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CHANTS REVOLUTIONNAIRES

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21 octobre 2012 7 21 /10 /octobre /2012 13:41

                                                                         lvres en ligne 1027                                                

 

L'histoire contemporaine toujours sous influence
Annie Lacroix-Riz

Ed:Le temps des Cerises    12 E.

 En 2004, dans un pamphlet intitulé L’histoire contemporaine sous influence, Annie Lacroix-Riz s’inquiétait d’une certaine dérive de la recherche historique depuis les années 1980. Le climat idéologique s’est alourdi avec la généralisation d’un certain révisionnisme historique pour lequel toute révolution serait liberticide. Ces nouveaux dogmes conduisent aussi à censurer où à mettre à l’index les travaux des historiens qui continuent à penser hors des sentiers battus. Depuis, de « réforme » de l’université en nouvelles lois sur les archives, la situation s’est aggravé. S’est banalisé l’histoire d’entreprise, l’histoire de connivence, qui fait l’impasse sur les épisodes les moins glorieux de la vie des entreprises ou de leurs dirigeants. En témoigne l’affaire Louis Renault qui a défrayé la chronique au début de cette année : afin d’obtenir la réhabilitation de leur ancêtre, les héritiers Renault – et certains « historiens » avec eux – ont réécrit sa biographie. Dans un contexte ou le statut de fonctionnaire est menacé, dans quelles conditions la recherche historique peut-elle être indépendante des pressions financières ?

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21 octobre 2012 7 21 /10 /octobre /2012 13:10

  Clio

Clio,la Muse de l'Histoire  

 

 

Reparution à l’occasion du centième anniversaire de sa naissance, le 25 août 2012.
Debout devant les vainqueurs, par Erich Honecker
Déclaration politique devant le Tribunal de Grande Instance à Berlin, le 3 décembre 1992
E. Honecker, Chef d’Etat de la République Démocratique Allemande, fondée le 7 octobre 1949, et dirigeant du Parti socialiste unifié allemand (SED).

 

Le 18 octobre 1989, il a démissionné de toutes ses fonctions. Dans les dernières années de sa vie, il a été de plus en plus poursuivi politiquement. Lui et d’autres membres du Conseil d’Etat et du Conseil National de la Défense de la RDA ont été accusés « d’homicide involontaire », accusation fondée sur une construction démagogique et juridiquement absurde. Il y répondait par la déclaration suivante…

 

 

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Mesdames et Messieurs ! Cette mise en examen et cette procédure judiciaire ne recevront pas l’apparence de la légalité par une défense de ma part contre l’accusation d’homicide involontaire, de toute évidence sans fondement. Ma défense est d’autant plus superflue que je ne vivrai plus au moment du verdict. La peine que vous me destinez, ne me parviendra plus. Aujourd’hui, tout le monde le sait. Même vu uniquement de ce point de vue, ce procès contre moi est une farce, une comédie politique.

Absolument personne dans les vieux lands, la ville de Berlin Ouest incluse, ne possède le droit de mettre en examen ou même de condamner mes camarades coaccusés, moi et n’importe-quel citoyen de la RDA [République Démocratique Allemande] à cause d’actes commis en remplissant des responsabilités d’Etat en RDA.

Si je parle ici, c’est seulement pour témoigner en faveur des idées du socialisme, en faveur d’une appréciation politiquement et moralement juste de la République Démocratique Allemande reconnue à l’international par plus de cent Etats. Cette république, maintenant qualifiée « d’Etat d’Injustice » par la RFA [République Fédérale d’Allemagne, notes en italiques du traducteur], fut membre du conseil de sécurité de l’O.N.U., remplit de temps en temps la présidence du conseil et une fois la présidence de l’assemblée générale de l’O.N.U.

Je n’espère pas de ce procès et de ce tribunal l’appréciation politiquement et moralement juste de la RDA. Mais cette comédie politique me donne l’occasion de porter mon point de vue à la connaissance de mes concitoyens.

Ma situation dans ce procès n’est pas inhabituelle. L’Etat de Droit allemand a déjà inculpé et condamné Karl Marx, Auguste Bebel, Karl Liebknecht et beaucoup d’autres socialistes et communistes. Le Troisième Reich a poursuivi cette politique en gardant des juges de l’Etat de Droit de la République Weimarienne pour ses procès. J’ai moi-même vécu un tel procès en tant qu’accusé. Après le démantèlement du fascisme allemand et de l’Etat hitlérien, la RFA n’avait pas besoin de chercher de nouveaux procureurs et juges pour poursuivre massivement des communistes, leur retirer travail et pain par les tribunaux du travail, et de les suspendre des services publics par les tribunaux administratifs. Maintenant c’est à nous [les communistes est-allemands] de vivre ce qu’ont vécu nos camarades d’Allemagne de l’Ouest dans les années 50. Depuis environ 190 ans règne le même arbitraire. L’Etat de Droit en RFA n’est pas un Etat de Droit, mais un Etat de droite.

Un procès politique

Il faut un argument pour ce procès comme pour d’autres procès devant les tribunaux du travail, correctionnels, sociaux, administratifs, dans lesquels sont poursuivis d’autres citoyens de la RDA pour avoir été « trop proches du système ». Les politiciens et les juristes se disent obligés de condamner les communistes, parce qu’ils n’ont pas condamné les nazis. Cette fois-ci il faut assumer le passé. Cela paraît être un argument convaincant pour beaucoup de gens. Mais il s’agit d’un pseudo-argument. La vérité, c’est que la justice allemande de l’ouest ne pouvait pas condamner les nazis, parce que les juges et les procureurs ne pouvaient pas se condamner eux-mêmes. En vérité, le niveau de la justice en RFA, quel que soit comment on la juge, est aujourd’hui dû aux nazis intégrés. La vérité, c’est que les communistes, les citoyens de la RDA sont aujourd’hui poursuivis pour les mêmes raisons qu’avant en Allemagne. Ce ne fut le contraire que pendant les 40 ans de l’existence de la RDA. Maintenant, il faut « mettre à jour tout ce qui est resté en attente ». Evidemment, tout cela est fondé sur le droit. Cela n’a absolument rien à voir avec la politique.

Les juristes de premier plan de ce pays, qu’ils soient des partis du gouvernement ou du Parti social-démocrate, nous supplient d’admettre que notre procès est une procédure pénale normale, et en aucun cas un procès politique voire un procès-spectacle. On arrête les membres des organes d’Etat suprêmes de l’Etat voisin et on déclare que cela n’aurait pas de raison politique. On dispute les décisions des généraux d’une alliance militaire ennemie et dit que cela n’aurait pas de raison politique. On qualifie de criminels ceux qu’on a honorablement reçu, hier encore, comme invités de l’Etat et partenaires dans l’effort commun pour éviter une nouvelle guerre en Allemagne. Cela aussi, n’aurait rien à voir avec de la politique.

On accuse des communistes, qui ont toujours été poursuivis depuis qu’ils sont apparus sur la scène politique. Mais aujourd’hui en RFA, cela n’a rien à voir avec de la politique.

Pour moi, et à mon avis, pour chaque personne sans idées préconçues, c’est clair : Ce procès est aussi politique qu’un procès contre la direction politique et militaire de la RDA le serait. Celui qui ignore cela ne se trompe pas – il ment. Il ment pour tromper de nouveau le peuple. Avec ce procès, on fait ce qu’on nous reproche. On se débarrasse des ennemi politiques avec les moyens du Droit pénal. Mais évidemment, tout cela est fondé sur le Droit.

D’autres circonstances font reconnaître sans mal que le procès suit des objectifs politiques. Pourquoi est-ce que le chancelier fédéral et Monsieur Kinkel, ancien chef des services secrets, plus tard ministre de la justice et encore plus tard ministre des affaires étrangères, voulaient-ils coûte que coûte me faire revenir en Allemagne, et m’enfermer à Moabit [arrondissement de Berlin, où se trouve la maison d’arrêt], où j’ai déjà été enfermé une fois sous Hitler ? Pourquoi le chancelier me laissait-il voler à Moscou, pour faire ensuite pression sur Moscou et le Chili afin qu’ils m’extradent, à l’encontre de chaque droit international civil ? Pourquoi les médecins russes devaient-ils falsifier les bons diagnostics posés sans hésitation ? Pourquoi me fait-on parader, avec mes camarades qui ne vont pas mieux que moi, devant le peuple, comme les Césars romains faisaient, à l’époque, parader leurs prisonniers ?

Aveugle ou menteur ?

Je ne sais pas si tout cela s’explique encore rationnellement. Peut-être se vérifie ici l’expression ancienne : Si Dieu veut anéantir quelqu’un, il rendra d’abord celui-ci aveugle. Tout le monde sait que tous les politiciens qui m’ont autrefois demandé une audience et qui se réjouissaient de m’en donner chez eux, ne resteront pas sans dommage. En Allemagne et ailleurs, chacun savait que des gens ont été abattus au Mur, que j’étais le président du Conseil National de la Défense (CND), le Secrétaire général, le président du Conseil d’Etat de la RDA, le plus responsable de ce Mur en tant que politicien vivant au rang le plus élevé. Il n’y a alors que deux possibilités : Soit ces Messieurs les politiciens de la RFA ont délibérément, librement et même avidement cherché à fréquenter un meurtrier, ou bien tolèrent maintenant délibérément et avec plaisir que des innocents soient accusés d’homicide involontaire. Ni l’une ni l’autre de ces possibilités ne leur sera honorable. Il n’y en a pas de troisième. Qui s’accommode du dilemme, d’être d’une manière ou d’une autre, un homme sans caractère, soit est aveugle, soit poursuit un objectif supérieur à celui de garder son honneur.

Supposons que ni M. Kohl ni M. Kinkel ni les autres Mrs. ministre-présidents et représentants des partis de la République Fédérale d’Allemagne sont aveugles (ce que je ne peux pas cependant exclure). Dans ce cas, il ne restera que l’intention de discréditer totalement la RDA et le socialisme en Allemagne en tant qu’objectif politique dans cette procédure. La défaite de la RDA et du socialisme en Allemagne et en Europe ne leur est vraisemblablement pas suffisante. Il s’agit d’anéantir tout ce qui, de cette époque où ouvriers et paysans gouvernaient, les feraient apparaître dans une lumière terrible, criminelle. On veut la défaite totale du socialisme et la victoire de l’économie de marché, comme on appelle euphémiquement le capitalisme aujourd’hui. On veut, comme le disait jadis Hitler devant Stalingrad, « que cet ennemi ne se relève jamais ». Les capitalistes allemands ont toujours eu cette tendance.

Ce but de ce procès, celui de tuer encore une fois le socialisme déjà prétendu mort, montre comment M. Kohl, comment le gouvernement et l’opposition de la RFA évaluent la situation.

Le capitalisme est économiquement destiné à mourir à force de vaincre comme l’était jadis Hitler à force de vaincre militairement. Le capitalisme a mondialement atteint une voie sans issue. Il n’a plus que le choix entre une chute dans le chaos écologique et social ou le renoncement à la propriété privée de moyens de production, donc le socialisme. Tous deux signifient sa fin. Pour les forces au pouvoir de la RFA, seul le socialisme semble apparemment être le danger immédiat. Ce procès veut l’empêcher, tout comme le veut la chasse contre le souvenir de la RDA déchue, et sa stigmatisation comme « Etat d’Injustice ».

Les morts au Mur

Dans notre pays, chaque mort non naturelle nous a toujours tourmenté. La mort au Mur ne nous a pas seulement affectés humainement, mais aussi endommagé politiquement. Depuis mai 1971, c’est moi, avant tout, qui porte la responsabilité politique générale pour le fait qu’on ait tiré, conformément au règlement de recours aux armes à feu, sur celui qui voulait franchir sans permis la frontière entre la RDA et la RFA, entre le Pacte de Varsovie et l’Otan. C’est à coup sûr une lourde responsabilité. J’ai expliqué plus tard, pourquoi je l’ai prise. Ici, en définissant l’objectif politique du procès, je ne peux m’empêcher de remarquer avec quels moyens on veut atteindre l’objectif diffamatoire du procès de la RDA. Ce moyen, ce sont les morts au Mur. Ils doivent et vont organiser ce procès, comme d’autres déjà, de façon médiatique. Il y manque les soldats de RDA, victimes de meurtres à la frontière. Nous, et surtout vous, avons déjà vu comment les images des morts sont commercialisées sans piété ni scrupule. C’est ainsi qu’on veut faire de la politique pour créer du bruit. Chaque mort est utilisé dans la lutte des patrons pour garder leur propriété privée capitaliste. Car la lutte contre le socialisme n’a aucun autre objectif. Les morts sont utilisés pour prouver l’inhumanité de la RDA et du socialisme, et comme manœuvre de diversion face à la misère actuelle et les victimes du marché. Tout cela se passe démocratiquement, tout cela est chrétien, humain est fondé sur le droit et pour le bien du peuple allemand. Pauvre Allemagne !

L’accusation : un « Etat d’Injustice »

Maintenant, venons aux faits. Les procureurs de la ville du front [Frontstadt = Berlin] nous accusent de criminalité, de meurtres infâmes. Parce qu’il est évident que nous n’avons pas tué personnellement chacune des 68 personnes, dont l’acte d’accusation nous reproche la mort, parce qu’il est évident que nous n’avons pas prémédité leur meurtre ou fait le nécessaire pour qu’ils soient tués, le ministère public m’accuse mot à mot à la page 9 :« …

[avoir commandé] en tant que secrétaire du CND et secrétaire de questions de la sécurité du Comité central du SED [Parti socialiste unifié allemand], l’aménagement du complexe frontière autour de Berlin-ouest et l’aménagement du complexe de barrage vers la République Fédérale, pour rendre impossible le passage ».

Ensuite, le procureur m’accuse d’avoir participé aux décisions dans 17 réunions du CND… à partir du 29 novembre 1961 jusqu’au premier juillet 1983 :
- de construire d’autres barrages de mines [Schrapnellmine, mine-S ?] (le mot « d’autres » faisant apparaître que les Forces armées de l’URSS avaient déjà installé de tels barrages) ;
- d’améliorer le système de la sécurité frontière, améliorer la formation de tir des soldats à la frontière ;
- d’empêcher le forçage de la frontière ;
- d’avoir déclaré personnellement, le 3 mai 1974, qu’il fallait utiliser impitoyablement l’arme de tir (ce qui n’est pas vrai) ;
- et d’avoir été d’accord avec le projet de loi sur la frontière, entrée en vigueur le 1er mai 1982.

Les accusations contre moi - contre nous - s’adressent aux décisions du CND, aux décisions d’un organe constitutionnel de la RDA. L’objet du procès est donc la politique de la RDA, l’effort du CND de défendre et de préserver la RDA en tant qu’Etat. On veut criminaliser cette politique à l’aide de ce procès. On veut donc stigmatiser la RDA comme « Etat d’Injustice » et traiter de criminels tous ceux qui l’ont servi.

L’objectif de cette procédure est la poursuite de dix milliers voire de cent milliers de citoyens de la RDA desquels parle déjà le parquet. Ce procès-ci est accompagné de procès-pilotes préparés contre les soldats de la frontière et d’innombrables procès devant les tribunaux du travail, correctionnels, sociaux, administratifs et d’autres actes administratifs qui discriminent les citoyens de la RDA.

Ainsi il ne s’agit pas de moi, ou de nous qui sommes accusés dans ce procès. Il s’agit de beaucoup plus. Il s’agit de l’avenir de l’Allemagne, de l’Europe, mais oui, du monde, lequel apparaissait tellement heureux avec la fin de la Guerre Froide et la pensée nouvelle. Ici, on ne poursuit pas seulement la Guerre Froide, c’est la pose de la première pierre pour une Europe des riches. Encore une fois et pour toujours, on veut asphyxier l’idée de la justice sociale. Notre stigmatisation comme meurtriers en est le moyen.

Je suis le dernier à me prononcer contre des mesures éthiques ou juridiques pour juger ou condamner les politiciens. Seulement, elles doivent remplir trois conditions :
- Auparavant, les mesures doivent être formulées exactement.
- Elles doivent être valables pour tous les politiciens pareillement.
- Pour décider, il faut un tribunal au-dessus des partis, un tribunal qui n’est pourvu ni des amis ni des ennemis de l’inculpé.

D’un côté, tout cela me semble compréhensible, mais de l’autre côté encore impossible dans notre monde actuel. Si vous nous faites néanmoins le procès aujourd’hui, vous le ferez au nom des vainqueurs sur les vaincus. C’est une constatation des rapports réalistes au pouvoir, mais non un acte exigeant une quelconque validité devant un Droit supra positif ou un Droit en général.

Rien que cela serait suffisant pour expliquer l’acte injustice qu’est cette accusation. Mais comme nous ne reculons pas devant le détail, je veux expliquer en détail ce que le procureur n’expose pas, soit par mauvaise intention, soit par aveuglement.

Comme déjà cité, l’acte d’accusation commence avec l’énumération chronologique des reproches avec les mots :

« Le 12 août 1961 l’accusé Honecker en tant que secrétaire du CND et secrétaire sur les questions de sécurité du Comité central du PUS, décrétait l’aménagement du complexe frontalier autour de Berlin-Ouest et l’aménagement du complexe de barrage vers la République Fédérale, pour rendre impossible le passage ».

Cette vue historique des choses parle pour elle. En 1961, le secrétaire des questions de sécurité au CC du PUS décrétait un événement historique dans le monde. Cela augmente encore l’autodérision des citoyens de RDA qui appelaient la RDA la plus grande puissance au monde. Si aujourd’hui Enno von Loewenstern veut faire de la RDA un « grand pays » pour augmenter la victoire de la RFA, pas même cet ailier droit [calembour d’extrême droite] du journalisme politique allemand n’essaye pas de faire de la RDA un pouvoir mondial. Le « service administratif le plus objectif du monde », le parquet se réserve le droit de faire ça. Devant l’histoire, chacun se ridiculise comme il veut et peut. Il est vrai que la construction du Mur a été décidée pendant une réunion des Etats du Pacte de Varsovie, le 05 août 1961 à Moscou. La RDA était un maillon important dans cette alliance d’Etats socialistes, mais pas le pouvoir dirigeant. Cela devrait être connu des tribunaux et n’a pas besoin d’être prouvé.

Car évidemment, comme je l’ai déjà dit, nous n’avons tué personne par préméditation ni provoqué d’homicide involontaire ; la construction du Mur, sa préservation et l’application de l’interdiction de quitter la RDA sans permission de l’Etat, sont considéré comme des actes meurtriers. Tout cela n’aurait aucun rapport avec la politique. Le Droit allemand en donne la possibilité. Il ne sera seulement pas valable devant l’Histoire et le bon sens. Il démontrera une fois de plus d’où il vient, de quoi il en est et où l’Allemagne s’apprête à aller.

Scission par l’ouest

A l’époque, nous tous qui assumions la responsabilité dans les Etats du Pacte de Varsovie, avons pris cette décision politique ensemble. Je ne dis pas cela pour m’en décharger et le rejeter sur d’autre ; je ne le dis que pour confirmer que cela se passait ainsi et pas autrement, et je suis toujours d’avis que cette décision était la bonne, en 1961, et restait la bonne jusqu’à la fin de la confrontation entre les Etats-Unis et l’URSS. L’objet de ce procès est justement cette décision politique et les convictions sur lesquelles elle est fondée. Il faut être aveugle ou fermer délibérément les yeux devant les faits du passé pour ne pas reconnaître ce procès comme le procès politique des vainqueurs sur les vaincus, pour ne pas reconnaître qu’il signifie une déformation politiquement motivée de l’Histoire.

Si vous tenez cette décision politique pour mauvaise et nous accusez, moi et mes camarades, de la mort de ces gens au Mur, je vous dirai que la décision inverse que vous tenez pour bonne aurait coûté la vie à des milliers ou des millions de personnes. C’était et c’est ma conviction, et je suppose aussi la conviction de mes camarades. Nous sommes ici debout devant vous à cause de cette conviction politique. Et c’est à cause de votre conviction politique différente que vous nous condamnerez.

Comment et pourquoi a t-on construit le Mur ; cela n’intéresse pas le parquet. Il n’y a aucun mot là-dessus dans l’acte d’inculpation. Les causes et les conditions sont dissimulées, la série des événements historiques est déchirée arbitrairement. C’est Erich Honecker qui a construit et qui a maintenu le mur. Basta. Le juriste fédéral allemand peut voir et expliquer aussi facilement le passé. Le principal est de traiter le communiste de criminel et de le condamner comme tel. Pourtant, chaque allemand peut savoir comment on en est arrivé au Mur et pourquoi on y a tiré. Parce que le parquet insinue que construire des murs est le propre du socialisme, comme d’y faire abattre des gens, que des « criminels » comme moi et mes camarades en auraient la responsabilité, je vais devoir, sans être historien, vous récapituler l’Histoire ayant conduit au Mur.

Son origine est lointaine. Elle commence avec le développement du capitalisme et du prolétariat. La page la plus misérable de l’histoire allemande moderne commence avec l’année 1933. En 1933, c’est connu, beaucoup d’Allemands ont élu librement le NSDAP, puis le président du Reich Hindenburg, qui a déjà été élu librement en 1932, a nommé démocratiquement au rang de chancelier du Reich Adolf Hitler. Ensuite, les précurseurs politiques de nos partis actuels, mis à part le Parti social-démocrate allemand, ont donné leur approbation à la loi donnant les pleins pouvoirs dictatoriaux à Hitler. Seuls les communistes affirmaient avant le vote en question : « Qui vote pour Hindenburg, vote pour Hitler, qui vote pour Hitler vote pour la guerre. » Quand la loi sur les pleins pouvoirs a été votée, les députés communistes étaient déjà exclus du Reichstag, emprisonnés ou reclus dans l’illégalité. Déjà à cette époque, la chute de la démocratie commençait avec l’interdiction des communistes.

Hitler à peine devenu chancelier, l’Allemagne a vécu son premier miracle économique. Le chômage fût surmonté, les obligations pour Volkswagen vendues, l’âme populaire en ébullition conduisait à la chasse et à l’assassinat des juifs. La plupart du peuple allemand était heureux et satisfait. Quand la Seconde Guerre Mondiale a éclaté et les fanfares annonçaient les victoires dans les guerres éclairs contre la Pologne, la Norvège, le Danemark, la Belgique, la Hollande, le Luxembourg, la France, la Yougoslavie et la Grèce, l’enthousiasme n’eut plus de limites. Le cœur de presque tous les Allemands battait pour leur chancelier, pour le plus grand dirigeant de tous les temps. Il n’y avait guère personne pour penser que le Reich de mille ans ne durerait que douze ans.

Après 1945, tout n’étaient plus que ruines, et le monde entier n’appartenait pas à l’Allemagne (comme on l’avait chanté dans la célèbre chanson nazie), mais aux Alliés. L’Allemagne a été divisée en quatre zones. Il n’y avait pas de liberté de circulation. A l’époque, ce droit de l’homme n’était pas valable chez les Alliés. Il n’était même pas valable pour les émigrants allemands qui comme Gerhart Eisler voulaient depuis les Etats-Unis retourner en Allemagne.

Aux Etats-Unis, on planifiait de diviser pour toujours l’Allemagne en plusieurs Etats (comme à l’époque le plan de Morgenthau). Ces plans ont amené Staline à dire cette phrase souvent citée : « Les Hitler viennent et partent, le peuple allemand et l’Etat allemand restent. » L’URSS ne parvint pas à l’unité souhaitée de l’Allemagne. L’Allemagne fût divisée en deux pour longtemps en passant par la fondation de la bizone, de la tri-zone, la réforme de la monnaie séparée et finalement la fondation de la République Fédérale Allemande, voilà le résultat de la guerre froide annoncée à partir de 1947 par les Etats-Unis. Cette division ne fut pas l’œuvre des communistes, comme le prouve l’ordre chronologique des faits, mais l’œuvre des Alliés de l’ouest et de Konrad Adenauer. La fondation de la RDA a suivi temporairement et logiquement la fondation de la RFA. Finalement existèrent deux Etats allemands côte à côte. Mais la RFA n’a pas voulu reconnaitre la RDA et vivre en paix avec elle. La RFA demandait en plus la représentation exclusive pour l’Allemagne entière et pour tous les Allemands. Aidée par ses alliés, elle décrétât contre la RDA un embargo économique et essayât ainsi d’isoler économiquement et politiquement la RDA. C’était une politique d’agression non militaire que conduisait la RFA contre la RDA. C’était la forme politique de la guerre froide sur le sol allemand. C’est cette politique-là qui conduisait au Mur. Après que la RFA soit devenue membre de l’Otan, la RDA s’est rattachée au Pacte de Varsovie. Ainsi les deux Etats allemands s’affrontèrent comme membres de deux alliances ennemies.

De multiples points de vue, la RFA était supérieure à la RDA : en quantité de population, en force économique et dans ses relations politiques et économiques. A la suite du plan Marshall et par de moindres réparations de guerre, les charges consécutives à la guerre ont été moins graves pour la RFA. Elle avait plus de ressources naturelles et un plus grand territoire. Elle profitait de cette multiple supériorité envers la RDA à tout point de vue, mais surtout en promettant des avantages matériels aux citoyens de la RDA s’ils émigraient de leur pays. Beaucoup de citoyens de la RDA se laissèrent tenter et faisaient ce qu’attendaient d’eux les politiciens de la RFA : Ils « votaient avec les pieds ». Après 1945, le succès économique ne motivait pas moins les Allemands qu’en 1933.

La RDA et leurs Etats alliés du Pacte de Varsovie se retrouvaient en situation difficile. La politique du roll back semblait mener au succès en Allemagne. L’Otan s’appliquait à élargir sa sphère d’influence jusqu’à l’Oder. JPEG - 15.9 ko Fidel Castro en visite en RDA, le 2 Avril 1977

Le monde au bord de l’abîme

En 1961 se déclenchait en Allemagne une situation de tension à cause de telle politique compromettant la paix mondiale. L’Humanité était au bord d’une guerre atomique. Les Etats du Pacte de Varsovie décidèrent ainsi de la construction du Mur. Personne ne prenait cette décision d’un cœur léger. Pas seulement parce qu’elle séparait des familles, mais parce qu’elle était le signe d’une faiblesse politique et économique du Pacte de Varsovie face à l’Otan qui ne pouvait être compensée qu’avec des moyens militaires. Hors d’Allemagne, des politiciens importants reconnaissaient, après 1961, que la construction du Mur avait détendu la situation mondiale. Franz Joseph Strauß écrivait dans ses mémoires : « La crise n’était pas seulement levée avec la construction du Mur, mais en principe aussi terminée, même si ce fut d’une manière peu réjouissante pour les Allemands. » (p. 390). Juste avant, il reporta le plan de largage de bombes atomiques sur le territoire de la RDA. (p. 388)

De mon point de vue, il n’y aurait eu ni le Traité fondamental [entre les deux Etats allemands, en 1972] ni Helsinki ni l’unité allemande, si l’on n’avait pas construit le Mur, à l’époque, ou si on l’avait détruit avant la fin de la guerre froide. C’est pourquoi, à mon avis – tout comme mes camarades – je ne me suis rendu coupable d’aucune faute juridique, ni politique ou morale en disant oui au Mur et en y restant fidèle. Dans l’histoire de l’Allemagne, on remarquera, même si c’est certainement en marge, que beaucoup d’Allemands autant de l’Ouest que de l’Est souhaitent de nouveau le Mur.

Mais il faut aussi se poser la question de ce qui se serait passé, si nous avions agi comme ce que le parquet considère comme une évidence. C’est à dire, si nous n’avions pas construit le Mur, et accordé à chacun le droit de sortir de RDA à partir de 1961. Il ne faut pas se livrer à de grandes spéculations pour s’imaginer les résultats d’une telle politique. Il faut seulement savoir ce qui s’est passé en 1956 en Hongrie et en 1968 en Tchécoslovaquie. Tout aussi bien comme là-bas, les troupes soviétiques de toute façon présentes en RDA seraient intervenues. En 1981 en Pologne aussi, Jaruzelski proclamait le Droit de la guerre pour empêcher une telle intervention.

Une telle aggravation des événements, comme le parquet nous l’a demandé tout naturellement en tant qu’action politique, morale et juridique, aurait signifié le risque d’une troisième guerre mondiale. Nous ne voulions pas, nous ne pouvions pas et n’avions pas le droit d’accepter ce risque. Si cela est un crime à vos yeux, vous vous condamnez vous-même, avec votre jugement, devant l’Histoire. Cela en soi n’a pas d’importance. Mais l’important est que votre jugement sera un signal qui ouvrira brusquement les vieux fronts au lieu de les fermer. Face au danger d’un effondrement écologique du monde, vous manifestez la vieille stratégie de la lutte des classes des années 30 et la politique du pouvoir qui a rendue célèbre l’Allemagne, depuis le chancelier de fer [Bismarck].

Si vous nous condamnez à cause de notre décision politique de 1961 à 1989, et je suppose que vous le ferez, vous ne rendrez pas seulement un jugement sans fondement juridique, pas seulement comme un tribunal partial, mais aussi sous le non-respect complet des habitudes politiques et des comportements des pays qui jouissent en tant qu’Etats de Droit de votre respect le plus haut.

Je ne veux et ne peux pas compter dans cette circonstance, les cas où des décisions politiques ont revendiqué la vie de gens, durant ces 28 ans, parce que je ne veux pas abuser de votre temps et de votre sensibilité. Aussi, je ne me rappelle pas de tout. Je veux évoquer seulement les suivants :
- En 1961, le président Kennedy décidait d’envoyer des troupes au Vietnam pour faire la guerre jusqu’en 1973, à la place des Français vaincus, contre les Vietnamiens qui luttaient pour leur liberté, leur indépendance et leur droit à l’autodétermination. Cette décision du président des Etats-Unis, qui signifiait une atteinte éclatante aux droits de l’Homme et au droit international, n’a été critiquée en aucune forme par le gouvernement de RFA. Les présidents des Etats-Unis Kennedy, Johnson et Nixon n’ont été déférés devant aucune justice, aucune ombre n’a été jetée sur leur honneur, du moins pas à cause de cette guerre. A cette occasion, aucun soldat us-américain et aucun soldat vietnamien n’a pu décider librement, s’il voulait se rendre ou pas en danger de mort à cause de cette guerre injustifiée.
- En 1982, l’Angleterre faisait appel aux troupes pour que les îles Malouines restent colonie de l’Empire. La « Dame de fer » s’en assurait une victoire à l’élection et sa réputation n’a pas été endommagée, même pas après avoir perdu aux élections. Aucun discours d’homicide involontaire.
- En 1983, le président Reagan ordonnait à ses troupes l’occupation de la Grenade. En Allemagne, personne ne jouit d’une plus grande réputation que ce président des Etats-Unis. Pas question que les victimes de cette opération ne soient pas mort légitimement.
- En 1986, Reagan a fait bombarder les villes de Tripoli et Bengazi dans une expédition punitive sans se demander si ses bombes ont atteint des coupables ou des innocents.
- En 1989, le président Bush ordonnait par la force des armes l’enlèvement du général Noriega de Panama. Des milliers de Panamiens innocents ont été tués à cette occasion. De nouveau, aucune tare ne marquât le président des Etats-Unis, encore moins n’a-t-il été accusé d’homicide involontaire ou de meurtres.

On pourrait élargir l’énumération à volonté. Parler seulement du comportement de l’Angleterre envers les Irlandais devrait être admis comme indécent.

Après, ce que font les armes de la République Fédérale Allemande chez les Kurdes turques ou parmi la population noire en Afrique du Sud, on pose certainement des questions rhétoriques, mais personne ne compte les morts et personne n’indique les coupables.

Ici je n’ai qu’énuméré les Etats particulièrement reconnus comme Etats de Droit, avec seulement quelques-unes de leurs décisions. Chacun peut comparer le rapport entre ces décisions et la décision de construire un mur à la frontière entre Pacte de Varsovie et Otan.Vous direz qu’on n’a pas le droit de décider sur les actions d’autres pays.

Vous direz que tout cela ne vous intéresse pas. Mais je pense qu’on ne peut pas rendre le jugement de l’Histoire sur la RDA sans que soient pris en considération les événements qui se déroulaient dans d’autres pays à cause du combat entre les deux blocs, à l’époque de l’existence de la RDA. Je pense de plus que des actions politiques ne peuvent être jugées que sur l’esprit de l’époque. Si vous fermez les yeux devant ce qui se passait dans le monde à l’extérieur de l’Allemagne de 1961 jusqu’à 1989, vous ne pouvez pas rendre de jugement juste.

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Timbre refusé par la Deutsche Post_ pour la célébration des 100 ans de la naissance de Honecker

« J’ai vécu pour la RDA »

Même si vous vous limitez à l’Allemagne et si vous comparez les décisions politiques des deux Etats allemands, un bilan sincère et objectif se terminerait en faveur de la RDA. Celui qui refuse le droit du travail et le droit au logement à son peuple, comme c’est le cas en RFA, est prêt à accepter qu’on vole l’existence d’un grand nombre de personnes au point qu’ils ne voient plus d’autre solution que d’en finir. Le chômage, l’absence de domicile fixe, la consommation abusive de stupéfiants, des délits pour se procurer de la drogue, la criminalité en général sont tous les résultats d’une politique favorable à l’économie du marché. Même des décisions qui semblent politiquement neutres comme la limitation de vitesse sur les autoroutes, sont la conséquence d’une entité politique, dans laquelle non pas les politiciens librement élus, mais les grands patrons de l’industrie ont leur mot à dire. Si la section en matière de délits gouvernementaux du procureur général au tribunal régional supérieur dirigeait une fois son regard sur cela, j’aurais bientôt la possibilité de serrer à nouveau la main des représentants de la RFA - Mais cette fois-ci à Moabit. Naturellement, cela n’arrivera pas, parce que tous les morts de l’économie de marché perdent « légalement » leur vie. Je ne suis pas celui qui peut faire le bilan de l’Histoire de la RDA. Le temps n’est pas encore là. Le bilan sera fait par d’autres, plus tard.

J’ai vécu pour la RDA. J’ai assumé, en particulier depuis mai 1971, une part considérable de la responsabilité pour son Histoire. Ainsi, je suis affaibli en raison de l’âge et de la maladie. Néanmoins, à la fin de ma vie j’ai la certitude que la RDA n’a pas été fondée pour rien. Elle a ouvert la voie pour montrer que le socialisme peut être possible et meilleur que le capitalisme. Elle était une expérience qui a échoué. Mais jamais l’humanité n’a cessé de chercher de nouvelles voies et expériences. Maintenant, il reste à élucider les raisons pour lesquelles l’expérience a échoué. Certes, elle a échoué aussi, parce que nous, c’est à dire les responsables de tous les pays socialistes, avons commis des fautes évitables. Entre autres aussi, elle a certainement échoué en Allemagne parce que les citoyens de la RDA, comme d’autres Allemands avant eux, ont mal choisi et parce que nos ennemis ont été encore supérieurs.

L’expérience de l’Histoire de la RDA avec celle de l’Histoire des autres pays socialistes seront utiles pour les millions gens dans les pays socialistes encore existants et pour le monde à venir.

Celui qui s’est donné à fond dans son travail et dans sa vie pour la RDA n’a pas vécu pour rien. De plus en plus d’« Ossi » [surnom de ceux qui viennent de L’Allemagne de l’Est – par opposition aux « Wessi », qui viennent de l’ouest] se rendront compte qu’ils furent moins déformés par leurs conditions de vie en RDA que les « Wessi » par l’économie « sociale » du marché, que les enfants de la RDA grandissaient plus insouciants, plus heureux, plus éduqués et plus libres, dans les crèches, les maternelles et les écoles que les enfants dans les écoles, et dans les quartiers dominés par la violence en RFA. Les malades se rendront compte qu’ils n’étaient pas des objets commerciaux pour le marketing des médecins, mais des patients dans les institutions de santé publique en RDA, malgré le retard technique. Les artistes comprendront que la soi-disant ou vraie censure en RDA était moins hostile à l’art que la censure du marché. Les citoyens feront l’expérience de n’avoir pas consacré tellement de temps disponible à la bureaucratie de la RDA et à la chasse aux articles rares comme à la bureaucratie de la RFA. Les ouvriers et paysans se rendront compte que la RFA est un Etat de patrons (c.à.d. des capitalistes) et que la RDA ne s’appelait pas sans raison l’Etat des ouvriers et paysans. Des femmes estimeront supérieur les droits qu’elles ont eu en RDA : le droit d’égalité et le droit de décider d’elles-mêmes de leur corps. Beaucoup diront en découvrant la loi et le droit de RFA, comme le disait Madame Bohley, qui maudit les communistes : « Nous avons voulu la justice. Nous avons reçu l’Etat de Droit. » Beaucoup de gens comprendront aussi que la liberté de voter entre CDU/CSU, SPD et FDP ne représente que la liberté d’un vote fictif.

Ils s’apercevront qu’ils ont eu dans leur vie quotidienne en RDA une liberté largement plus grande qu’aujourd’hui, en particulier sur leur lieu de travail. Enfin, le cocon protecteur et sécuritaire garanti à ses citoyens par la petite RDA - pauvre par rapport à la RFA - ne sera plus mésestimé comme évidente, parce que maintenant le quotidien du capitalisme montre clairement à chacun son vrai visage. JPEG - 15.7 ko
Rencontre avec Angela Davis, pendant la Fête mondiale de la jeunesse et des étudiants à Berlin/RDA, début août 1973

Une chasse aux sorcières moderne

Le bilan des quarante ans d’Histoire de la RDA aura une tout autre allure que celui que les politiciens et médias de RFA veulent inventer. Cela se clarifiera avec le temps.

Ce procès contre nous, les membres du Conseil national de la défense de la RDA, ressemble à un procès de Nuremberg contre des communistes. Cette opération est condamnée à échouer. En RDA, il n’y avait aucun de camps de concentration, aucune chambre à gaz, aucune de condamnations à mort politiques, aucun tribunal du peuple, aucune Gestapo [police d’Etat sous Hitler], aucun SS. La RDA n’a jamais fait la guerre et n’a pas jamais commis de crimes de guerre ni de crimes contre l’Humanité. La RDA était un Etat antifasciste conséquent, qui jouissait d’une grande réputation internationale pour avoir toujours défendu la paix.

Le procès contre nous en tant que « grands » de la RDA est une contradiction flagrante selon l’expression « c’est toujours le petit qui trinque ». Notre jugement servira ainsi à ouvrir parfaitement voie pour « faire trinquer » les petits. Même si jusqu’à présent, on n’a jamais fait preuve de retenue.

Le procès servira de base à la stigmatisation de la RDA en tant qu’« Etat d’injustice ». Un Etat gouverné par des « criminels » comme nous, des « meurtriers », ne peut qu’être un « Etat d’injustice ». Quiconque fut proche de lui, citoyen de RDA conscient de ses devoirs, devra en porter les stigmates. Un « Etat d’injustice » ne peut avoir été gouverné et soutenu que par des « organisations criminelles » comme le MfS [ministère de la sécurité de l’Etat, surnommé stasi] et le SED [Parti socialiste unifié allemand]. La responsabilité collective, la condamnation collective s’installera, au lieu de la responsabilité individuelle, pour dissimuler le manque de preuves pour les crimes prétendues. Des pasteurs venus de la RDA se présentent pour une nouvelle inquisition, une chasse aux sorcières moderne. Seront ainsi exclus et bannis de la société sans pitié des millions de gens. Les moyens d’existence seront extrêmement limités pour beaucoup de gens. Il suffit d’être enregistré comme IM [collaborateur informel] pour subir la mort civile. Le journaliste, comme dénonciateur, sera couvert de louanges et largement rétribué, personne ne s’intéressera à son sacrifice. Le chiffre des suicides restera tabou. Et tout cela sous un gouvernement qui se dit chrétien et libéral et qui est toléré, voire soutenu par une opposition ne méritant ni ce nom ni l’appellation de « social ». Tout cela se passe sous la marque autoproclamée d’Etat de Droit.

Le procès dévoile aussi sa dimension politique comme procès contre des antifascistes. A une époque où la meute néonazie de droite se déchaîne dans les rues sans être punie, où les étrangers sont poursuivis et assassinés, comme à Mölln, l’Etat de Droit montre toute sa force lors de l’arrestation de manifestants et précisément en poursuivant des communistes. Pour cela, les fonctionnaires et l’argent ne manquent pas non plus. On a déjà vu tout ça.

En résumant le contenu politique de ce procès, on remarquera qu’il se produit avec l’après guerre froide, comme la nouvelle pensée unique. Il dévoile le vrai caractère de cette république fédérale. La mise en examen, les mandats d’arrêt et la décision du tribunal sur la mise en accusation sont imprégnés par l’esprit de la guerre froide. Les décisions préjudicielles aux décisions du tribunal remontent à 1964. Depuis le monde a changé, mais la justice allemande dresse des procès politiques comme si Guillaume II gouvernerai encore.

En lui succombant temporairement après 1968, elle a surmontée de nouveau la « faiblesse » politique libérale et retrouvée sa grande forme anticommuniste. Nous, on nous surnommait les têtes de béton et on nous reprochait une incapacité à réformer. – On le démontre dans ce procès, où règnent les vraies têtes de béton incapable de réforme. Certes, à première vue, on se montre très souple, on décerne la citoyenneté d’honneur de la ville de Berlin à Gorbatchev, on lui pardonne d’un air condescendant le fait qu’il ait jadis glorifié les tireurs au Mur par une inscription dans leur livre d’honneur, à l’époque, mais à l’intérieur, on reste « dur comme l’acier de Krupp ». Par contre, on poursuit l’ancien allié est-allemand.

Gorbatchev et moi, nous appartenions tous les deux au mouvement communiste mondial. Il est connu que nous avions des positions différentes sur quelques points essentiels. A cette époque, je considérais nos différences moins graves que nos accords. Le chancelier fédéral ne m’a pas comparé à Goebbels. Et moi, je ne l’aurais pas pardonné. Pour le chancelier fédéral comme pour Gorbatchev, qui se tutoient, ce procès n’est pas un obstacle à leur amitié. Cela aussi est signifiant.Je termine ici ma déclaration. Faites comme bon vous semble !

Cette déclaration est parue en allemand dans Letzte Aufzeichnungen (« Dernières notes. Pour Margot »), Edition Ost, Berlin 2012, p. 146 et suivantes. Tirage à part dans le journal Rotfuchs Août 2012. Junge Welt le 25 août 2012. La présente traduction garde les sous-titres de ce dernier pour une meilleure lisibilité.

Erich Honecker est né en 1912, dans une famille de mineurs. Il grandit avec un groupe d’enfants et dans la jeunesse communiste, à 17 ans il devient membre du KPD (Parti Communiste d’Allemagne). Dans les années 1930-31, il étudie à l’Ecole Lénine à Moscou. Il fut un résistant antifasciste. Entre 1935 et 1945 il est prisonnier des nazis. Après la guerre, il est cofondateur de la Jeunesse Libre Allemande (FDJ) et devient son président jusqu’en 1955. Il entre à la Grande école du Parti à Moscou. Il exerce diverses hautes responsabilités dans l’appareil du parti et de l’Etat de la RDA. A partir de 1976, il devient secrétaire général du SED, président du Conseil d’Etat et du Conseil national de la défense jusqu’au 18 octobre 1989. Il est ensuite extradé de Moscou en RFA en 1992. Il fût relâché, après 169 jours de prison, le 13 février 1993 pour raison de santé. Suite à l’audience principale annoncée pour le 8 février 1993 à Berlin, il décède à Santiago du Chili le 29 mai 1993.  |


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21 octobre 2012 7 21 /10 /octobre /2012 12:44

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               Comment la terre d’Israël fut inventée
par Pierre Stambul

« Dans la guerre israélo-palestienne, il y a un aspect qu’il ne faut jamais mésestimer. Le sionisme a opéré une gigantesque manipulation de l’histoire, de la mémoire et des identités juives. C’est cette manipulation qui permet l’adhésion majoritaire des Juifs (aussi bien en Israël que dans le reste du monde) à un projet colonialiste et militariste qui détruit chaque jour un peu plus la Palestine et généralise l’apartheid. »

Dans un ouvrage précédent (Comment le peuple juif fut inventé, chez Fayard), Shlomo Sand avait réduit à peu de choses deux mythes fondamentaux du sionisme : l’exil et le retour. Non, il n’y a pas eu d’exode massif des Juifs lors de la destruction du Temple par les troupes de Titus en 70 ap JC. Les Juifs d’aujourd’hui ne sont pas les descendants des Hébreux de l’Antiquité. Ils descendent majoritairement de convertis. L’idée sioniste qu’après des siècles d’exil, ils auraient fait leur retour sur la terre de leurs ancêtres est une fiction.

Cette fois-ci, Shlomo Sand s’attaque à un autre mythe meurtrier. Pour les membres du courant national-religieux, « Dieu a donné cette terre au peuple juif » et au nom de ces conceptions intégristes, les Palestiniens sont des intrus. Mais les sionistes « laïques » partagent cette même conception. Ils ont fait de la Bible un livre de conquête coloniale en affirmant que les Juifs ont toujours eu un attachement indéfectible à « la terre d’Israël », ce qui leur donne un droit de propriété exclusif. C’est ce mythe de la terre qu’il passe à la moulinette avec un style agréable et de très nombreuses références historiques et bibliographiques. Bref, c’est un livre absolument indispensable.

Histoires personnelles

Dans Comment le peuple juif fut inventé, Shlomo Sand avait raconté quelques anecdotes personnelles. Son amitié ancienne avec le poète palestinien Mahmoud Darwish, banni de son propre pays et qui n’aura même pas pu être enterré dans son village d’origine (qui n’existe plus). L’histoire aussi de son beau-père, catalan et rescapé de la guerre d’Espagne qui finit par « atterrir » en Israël. Là, Shlomo nous livre quelques touches de ses origines. Il est né dans un de ces camps de rescapés juifs du génocide nazi pour lesquels il n’y avait qu’une seule destination possible : Israël. Les Palestiniens ont payé pour un crime européen.

En 1967, Shlomo est soldat dans une armée qui fait la conquête sanglante de Jérusalem-Est. Il décrit la fièvre nationaliste des jeunes qui l’entourent, cette certitude de « revenir sur la terre de leurs ancêtres ». Il décrit aussi un crime de guerre gratuit : un vieux Palestinien torturé à mort par cette armée qui se dit morale. Son écriture s’empreigne alors d’une grande émotion.

Shlomo Sand est un professeur universitaire d’histoire. Son université, située dans les faubourgs de Tel-Aviv, a été construite sur un de ces nombreux villages (plusieurs centaines) rayés de la carte avec l’expulsion de la population palestinienne en 1948. Les habitants de ce village n’ont pas combattu et ont espéré jusqu’au bout qu’ils ne seraient pas expulsés. L’État d’Israël pratique un négationnisme total sur la vraie histoire de cette terre et notamment sur les Palestiniens. Shlomo évoque l’action de l’association israélienne anticolonialiste « Zochrot » qui fait revivre la mémoire de ces villages rayés de la carte.

Shlomo a milité dans le mouvement de l’extrême gauche antisioniste Matzpen dans les années 80. Il ne se définit plus comme antisioniste. Pourtant, encore plus que le précédent, son livre démolit avec beaucoup d’efficacité les mythes sionistes.

Il est partisan de deux États vivant côte à côte en Palestine qui seraient des États de tous leurs citoyens. Il écrit pourtant : « En apparence, l’occupation, entrée dans sa cinquième décennie, prépare au plan territorial, la constitution d’un État binational ».

Il est contre le droit au retour des réfugiés palestiniens. Il explique à titre de comparaison qu’on ne fera pas revenir les millions d’Allemands originaires des pays de l’Est descendants de ceux qui ont été chassés en 1945. Pourtant, il montre bien comment l’expulsion des Palestiniens de leur pays en 1948 a été criminelle, comment Israël a rendu définitive leur expulsion. Son enquête sur le village détruit pour construire son université (et ses habitants) est précise et sans concession.

Il a espéré avant 1967 que son pays saurait se normaliser et faire une paix juste. Amèrement il écrit : « je ne savais pas que je vivrais la majeure partie de mon existence à l’ombre d’un régime d’apartheid, alors que le monde “civilisé”, du fait notamment de sa mauvaise conscience, se sentirait obligé de transiger avec lui, et même de lui apporter son soutien ». Le mot « apartheid » est souvent utilisé dans le livre pour qualifier la réalité actuelle.

Une terre habitée par de nombreux peuples et une religion venue de l’étranger

Dans Comment le peuple juif fut inventé, il y avait un chapitre difficile pour un non-spécialiste sur la notion de « peuple ». Cette fois-ci, Shlomo examine les notions de patrie, de frontières, du droit du sol et de droit du sang. Chapitre ardu mais dont la conclusion est claire. La prétention des sionistes de retourner dans leur « patrie » au nom d’une histoire réécrite ne repose sur aucune des différentes constructions de patries que l’histoire a connue.

Comment la terre qui est aujourd’hui Israël/Palestine fut appelée dans l’histoire ? Quelle est l’importance de Jérusalem ?

La Bible parle de Canaan et affirme que les Hébreux sont venus de l’étranger. Les deux personnages centraux, Abraham et Moïse seraient venus, l’un de Mésopotamie, l’autre d’Égypte. Ces personnages sont légendaires. Le livre de Josué (qui est une véritable apologie du nettoyage ethnique et du génocide) évoque une terre habitée par de nombreux peuples qui restent toujours là malgré les massacres. Autrement dit la religion juive décrit un peuple venu de l’extérieur ayant une haine terrible pour les autochtones.

Dans la Bible dévoilée, les archéologues israéliens estimaient que la Bible avait été essentiellement écrite dans le royaume de Judée, peu avant la prise de Jérusalem par les Babyloniens (VIIe siècle av JC). Shlomo Sand va plus loin. Il pense que le texte a été écrit par les lettrés qui ont été autorisés par l’empereur perse Cyrus à retourner à Jérusalem, voire plus tard à l’époque hellénistique. Ces lettrés sont entourés de paysans restés majoritairement païens, ce qui explique tout le mal que la Bible dit des autochtones.

Dans le livre des livres, la promesse de la terre pour le peuple élu est toujours soumise à condition. Tout est conditionné par le degré d’intensité de la foi en Dieu. Quand les colons religieux actuels prétendent que « Dieu leur a donné cette terre », ils s’écartent beaucoup de leur texte fondateur. La région d’Israël/Palestine s’est appelée Canaan et la région de Jérusalem la Judée. Cette région avait un peuplement hétérogène et on y parlait des langues diverses. Ce n’est qu’à l’époque des Maccabées (IIe siècle av JC) que la religion s’est répandue dans de nouvelles régions (Samarie, Galilée, Néguev) puis plus loin dans l’empire romain. Il n’y a aucune référence à la « terre promise  ». Le philosophe juif Philon d’Alexandrie a vécu à l’époque de Jésus-Christ et il est peu probable qu’il ait effectué un quelconque pèlerinage à Jérusalem pourtant toute proche.

Contrairement au mythe enseigné aujourd’hui dans les écoles israéliennes (l’exode de plusieurs de millions de Juifs quand les troupes de Titus détruisent le deuxième temple), il y a eu trois grandes révoltes juives aux premier et deuxième siècles après JC qui traduisent un antagonisme fondamental entre polythéistes et monothéistes. Mais aucun exode massif et encore moins un tel nombre. Après la dernière révolte juive (Bar Kokhba, 135 ap JC), la région prend le nom de Palestine et la population va se convertir au christianisme puis cinq siècles plus tard à l’islam. Il n’y a pas de trace du terme « Eretz Israel » (la terre d’Israël) à l’époque.

La religion juive et l’absence d’attachement à la terre

Le premier commandement du Talmud « interdit explicitement aux fidèles juifs de s’organiser pour émigrer dans le foyer saint avant la venue du messie ». Seule une dissidence du judaïsme, les karaïtes prêcheront une immigration en Palestine. Malgré (comme les Juifs) une grande dispersion dans le monde, les karaïtes seront présents à Jérusalem lors de la prise de la ville par les Croisés et il y a toujours une synagogue karaïte à Jérusalem.

Les lettrés juifs qui visitent la région au Moyen-Âge cherchent surtout leurs coreligionnaires. L’un note d’ailleurs qu’il y a beaucoup plus de Juifs à Damas qu’à Jérusalem.

À la base du sionisme, il y a l’alyah, la « montée » en Israël. C’est une manipulation : l’alyah, c’était (dans la Kabbale) « l’ascension mystique de la personne qui se condense dans la formule : ascension de l’âme ». Du IVe au XIXe siècle, les chroniques ont répertorié seulement 30 pèlerinages juifs en Palestine alors qu’elles ont répertorié 3500 comptes rendus de pèlerinages chrétiens. Il n’y a rien d’étonnant à cela. Le pèlerinage est une tradition chrétienne puis musulmane. La prière juive « l’an prochain à Jérusalem » évoque une rédemption prochaine et pas une émigration. « La ville sainte est pour le juif religieux un souvenir qui nourrit la voix et pas un site géographique attractif ».

Et si le sionisme était une invention chrétienne ?

On connaît aujourd’hui les mouvements chrétiens sionistes. Ces mouvements évangélistes ont très puissamment aidé la colonisation de la Palestine financièrement et politiquement. Accessoirement, ces Chrétiens sionistes sont attachés à un « Juif irréel », pas aux Juifs réels. Pour eux, les Juifs doivent chasser de la terre sainte Armageddon (= le mal = les Arabes) puis se convertir à la « vraie foi », sinon ils disparaîtront car ce courant est millénariste (et antisémite). Ces Chrétiens sionistes ont identifié la colonisation de nouveaux territoires (Amérique du Nord, Afrique du Sud, Australie) à la conquête de Canaan par Josué.

Déjà Mohamed Taleb était allé plus loin dans l’idée que le sionisme a des origines chrétiennes. Les Chrétiens sionistes, ce sont les « dissidents » du protestantisme (évangélistes, puritains). Shlomo Sand parle aussi des Anglicans et il accumule des faits sur l’histoire anglaise. Dès le XVIe siècle avec la Réforme, la Bible est traduite. Le monde hébraïque antique, tel qu’il est décrit dans la Bible devient familier. Le « juif irréel » devient sympathique. Après plusieurs siècles d’interdiction de séjour, Cromwell (en 1656) autorise le retour des Juifs en Angleterre (des facteurs économiques jouent aussi. Les Juifs chassés d’Espagne et réfugiés aux Pays-Bas ont contribué à la prospérité de ce concurrent).

De nombreux personnages publics britanniques évoquent le « retour » des Juifs en Palestine (au XIXe siècle, Shaftbury, Palmerston et bien sûr Disraeli, Premier ministre et fils de Juif converti). Les Britanniques manifestent un intérêt croissant vers la Palestine, pièce essentielle sur la route de l’Inde.

À partir des pogroms de 1881, des millions de Juifs de l’empire russe partent vers l’Ouest. Ils iront principalement vers les États-Unis car la Grande-Bretagne ferme ses portes. Premier ministre en 1905, Lord Balfour fait adopter en 1905 une loi très restrictive contre l’immigration, principalement celle des Juifs. Il tiendra publiquement des propos antisémites. Le même enverra à Rothschild la fameuse déclaration Balfour en 1917. Il n’y a pas contradiction. Pour Balfour, les Juifs sont « inassimilables » s’ils viennent en Europe mais ils deviennent des colons servant les intérêts de l’empire britannique s’ils vont s’installer en Palestine. Pour de nombreuses raisons, dont l’attachement à une lecture familière de la Bible, la déclaration Balfour a fait consensus chez les principaux hommes politiques britanniques.

On a donc eu au début du XXe siècle la rencontre de trois phénomènes politiques qui ont rendu faisable le projet sioniste : une sensibilité chrétienne issue du monde protestant articulée avec une vision coloniale britannique, l’antisémitisme virulent en Europe de l’Est et l’apparition d’un nationalisme juif qui a tout inventé : l’histoire, la terre, la langue.

Le sionisme et la religion juive

On connaît les virulentes critiques contre le sionisme, venues des Juifs socialistes qui seront hégémoniques dans le monde juif européen jusqu’à la deuxième guerre mondiale. Le Bund, parti ouvrier préconisant « l’autonomie culturelle » des Juifs sans territoire spécifique, était farouchement antisioniste. Et les partis ouvriers socialistes ou communistes dans lesquels militaient beaucoup de Juifs/ves étaient aussi très critiques.

On connaît moins l’opposition radicale des Juifs religieux au sionisme. Le livre de Yacov Rabkin Au nom de la Torah, l’opposition juive au sionisme apporte de nombreux faits. On a souvent en tête l’attitude actuelle des religieux juifs. Depuis 1967, ils sont devenus majoritairement colonialistes, nationalistes et racistes à l’image d’Ovadia Yossef, fondateur du Shass ou du grand rabbin de la ville de Safed qui interdit de louer à des « Arabes ». Il n’en a pas toujours été ainsi et Shlomo Sand rappelle que pour les religieux, la « terre sainte » n’a jamais été la patrie des Juifs. Le judaïsme réformateur était contre le sionisme car il craignait (à juste titre) que cela retarderait la marche vers l’égalité des droits. Les Juifs orthodoxes étaient encore plus durs. Citons certains de leurs propos : « reçois la Torah dans le désert, sans pays, sans propriété terrienne », « Les sionistes n’aspirent qu’à secouer le joug de la Bible et des commandements pour n’en conserver que le national, voilà ce que sera leur judaïsme ».

Dans le sionisme, la terre remplace la Bible, et la prosternation devant le futur État prend la place de la ferveur envers Dieu.

Quand Theodor Herzl essaiera de rallier au sionisme les rabbins, l’immense majorité d’entre eux protestera et organisera même une résistance aux idées sionistes. Ils publieront à plusieurs en 1900 une brochure : « livre éclairant , pour les honnêtes gens, contre le système sioniste ». Le sionisme n’est pas seulement en contradiction avec les droits fondamentaux (refus du racisme, du colonialisme, des inégalités), il est aussi en contradiction avec la religion. Il a nationalisé le langage juif religieux et transformé la Bible en un livre de conquête coloniale.

Le sionisme et les Arabes

La question de la présence d’Arabes en Palestine au début du mouvement sioniste n’a quasiment jamais été soulevée. Comme la plupart des colonisateurs, les sionistes n’ont pas vu (ou pas voulu voir) le peuple autochtone.

Pourtant, alors que jusqu’en 1922, l’immigration des Juifs en Palestine est autorisée, ce pays reste arabe à 90% à cette époque. Et les Palestiniens formeront les 2/3 de la population quand la guerre de 1948 éclate.

Il y a eu chez les sionistes des humanistes qui imaginaient une coexistence pacifique avec les Palestiniens. Citons Ahad Haam ou plus tard Martin Buber. Mais ils ont vite été débordés par les partisans du « transfert », l’expulsion des Palestiniens.

Dans son film La terre parle arabe , la cinéaste franco-palestinienne Maryse Gargour montre que tous les dirigeants sionistes étaient favorables au « transfert » dès 1930. Ils ne divergeaient que sur la méthode pour y parvenir.

Dès 1930, la plupart des recherches sionistes sur le passé se sont efforcées de situer et de maintenir la terre d’Israël au centre de « l’être juif ». Ils sont parvenus à une conclusion insensée : « les Arabes se sont emparés de la terre d’Israël en 634 et ils s’y sont maintenus depuis lors en tant qu’occupants étrangers ». Certains propagandistes vont même jusqu’à comparer avec la présence arabe en Espagne qui a duré plus de 7 siècles. En fait, au-delà de tous les textes d’autojustification, la colonisation sioniste n’a connu comme seul frein que les limites du rapport de force. C’est pourquoi le gouvernement israélien actuel qui est soutenu à bout de bras par l’Occident semble pouvoir tout se permettre.

Shlomo Sand analyse plusieurs mythes qui ont accompagné la conquête sioniste : celui du travail, celui des kibboutz qui, au-delà de l’idéal égalitaire, étaient avant tout des instruments de conquête de la terre réservés aux seuls Juifs, et celui du syndicat Histadrout, réservé lui aussi aux seuls Juifs. Les kibboutz ont systématiquement été installés dans les zones frontalières pour empêcher le retour des « infiltrés » (= les réfugiés palestiniens). Ils sont en déclin aujourd’hui parce qu’on est passé à une nouvelle forme de colonisation.

Depuis 1967

Le mythe de la terre a guidé la politique sioniste. Depuis 1967, il en est le centre.

La colonisation sioniste s’est faite sous l’égide imaginaire, dynamique et mobilisatrice de la « rédemption du sol ». Shlomo Sand est très sévère pour la « gauche sioniste » qui a participé à toutes les conquêtes. Il y a eu consensus pour le concept de « judaïsation de la terre » qui signifie bien sûr l’expulsion des Palestiniens. Les nationalistes les plus zélés sont venus de la gauche : Moshé Dayan, Yigal Allon. Shlomo pense que la guerre de 1967 n’était préméditée ni d’un côté, ni de l’autre. J’ai des doutes à partir d’un témoignage familial. Un cousin de mon père, général de l’armée de l’air israélienne, m’a affirmé dès juillet 1967, qu’Israël n’avait pas été menacé, que les projets de bombardements étaient prêts depuis des années et que la colonisation allait commencer.

Dès la fin de cette guerre, les intellectuels israéliens les plus éminents ont signé le « manifeste pour le grand Israël », prélude à la colonisation. 20 ans plus tard et malgré l’Intifada, le principe de l’État « ethno-démocratique » a repris le dessus. Le sionisme est une machine infernale qui ne saura pas s’arrêter d’elle-même.

Pour conclure

Logiquement, Israël se retrouve aujourd’hui gouverné par une coalition d’extrême droite. Le consensus qui a abouti à cela vient en partie d’une histoire totalement réécrite. Comme pour son livre précédent, Shlomo Sand sera sûrement très lu en Israël. Les sionistes l’injurieront. On enverra d’éminents spécialistes pour réfuter des faits pourtant indéniables. Ce livre doit nous aider à démonter les mythes meurtriers.

Le jour où la « rupture du front intérieur » sera possible en Israël, ce livre, comme le précédent, aidera les Israéliens à se débarrasser d’une identité falsifiée qui contribue à détruire la société palestinienne mais qui est aussi suicidaire à terme pour les Israéliens.

Pierre Stambul

jeudi 11 octobre 2012

Citation d’Eric Cantona

Nous sommes choqués de voir que certains politiciens et institutions sportives qui se sont inquiétés de la tenue de l’Euro en Ukraine, en raison des violations des droits de l’homme, se taisent quand Israël est censé accueillir la coupe européenne de foot des moins de 21 ans en 2013.

Le racisme, les violations des droits de l’homme et du droit international sont monnaie courante dans ce pays.(...)


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21 octobre 2012 7 21 /10 /octobre /2012 12:29

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France-Algérie : pas de "traité d’amitié" mais un "partenariat stratégique"

La France souhaite conclure un "partenariat stratégique" avec l’Algérie à l’occasion de la visite, en décembre, du président François Hollande dans ce pays, mais pas un "traité d’amitié", que "ne souhaitent pas" les Algériens, a déclaré dimanche le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius.

Selon L.Fabius, qui parlait sur sur Europe 1 et I-télé, "nos amis algériens" ne souhaiteraient d’ "instrument juridique"  et pencheraient pour " un partenariat stratégique avec nous et c’est aussi notre approche" a encore affirmé M. Fabius.

Cependant, dans un entretien au Journal du Dimanche, le ministre délégué aux Anciens Combattants, Kader Arif, aurait déclaré  "espérer" que le traité franco-algérien porterait  "le nom de traité d’amitié".

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20 octobre 2012 6 20 /10 /octobre /2012 08:21

                          Guerre de classes et compEtitivitE

 

 

"Nous sommes dans une véritable guerre de classe. L'argent en est l'arme principale, utilisée par les dominants pour asseoir leur domination à l'échelle de la planète."

Monique Pinçon-Charlot,Michel Pinçon, sociologues.

 

 C'est au nom de la compétitivité que l'Union Européenne et le Fond monétaire International (FMI) ont exigé la réduction des salaires en Grèce."

   Gilles Ardinat, géographe (in " Géographie de la la compétitivité", thèse de doctorat, Université P.Valéry, Montpellier, 2011)

              

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20 octobre 2012 6 20 /10 /octobre /2012 08:07

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Déclaration de Manolis Glezos à l’occasion de la visite en Grèce de la Chancelière Allemande Angela Merkel

8 octobre par Manolis Glezos


A l’occasion de la visite de la Chancelière allemande en Grèce nous considérons de notre devoir de rappeler tant à elle qu’au Premier ministre grec que :

1. La grande et puissante Allemagne n’a pas le droit de se dispenser de ses devoirs, privant ainsi la Grèce de ce qui lui est du sur la base du droit international, et il n’est pas non plus permis que la Grèce abdique de ses droits.

2. Les violations du droit international et des principes humains d’honneur et de morale portent en elles le danger de voir se répéter des phénomènes qui ont mis l’Europe à feu et a sang. La reconnaissance des crimes nazis constitue une garantie élémentaire que de telles monstruosités ne se répèteront pas à l’avenir.

Notre peuple n’a pas oublié et ne doit pas oublier. Aujourd’hui, il ne demande pas vengeance mais justice. Nous souhaitons que les Allemands non plus n’oublient pas. Car les peuples qui refusent leur mémoire historique sont condamnés à commettre les mêmes erreurs. Et il semble qu’Angela Merkel conduise son pays et même la partie la plus sensible du peuple, la jeunesse, sur ce chemin glissant, puisque en s’adressant aux jeunes de son parti, elle n’a pas hésité de dire que « l’aide a la Grèce doit être liée aux devoirs de la Grèce ». Et quid des devoirs de l’Allemagne ?

On aurait attendu de la Chancelière qu’elle adopte une attitude analogue à celle des Alliés envers l’Allemagne, quand, en 1953, avec la suspension des paiements de la dette et l’aide économique qu’ils lui ont offert, ils ont contribué au développement et à la reconstruction de l’Allemagne. La Grèce d’alors n’avait pas été absente de cet effort-là.

Nous n’avons pas l’intention d’inviter la Chancelière à diner. Par contre nous l’invitons à venir visiter avec nous le Champ de Tir de Kaisariani [lieu d’exécution par les SS de 200 otages communistes grecs, le 1er mai 1944, NdE] pour qu’elle voie qu’aujourd’hui encore, 67 ans après la fin de la guerre, l’herbe ne pousse pas là où a été versé tant de sang. La terre n’oublie pas. Alors, les hommes n’ont pas le droit non plus d’oublier.

Il est temps d’unir notre voix à la voix du président du parti allemand La Gauche (Die Linke) Bernd Riexinger qui, à l’occasion de la venue d’Angela Merkel en Grèce, lui demande d’écouter la voix de ceux qui résistent aux coupes brutales qui menacent d’approfondit la polarisation dans le pays et qui avertit que la Grèce court le risque d’une catastrophe humanitaire.

Nous sommes déjà en train de payer cette polarisation dans mon pays avec l’apparition d’Aube Dorée [groupe nazi, NdE]. Est-ce qu’on va rester les bras croisés, attendant aussi de voir les conséquences de la catastrophe humanitaire ? Alors, il sera trop tard non seulement pour la Grèce, mais pour l’Europe toute entière.

Traduit par Yorgos Mitralias et édité par Fausto Giudice


Manolis Glezos, 90 ans, est le symbole vivant de la résistance contre l’occupation nazie. Le 30 mai 1941, il fut l’un des deux jeunes hommes qui avaient dérobé l’immense drapeau nazi flottant sur l’Acropole. Condamné à mort à plusieurs reprises durant et après la guerre civile,, M. Glezos a passé au total plus de 11 ans en prison. Aujourd’hui, il est député de SYRIZA (Coalition de la Gauche Radicale).

Traduction : Yorgos Mitralias

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20 octobre 2012 6 20 /10 /octobre /2012 07:57

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Hollande à Kinshasa : Françafrique et langue de bois

15 octobre par Fabrice Tarrit KINCHASA.jpg


Après quelques atermoiements et une déclaration supposée offensive sur l’absence de démocratie en RDC destinée à atténuer d’éventuelles critiques, François Hollande se rendra samedi à Kinshasa pour participer au sommet de l’OIF. Avec pour enjeu, sous couvert de promotion de la langue française et des valeurs républicaines, l’affirmation de la domination économique, politique et militaire de la France vis à vis de ses « partenaires » africains.

En langue de bois, la langue la plus courante dans les enceintes diplomatiques, « dictateur » se dit « chef d’Etat élu au terme d’un scrutin entaché de quelques irrégularités », se compromettre avec des régimes corrompus et répressifs se défend par la volonté de « ne pas pratiquer la politique de la chaise vide ». « État en déliquescence et en proie à la violence » se dit « Etat fragile » ou, si l’on veut se montrer un peu plus offensif, « Etat où la situation de la démocratie et des droits de l’Homme est inacceptable ».

En acceptant de participer au sommet de l’Organisation Internationale de la Francophonie de Kinshasa, et donc de se rendre sur les terres de Joseph Kabila, l’un des pires dictateurs du continent, imposé par les armes, la répression des opposants et la violation des urnes (à l’exemple de la mascarade électorale de novembre 2011), le Président de la République semble cependant bien enterrer définitivement ses promesses d’en finir avec le système de la Françafrique. Ce ne sont pas sa petite déclaration sur l’état des droits de l’Homme en RDC et quelques aménagements cosmétiques affichés dans le programme du déplacement présidentiel (escales à Dakar, rencontre d’opposants congolais) qui atténueront le choc du symbole. Celui de voir une nouvelle fois un chef de l’Etat français s’afficher aux côtés d’un parterre de chefs d’Etat supposés unis par une langue en partage, quand le terreau commun d’un bon nombre d’entre eux est la corruption et l’oppression, dans le cadre d’un Sommet de l’organisation porte-étendard de l’influence française qu’est la Francophonie.

De simple agence de coopération culturelle et technique (ACCT), en 1970, l’Organisation internationale de la Francophonie s’est muée de sommet en sommet en enceinte politique, avec la nomination d’un secrétaire général, l’adoption d’une Charte et un élargissement constant à des pays comptant parfois très peu de locuteurs français mais qui voient un grand intérêt à intégrer l’amicale des chefs d’Etat francophones, espace de solidarité politique à défaut d’être un vrai outil d’échange culturel et linguistique.

Malgré l’adoption de textes sur la défense de la démocratie, à l’instar de la déclaration de Bamako de 2000, l’OIF a en effet servi tout au long de son existence à conforter des dictateurs en place, tenant ses sommets à Brazzaville ou à Ouagadougou, envoyant des délégations complaisantes « observer » certaines élections (160 missions sur une vingtaine d’années, dont bien peu ont nourri la chronique pour leur esprit critique, à l’exemple de la caution apportée en octobre 2011 à l’élection présidentielle au Cameroun) ou acceptant dans ses rangs des dictateurs anglophones isolés politiquement.

Parmi les volets moins connus de l’activité de l’OIF figure également la « prévention des conflits », consacrée par la déclaration de Saint-Boniface, adoptée par l’OIF en mai 2006. Présenté comme un secteur de plus en plus stratégique pour cette organisation lors d’un colloque de l’OIF en 2009 à l’IRIS, s’appuyant principalement sur des activités de formation, ce glissement militaire de la Francophonie fait surtout redouter un nouvel habillage multilatéral de l’interventionnisme militaire français, en supplément des cadres onusien, européen (Eufor) ou de dispositifs comme RECAMP.

Ce déplacement intervient dans un contexte d’accélération du positionnement de l’exécutif français sur le terrain des relations franco-africaines, avec pour point focal la crise au Mali, qui alimentera à n’en pas douter les échanges formels et informels entre la délégation française et les chefs d’Etat africains présents à Kinshasa. Il serait à cet égard intéressant de savoir si le Président de la République osera parler de « situation des droits de l’Homme inacceptable » dans un pays comme le Tchad, dont la France négocie le soutien militaire à une intervention au Mali.

François Hollande et son gouvernement auront donc réussi l’exploit de s’approprier en quelques mois seulement toutes les composantes diplomatiques, politiques, monétaires et militaires de la Françafrique. Le terrain économique avec la promotion des intérêts d’Areva auprès du président nigérien Issoufou, reçu 11 juin dernier. Le terrain politique et diplomatique, avec les déplacements de ministres français au Tchad et au Burkina Faso fin juillet et l’accueil à l’Elysée d’Ali Bongo, Alassane Ouattara et Blaise Compaoré en l’espace de deux mois. Le volet militaire, avec pour point d’orgue l’activisme français dans les couloirs de l’ONU à New York pour imposer une intervention militaire dans le Sahel pilotée par la France. Et bien sût le volet monétaire, avec la célébration à Paris des 40 ans du franc CFA le 5 octobre dernier.

Ne manquait plus qu’un sommet de l’OIF pour, le temps d’une petite photo de famille, d’un discours de circonstance sur les valeurs et les droits à défendre (il est toujours utile d’animer un peu les repas de famille) et de quelques échanges avec des associations et opposants, continuer d’apporter du crédit à une organisation supposée linguistique qui n’a toujours été qu’un outil d’influence.

En langue de bois diplomatique, il est certes plus convenable de dire « Francophonie » que « Françafrique ».

Tribune publiée sur Mediapart.


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20 octobre 2012 6 20 /10 /octobre /2012 07:49

    Clio

Clio,la Muse de l'Histoire  

  

 

Thomas Sankara.SANKARA.jpg 15 octobre par Samir Abi

Lomé, en cette nuit calme du 15 octobre 1987, accueilli cette nouvelle, subite et brusque : Sankara est mort. La Radio France Inter venait de l’annoncer. Bien avant tous les médias africains. En outre-mer on était déjà informé qu’une étoile noire, brillante dans le ciel obscur d’Afrique, s’en était allée. Et, me revient encore en mémoire le visage du père Kao, en cette nuit sombre, assis la tête entre ses mains et criant le désespoir d’un continent encore une fois humilié.


Vingt cinq ans ont passé, beaucoup d’eau a coulé sous le pont mais la nuit semble toujours être la même. Longue et couvrant tous les malheurs de peuples mille fois saignés. La mémoire se refuse cependant à oublier les luttes de nos courageux pères résistants à la colonisation et ceux de leurs descendants réclamant l’indépendance, les martyrs de la lutte discontinue contre l’impérialisme économique renouvelé depuis l’esclavage jusqu’à sa face post moderne du capitalisme financier. Le front contre l’oubli s’amplifie pour qu’à jamais l’Afrique se souvienne de ses dignes fils.

Sankara aura été le reflet en quatre ans de cette Afrique debout tant rêvée par les pères de l’indépendance. Il aurait pu incarner la fin d’une ère, il a consacré le début d’une nouvelle lutte. La lutte contre l’esclavage financier qui lie les peuples par la dette. Aux yeux du monde, tant que demeurera son souvenir, des jeunes africains pourront encore avoir espoir en leur étoile. L’espoir qu’un jour, quelque part sur le continent, naitra un nouveau souffle libérateur. L’éveil des peuples arabes a prouvé à plus d’un que les idées intemporelles seront toujours victorieuses de tous les complots contre la chair. « Je soussigné cardiaque » disait Sony Labou Tansi aux jeunes africains pour exprimer la fragilité des corps et la puissance de la pensée.

Une pensée restée célèbre à travers un discours à jamais immortel. Autour de cette veillée nocturne en hommage au « black star » assassiné, ce discours résonne encore, haut et fort, en ces temps de crises où les bourreaux se voient décernés des prix Nobel à la place des victimes. « Les masses populaires en Europe ne sont pas opposées aux masses populaires en Afrique. Ceux qui veulent exploiter l’Afrique sont les mêmes qui exploitent l’Europe. ». Sankara, juillet 1987. De la Grèce à l’Islande que ce discours soit entendu comme un élan de solidarité africaine à vous, peuples en lutte contre la nuit qui envahit votre avenir.

La nuit, aussi longue qu’elle soit, n’empêchera jamais des étoiles noires de briller au firmament pour guider les peuples vers la lutte et le bien.
La patrie ou la mort, Nous vaincrons !!!


 

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19 octobre 2012 5 19 /10 /octobre /2012 15:23

 

 

 

 

 

 

Égypte : une enseignante coupe les cheveux de deux élèves non voilées

jeudi 18 octobre 2012

Une enseignante égyptienne portant le niqab (voile intégral) a coupé les cheveux de deux de ses élèves pour les punir de ne pas porter le voile islamique, a rapporté la presse locale jeudi. "La colère monte chez les habitants de Louxor (sud) après qu’une enseignante en niqab a coupé les cheveux de deux élèves de sixième pour les obliger à porter le voile", affirme le quotidien indépendant Al-Chourouq.
"Je n’imaginais pas que couper deux centimètres était un grand crime. Je plaisantais avec elles puis un élève a sorti des ciseaux et m’a demandé de mettre ma menace en application. Je l’ai fait pour conserver mon autorité", a tenté d’expliquer l’enseignante, citée par le journal indépendant Al-Masri Al-Yom, en ajoutant porter le niqab depuis cinq ans. Le ministère de l’Éducation a décidé de la sanctionner en la privant d’un mois de salaire, selon les deux journaux. Le père de l’une des élèves s’est officiellement plaint auprès des autorités administratives, qui doivent examiner l’affaire.
La grande majorité des Égyptiennes musulmanes porte le voile, mais le niqab, qui ne laisse à découvert que les yeux, gagne du terrain depuis quelques années. L’arrivée au pouvoir en juin du président islamiste Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, fait craindre à une partie de la population égyptienne des pressions accrues de la part des tenants d’un islam fondamentaliste ainsi qu’un certain laxisme de la part des autorités.

(18 Octobre 2012 - Avec les agences de presse)

source:  "Assawra"

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19 octobre 2012 5 19 /10 /octobre /2012 15:17

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Manifestation ouvrière en faveur du pouvoir d’achat et des salaires, Place Tahrir du Caire.

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