégristes.
Voilà de quoi les manifestations très minoritaires qui se déroulent dans certains pays arabes et en France sont le symptôme, sans oublier la volonté de lutte de ces peuples contre des impérialistes qui sont, alliés aux pétro-potentats locaux, les responsables de la misère et des guerres dans ces région du monde.
Face aux frères ennemis de la croisade et du djihad (avec à l’arrière-plan les projets bellicistes des intégristes et aventuristes qui dirigent actuellement Israël) la bonne réponse n’est évidemment pas de répondre à la provocation par la provocation, comme le fait la rédaction de Charlie Hebdo en toute irresponsabilité. Bien entendu, tout journaliste et tout dessinateur a le droit d’écrire ce que bon lui semble en vertu d’une liberté d’expression – et même d’un droit au « blasphème » que garantit par nature la laïcité des Etats séparés des religions. Mais la contrepartie est que les rédactions concernées n’ont pas le droit de pousser des cris d’orfraie quand les courants idéologiques ridiculisées ripostent – pourvu que ce soit dans le cadre du débat démocratique.
La vraie réponse de fond au jeu mortel des Croisés occidentaux et de leurs frères ennemis djihadistes, c’est, en France, en Europe et dans le monde entier, de développer le combat de classe anticapitaliste, antifasciste, laïque et anti-impérialiste en unissant les exploités et les démocrates croyants et non-croyants.
Dans l’immédiat, retrouvons-nous ensemble[...] contre le TSCG, contre l’euro, l’UE et la mondialisation capitaliste, pour la République une, laïque, sociale, souveraine et indivisible !
FAIRE ECHEC AU TRAITE BUDGETAIRE EUROPEEN
ET ENGAGER UN PROCESSUS DE SORTIE DE L'EURO ET DE L'UNION EUROPEENNE.
Publié le mardi 25 septembre 2012 - Les graphiques ci-dessus permettent de constater que les écarts entre les prix théoriques et les prix réels sont plus importants pour la Corse que pour les réseaux du département des Bouches-du-Rhône.
Un carburant moins cher en théorie, plus cher en pratique. C'est ce qui ressort de l'étude commandée par l'Agence de développement économique de la Corse sur le prix de l'essence qui vient d'être présenté devant la commission des finances de l'assemblée de Corse.
Sans surprise, ce rapport corrobore les multiples études menées jusqu'à présent. Seule nouveauté : le cabinet spécialisé Vialtis Consulting International précise clairement les mécanismes de formation du prix des carburants.
Le constat est simple : malgré l'effort fiscal, le prix des carburants est plus élevé pour les consommateurs corses que pour les ménages continentaux: +5 centimes par rapport au réseau traditionnel et + 11 centimes par rapport au réseau low cost (GMS).
La Corse paye son insularité
Pourquoi le carburant est-il plus cher dans l'île ? Le surcoût logistique et les marges importantes des opérateurs expliquent cette flambée des prix. Le rapport s'intéresse d'abord à l'avantage « fiscal partiel » de la Corse sur le carburant. D'un côté, la Corse bénéficie d'une TVA et d'une TICPE réduite. Avec une TVA à 13 % (au lieu de 19,6%) et pas de taxe intérieure de consommation prélevée par la collectivité territoriale - contrairement à la plupart des régions - le prix de base est impacté. D'un autre côté, la Corse est pénalisée par la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) dues par les entreprises pétrolières qui n'utilisent pas de biocarburants et font augmenter les prix à la pompe de 4 ou 5 centimes par litre. S'il n'y a pas de biocarburants dans l'île, c'est justement parce que les cuves de stockage sont obsolètes et que l'investissement pour les sociétés privées qui les exploitent serait trop lourd au regard de la population.
Outre la vétusté des dépôts de stockage, le coût total du transport impacte les prix. Il serait de 18 centimes par litre.
La Corse paye là, son insularité.
Le déchargement entre également en jeu. Pour Bastia par exemple, il n'existe pas de quai pétrolier mais un sea-line reliant le navire au dépôt. En cas de mauvaise météo, le navire ne peut décharger et l'armateur facture des indemnités pour l'immobilisation du navire.
Autre problème : l'organisation du transport secondaire, marqué par la forte saisonnalité avec l'approvisionnement des stations dispersées, est aussi coûteuse.
Les marges élevées pointées du doigt
Reste le dernier facteur : les marges des opérateurs qui font flamber le prix de l'essence dans l'île. En Corse, la population est moins dense et les stations-service moins nombreuses. Les enseignes de grande distribution, qui pratiquent généralement des prix plus faibles, ne sont pas présentes et la compétition se joue entre quelques enseignes ; elles sont seulement quatre (Vito, Total, BP et Esso) à se partager le marché du carburant. Conséquence : une situation quasi monopolistique qui profite à la poignée de distributeurs présents et tire les prix vers le haut. « L'écart entre ce qui est et ce qui devrait être s'explique par des surplus de marges prises à tous les niveaux de la chaîne de distribution et par l'ensemble des acteurs impliqués», explique le rapport. Et de conclure : « Le dispositif fiscal spécifique à la Corse permet de compenser en grande partie les coûts objectifs de l'insularité. Toutefois, des marges de distribution supérieures à celles constatés sur le continent maintiennent un niveau de prix à la pompe plus élevé ».
Que faire pour inverser la tendance ? Le rapport évoque une série de pistes : l'encadrement des prix en Corse ; une réflexion de fond sur la TGAP ; une réflexion sur les conditions de déchargement avec par exemple la construction d'un nouveau dépôt à Porto-Vecchio ; l'implantation de stations service dans les grandes surfaces...Certaines de ces pistes ont retenu l'attention de l'Adec. L'agence de développement économique prend le problème à bras-le-corps. Elle souhaite réunir tous les acteurs et mettre en place des groupes de travail pour tirer les prix vers le bas. Vaste chantier. Une fois ces séminaires terminés, le président de l'Adec présentera son rapport et les mesures préconisées devant les élus de l'assemblée de Corse, probablement durant le premier trimestre 2013. En attendant, le rapport conseille... le covoiturage.