Dans quelques semaines se tiendront des élections départementales. Aujourd’hui, beaucoup de décisions sont prises au niveau départemental : action sociale, petite enfance, voirie, logement, culture, transports scolaires… C’est très concret pour la vie quotidienne des ménages populaires.
Le scrutin des 22 et 29 mars est donc d’une grande importance. La qualité du « vivre ensemble » auquel nous aspirons dépend ainsi pour une part non négligeable des politiques mises en œuvre par le Conseil général. C’est aussi l’existence de cette institution qui fait que le département entité administrative existe.
La suppression du Conseil général au bénéfice d’une Collectivité unique, indépendamment de la création d’un établissement public à caractère administratif (EPA) appelé Chambre des territoires, anticipe donc la disparition de l’administration départementale.
Austérité oblige ne l’oublions pas, l’esprit de la RGPP resurgit dans la Modernisation de l’action publique (MAP) ou la loi NOTRE. Il faut moins d’élus, moins de fonctionnaires et surtout au final moins de services publics pour répondre aux besoins de la population. Le gouvernement qui vient de supprimer 11 milliards de subvention aux collectivités, révèle tout le sens de cette réforme.
Le double enjeu de ces élections c’est bien - plus encore après la victoire encourageante du peuple grec avec Syriza - de s’opposer à l’austérité déclinée depuis l’Union européenne via les gouvernements jusqu’aux collectivités locales et de défendre la démocratie locale.
Cependant tout est fait pour occulter du débat cet enjeu. Et si on ne parle plus du lamentable épisode survenu au moment de l’élection du président du Conseil général, il faudra quand même débattre du projet de Collectivité unique que les Conseillers généraux de Haute Corse ont soutenu avant de faire timidement marche arrière. Car si le projet Valls Hollande porte un coup décisif à la vie démocratique du pays en touchant à l’existence des communes et des départements, celui du pouvoir unique en Corse participe de la même visée politique.
Il faut savoir que ce projet de Collectivité unique entend réduire de moitié les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) une trentaine aujourd’hui. Contrairement à ce qui est affirmé ici ou là ce n’est pas la poursuite de la décentralisation, c’est une recentralisation autoritaire.
Par conséquent, les élections départementales seront l’occasion de dire fermement NON à ce recul démocratique et au pouvoir unique en exigeant que les Corses, comme en 2003 soient consultés par référendum sur la création de cette collectivité unique.
Pour les tenants du libéralisme à tous crins, il ne s’agit mois comme ils l’affirment de « réduire le mille-feuille » que de contracter la dépense publique, de laisser plus d’espace à l’intervention du privé dans la sphère publique notamment par la concurrence déloyale sur les critères du low cost.
Ainsi, en affaiblissant le département, ce sont autant de services publics qui vont être dévitalisés : des réseaux routiers abandonnés, des politiques sociales amputées. En réduisant les dotations, le gouvernement place en effet les départements et les collectivités locales dans une situation budgétaire critique qui appelle une forte mobilisation citoyenne.
C’est d’ailleurs ce qui est le plus redouté du côté les défenseurs de cette prétendue modernité qui met en pièce les fondements de l’organisation administrative et institutionnelle de la République. C’est pourquoi, d’ailleurs, les citoyens, conscients de la richesse existante dans notre pays, sont éloignés progressivement des lieux de décisions.
Pourtant, l’efficacité démocratique et sociale impliqueraient de rapprocher plus encore ces lieux de décisions des citoyens. Ainsi la volonté de revenir sur la « clause de compétence générale », c’est à dire la liberté d’une collectivité de se saisir de n’importe quel problème pour y remédier, constituerait un grave recul démocratique.
Cette approche anticipe tout autant la nécessité de bâtir une 6ème République, donnant plus de pouvoir aux citoyens. Dans ce cadre le département reste un atout du renouveau démocratique auquel aspirent tous les citoyens.
Noël GRAZIANI