mercredi 3 mars 2010

                      Monsieur CASANOVA Jean-Baptiste

31 rue du Taravo La Confina 20167 Mezzavia


  Monsieur,

Vous avez souhaité connaître la position du Front de gauche concernant la détention légale d’armes. Après le drame qui a frappé la communauté étudiante à Corté et au delà plongé dans la stupeur toute la Corse, aborder cette question en faisant abstraction de ce contexte n'est pas chose facile.

Si l'instrument ne détermine pas l'acte de celui qui s'en sert, dans le contexte actuel, de perte des repères nécessaires au respect du vivre ensemble, la prolifération des armes est un problème grave qui accentue les risques. S'affranchir du cadre légal en fait partie et on ne peut faire abstraction de cette réalité. Dans le cas contraire la banalisation prend le dessus et les effets pervers peuvent être terribles. Tous les détenteurs d'armes ne sont pas des assassins, c'est une évidence mais il y a un effort de pédagogie, notamment auprès des jeunes, à réaliser pour réduire les risques, sinon à néant, le plus possible. Les pratiques encadrées de tir sportif et de chasse le permettent et nous saluons ceux qui, comme vous, s'emploient à cette tâche.

Par conséquent, nous ne sommes pas convaincus qu'une interdiction totale des armes suffirait à régler le problème des violences ou des crimes de sang dont la Corse est le théâtre depuis plusieurs années. Il y a un enjeu majeur, qui dépasse cette réflexion, dans l'objectif justement de changer radicalement la nature des rapports sociaux à plus forte raison dans une société marquée par la pauvreté. L'histoire nous enseigne en effet que dans le mal vivre les conditions sont souvent réunies pour nourrir toutes les frustrations et parfois les dérives de comportement. La violence clandestine où la prégnance du gangstérisme dans notre société ne peuvent, non plus, être ignorées dans cette réflexion sur la place et le rôle des armes dans la société. Pour ce qui nous concerne nous condamnons l'une et l'autre en réaffirmant la nécessité, à laquelle elles font obstacle, d'une action populaire et démocratique pour changer la vie quotidienne de milliers de Corses frappés par la précarité, le chômage, la cherté de la vie, la pénurie de logement sociaux, l'insuffisante couverture sanitaire...

Chasseurs, amateurs de tirs et collectionneurs doivent donc pouvoir exercer leur passion dans le cadre légal établi mais plus encore dans une société où le vivre ensemble et le vivre mieux occupent la première place.

La priorité qui est la nôtre est de ce fait tournée vers l'amélioration des conditions de vie de la population. Le système libéral basé sur la compétitivité économique, qui laisse nombre de personnes dans l’indigence, ne fonctionne pas. Notre projet politique est d'en prendre l'exact contre-pied et de répondre aux besoins vitaux de chacun, d’assurer une activité socialement utile en harmonie avec la nature et le respect de l’homme.

Voilà la sécurité dont a besoin la Corse plus que d'une politique du tout sécuritaire qui ne fait qu'aggraver les tensions en laissant entières les difficultés posées par la dégradation des conditions de vie du plus grand nombre. Le budget de la collectivité, réorienté vers une politique sociale, peut changer radicalement la société dans laquelle nous vivons et proposer, aux jeunes et moins jeunes, un cadre de vie nouveau, un épanouissement individuel sportif, culturel et familial.

En espérant avoir répondu à vos attentes, je vous prie de croire Monsieur en l'expression de nos sincères salutations.

Dominique BUCCHINI