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CHANTS REVOLUTIONNAIRES

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20 novembre 2007 2 20 /11 /novembre /2007 10:42
HUMA-f--te3.jpgDANS "L'HUMANITE"  du  20 Novembre 2007

                                                

1) Editorial par Pierre Laurent

Que de « privilégiés » !

La grève d’aujourd’hui s’annonce comme l’une des plus puissantes qu’ait connues la fonction publique ces dernières décennies. Elle s’ajoute dans le paysage social aux grèves de la SNCF, de la RATP et d’EDF-GDF, qui, au-delà de la seule question des régimes spéciaux de retraite, portent de nombreuses revendications sur l’avenir de ces services publics, de leurs missions et de la qualité de leurs emplois. Cette journée verra également converger la mobilisation étudiante qui s’enracine dans les établissements universitaires à propos du devenir du service public d’enseignement supérieur. Et pendant ce temps-là, la colère grandit chaque jour dans les tribunaux contre une réforme de la carte judiciaire menée à la cravache par Rachida Dati, au mépris de la plus élémentaire des concertations. Quant au secteur privé, il regorge d’exemples où la situation de l’emploi et celle du pouvoir d’achat provoquent les plus vives inquiétudes des salariés.

Que vaut dès lors la ligne de défense de l’Élysée qui tente de réduire le débat social dans le pays à la caricature d’un bras de fer entre quelques salariés « privilégiés » d’un côté et un gouvernement « décidé à réformer malgré les conservatismes » de l’autre ? L’application du programme présidentiel soulève en réalité une résistance très nettement grandissante dans le pays pour une double raison.

La première de ces raisons est l’aversion pour des méthodes gouvernementales et patronales brutales qui consistent à tout imposer sans jamais rien discuter ni négocier. Cela ne suffit pas de répéter qu’on a été élu. Car l’exercice du pouvoir ne dispense pas de la concertation démocratique. Imagine-t-on un maire qui une fois l’élection municipale passée gérerait sa commune comme le président entend gérer la France, à sa botte ?

La seconde de ces raisons tient à la prise de conscience - qui s’opère visiblement assez rapidement - que les conséquences concrètes de l’application du programme présidentiel n’ont pas grand-chose à voir avec les solutions qu’elles étaient censées apporter aux problèmes quotidiens les plus pressants des Français. Il ne reste déjà plus grand monde pour croire qu’en 2008, avec la politique Sarkozy, on va « gagner plus », même en « travaillant plus ».

Ces dernières semaines, le gouvernement a passé beaucoup de temps à opposer les salariés entre eux, à diviser les Français, à caricaturer ceux qui osaient lui résister, mais qu’a-t-il fait pour trouver de réelles solutions aux problèmes d’emploi, de pouvoir d’achat, de protection sociale, de sécurité du logement ? Rien, et cela commence à beaucoup se voir. L’hyperactivité médiatique du président ne peut éternellement donner le change.

Les salariés demandent, une fois de plus, des comptes et des réponses, car ce pays ne renonce décidément pas à trouver, même quand il zigzague de gauche à droite, le chemin du progrès social, et c’est tant mieux. Dès lors, le débat national sur les choix politiques, les choix de société qu’il convient d’opérer pour l’avenir du pays est relancé par les mobilisations sociales actuelles. Pour justifier son refus de toutes négociations, Nicolas Sarkozy a besoin de continuer à faire croire qu’il est le seul à vouloir réformer, que ses projets sont l’unique espoir de changement. Ouvrir le débat sur d’autres voies de changement et de réformes que celles portées par la droite est donc indispensable pour conforter les mobilisations actuelles et leur permettre d’engranger des acquis.

Promouvoir les services publics, inventer de nouveaux financements solidaires pour les retraites de demain, investir dans l’augmentation des salaires et la qualité des emplois, sécuriser ces mêmes emplois au lieu de les précariser…, ce n’est pas défendre des acquis dépassés, s’accrocher à des vieilles lunes, c’est faire des choix pour l’avenir qui ne s’appellent pas mise en concurrence et guerre économique, mais solidarité et progrès social partagé.

 

2)Aujourd’hui, les mouvements se rencontrent

Grèves. La journée de mobilisation dans la fonction publique sur le pouvoir d’achat et l’emploi s’annonce très suivie. Les syndicats veulent des négociations "immédiates"

Même le secrétaire d’État à la fonction publique a dû le reconnaître hier : la grève des fonctionnaires va être « largement suivie ». Les organisations syndicales sont, sur ce point, d’accord avec André Santini. « la mobilisation s’annonce très significative », assure Jean-Marc Canon, secrétaire général de l’UGFF-CGT. « On est déjà sûr que le taux de grévistes va être important », annonce Jean-Michel Nathanson, porte-parole de Solidaires fonction publique tandis que Gérard Aschieri, leader de la FSU, considère que « l’éducation est sur la voie d’une grève majoritaire ». Aujourd’hui, c’est au tour des agents de la fonction publique d’entrer dans la danse avec deux revendications principales : un gel des 22 900 suppressions d’emplois inscrites au budget 2008 avec ouverture d’un débat sur les missions des services publics ; une « négociation immédiate » en bonne et due forme sur le pouvoir d’achat.

Intersyndicale mercredi

Fait « exceptionnel », les huit fédérations de fonctionnaires ne se sont pas contentées de déposer chacune un préavis de grève il y a dix jours. Elles ont doublé cette initiative d’un préavis commun. Dans le texte, elles insistaient sur leur totale disponibilité pour engager des négociations salariales « immédiates ». Normalement, le « préavis » de grève définit une période pendant laquelle l’employeur est tenu d’engager des discussions afin de dénouer le conflit. Cette fois-ci encore, l’État employeur a fait la sourde oreille. « Nous avons un gouvernement qui nous rebat les oreilles avec le dialogue social mais laisse venir la grève sans négocier », dénonce Jean-Marc Canon. Le préavis de grève, qui couvre les 5,5 millions d’agents est de 24 heures. Mercredi soir, l’intersyndicale se réunit. Sans geste du gouvernement, les syndicats préviennent qu’ils donneront des « suites » au mouvement, sans s’interdire aucune forme d’action. Ce qui se passe n’a rien à voir avec un « mouvement de mauvaise humeur », prévient Gérard Aschieri. Les fonctionnaires affrontent en effet, un feu croisé des réformes, Nicolas Sarkozy ayant annoncé le 19 septembre à Nantes, dans un discours spécifique, vouloir « refonder la fonction publique ». Les suppressions de postes ne passent pas car non seulement, elles rendent plus difficile les conditions de travail mais elles contribuent à dégrader la qualité du service rendu aux usagers. « On veut porter le débat sur les missions du service public », souligne Jean-Marc Canon. Cette inquiétude se double d’un ras-le-bol sur les salaires. Les cheminots ont fait leur compte sur leur retraite, les fonctionnaires sur leur pouvoir d’achat. La perte se chiffre à près de 7 % depuis 2000. « C’est une situation sans précédent », s’insurge encore le responsable cégétiste. D’autant plus, ajoute Gérard Nogues, que « loin d’être des privilégiés, une majorité d’agents gagnent le SMIC et des broutilles ».

Concomitance de luttes

Dans la rue, les fonctionnaires vont donc l’être sur leurs revendications propres, mais aux côtés des étudiants, qui appellent à se joindre aux cortèges et des cheminots qui vont envoyer des délégations. « Les mouvements sont différents mais le lien va se faire dans la rue », explique Gérard Nogues, qui ajoute qu’« au bout du bout, le point commun, c’est le pouvoir d’achat. Les petits salaires font de petites retraites, plus encore après le nouvel allongement de cotisation pour tous que le gouvernement prépare en 2008 ». Les fonctionnaires, eux, ont subi la réforme des retraites de 2003, celle-là même qui touche aujourd’hui les salariés des régimes spéciaux. « Conséquence, le niveau des pensions baisse car les agents qui partent subissent la décote et des inégalités entre les hommes et les femmes se creusent », regrette Gérard Aschieri. « Aujourd’hui, les mouvements se rencontrent. On sera plus fort tous ensemble », se réjouit Jean-Michel Nathanson tandis qu’Éric Fritsch, responsable de l’UFFA-CFDT appelle à se « concentrer pour que notre image ne soit pas déformée par celle des autres mouvements ». Jean-Marc Canon note tout de même l’intérêt d’une « concomitance des luttes ». Pour lui aussi, l’idée que le rendez-vous de 2008 sur les retraites va inscrire de nouvelles régressions pour tous les salariés est « une idée qui monte ».

Paule Masson

 

3) médias :Sarkozy place ses hommes

Presse . Le chef de l’état l’a décidé : Nicolas Beytout va aux Échos et Étienne Mougeotte au Figaro.

Alors que la Tribune a ouvert hier ses colonnes aux patrons du CAC 40 (lire notre édition d’hier), Nicolas Sarkozy, lui, continue, imperturbable, de placer ses hommes. Fort de son expérience de conseiller quand Elkabbach ne sait pas qui nommer au service politique d’Europe 1, vendredi, le locataire de l’Élysée aura profité d’un rendez-vous avec des journalistes des Échos, dont le directeur de la rédaction Erik Izraelewicz, pour leur annoncer que Nicolas Beytout, jusque-là directeur des rédactions du Figaro, allait être leur nouveau chef !

Ce que les salariés des Échos craignaient depuis que Bernard Arnault, le patron du groupe LVMH (et accessoirement témoin de mariage de Sarkozy), lorgne sur ce journal se sera réalisé peu de temps après que ce dernier s’en soit emparé : la confusion des genres et des rôles règne en maître sur la presse en France puisqu’elle voit le président de la République désigner qui chapeautera telle ou telle rédaction. Un signe fort à l’heure où les journalistes réclament une loi pour garantir l’indépendance des rédactions.

Car c’est à un véritable jeu des chaises musicales auquel on assiste. Beytout prenant la tête de DI Group, le pôle médias de LVMH actuellement en pleine mutation (vente de la Tribune et acquisition des Échos), avec pour mission de le renforcer, il devrait être remplacé au Figaro par Étienne Mougeotte, ancien vice-président de TF1 depuis peu à la tête du Figaro Magazine. « Autant dire que si l’on avait failli sortir les bouteilles de champagne quand Beytout avait été annoncé à TF1, là, on va les laisser dans les placards, nous explique un journaliste. Parce qu’on est en pleine expectative. Que Beytout s’en aille, tant mieux. Reste qu’il faisait encore plus ou moins rempart avec Serge Dassault. Là, le mur risque d’être moins solide. Surtout qu’on ne sait pas qu’elle va être le degré d’investissement d’un Mougeotte. Quand Beytout était directeur des rédactions du Figaro, il était en fait omniprésent dans le journal. Là, Mougeotte pourrait se contenter de superviser. Mais, en ce cas, on risque de ne pas en avoir fini avec les guerres de succession en interne pour savoir qui sera calife à la place du calife. »

Alors qu’une AG de la société des rédacteurs devait se tenir hier en fin d’après-midi au Figaro après que Beytout ait annoncé en comité de rédaction son départ, c’est aujourd’hui, lors d’un conseil d’administration, que Mougeotte devrait être nommé. Il devrait être flanqué de Jean-Michel Salvator (jusque-là directeur délégué) et remplacé par Alexis Brézet au Figaro Magazine. Publication qui, samedi, aura encore fait preuve de son sens de la mesure puisque titrant avec un Sarkozy remontant sa cravate : « Face aux grèves, pourquoi il a eu raison de tenir ». Comme si elles étaient déjà terminées !

Aux Échos, où se sont déroulées hier plusieurs AG, on fait la grimace. Mais on n’est guère surpris : « Ça fait longtemps qu’on évoquait ce scénario. Mais là, de voir que c’est avec l’aval de Sarkozy qu’il se concrétise, c’est tout sauf rassurant, assure un syndicaliste. Parce que Beytout, on l’a déjà pratiqué. » Et de se souvenir du « soulagement » de la rédaction quand en 2004, il était parti pour le Figaro. On appelle ça un retour à l’envoyeur. Dans l’attente d’un renvoi d’ascenseur ?

Sébastien Homer

 

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